dimanche 6 novembre 2011

Europe, Europe...

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Aux rarissimes lecteurs de ma prose quotidienne, je présente mes excuses. J'ai omis de leur signaler que je m'absentais et qu'il ne me serait pas possible de délivrer mes billets habituels. Je répondrai par une note spéciale aux objections très argumentées que Pierre-Henri THOREUX fait aux propositions de Gaël GIRAUD.
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Donc, je vous parlais, il y a quelques jours de René GILLOUIN et de son petit livre, L'homme moderne bourreau de lui-même, publié aux éditions du Portulan, Paris, 1951. Dans le chapitre qu'il intitule LIBERTÉ DE CONSCIENCE ET POURVOIR SPIRITUEL, l'auteur fait preuve d'une sorte de prescience prophétique ; après avoir analysé les aspects positifs et négatifs des régimes politiques antérieurs à la Révolution (et notamment du régime qui prévalait en France), il dit ceci qui mérite d'être écouté et qui me fait murmurer avec regret Europe, Europe... :

"Et il est une autre constatation non moins évidente, c'est que ce régime n'avait pas si mal réussi, puisqu'il avait eu pour résultat, ni plus ni moins, cette Europe chrétienne tant décriée par le libéralisme et par l'idéalisme, mais dont nous commençons à mesurer le prix depuis que nous l'avons perdue. Cela ne veut pas dire que tout y fût digne d'admiration et de louange, mais qu'elle gagne singulièrement à la comparaison avec ce qui l'a suivie.
Ce qui l'a suivie en effet et qu'on peut considérer comme un siècle et demi de "liberté religieuse", nous n'avons qu'à ouvrir les yeux pour le voir : c'est l'Europe athée, achrétienne ou antichrétienne, et non point certes irréligieuse pour autant, mais tout au contraire convulsée et déchirée de mystiques récentes, et d'autant plus ardentes : rationalisme et matérialisme, racisme et marxisme, culte du surhomme ou de l'humanité, faustisme et titanisme, prométhéisme et luciférisme, qui sont à n'en pas douter les religions dominantes de notre âge, le Christianisme ayant passé au rang de religion récessive (pour parler le langage des biologistes. [...]"
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L'intérêt des analyses de René GILLOUIN est qu'il démontre que la confusion des deux pouvoirs, le spirituel et le temporel dans l'espace public, c'est-à-dire l'absorption du premier par le second, aboutit à créer un système de croyances, qui inféode les personnes, réduites à l'état d'individus, non pas à des chefs - le politique ne peut s'en passer - mais à des GUIDES (Führer en allemand !).
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L'Europe chrétienne a vu certes fleurir nombre de fleurs vénéneuses d'hypocrisie, de violence, d'oppression, mais aussi des saints, des mystiques, des témoins. Et GILLOUIN fait ce constat fulgurant, que je vous livre en conclusion et qui explique pourquoi nous sommes en train de crever dans un air devenu irrespirable tant ils est corrompu par l'argent, le vice et la cupidité (disons le mot, par le commerce) : "Rien ne fait sur l'être de désir une impression plus profonde que l'être de renoncement". N'aurait-il écrit que cela dans cet ouvrage fort intéressant, il mériterait de rentrer dans le panthéon des sages immortels.
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A tout à l'heure.
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1 commentaire:

Pierre-Henri Thoreux a dit…

Cher M. Poindron, je ne sais pas si vos lecteurs sont si rarissimes que vous le dites, mais il vaut mieux en tout cas qu'ils soient fidèles et captivés ce qui est manifestement le cas...
Juste une ou deux remarques en attendant (avec impatience) votre réponse à mes derniers commentaires un peu sévères concernant Gael Giraud. Pour dire qu'il me paraît excessif de dire que le libéralisme s'oppose à l'Europe chrétienne. A la notion d'Europe sûrement pas, puisque ses représentants plaident en général pour la mise en place d'une vraie fédération ! Une nation européenne en quelque sorte.
Quant aux racines chrétiennes, pourquoi les nier puisqu'il s'agit d'une réalité, et que les libéraux n'ont pas l'habitude d'occulter la réalité.
Rappelez-vous que c'est Jacques Chirac qui refusa d'intégrer cette réalité au projet de constitution européenne. Dans le même temps, il affirmait que le libéralisme ne valait pas mieux que le communisme !
Enfin, je ne peux m'empêcher de réagir lorsque vous dites que nous crevons dans un air corrompu par l'argent, le vice et la cupidité, en un mot le commerce. Cela rejoint mon sentiment sur Gael Giraud. Je déplore certes le règne de l'argent facile qu'on voit de nous jours, mais je pense, à l'instar de Montesquieu, que le commerce est bon. Il ne s'agit au fond que d'échanges, et tant qu'on échange, on ne se fait pas la guerre.
Ce n'est à mon sens pas de ça que nous crevons mais de la démagogie de nos gouvernants depuis des décennies, qui ont fini par ruiner les finances publiques...