vendredi 5 octobre 2012

Un essai de réponse...

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J'ai dit à Élisa que je répondrai à ses commentaires dans la journée. Avant de le faire, je voudrais exposer ici quelques remarques. J'invite Élisa à relire soigneusement et sans parti pris l'ensemble de mon propos d'hier : je suis infiniment plus nuancé qu'elle ne semble l'avoir entendu, puisque je constate même qu'il peut exister un amour authentique entre deux personnes du même sexe et qu'il convient de le reconnaître et même de le bénir.

Je voudrais ensuite lui faire remarquer que la question du mariage homosexuel ne se pose pas en termes de revendications féministes. Il est vrai qu'au tout début des temps historiques, la femme mariée a été considérée d'abord comme reproductrice. SOCRATE lui-même distinguait l'eros - et il semble bien que cet eros eut été pour lui de nature homosexuelle - et l'agape, amour moins physique qu'il réservait à sa femme XANTHIPPE ; il ne semblait la porter terriblement dans son coeur. Il considérait certainement que la fonction essentielle de la femme était de faire des enfants. Les choses changent, n'en déplaise à de possibles détracteurs, avec l'irruption du christianisme dans l'histoire ; quoi qu'on puisse en dire, PAUL de TARSE tient sur l'épouse et l'époux des propos dépourvus de toute équivoque ; s'il est vrai qu'il dit : "Femmes soyez soumises à vos maris", il ajoute immédiatement : "et vous maris, aimez-vos femmes comme vous-mêmes". Pour la première fois dans l'histoire, apparaît avec la Parole de JESUS, la notion d'amour sponsal (ou conjugal) et ce n'est pas pour rien que l'on considère l'Eglise comme l'épouse du Christ. Peu à peu s'est dégagée au fil des temps historiques (et je reconnais à Yves l'initiative de la remarque qui consiste à inclure les institutions humaines dans l'histoire) la notion que le mariage unit un homme et une femme qui s'aiment d'amour (Elisa a raison sur ce point), mais d'un amour de don et qui se désirent. (Cette perspective est massivement présente dans le Cantiques des Cantiques, un magnifique poème d'amour de l'Ancien Testament); Je n'ai jamais vu de jeunes gens sur le point de se marier et qui s'aiment de cet amour-là ne pas exprimer ouvertement ce désir d'enfant. Du reste, c'est une grande souffrance pour un couple que de voir leur union stérile. Bien entendu, la fécondité peut n'être pas au rendez-vous de la rencontre. Il n'en demeure pas moins qu'au centre de celle-ci, il y a la DIFFÉRENCE, et l'attirance sexuelle.
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Comme je l'ai déjà dit, en tant que bénévole dans une association qui accueille des séropositifs, j'ai eu l'occasion de discuter souvent de ces sujets avec nos accueillis. A de très rares exceptions, aucun d'eux ne réclament pour lui le mariage ; il en est même qui y sont farouchement opposés.
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Finalement, Elisa, pour vous, qu'est-ce que le mariage ? Pouvez-vous répondre à cette question toute simple, sans tomber dans les théories post-modernes ? Merci d'avance.
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8 commentaires:

elisseievna a dit…

Philippe,

je vous repondais juste un point, celui du type d'argumentation que vous employez, et que je qualifie de scientiste.

quelque soit la position que l'on ait sur le mariage ou autre institution, on ne peut fonder son choix qu'en assumant le fait qu'il est de nature morale.

sans quoi l'on a vite de fait de tomber dans le culte de la "nature" et dans la dictature de l'irrationnel.

La nature est muette. C'est l'humain qui donne du sens, et qui choisit.

elisseievna a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
elisseievna a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
elisseievna a dit…

la question ne peut pas etre "qu est ce que le mariage" [en soi], mais quelle definition on choisit de lui donner et surtout, pourquoi

quand j'ai ecrit "L'égalité suppose de traiter également ce qui est identique, de distinguer les régles pour ce qui est différent, malheureusement ce débat est rendu confus parce que ce qui est identique (l'amour) est mélangé avec ce qui ne l'est pas(l'enfantement)",

j'ai voulu dire que les regles du mariage peuvent etre appliquées aux couples homosexuels dans la mesure ou elles regissent des aspects de leur vie qui est identique à celle de la vie des couples heterosexuels, mais pas pour ce qui concerne leurs liens avec leurs enfants respectifs puisque forcement, ils n'ont pas d'enfants biologiques communs.
Par consequent à mon sens, le mariage peut avoir des regles communes et etre appelé mariage dans les deux cas du fait de cette identité, pour les deux sortes de couples, mais les regles ne peuvent pas être entierement identiques, il y a deux types de mariages distincts, puisque la situation n'est pas la meme en tout, pas la meme pour ce qui est des enfants.

les elements communs me semblent etre la volonté de vivre ensemble, de s'aimer...

Philippe POINDRON a dit…

Chère Elisa,

Je vous remercie pour cette réponse qui me paraît éclairante sur certain point. Les deux types d'union ne peuvent être du même ordre en effet. Vous remarquerez que je crois possible l'amour authentique de deux êtres de même sexe. Mais là où je ne vous suis pas, c'est dans la dissociation de l'amour et de la sexualité, l'engendrement-enfantement n'étant qu'un conséquence de l'activité sexuelle.
Dans la mesure où j'ai pu discuter très calmement et paisiblement avec nos amis homosexuels qui fréquentent l'association Tibériade, je crois pouvoir dire qu'ils souffrent de cette orientation sexuelle dont ils ne sont pas responsables (beaucoup disent qu'ils ne sont pas libres), qu'ils la jugent anormale, et sont remplis de culpabilité. J'avance comme hypothèse que l'instauration du mariage homosexuel n'a,dans la tête de leur promoteur, qu'un seul but : la déculpabilisation. Il semble bien que nous fassions aujourd'hui une équivalence entre ce qui est légal et ce qui est moral (dans le sens où la morale est la science de la réponse à la question : que dois-je faire pour avoir la vie bonne, et non une ensemble d'obligations et d'interdits). Hélas, c'est pour avoir trop longtemps confondu morale et foi que les clercs ont perdu des ouailles, et notamment les jeunes. Jésus N'A JAMAIS parlé de morale : son seul commandement, le dernier, celui qu'il qualifie de "nouveau" est de nous aimer les uns les autres de l'amour même dont il nous a aimé. Tout le reste alors suit.
Je résume : la mesure mise en musique par madame TAUBIRA (un très mauvais Garde des sceaux) n'a d'autres finalités que d'inscrire dans un champ symbolique inadéquat, (celui d'une union stable, durable et féconde, témoin de l'amour de don), ce qui n'est que l'union de deux similarités ; je crois que cette mesure vient sanctionner un désir profondément narcissique inscrit dans le couer de nombre d'êtres humain ; en aimant le MÊME, il se pourrait (noter le conditionnel)que l'on cherche à s'aimer soi-même. Il faut, pour échapper au miroir de NARCISSE, beaucoup d'abnégation, d'humilité et de recul.

elisseievna a dit…


Pour résumer ce qui m'agace dans ce texte du diocese, (et ce que vous reprenez peut etre par deformation professionnelle de scientifique), c'est le scientisme, c'est dire "mais non mais, nous ne voulons parlons pas en tant que croyant mais en tant que savant ... juriste, biologiste, antropo.."

cela m'agace parce que c'est faux cul, c'est la honte d'afficher sa foi, c'est l'escroquerie du scientisme servi en remplacement au discours franc d'un croyant

pour moi, si un croyant me dit " je suis contre l'homosexualité parce que c'est un péché, parce que je crois que dieu ne veut pas que l'on soit homosexuel et je veux servir dieu ": je trouve que c'est un discours franc et honnete, et courageux quand on a en face de soi des non croyants,

je ne comprend rien parce que je ne partage pas cette foi, mais je comprends que l'on puisse croire ainsi, je ne comprend pas dans le sens de comprendre "pourquoi" on peut croire ainsi, mais je comprends la personne qui me le dit parce que je vois que c'est sincere,

mais par contre, se cacher derriere la "science" pour fonder des choix moraux ... c'est se donner le ridicule de tomber direct dans le paganisme ( ... depuis quand les antrhopologues sont ils des prophetes ??? ),
c'est manquer du courage d'affronter les impies en leur disant " je crois, je crois que dieu dit que c'est un péché",

les croyants croient à partir de messages, de texte, ou peut etre de liens mystiques, pas sur la base de "prophetes" adorateurs de la nature ou de leur propre jus de cervelle, projection de leurs propres désirs en général,

des théories "scientifiques" montrant l'infériorité des femmes ou des races : il en a plu,
des scientifiques parlant de l'homosexualité dse animaux, dans le sens inverse il y en a aussi au service des militants "LGBT",
tout cela est ridicule

Il y a des croyants comme vous qui disent "j'accepte que ces unions soient bénies" - j'avais bien lu et noté -
il y a des catholiques qui disent "c'est un peche qui mene a l'enfer"
bon ... ces points de vue existent, m'interessent, j'ai envie d'en comprendre la logique par rapport aux textes sacrés, par rapport aux autres éléments de foi, de conviction, aux autres valeurs des gens qui croient cela,
mais la science n'a rien à dire là dedans,
le christianisme est assez proche du refus du mariage lui meme si on lit les apotres : c'est un choix, allant jusqu'au refus de la reproduction: qu'est ce que la "nature" a à voir la dedans : rien

elisseievna a dit…


Bonjour Philippe

nos réponses se croisent ...

vous me redonnez un argument "scientisme" "psychologique" : narcisse ...

je suis imperméable à ce type d'argument, je les trouve sans interet,

ce qui me parait important c'est quelle valeurs on CHOISIT et la logique par rapport à cela

pour un croyant c'est l'obeissance a dieu d'abord

pour moi ce sont les liens entre les personnes d'abord

je ne sais pas pourquoi les gens viennent à Tibériade, mais pour ma part, j'ai rencontré quantité d'homosexuels qui ne ressentent aucune culpabilité du fait de l'etre

elisseievna a dit…

suite :

je pense donc que votre hypothese sur le mariage voulu pour se déculpabiliser est fausse.
Le mariage est voulu parce que les homosexuels en ont marre que l'on traite leur amour comme ... rien, pour etre polie.
Ils veulent que la société arrete de mettre plus de barrages pratiques à la vie en couple qu'aux autres couples.
Ils veulent pouvoir dire "nous nous engageons autant que les mariés et nous sommes autant unis, ne tentez pas de nous séparer .. que ce soit à l'hopital, ou par des mutations professionnelles ou autres".
quand il y des mariages homos a l'étranger, il y a autant de joie et d'émotion que dans les autres, tou tl emonde pleure et tout et tout ...

Leur revendication rejoint l'intéret politique des partis qui veulent se donner une image libérale, et c'est là que la démagogie commence, c'est là qu'elle rejoint une certaine parano et un certain machisme des gays, qui veulent que "tout" soit pareil, qui ressentent ou présentent la moindre différence comme insultante.
D'ou le risque que les meres porteuses soient légalisées.

Le point de vue des croyants, quand ils l'expriment franchement, en disant " nous ne voulons pas du mariage gay parce que nous ne voulons pas etre complice de l'encouragement d'un comportement qui mene tout droit à l'enfer", a au moins un avantage, de mon point de vue d'incroyante,
c'est qu'il pose la question de savoir ce qui est bon pour l'individu en dehors de tout effet de mode,
il interpelle les gens en leur disant "interroges toi sur ce qui est bon pour toi, ose penser à contre courant à ce sujet, tu es libre meme de tes "tendances", meme vis a vis de ton corps".

c'est une question qui peut etre utile, pour des adolescents qui ne savent pas, qui peuvent se sentir non libres de choisir, pris dans une bissexualité compliquée.

Or justement, le discours "scientiste" fait disparaitre cette question du "libre-choix", du "libre arbitre", qui me parait etre l'intéret de l'idée des croyants.

Si on est dans l'ordre de la nature", alors on suit ses gouts, et on utilise la science et des contrats juridiques pour avoir des enfants si on en veut, et si on veut "bien se reproduire" on choisit meme selon des criteres purement eugenistes : c'est logique ... la "science" dit que l'on épouse rarement son clone, alors "narcisssisme" : zero, la demographie dit que l'homosexualite n'a jamais empeché les sociétés de se reproduire ...

Tout n'est que choix de valeur. Attacher plus de valeur à l'hétérosexualité, parce que encore plus amour du différent : ce n'est qu'un choix de valeur. Attacher plus de valeur à un amour fécond, ce n'est qu'un choix de valeur.