mercredi 18 juillet 2012

Retour à l'évidence, ou Lanza del Vasto à l'honneur

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Si vous saviez la joie que l'on à déballer de leurs cartons poussiéreux des livres qui y dormaient depuis 6 ans ! J'ai enfin pu trouver un lieu où il me sera loisible de ranger sur des étagères les milliers d'ouvrages que j'ai accumulés, parfois sans discernement, depuis des décennies, et qui sont les seuls biens, hélas, auxquels je suis attaché, trop attaché sans aucun doute.
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Figurez-vous que j'ai retrouvé dans l'un de ces cartons un petit opuscule publié en 1945 aux Éditions Denoël, intitulé Principes et préceptes du retour à l'évidence, que l'on doit à LANZA del VASTO. C'était un homme en tous points remarquable et qui s'efforçait d'unifier en lui l'être, la parole et le faire. Dire que j'ai compris tout ce mon cher LANZA, Prince di TRABIA (car il était effectivement Prince) veut exprimer dans cette langue elliptique, imagée, parfois hachée, qui lui est si personnelle, est présomptueux. Car il nous faut être passé par sa propre expérience du jeûne, de l'érémitisme, de la vie à la campagne, pour goûter la saveur et le sel de ses propos, lâchés en apparence à bâtons rompus, alors qu'ils obéissent à une logique de vie d'une rare cohérence.
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Tout de même voilà un ensemble d'aphorismes que je me plais à vous livrer :
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"Ne proteste pas contre ce que tu désapprouves.
Passe-t-en... [je commenterai plus bas].
Passe toi de toutes les organisations industrielles, commerciales, officielles.
Si tu désapprouve le mensonge, quitte la ville.
Si tu désapprouves la banalité, ne lis pas le journal.
Si tu désapprouves la laideur du siècle, jette loin de toi tout ce qui vient d'une usine.
Si tu désapprouves la boucherie, cesse de manger de la viande.
Si tu désapprouves le bordel, regarde toute femme comme ta mère.
Si tu désapprouves la guerre, ne serre jamais les poings.
Si tu désapprouves les contraintes de la misère, dépouille-toi librement.
Mais approuve pleinement ce qui te reste et l'apprécie."
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"L'argent, cela ne se mange ni se boit, ce n'est pas un objet utile à garder, ni bel à voir."
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"Injustice du don que l'amour seul pardonne."
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"N'oublie pas que la générosité est un privilège.
Ceux qui reçoivent de ta main le savent, n'en doute pas.
Si donc tu donnes sans pudeur, leur ingratitude ne sera que justice."
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 J'ai dit que je commenterai les deux premières phrases de ces citations :
Nous ne donnons du pouvoir à ceux qui nous gouvernent que pour autant que nous le leur reconnaissons. Le jeune Etienne de LA BOËTIE l'a bien vu dans son Discours de la servitude volontaire. Nous voilà gouvernés par des hommes, sans doute pleins de bonne volonté, mais à l'esprit faux, parvenus au pouvoir par des méthodes et pour des raisons qui, de mon point de vue, relèvent de tout ce qu'il y a de plus "bas" en l'homme : l'envie, le partage théorique entre les gentils (ceux qui votent socialiste) et les méchants (les autres), le matérialisme, la méconnaissance de la part spirituelle de l'homme qui fait qu'il est homme et non pas singe. Un bon conseil. Ne les désapprouvons pas ni ne les approuvons. Ignorons-les. Ne regardons pas la télévision, ce lieu irréel où l'on nous abreuve d'approximations. Ne lisons-pas les journaux, ou, si nous le faisons, que ce soit avec recul, esprit critique, et mémoire. Non, laissons ces puissants dans leur tour d'ivoire ; laissons-les là où ils sont. Acceptons de n'être pas de leur monde.
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Notez chers lecteurs la convergence des vues d'un THIBON, d'un LEGAUT, d'un LANZA. Tous ont été dans le monde ; aucun n'a été du monde. Voilà à quoi, si vous donnez suite au projet un peu fou de créer là où nous vivons ces petites cellules de vie animées par le seul désir de relation fraternelle, nous sommes appelés. Et n'oubliez jamais que l'Etat, en exerçant sans pudeur une générosité qu'il doit à l'argent des autres, ne récoltera ni gratitude, ni reconnaissance, mais simplement l'aigreur du "ce n'est pas assez" et la revendication permanente.
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