-
SIMONE WEIL, TOUJOURS.
-
"La notion de droit, étant d'ordre objectif,
n'est pas séparable de celles d'existence et de réalité. Elle apparaît quand
l'obligation descend dans le domaine des faits ; par suite elle enferme
toujours dans une certaine mesure la considération des états de fait et des
situations particulières. Les droits apparaissent toujours comme liés à
certaines conditions. L'obligation seule peut être inconditionnée. Elle se
place dans un domaine qui est au-dessus de toutes conditions, parce qu'il est
au-dessus de ce monde.
Les hommes de 1789 ne reconnaissaient pas la
réalité d'un tel domaine. Ils ne reconnaissaient que celle des choses humaines.
C'est pourquoi ils ont commencé par la notion de droit. Mais en même temps ils
ont voulu poser des principes absolus. Cette contradiction les a fait tomber
dans une confusion de langage et d'idées qui est pour beaucoup dans la
confusion politique et sociale actuelle. Le domaine de ce qui est éternel,
universel, inconditionné, est autre que celui des conditions de fait, et il y
habite des notions différentes qui sont liées à la partie la plus secrète de
l'âme humaine."
In
Simone WEIL.
L'enracinement. (Téléchargeable.)
-
COMMENTAIRES.
-
Le texte de Simone WEIL peut paraître difficile. En réalité, il est est d'une clarté absolue et il explique très bien, d'une part l'origine des lois dites sociétales, qui dépendent de conditions particulières, objectives sans aucun doute, mais contingentes car conditionnées par l'état de la société et de l'opinion, (manipulée souvent, docile toujours), et d'autre part les réactions hostiles de nombre de nos concitoyens à ces lois.
La loi positive déclare que les officiers d'état civil ont le devoir de marier des homosexuels. C'est un devoir pour eux, un devoir qui est la contrepartie du droit qui est accordé à cette partie de la population française. C'est un devoir légal, mais ce n'est pas une obligation, car l'obligation seule est inconditionnée, alors que le droit des homosexuels au mariage est conditionnée par la loi et l'état de la société.
Simone WEIL assigne l'origine du chaos intellectuel et moral dans lequel notre malheureuse patrie est plongée, à l'idéologie des hommes de la révolution. En effet, comment concilier des droits érigés en absolu avec les conditions effectivement variables et changeantes de la société qui amène le législateur à constamment bafouer les principes supposés intangibles exposés dans la déclaration des Droits de l'homme ? Très simple : il suffit de définir ce qu'est un être humain, puis d'en tirer les conséquences.
En ce qui concerne l'avortement, la chose a été facile. Il a suffi de déclarer que l'embryon et le foetus ne sont pas des personnes, et donc n'ont pas de droit absolu à vivre. Idem pour l'euthanasie. Il suffit de déclarer que des vie ne valent pas d'être vécues pour les supprimer, d'où l'assassinat légal de Vincent LAMBERT. Or il est évident que nous avons, en tant qu'être humain, l'obligation absolu de respecter toute vie humaine, sans parler de celle des animaux.
Les choses deviennent plus compliquées quand il s'agit de la PMA ou de la GPA. C'est en réalité le désir de quelques personnes, désir qui ne peut être assouvi par les conditions que la nature et la culture imposent à la procréation, qui justifie l'octroi de ce nouveau droit. Dans ce cas, on oublie l'obligation qu'impose la nature à l'homme d'être inscrit dans un lignage (d'où, pour les animaux de race, les pedigrees), l'obligation de reconnaître en l'autre un égal, et de le pourvoir d'un père (PMA) ou d'une mère (GPA), tout comme ceux ou celles, qui ayant eu ce bonheur ou ayant satisfait à cette condition réclament le droit d'en priver l'autre.
Bref, les obligations ne dépendent nullement des conditions géographiques, sociales ou politiques. Elles ont un caractère transpatial et transhistorique qu'il est loisible de repérer dans toutes les cultures, colorées sans aucun doute par des aspects particuliers dépendants du climat, de la langue, de l'organisation sociale, mais respectées en raison de ce caractère impératif.
Il n'y a pas d'enracinement possible sans respect des obligations inconditionnées. On verra que ce point a des conséquences incalculables, notamment dans la manière de traiter les problèmes liés à l'immigration.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire