lundi 13 mai 2013

Egalité des droits ou désir mimétique ?

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Les plus matinaux de mes lecteurs réguliers ont dû s'étonner que le billet de ce jour n'ait point encore été publié, alors que 12 heures viennent de sonner il y a plus de 10 minutes. Mais c'est qu'il s'agit de ne pas bidouiller ce message, et de tenir, en le rédigeant, les deux bouts de la chaîne, celle de la raison et celle de la foi, celle de l'argumentation et celle de la charité.
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Michel de CERTEAU, toujours lui, m'a donné l'occasion de réfléchir à ce qu'il appelle "une maladie : le besoin d'être identique". Il constate en effet qu'une pathologie nous guette tous : celle de l'identité. "Elle consiste à refuser le fait de la différence". Et il souligne que la maladie est multiforme. Sans connaître les travaux de René GIRARD sur le désir mimétique, sans en envisager les conséquences quant au déclenchement de la violence collective, il pressent qu'il y a dans cette maladie, des germes malsains à haut pouvoir épidémique et une atteinte à la vérité.
D'abord interrogeons le phénomène de la mode. Comme je l'ai dit à plusieurs reprises dans mes billets, je m'occupe de la catéchèse des lycéens de seconde, première et terminale de deux très grands lycées parisiens. Je suis frappé de constater que tous les garçons ou presque portent des jeans, et que toutes les filles, plus diverses dans leurs atours cependant, sont des accrocs du rouge à ongle qui n'a de rouge que le nom, puisque leurs ongles sont bleus ou verts. Voilà des tendances bien innocentes ; elles traduisent cependant le désir d'appartenance à un groupe.
A plusieurs reprises, j'ai fait état du nombre considérable de passagers et passagères du Métro, porteurs de casques ou d'écouteurs. je m'amuse à les compter chaque fois que je prends le métro : il n'y en a jamais moins de 10 % du nombre de transportés pour un wagon. Même remarque pour les bonnets de laine, portés par les jeunes, très en arrière sur la tête (pour les garçons) ou les shorts en denim, très courts (pour les filles). On est dans le vent, on est à la mode, on est comme les autres. Est-on soi en sacrifiant à la mode ? Oui et non. 
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Ces phénomènes sont exploités par les agences de publicité ; elle suscite le désir, en utilisant du reste les tendances naturelles et non condamnables du tempérament humain : moins de fatigue, de la beauté, du bien-être, de la commodité, etc. ; certains succombent sans combat, et d'autres les imitent pour être "comme eux", c'est-à-dire "comme les autres", indûment identifiés à ces quelques leaders de la mode . Voilà un constat très simple, "l'homme est un être de désir et non de nécessité" (G. BACHELARD), et souvent, ne sachant où se situe son désir à lui, il en vient à désirer non pas l'objet du désir de l'autre, mais son désir même, serait-il sans objet connu. C'est le ressort de l'envie. Et quand le désir ne peut être satisfait pour diverses raisons (on va y revenir), il devient le ressort du ressentiment (tel que l'a décrit NIETZSCHE).
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Simplement remarquons avec René GIRARD que c'est le désir qualifié par lui de mimétique qui déclenche la violence ; que c'est le sacrifice d'un innocent, le bouc émissaire, qui ramène le calme dans les sociétés humaines déchirées par elle, du moins qui ramenaient le calme, avant que le point de vue de l'innocent persécuté ne soit exemplifié et dénoncé pour toujours par JÉSUS. Des boucs émissaires, on ne cesse d'en désigner en politique, en utilisant toutes les ficelles de l'imagination, de la calomnie, de l'insinuation, et même de la dénonciation véridique. Ainsi, en sacrifiant (un peu) monsieur CAHUZAC, la majorité actuelle a-t-elle tenté d'éteindre l'incendie, imprudemment allumé par l'ex-ministre. Mais il est inextinguible. Le bouc émissaire (qui du reste est ici coupable, même s'il n'est certainement pas le seul), ça ne fonctionne plus, et monsieur CAHUZAC a bénéficié de 40 bulletins portant son nom sur les 200 votants, lors d'un vote organisé par les socialistes à VILLENEUVE-SUR-LOT.
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Je reviens maintenant au mariage pour tous, et à la revendication de la PMA et de la GPA par les homosexuels qui désirent se marier. Il est clair qu'avec elle, ils expriment un désir. Il ne s'agit pas de savoir s'il est légitime ou non : il est exprimé, à tort ou à raison peut-être mais là n'est pas le problème. Qui ne voit que ce désir ne peut être satisfait autrement qu'en ayant recours à des artifices (c'est à dessein que je refuse d'utiliser des mots qui évoqueraient "la nature") ? Cette revendication est celle d'un désir mimétique. Mais le désir ne sera JAMAIS SATISFAIT. Il s'agit en effet d'être "comme les autres", alors que cette identification à l'autre, au différent, (l'hétérosexuel en l'occurrence) est tout simplement impossible. Et c'est la revendication du désir de l'autre, celui des hétérosexuels en l'occurrence, qui déclenche les réactions  massives de l'opinion publique. Les homosexuels parlent d'égalité de droits ; il s'agit en réalité de l'expression d'un ressentiment qui ne peut être levé, ni par loi, ni par l'opinion publique. Tant qu'il y aura des êtres humains, il y aura cette protestation relative à la différence ; elle est légitime.
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Les jeunes dont je vantais l'existence dans mon billet d'hier, sentent confusément qu'il s'agit avec la loi dite TAUBIRA, de leur ôter leur identité d'être sexué et  de procréateur "naturel". Il s'agit avec cette mesure de faire rentrer dans l'espace public un germe de violence, de la violence faite à l'enfant, ou de la violence faite aux couples, mariés ou non, qui se sentent bafoués dans leur statut d'homme et de femme. La violence, elle vient de cette loi, non de ceux qui s'y opposent. Encore une fois, l'opposition n'est pas politique, et les éléphants se trompent quand ils analysent en ces termes les manifestations. Elle est fondamentalement issue du sens commun, de la perception d'une vérité inscrite dans les phénomènes de la vie et des sociétés... Adeptes du darwinisme social, ils croient qu'il suffit de changer l'environnement juridique pour changer les mentalités. C'est vrai jusqu'à un certain point. Mais vient un moment où l'on se heurte aux limites de l'exercice : HITLER, MAO, STALINE, POL POT, et bientôt l'increvable CASTRO en ont fait ou en feront l'amère expérience. On ne change pas l'homme à coup de décrets.
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Merci de commenter (mais je n'ai pas trop d'illusion !).
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4 commentaires:

Laurence a dit…

Tant pis je "commente", je n'ai pas envie de vous faire de peine alors que je lis vos billets tous les jours !
Et puis non non et non ! Nous n'avons pas tous l'instinct grégaire sur lequel comptent nos gouvernants pour nous mener tout droit à la pensée unique et à l'abattoir.
Il y a longtemps, nous nous sommes rendus compte que c'était en se voulant "quelqu'un" que nous étions devenus tous les autres : à l'époque filles et garçons portaient jeans et chemise blanche jusqu'aux genoux, il y avait aussi la salopette et les couettes, c'était très chic !! Tellement original que c'était devenu l'uniforme.
J'ai l'impression que le jeune d'aujourd'hui n'a pas tant changé, il a toujours du coeur et veut changer le monde mais il y a moins d'insouciance, les couleurs sont plus ternes (gris, noir, bleu marine...) "l'autonomie" est largement plus précoce et la consommation d'alcool est devenue banalité. L'obésité était rare, il n'y avait pas Mac Do ! Nous étions adolescents à 16 ans, ils le sont à 12... Paradoxe, nous nous mariions beaucoup plus jeunes.
Pour ceux qui échappent à toutes les modes, au parisianisme aussi, je crois qu'ils sont aujourd'hui heureux d'avoir gagné une certaine force de caractère et qu'ils iront tout droit mais j'espère qu'il leur sera toujours possible de garder leur libre arbitre car toutes ces manigances politiques, ces appartenances aux loges, ces lois sont inquiétantes.
À bientôt !

Philippe POINDRON a dit…

Merci, chère Laurence. Je vais rajouter quelques éléments à votre commentaire. La force de caractère consiste très certainement à ne pas céder aux modes parce que c'est la mode, mais à faire preuve de discernement. Je reste plein d'espoir. Ces jeunes que j'ai vus aux manifestations et que je reverrai le 26 mai étaient bien de leur temps, là dessus pas de doute, y compris jusque dans la mode. Ce qui ne l'était pas de la mode (médiatique), chez eux, c'était la conscience claire de la différence et de l'altérité. François HOLLANDE a perdu la bataille de la jeunesse... Il est vieux, très, très vieux, et je ne parle pas de son entourage ! Quand on les voit, on se croirait dans l'antichambre un banquet radical-cassoulet de la troisième république !

Laurence a dit…

Je ne sais pas si vous suivez ce qui se passe actuellement au Trocadéro... on dit que les CRS ne sont pas assez nombreux ! vitrines brisées, voitures défoncées, abris bus explosés, des blessés et le pompon un car de touristes encerclé et les soutes à bagages pillées vidées en quelques minutes...

Et on veut nous faire croire que nos petits veilleurs virés hier soir des abords de l'Elysée sont de dangereux terroristes !

hier soir à l'issue du match sur les Champs Elysees : 5000 fêtards 21 interpellations, 6 heures de guerilla, 16 policiers blessés, 3 gardes à vue.

Manif pour tous : 1 400 000 pacifistes, 67 interpellations, 67 gardes à vue. Aucune dégradation.

Delanoë vient de déclarer qu'iĺ était vraiment dommage qu'il y ait une poignée de provocateurs...

Philippe POINDRON a dit…

Je vais, effectivement, faire un billet là-dessus. Merci, chère Laurence;