Le Révérend Père Alexandre SCHMEMANN fait ce constat d'une justesse et d'une profondeur saisissantes : "Aussi étrange que cela puisse paraître, c'est la paresse et le découragement qui remplissent notre vie du désir de dominer.[...] En rendant notre vie vide et dénuée de tout sens, ils nous obligent à chercher une compensation dans une attitude radicalement fausse envers les autres". (Je ne puis, hélas, donner la référence de l'ouvrage où figure cette citation).
Deux remarques, l'une terre à terre et de nature politique. L'autre de portée générale.
Première remarque. Il me semble que si monsieur FILLON monte dans les sondages, c'est précisément parce qu'il ne manifeste pas ce désir obsédant, éclaboussant, de domination. Il agit, avec discrétion, et donne l'image d'une homme équilibré, qui habite sa vie, et trouve dans ses proches, sa famille, ses enfants, ses amis, l'ancrage et l'équilibre nécessaires à la conduite de son projet.
Deuxième remarque. Je suis très frappé de voir combien les contempteurs du "christianisme" se trompent de cible. Jésus n'est pas venu fonder une religion. Il est venu les démolir toutes. Il parle du Royaume, et il énonce clairement les douloureuses conditions qui permettent d'y rentrer. Elles passent par l'oubli de soi. Ce qui caractérise les disciples de Jésus, c'est justement le refus de toute volonté de pouvoir. "Les nations appellent leurs princes 'Bienfaiteur', mais vous n'agissez pas ainsi - dit-il à ses amis - Que le plus âgé soit comme le plus jeune ; que celui qui commande soit comme celui qui sert". Là est tout l'esprit, tout le souflle, toute l'inspiration de l'homme qui désire servir son pays, et non point s'en servir. Il ne le peut pas de lui-même. Il lui faut autre chose, mais hélas, cet autre chose a déserté l'espace public depuis bien longtemps. Je ne suis pas certain que nous y ayons gagné.
Pour habiter sa vie il faut se recevoir d'un Autre et de soi. Jamais de l'un seul. D'un Autre exclusivement, et c'est la dérive intégriste ; de soi seul, et c'est la dérive totalitaire. La condition humaine est telle que l'homme doit appliquer sa liberté à faire ce qu'il doit faire, et ce devoir n'est ni anodin, ni quelconque, mais le remplir est indispensable au bonheur. Ainsi pouvons-nous aller vers la fin qui nous est due, ainsi les responsables politiques peuvent-ils nous y conduire.
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