"Vous Nous avez faits pour Vous, Seigneur, & notre coeur est inquiet, jusqu'à ce qu'il se repose en vous" dit Augustin d'Hippone dans ses Confessions (Livre I, chapitre I).
L'abbé GROU, un ecclésiastique du XVIIIe siècle, commente ce texte d'une manière qui me semble très pertinente ; j'en extrais ce court passage : "Tant que nous avons fait notre Dieu des richesses, des plaisirs, des honneurs ; tant que nous avons prétendu y trouver notre béatitude, jamais nous ne l'y avons rencontrée. Une voix intérieure nous criait : ton bonheur n'est pas là ; tout cela ne te remplit pas ; tes désirs vont toujours au-delà de ce que tu possèdes ; ton coeur ne cesse de demander ; et tout ce que tu lui donnes, ne fait qu'irriter ta faim. Tu as eu, il est vrai, quelques moments d'ivresse ; mais est-ce dans l'ivresse, dans l'aliénation de la raison, qu'est le bonheur d'un être raisonnable ?"
Il est intéressant de noter qu'au tout début du commentaire, avant l'extrait que je viens de citer, l'abbé GROU dit ceci : "Cette sentence est le premier Principe de la Morale ; & elle rend raison des agitations du coeur humain..."
J'invite monsieur Julen DRAY, dont j'ai vigoureusement critiqué l'appel a combattre "une vision religieuse de la société", à se poser les questions qu'a si bien formulées l'abbé GROU. Trouve-t-il plénitude et sens dans le seul combat politique ? Et s'il lui advenait d'être battu aux élections, comment réagirait son coeur ? N'a-t-il jamais fait, ne fût-ce qu'un instant, l'expérience terrible de la vanité des succès, de la possession, des plaisirs ? Voilà qui me paraît impossible. Et voilà pourquoi il me semble que ces interrogations essentielles doivent porter toute vision, tout projet, toute action politiques. Il n'est pas demandé aux politiques d'y apporter des réponses toutes faites. Il leur est demandé de permettre à leur frères et soeurs en humanité de se les poser. Et ceux-ci ne le peuvent que si les besoins élémentaires de leur nature sont satisfaits. C'est là, la justification fondamentale des exigences de justice sociale : permettre à tout être humain de se poser les vraies questions : celle du sens de sa vie, celle de sa fin, celle de son bonheur. Il ne le peut que si les exigences de sa nature sont satisfaites.
Citations tirées de l'ouvrage ci-dessous :
Abbé GROU.
Morale tirée des Confessions de S. (sic) Augustin.
Tome premier. (Chapitre premier, page 5)
A Paris, Chez Mérigot, jeune, Libraire, Quai des Augustins, au coin de la rue Pavée, 1786. (Je possède ce livre dans ma bibliothèque.)
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