A ce proche de mon ami nancéen Louis, je présente de très plates excuses. Il n'aura pu, comme à son accoutumé, lire mon billet quotidien en prenant son petit-déjeuner. J'ai de très bonnes raisons d'avoir tardé à me manifester : celui de m'être couché fort tard, après une veillée absolument bouleversante, passée comme Veilleur parmi les Veilleurs. Je vais tâcher de vous en rendre compte, mais il m'est impossible en si peu d'espace de traduire la richesse du contenu et la beauté l'atmosphère qui régnait chez les Veilleurs, hier soir, Place Louis Lépine, dans l'île de la Cité.
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Je suis arrivé en compagnie d'Antoine sur le coup de 21 h 30 ; la veillée avait été avancée à 21 heures, mais dans les tout derniers moments, de sorte qu'il ne cessait d'arriver de nouveaux Veilleurs bien après l'heure du début. La partie de la Place Louis Lépine qui est légèrement surélevée et se trouve plantée d'arbres, à la manière des mails d'autrefois, était noire de monde. Axel nous présentait de nouveau les objectifs et les moyens de ces veillées : non violence absolue, respect des lieux sur quoi nous ne devions rien abandonner en partant, travail de contrôle sur soi, bienveillance, espérance, patience. Puis la veillée proprement dire a commencé. Lorsque nous sommes arrivés par les quais nord de l'île de la Cité, nous avons vu en marche un important dispositif policier ; une centaine de gardes républicains gagnaient en silence la Place Louis Lépine. Quand nous nous sommes assis, ils encerclaient la totalité du rassemblement de manière très proche. J'ai vu un gradé muni d'un porte-voix. Nous avons eu l'impression que les CRS laissaient rentrer les possibles participants, mais empêchaient leur départ. Vers 22 heures, ils sont reculé de quelques mètres en arrière. A cette occasion, nous avons reçu l'information que près de quatre-vingt avocats passaient leur soirée dans les brasseries, bistros et bars proches, histoire de...
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Soirée d'une richesse incroyable. D'abord la lecture d'une pensée de PASCAL sur la force et la justice. Je vais bien entendu la chercher pour vous la livrer dans un prochain billet, puis des textes de SOLJENYTSINE, de CAMUS, d'Hannah ARENDT, de Gustave THIBON, de Lanza Del VASTO, de GRAMSCI [le fameux "Je hais les indifférents"], des citations (ARISTOTE, Robert DESNOS, BOUDDHA, le Dalaï LAMA, Victor HUGO), le tout entrecoupé de l'hymne des Veilleurs (un Veilleur avait eu la bonne idée de le polycopier sur de petits bouts de papier tenant dans la paume de la main et il les donnait à qui en voulait). Nous avons eu un témoignage bouleversant sur la non-violence ; on avait alloué 5 minutes à la jeune fille qui devait nous en parler ; elle les a tenues dans une intervention d'une densité exceptionnelle. Deux jeunes, dont l'un était censé jouer de la guitare laquelle est restée muette pour d'obscures raisons, ont chanté Imagine, un autre Veilleur a interprété un air du Don Giovani de MOZART, un chœur de trois Veilleurs a chanté l'Ave verum du même. AQUILA (j'ignore l'orthographe de ce prénom), originaire de la Seine Saint-Denis, et âme des Veilleurs en ce Département, nous a livré un témoignage incroyable de force et de conviction. AQUILA est probablement de confession musulmane ; je n'ai pas pu vérifier ce point. Une religieuse tout juste arrivée de JERUSALEM nous a dit, en deux minutes au plus, que des Veilleurs se rassemblaient dans la Ville tous les deux soirs. A ce moment, mais je ne saurais l'assurer, il est probable qu'un journaliste a prise en photo (il y en avait deux hier soir qui portaient des sortes de tee-shirts bleu-marine marqué PRESSE en gros caractères. Il se pourrait bien que dans le grand mouvement de mensonge et de désinformation médiatiques, ce soit la seule photo que la presse publie pour montrer que les Veilleurs sont des "cathos ringards").
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Vers minuit, et alors que nous pensions rester sur place, les responsables de la veillée, Axel et Madeleine, nous ont fait savoir qu'ils avaient demandé au Préfet de Police l'autorisation de nous rendre en cortège sur le parvis de Notre-Dame, lieu hautement symbolique de Paris et de la France, lieu de culte récemment profané par les Femen. L'accord est venu. Et l'on a vu quelque chose d'incroyable : les CRS en tête de cortège, des CRS sur chaque côté en serre-file, et quelques centaines de Veilleurs marcher silencieusement sur les quais Nord de l'île de la Cité. Vous ne me croirez pas si je vous dis que l'on avait l'impression d'accompagner une manifestation de policiers... Nous chantions le chant des partisans, ou bien encore nous tenions dans un silence impressionnant. J'ai entendu un CRS répondre au téléphone, sans doute à un gradé qui lui demandait des nouvelles de notre marche, et utiliser pour la désigner le mot "procession". Nous sommes alors arrivé sur l'esplanade. Un cordon impressionnant de CRS s'est mis à barrer l'accès au pont qui donne sur la rive gauche de la Seine. Antoine n'a pas pu franchir ce cordon pour le photographier de dos.
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Là, lecture d'autres textes, dont un texte admirable de Jules FERRY ; monsieur PEILLON devrait s'en inspirer REELLEMENT à défaut de faire référence IDEOLOGIQUEMENT à son lointain prédécesseur. Il parlait, ce texte, du respect que l'on doit à l'enfant, notamment dans ses convictions, du rôle irremplaçable des parents dans l'éducation de l'enfant, de celui de l'enseignant dans le délicat travail qui lui était confié. C'était le temps de la troisième république, dont j'ai dit dans un très ancien billet combien son projet éducatif, malgré bien des lourdeurs et des sous-entendus politiques, avait de mérite. Ah si, j'oubliais : petit air de cornemuse (Eric ?), chant d'un extrait de la Création de HAYDN, d'autres textes encore, dont (mais je n'en suis pas sûr) encore un texte de CAMUS, et un autre de Fabrice HADJADJ exaltant la sexualité et bénissant la génitalité complémentaire de l'homme et de la femme (absolument décapant ce texte ; je vais me le procurer). Contemplation de la façade de la Cathédrale, après que l'on avait entendu, au début du rassemblement, un rappel sur sa constructions. Sans que l'on sache bien pourquoi, il semble que les orgues aient retenti à cette heure fort tardive de la nuit (vers une heure du matin). Dispersion à 1 h 30.
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Ce que j'ai retenu aussi, et ce sera ma conclusion, c'est un petit événement. Il nous avait été demandé d'être ouvert, bienveillant, souriant. Je me suis efforcé de l'être, ou plutôt je crois l'avoir été. J'ai croisé sur le quai de la Corse le regard d'un CRS et lui ai souri. Il m'a répondu par un sourire que je n'oublierai jamais. Il ne me revient pas de donner ici une interprétation de cette minuscule rencontre entre deux hommes, mais j'avais le devoir de vous la signaler. Voilà le signe tangible d'un réel changement du rapport entre les Français.
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Prochaine veillée, mercredi prochain. Je vous donnerai les renseignements utiles. Et j'invite mes lecteurs qui vivent loin de PARIS ou même à l'étranger (j'ai vérifié que mes billets étaient lus aussi bien en Amérique du Nord et du Sud, qu'en Europe - notamment orientale - et en Asie), à rejoindre la cohorte de ceux qui ne supportent plus le mensonge, l'iniquité, et la désinformation, et veulent une France VRAIMENT fraternelle, fondée sur un solide lien social. Il y a 170 lieux de veille en France et une trentaine à l'étranger (chiffre fourni par moi à la louche). Ah ! Encore un conseil. Quand vous êtes dans les transports en commun, efforcez-vous d'être présent à vous-même, et de regardez vos voisins avec bienveillance. C'est fou ce que cela peut changer l'atmosphère.
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Retour en taxi (nous en avons trouvé un avec peine) en compagnie de Bertrand, un jeune qui n'avait pas assez d'argent pour regagner ses pénates par ce moyen dispendieux, et que nous avons pris bien volontiers avec nous. Je n'oublie pas, non plus, que j'ai contracté une petite dette pécuniaire vis-à-vis d'Antoine, et une très grande dette d'amitié.
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