-
Cher Dr PIEPHO,
J’ai
lu avec intérêt la lettre que vous avez envoyée il y a quelques jours à l’éditeur
de New Microbes and New Infections,
Volume 37, intitulée "‘Influence of conflicts of interest on public
positions in the COVID-19 era, the case of Gilead Sciences’ by Roussel and
Raoult (2020)."
Je
ne suis pas un biostatisticien comme vous. Néanmoins, je pense que vos commentaires
ne sont pas entièrement de bonne foi. En premier vous critiquez le fait que
Roussel et Raoult ont utilisé ce que vous appelez l’« agrégation » de
données, et la réduction à 5 items des opinions analysées par les auteurs.
Cette manière de faire est très courante en matière de sciences sociales, et
nombre de sondages d’opinion demandant l’appréciation d’une cohorte de gens,
proposent de classer les réponses en un petit nombre de catégories, cinq en
général, notée de 1 à 5. De ce fait, il n’y a aucune raison de refuser l’application
de cette méthode aux contenus des articles analysés par Roussel et Raoult. En outre
la subdivision en des catégories d’opinion plus subtiles aurait été critiquée
avec raison. Réduire l’analyse à une classe aurait vidé l’intérêt du papier, en
même temps de celui des enquêtes d’opinion. Si j’ai bien compris l’article de Roussel
et Raoult, la classification en cinq classes d’opinion a précédé leur
assignation à un financement par Gilead. Évidemment, on ne peut exclure cette
dernière possibilité. Cependant, en le suggérant indirectement, vous suggérez
aussi que les auteurs ne sont pas entièrement honnêtes ou ne sont pas compétents.
La
seconde raison que vous invoquez et qui rend les conclusions de l’article irrémédiable
(sic !) est que Roussel et
Raoult n’ont pas cité les articles et les passages qu’ils ont utilisés pour
classer l’opinion des médecins. Selon la loi française, cette manière de faire
aurait probablement été attaquée en justice sous le chef de dénonciation
calomnieuse (sans aucune chance de succès, car les données concernant les honoraires
perçus par les médecins sont publiques). Selon moi, le mérite de cet article est
que personne n’est nommé et que tout le monde peut consulter les sites officiels. À
ce point, il ne reste que deux solutions. Ou bien Roussel et Raoult ne sont pas
honnêtes ou bien nous pouvons avoir confiance en eux. Bien que vous donniez l’impression
de ne partager aucune de ces opinions, il semble que la première apparaisse en
toile de fond dans votre lettre, à moins que vous cherchiez à dénier toute
compétence en statistiques à l’équipe marseillaise. Concernant ce point, j’aimerais
avoir tort. Trop de statistiques tuent les statistiques
Contrairement
à votre jugement qui rend l’article non remédiable, il existe un moyen (souvent
utilisé par Jean Piaget pour s’assurer de la qualité de ses classements concernant
le stade de développement psychologique des enfants) de prouver l’opinion bien fondée
de Roussel et Raoult : donner les titres des papiers et des passages
utilisés pour le classement des opinions sur l’usage de la chloroquine pour
traiter la Covid-19 à un chercheur anonyme (sans mentionner bien sûr le
financement de Gilead) et de comparer ce classement à celui des auteurs que vous
critiquez.
Espérant
avoir de vos nouvelles dans un futur très proche,
Sincèrement vôtre.
Philippe POINDRON
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire