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Le spectacle du monde politique est affligeant. Mais, sacrebleu, faut-il leur répéter :
Ce n'est pas l'ignorance qui nous empêche de devenir vrai, c'est la lâcheté !
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1. La citation du jour.
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Tout le monde, politiciens en tête, devrait avoir lu ce très important livre. Je veux parler de l'essai d'Henri HUDE, intitulé Ethique et politique, duquel j'extrais la citation, l'amère citation, le constat terrible que voici :
"Notre société, loin de se démocratiser, devient en réalité de plus en plus aristocratique. C'est désormais un fait massif : démocratie aristocratique virant à l'oligarchie, économie de marché aristocratique virant à l'usure et aux pratiques semi-maffieuses, sectarisme et dogmatisme à rebours d'une caste intellectuelle pseudo-progressiste, enfin cynisme et corruption dans les moeurs politiques, croissante vacuité de la rhétorique politique, impuissance des syndicats et des salariés, disparition de tout parti populaire d'avenir, ruine et déportation de la paysannerie dans l'indifférence générale, etc.
Et pourtant... La grande révolution qui a commencé à l'Est ne s'achèvera pas avant d'avoir traversé l'Europe. La révolution de l'Est est à mi-chemin. La révolution de l'Ouest commence.
[...]. A l'Est, le rationalisme des lumières a enfanté un totalitarisme violent. A l'Ouest, le même rationalisme engendre continûment un totalitarisme rampant.
Un régime politique s'effondre sur lui-même quand il n'existe plus de force morale pour le porter. Le régime communiste s'est effondré parce que le progressisme communiste était mort dans les esprits et dans les coeurs.
A l'Ouest de l'Europe, le progressisme pseudo-libéral ne représente plus une conviction forte, tout au plus un ensemble d'habitude de pensée et de situations acquises. Les peuples n'y adhèrent plus que par inertie. Il est mort comme force morale. Quant à la démocratie oligarchique et internationaliste, élevée sur la base de l'ordre moral et du dogmatisme progressistes, c'est une forme politique qui, virtuellement a vécu.
C'est pourquoi l'Ouest ne parviendra pas à normaliser les pays d'Europe centrale, ni à y construire quoi que ce soit sur les ruines du communisme. L'Est s'affirmera peu à peu, pèsera sur nous, frappera à notre porte. Le choc sera énorme à l'Ouest. Déjà la contestation fermente partout. L'ordre établi n'y résistera pas. De ce double effondrement sortira l'Europe nouvelle, et, peut-être, un monde nouveau."
In
Henri HUDE.
Ethique et politique.
Editions Universitaires, Paris, 1992.
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2. Commentaires.
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Quoique écrit en 1992, ce texte décrit parfaitement ce qui est en train d'arriver sous nos yeux. Il convient, d'abord, de dégager les quelques idées forces de ce passage : (a) Notre prétendue démocratie n'est qu'un gigantesque système de confiscation du pouvoir et de ses avantages aussi bien matériels (voiture de fonction, retraites dorées, vie luxueuse, aux frais des contribuables et/ou des salariés) que sociaux (prestige social, considération médiatique, foules de courtisans - souvent intéressés - flagornerie d'une bassesse incroyable), par une petit nombre d'individus au rang desquels il faut mettre les ENARQUES, les anciens des soi-disant grandes écoles (Polytechnique, Mines, Centrales, Normale Sup' [dans une moindre mesure]) qui créent de véritables réseaux d'influence. A cet égard, l'annuaire des anciens élèves de l'Ecole polytechnique est un chef-d'oeuvre du genre. Ne parlons pas des partis dont les chefs se refilent les postes de pouvoir, en jouant d'une alternance qui se dit démocratique mais ne fait que prolonger l'existence de structures vermoulues (le maintien des Départements, et des Conseils Départementaux en est un exemple remarquable), sans faire naître de structures qui auraient un sens (les pseudo-régions qui marient la carpe et le lapin, est un autre exemple de ce dogmatisme sectaire qui fait fi de l'histoire et de la géographie ; or une étude toute récente des résultats des élections départementales montrent que les résultats recouvrent très exactement les territoires des anciens pays dits d'Etat, sous l'ancien Régime, c'est-à-dire les provinces dotées d'un Parlement). (b) Il y a ensuite la tyrannie d'un Etat omniprésent qui se mêlent de tout, sauf de l'essentiel ; il faut avoir un gilet jaune dans sa voiture, des détecteurs de fumée dans sa maison ou son appartement, des prises électriques conformes à des normes élaborées par des imbéciles qui mangent des moules-frites à BRUXELLES ; on pourra fermer votre Blog ou votre site, s'il apparaît qu'il déplaît aux Princes. La France est un exemple caricatural de cette tyrannie rampante qui censure jusqu'à l'expression de l'intimité religieuse par un laïcisme d'un autre âge. Les institutions européennes ne sont pas en reste qui tendent à imposer des comportements identiques à tous les citoyens qualifiés d'Européens, à commencer par la forme des cuvettes de WC. (c) Et puis il y a le choc qui est en train de prendre forme entre l'ancienne Europe de l'Est et notre pauvre Europe de l'Ouest laquelle s'occupe de la GPA, de la PMA, de l'euthanasie, du mariage des homosexuels, mais est infoutue de construire des logements pour abriter les sans abris (80 000 dans la Région parisienne), créer de l'emploi, redynamiser l'industrie, inféodée qu'elle est aux grandes multinationales. C'est ainsi que l'on est fort maladroitement intervenu en UKRAINE, sans compter, il y a quelques décennies, la désastreuse intervention en SERBIE, un pays ami de la France de toute éternité, sans compter la reconnaissance du KOSOVO. La GRECE, fort habilement, se tourne vers la RUSSIE. Elle partage sa conception mystique de l'humanité. On critique les autorités tchèques ou hongroises qui ont le malheur de ne pas comprendre la beauté de la théorie du genre, de l'internationalisme, du mariage pour tous alors que, palsembleu, ils sont dans l'Europe. Ces pays jeunes, RUSSIE en tête, frappent à notre porte en effet. Et je préfère le peuple russe et son âme mystique, à l'agglomérat nébuleux des puissants du groupe de BILDERBERG, et des peuples qu'ils manipulent d'une main de fer gantée dans le velours du foot, des salles de shoot et de la calamiteuse télévision. On voit le résultat de notre indiscrète intrusion en Europe orientale ; je ne le décrirai pas, mais je vous le laisse deviner.
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2 commentaires:
J'ai lu votre billet avec beaucoup d'attention, car il soulève des questions brûlantes.
Mais si je vous rejoins sur un certain nombre de points, je peine à vous suivre sur d'autres et m'interroge sur le sens de cette sombre prédiction au sujet du modèle de société dans lequel nous vivons. Le titre de votre billet révèle d'ailleurs toute l’ambiguïté de la problématique en évoquant la fin de « la démocratie progressiste pseudo-libérale ». Derrière cette expression, de quoi parle-t-on et qu'y a-t-il de vicié dans le système qu'elle désigne ?
Est-ce la démocratie elle-même qui est en cause, ou bien certaines tares qui viendraient obérer le modèle originel ?
S'agissant du progressisme, faut-il comprendre le progrès en soi ou sa « gauchisation », qui ramène tout aux acquis sociaux ?
S'agissant du « pseudo-libéralisme » enfin, faut-il y déceler un excès ou au contraire un manque de liberté ?
Même si je suis inquiet de certaines évolutions, je reste persuadé qu'il n'existe pas de meilleure issue que celle de la démocratie, qui permet au peuple de changer sans violence de gouvernants. Et je suis naturellement enclin à considérer le progrès et la liberté (donc le libéralisme) comme consubstantiels à la démocratie.
Je suis convaincu d'autre part, que c'est à l'esprit des Lumières qu'on doit l'éclosion du modèle démocratique moderne, dont les Etats-Unis d'Amérique furent le berceau et sont encore à ce jour la représentation la plus aboutie. Bien qu'il soit entaché de beaucoup de défauts, c'est tout de même le régime le plus stable au monde, le plus libre, le plus responsable et le plus durablement prospère. C'est aussi celui où les droits des citoyens sont les mieux respectés. Et c'est enfin grâce à lui que la liberté a pu s'étendre sur le monde, en terrassant notamment les totalitarismes sanguinaires du XXème siècle.
Pour ces raisons, j'ai bondi en lisant l'affirmation de M. Hude selon laquelle, à l'Ouest, le « rationalisme engendre continûment un totalitarisme rampant ». C'est selon moi un raccourci fallacieux, qui tient du sophisme.
Ainsi je serais donc tenté d'adhérer au constat, s'il s'agit de déplorer la tendance à la médiocratie de ce modèle, particulièrement en France où la suradministration, et les mythes de l'Etat Providence et de la justice sociale, l'ont quelque peu dénaturé (en dépit des avertissements lancés par Tocqueville). Je ne peux l'approuver en revanche s'il consiste à faire de la démocratie, du progrès et de la liberté, les maux qui rongent notre société. Car le « monde nouveau » qui sortirait après sa mort serait sans nul doute bien plus horrible...
Cela dit le problème est si complexe qu'il est bien difficile de l'aborder en si peu de mots (les problèmes politiques européens sont à mon sens d'une autre nature)...
Cher Pierre-Henri, quand un état veut s'occuper de tout en posant des normes, des décrets, des arrêtés et des lois pour ce qui concerne la vie quotidienne des citoyens, y compris leur vie intime, il est effectivement tyrannique, et c'est bien une tyrannie rampante qui ne dit pas son nom. Quand l'Etat impose un quota d'avortements par centre hospitalier, quand il nie la liberté de conscience, il est tyrannique. si vous avez lu quelques billets antérieurs, vous verrez que loin d'être contre la démocratie, je suis résolument pour, à condition que ce soit une vrai démocratie.
Par ailleurs, la citation d'Henri HUDE doit être mise dans son contexte : lui aussi, il est résolument démocrate, mais il dénonce les dérives de la démocratie à la française. Ce que je vais essayer de montrer avec le billet daté du 11 avril, mais publié le 12. Merci pour vos contributions, toujours substantielles et réfléchies.
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