Dernier billet consacré aux conséquences désastreuses de la Révolution, un billet qui a trait aux mensonges que nous distillent les professeurs d'histoire quand ils nous enseignent la Révolution. Vous remarquerez tout d'abord la manière dont on périodise l'histoire de France. On découpe arbitrairement le XVIIIe siècle lequel est censé prendre fin en 1789, et l'on fait émerger la France des brumes de l'enfance à cette date. Pour que la chose soit crédible, il faut bien expliquer la périodisation, et justifier la folie collective révolutionnaire par un préalable état des lieux, honteusement noirci, et un inventaire des nouveautés remarquables qu'ont introduit dans la vie publique les prétendues "grandes figures" que sont les Robespierre, Marat, Danton, Hébert, et autres Carnot (oui, oui, Carnot, qui signait en blanc des décrets d'accusation et qui faillit perdre ainsi un de ses fidèles secrétaires).
Ainsi, on parlera de l'ignorance dans laquelle on maintient le peuple, mais l'on passera sous silence l'existence de près de 20.000 petites écoles paroissiales où l'on dispensait aux enfants, garçons et filles, un enseignement primaire élémentaire tout au long du XVIIIe siècle. On insistera sur l'exploitation des paysans par les nobles, mais on passera sous silence deux faits de première importance : la première est que les aristocrates ne pouvaient pas exercer de professions dites serviles sans déroger, ce qui leur interdisait de rentrer dans le processus industriel, le capitalisme sauvage et l'exploitation d'une classe ouvrière qui n'existait pas (pas encore) et que des bourgeois opportunistes et sans scrupules ont opprimée au cours du XIXe siècle ; la seconde est qu'ils se sentaient obligés de porter les armes pour défendre leur pays, et qu'ils n'obligeaient pas les paysans ou les artisans à la conscription, laquelle a fait le nombre de morts que vous savez, aussi bien pendant les guerres révolutionnaires, ou napoléoniennes, qu'en 1914-1918. La conscription est une invention révolutionnaire. Enfin, on oublie de mentionner que nombre d'aristocrates résidaient effectivement en province, dirigeaient avec sagesse leur exploitation agricole (le seul "métier" qui leur fut autorisé), et ont souvent dépensé jusqu'à leur dernier sous pour secourir la misère des pauvres. On fait donc semblant de confondre la noblesse fréquentant la cour (une minorité de nobles, souvent libertins, anticléricaux, areligieux, et pour tout dire scandaleux) avec les nobles administrant leurs domaines. Dans un précédent billet, je vous ai aussi décrit le zèle de nombreux évêques, et leur inventivité dans le domaine social avant la Révolution. Avez-vous aussi remarqué que nombres d'artistes ou de savants de premier plan n'ont point de particules et qu'il a bien fallu qu'un système d'enseignement supérieur existât pour les amener à cette perfection.
Bref, on noircit à loisir le tableau, pour justifier le sang versé. Et l'on installe dans l'esprit des enfants une sorte de flou sur la naissance de la république DANS LE SANG.
Comme le mécanisme victimaire ne fonctionne plus, et que malgré tout la violence doit se résoudre dans le sacré, comme l'on n'a pas pu inventer une nouvelle religion, alors on va lui fabriquer un substitut, qui n'est qu'une violence supplémentaire faite à la nature humaine ; on va inventer la religion de la laïcité. Mais d'un point de vue structural, l'imposer dans l'espace public, c'est strictement la même chose qu'imposer une religion particulière. (D'ailleurs il faut noter que Louis XVI, fort sagement, avait pris des mesures très importantes pour réintroduire dans la vie publique les Protestants, et qu'il s'apprêtait à faire de même pour les Français de confession juive.) Il faut bien comprendre que l'occultation des crimes révolutionnaires va de pair avec l'instauration de la laïcité à la française. Celle-ci justifie ceux-là.
En essayant de dégager les grands traits qui sous-tendent la pensée publique actuelle, fondée sur une abstraction qui n'a jamais existé, celle d'une France régénérée par la Révolution, je n'entends pas justifier les injustices ou les disparités de conditions qui existaient réellement avant qu'elle n'éclate : je dis qu'il y avait en France suffisamment d'esprits sages et compatissants, en ce fatal XVIIIe siècle, pour introduire dans la vie publique une régulation sociale pacifiante, au lieu que depuis ce temps, et parce que l'on nous ment, en vain, sur le sort des innocents exécutés, massacrés, exilés, ou déportés (mais oui : cherchez du côté des Pontons de Rochefort, et vous trouverez), les Français ne peuvent pas trouver la concorde civile qui leur permettraient de faire face aux problèmes du temps.
Qui aura le courage de faire repentance pour tant d'injustice ? Voilà ce qui serait un nouveau départ pour une République réconciliée.
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