lundi 20 mai 2013

Des livres et des hommes

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A l'image des rencontres, il y a des lectures qui peuvent radicalement changer la perception que l'on a du monde, remettre en cause ses convictions et conduire à un profond remaniement psychique.
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Des rencontres ? J'écoutais hier soir Daniel CORDIER, l'ancien secrétaire de jean MOULIN ; 94 ans ! et une vivacité d'esprit, une fraîcheur d'âme qui forcent l'admiration. Daniel CORDIER, camelot du Roi, royaliste engagé, s'embarque le 21 juin 1940 sur un bateau belge en partance pour l'Angleterre et il y rejoint le général DE GAULLE. Il vient d'avoir 17 ans. Hier, dans l'émission de Michel DRUCKER, Vivement dimanche, il raconte avec infiniment de pudeur sa première rencontre avec Jean MOULIN. Et il explique que d'antisémite qu'il était, lui qui voulait, encore à LONDRES, que l'on fusillât Léon BLUM, s'est soudain trouvé envahi de honte en voyant à PARIS - il était retourné en France - un vieillard et un enfant assis sur un banc, portant l'étoile jaune. Il n'en avait jamais vu puisqu'il résidait en zone libre. Il nous dit, avec ses beaux yeux clairs, embués de quelques larmes discrètes, que cet antisémitisme est le seul regret, la seule honte, qu'il garde de sa vie passée. Notons deux choses : (a) contrairement aux mensonges d'état, nombre de Français de droite ont - bien avant les communistes qui en 1940, en vertu du pacte germano-soviétique - étaient les alliés de HITLER, se sont sentis trahis et se sont révoltés contre la lâcheté des responsables politiques de l'époque, PETAIN en tête ; d'ESTIENNE d'ORVES, l'un des premiers résistants fusillés par les allemands, le 29 août 1941 (alors que les allemands viennent d'attaquer la Russie le 22 juin). D'ESTIENNE d'ORVES appartenait à une vieille famille aristocratique de Provence, il était catholique et il était royaliste ; (b) Daniel CORDIER avoue que jamais il n'aurait rallié Londres, s'il n'avait pas trouvé dans la doctrine du nationalisme intégral de MAURRAS, des raisons de continuer la lutte contre l'occupant.
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La rencontre de Daniel CORDIER avec Jean MOULIN va le pousser à abandonner peu à peu ses opinions royalistes et il optera pour un socialisme humaniste. Voilà deux rencontres, deux inconnus sur un banc, un homme ferme et remarquable et une vie qui bascule vers la résistance et la compassion. Des encontres, une rencontre...
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Des lectures ? Je vais vous confesser que c'est la lecture de l'œuvre remarquable de René GIRARD, Des choses cachées depuis la fondation du monde qui m'a convaincu, il y a maintenant 16 ans, que JÉSUS était un maître de vérité, un maître en humanité, et que je ne pouvais me dérober à sa lumière, sans être profondément infidèle à ce que me disait mon cœur.  Mais jusqu'à un très récent passé (quelques jours), j'avais tendance à voir dans son enseignement une leçon sur le bien et le mal. A vrai dire, je voyais bien que JÉSUS n'a jamais fait de leçon de morale. Et trop souvent, dans mes billets, j'ai fait allusion à cette dualité desséchante, culpabilisante. Je le regrette très profondément. En vérité, c'est la loi sur le mariage homosexuel et la lecture d'un livre décapant qui me font prendre conscience de la nature réelle de la révolte qui anime tant de Français devant cette loi. Dans le livre auquel je fais allusion, et que l'on doit à Éric EDELMANN (Jésus parlait araméen. Enquête sur le message initial des Évangiles. Éditions Le Relié, Paris, 2012), il est dit ceci : (je vous prie d'excuser la relative longueur de ce billet) :
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"[...]. Le mot araméen khtahayn, rendu par 'péché', signifie exactement 'erreur' au sens du mot familier ratage. Autrement dit, si le point précis est raté, on passe à côté du but, de la vérité. C'est ce que souligne dans un tout autre univers culturel ce texte du CH'AN, en Chine : S'en éloigne-t-on de l'épaisseur d'un cheveu, c'est comme un gouffre profond qui sépare le ciel de la terre. Les conséquences qui en résultent sont donc d'une particulière gravité parce que, la cible étant manquée, la pensée se déploie dans une fausse direction et ne fait qu'amplifier la distorsion par rapport à la vérité." (j'aime que l'on cite des maximes tirées de la très profonde sagesse chinois, je ne peux pas le cacher.)
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EDELMANN poursuit, quelques lignes plus loin : "Le péché est bien une faute, mais dans un sens identique à celui d'une faute d'orthographe ou d'une erreur dans un calcul arithmétique. Il s'agit donc d'une erreur objective, d'un manquement à ce qui est juste. En grec, hamartia (que l'on traduit par péché, NDT) signifie erreur, hamartanô, manquer le but, et c'est principalement dans ce sens qu'il est utilisé dans le Nouveau Testament puisqu'on le retrouve - ou avec des termes de la même racine hamart - deux cent-quatre-seize fois alors que adika dans le sens d'iniquité qui relève de la terminologie juridique, est employé vingt-deux fois et parabasis, la transgression d'ordonnance divine, quatorze fois".
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L'opposition de nombreux Français à la loi TAUBIRA n'est pas de nature politique comme nombre d'imbéciles se plaisent à le dire, surtout à gauche, elle n'est pas davantage morale, elle est dans le refus de l'erreur sur l'homme, sa nature, sa destinée dont témoigne cette loi. EDELMANN poursuit et ceci est capital : "L'erreur, le fait d'être dans la non-vérité, est quelque chose d'intime, de personnel à chacun, et même si l'erreur se produit à tout moment et en tous - ce qui rend le phénomène quasi universel -, cela ne veut pas dire que l'affranchissement est global et collectif."
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Notre résistance, à l'image de celle de Daniel CORDIER contre le nazisme, n'est qu'une lutte pour la vérité. Le Président de la République (notez que pour la première fois j'utilise ce terme dans mes billets pour désigner monsieur HOLLANDE, car c'est tout simplement la vérité factuelle, et désormais je l'utiliserai, sauf dans des billets d'humeur où j'utiliserai des sobriquets déjà connus) devrait au moins reconnaître l'objection de conscience, à quoi du reste, les opposants à la loi appellent tous les maires de France, au moins ceux qui ont signé le manifeste contre son élaboration.
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Tous à PARIS le 26 mai. Non à l'erreur ! Oui à la lumière ! Oui à la vérité !
Prière pour notre patrie, et pour les responsables politiques.
Non violence.
Bienveillance vigilante !
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2 commentaires:

tippel a dit…

Écrire « la lâcheté des responsables politiques de l'époque, PETAIN en tête » n’est pas juste, le Maréchal a peut être fait des erreurs dans le contexte particulier de la terrible débâcle de l’armée française et de l’occupation qui a suivi, ne peut me convaincre qu’il fut un lâche. Ces affirmations sont parmi d’autres, des propos du parti communiste, dont je ne partage pas les allégations partiales de l’histoire de l’occupation.

Philippe POINDRON a dit…

Non, Tippel, Pétain a eu tort. Un maréchal de France ne serre pas la main d'un tyran. Certes, il a été porté au pouvoir par une chambre de gauche, et lui-même penchait plutôt de ce côté-là. Mais il était âgé, à peine lucide à certain moment de la journée. Quant aux communistes, n'en parlons pas. Ils ont collaboré avec les nazis, pendant les premiers mois de la guerre, en raison du pacte germano-soviétique. J'ai fait, il y deux ou trois ans, un petit billet là-dessus. Mais nous avons la mémoire historique courte...