Dans ce premier billet, je désire vous raconter le plus objectivement la première partie de la veillée organisée hier soir à 21 h 30, place bâillonnée, je veux dire place de l'Hôtel de Ville. Je m'expliquerai dans quelques lignes sur ces modifications de l'onomastique parisienne.
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Nous arrivons sur place (ou presque, voir ci-après), Antoine, ses deux fils Charles et Matthieu et moi-même à 21 h 40. Il nous a fallu descendre à la station Châtelet, car la Préfecture de police a fait fermer les bouches de métro de la station Hôtel de Ville et nous n'aurions donc pu sortir par ces issues. Lorsque nous arrivons, nous voyons une très longue file de Veilleurs, rue de Rivoli, attendant sagement d'accéder, d'une manière ou d'une autre, sur la place de l'Hôtel de Ville, dont l'accès a été interdit. De l'autre côté une centaine d'opposants aux Veilleurs, des "antifas" agitent des drapeaux arc-en-ciel et profèrent des injures dont je ne saurais vous dire le contenu car nous n'arrivons pas à les entendre dans ce vacarme antifasciste (pour autant que j'ai pu en juger, ces antifas sont des jeunes) . Il fait un contraste énorme avec le calme du millier de personnes attendant que commence notre soirée. Finalement, encadrés par des gendarmes fort courtois, nous parvenons, après un petite détour via la rue de la Coutellerie, aux abords de la place de l'Hôtel de Ville, par l'Avenue Victoria. Impossible d'avancer. Des gendarmes forment un cordon infranchissable. Reculant de quelques mètres, ils nous laissent déposer nos banderoles au ras du terre plein bordé de grilles métalliques de protection. Puis, se relayant sans interruption, des gendarmes forment des groupes de deux ou trois, postés à intervalles à une quinzaine de mètres derrière les grilles. Le rassemblement est alors entièrement entouré par des gendarmes sur les côtés et par derrière. Et qui voudrait partir, sans doute, ne le pourrait (mais je n'ai pas vérifié ce point à ce moment-là). Première atteinte à liberté physique.
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Commence la veillée. Une intervention inaugurale nous indique que la place de l'Hôtel de Ville nous est interdite au motif, tenez-vous bien, que c'est un espace privatif qui appartient à la Mairie. Ce qui est un mensonge, comme le souligne avec force la jeune femme qui nous explique le fait (je n'ai pas retenu son prénom). Est-ce monsieur DELANOE, est-ce le Préfet de Police qui interdit aux citoyens français l'accès à un espace en vérité public, un espace qui honore la Maison Commune, un véritable agora ? Nous le savons pas. Mais c'est bien évidemment une première entorse à la démocratie et une grave atteinte à notre liberté. Cette place n'est pas celle de l'Hôtel de Ville, c'est la place bâillonnée. Et Gauthier, mi grave, mi humoristique, nous fait remarquer que seuls les termes Egalité et Fraternité sont bien éclairés au fronton du corps central du bâtiment, tandis que celui de Liberté (à gauche) reste invisible, plongé dans des ténèbres symboliques. Lecture de textes : SARTRE, VOLTAIRE, ORWELL, SAINT-EXUPERY, ARENDT, intervention de XAVIER sur les trois libertés : physique, morale et spirituelle (remarquable exposé), d'un autre philosophe qui développe ce thème de la liberté et de la responsabilité. Musique (cornemuse d'Eric en introduction, chant superbe de BASILE et CHLOE sur la maternité et la paternité, Summertimes de GERSCHWINN chanté par MARJOLAINE accompagné à la guitare par un musicien dont j'ai oublié le prénom). Témoignage d'une jeune fille qui rentre de NEW YORK et nous résume la stupéfaction de nombre de diplomates étrangers devant les événements qui se déroulent chez nous. Témoignage ahurissant du comportement de certains policiers du Commissariat de la Rue de l'Evangile au soir du 26 juin, rappel de nos droits en cas d'embarquement, par un avocat membre du collectif des 14 avocats des veilleurs. Bref, un ensemble d'une richesse et d'une densité incroyables.
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Une veilleuse, fort gentiment fait distribuer au premier rang des bonbons. J'avais en arrivant remis des textes à Gauthier et Madeleine. Ils serviront tout à l'heure dans un tout autre contexte que celui de la place bâillonnée. Et puis vers 1 heure du matin, une consigne de déplacement nous est donnée ; elle circule de bouche à oreille de façon que les forces de l'ordre ne puissent savoir où nous allons. Nous nous levons et nous apprêtons à partir. Comme les deux côtés de la chaussée qui mène du quai de bord de Seine à la rue de Rivoli, nous n'avons qu'une issue, le boulevard Victoria. A notre surprise, elle est entièrement barrée. La chaussée est littéralement recouverte de fourgons de gendarmerie, placés parallèlement au grand axe, et, placé devant, un cordon serré de gendarmes, qui nous paraissent bien gênés. Nous piétinons pendant une dizaine de minutes, jusqu'à ce qu'un commissaire, le même qui si paternellement nous avait dit mercredi dernier que nous ne respections point la loi, nous autorise à quitter cette nasse, par groupe de 25. Le point de ralliement est l'Elysée. Les médias bien pensants ne vous raconteront pas ce qui s'est passé ce soir-là autour de l'Elysée, lieu de ralliement des Veilleurs qui allaient rejoindre les Veilleurs debout. Je vais vous donner mon témoignage dans un deuxième billet. Je crois que nos concitoyens ne mesurent pas la gravité des faits qui sont en train de ternir la démocratie, la justice et l'ordre légal.
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