dimanche 27 mai 2012

Jaurès me déçoit

Le Président de la République avait l'intention de faire inscrire dans la Constitution une mesure qui aurait abouti à supprimer en Alsace-Lorraine le droit local, et notamment le régime des cultes reconnus. Jean-Philippe MAURER, député alsacien, avait envoyé à monsieur HOLLANDE alors candidat, une lettre ouverte dont j'ai donné ici même copie. Il semble que l'on ne parle plus trop de cette proposition imbécile.

J'ai quand même cherché les raisons d'un tel acharnement. Et je me demande si l'ombre de JAURES ne plane pas au-dessus des responsables socialistes contemporains. Dans un livre excellent, Histoire de l'anticléricalisme français, Alec MELLOR (Éditions Henri Veyrier, Paris, 1979), je trouve - et j'en suis atterré - les paroles d'un JAURES que je croyais plus ouvert et qui révèlent le fondement même de la pensée socialiste :

"Que l'on ne m'objecte pas que tous les socialistes militants font profession d'irréligion absolue, qu'ils combattent non seulement le Christianisme, non seulement le spiritualisme mais l'idéalisme lui-même. Je le sais bien, mais il y a un immense malentendu que l'on peut résumer d'un mot : le socialisme est à l'état de combat, et toutes ses doctrines, même philosophiques sont des doctrines de combat... Ce que le socialisme combat, surtout dans le Christianisme dogmatique et le spiritualisme officiel, c'est la force donnée par eux aux partis rétrogrades et conservateurs. Il n'a pas le loisir de démêler dans le Christianisme ce qui est principe de tyrannie et de mort, ce qui est principe de liberté et de vie... Le Christianisme de la société actuelle n'est qu'une organisation théocratique au service de l'iniquité sociale, et il s'agit avant tout de le renverser.
Quant au christianisme flottant des dilettantes mystiques, des Renan et des Vogüe, il est aussi dangereux que l'âpre Catholicisme, car il énerve les esprits et il détrempe (sic) les courages dans une sorte de brouillard de religiosité." 'Ecrits posthumes et inédits de JAURES, publiés par Michel LAUNAY, dans son Histoire socialiste de la Révolution française.
 Pourtant, JAURES, du moins je le croyais, avait écrit des choses admirables sur Jésus. C'était pour mieux enfariner les âmes soucieuses de s'occuper des pauvres. Le fond de sa pensée, c'est bien ce texte qu'il produisit au plus fort des querelles sur la séparation de l'Église et de l'État.
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Je ferai ici deux remarques :
(a) Le jour où je verrai monsieur Pierre BERGE visiter nos amis de TIBERIADE, monsieur FABIUS héberger chez lui des étrangers, monsieur SAPIN donner régulièrement sa dîme aux oeuvres qui s'occupent des "plus démunis" comme le disent pudiquement les tenants du "politiquement corrects", le jour où le ministre de la santé ira visiter tous les soirs des malades à l'hôpital, celui de la solidarité déménager les cartons des banques alimentaires et distribuer de la nourriture à ceux qui ont faim (que ce soit au Resto du coeur ou aux cercles de saint Vincent de Paul), ce jour-là je croirai à la bonne foi des prédicateurs de gauche. Je constate que la charité active et discrète est le fait SURTOUT (pas exclusivement ; je n'aurai garde d'omettre, par exemple, le Secours Populaire, qui me semble bien isolé dans ses initiatives) de chrétiens discrets (catholiques et protestants), issus de tous les horizons sociaux de la population, pour qui l'agir est la marque du croire.
(b) Je rappelerai aussi ce que le pape Léon XIII disait dans son Encyclique Rerum novarum en 1891 : "Que le riche et le patron se souviennent qu'exploiter la pauvreté et la misère et spéculer sur l'indigence sont choses que réprouvent également les lois divines et humaines." Comme quoi on n'avait pas attendu JAURES pour condamner l'iniquité sociale.

Oui, ils croient qu'ils ont le monopole du coeur, et il exerce la charité avec l'argent des autres. Voilà qui est dépouvu de toute valeur morale.

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