mercredi 30 novembre 2011

Quand les médias manipulent

-
Je suis parfaitement scandalisé de la manière dont la proposition des jeunes UMP a été présentée hier par une "journaliste" de BFMTV, enfin quelqu'un qui se prétend journaliste. La question n'est pas de savoir si l'on est d'accord ou non avec la proposition de rabaisser à 12 ans l'âge auquel un jeune peut être condamné, la question est de présenter cette proposition avec probité. Je ne connais pas le nom de la "journaliste", mais enfin elle s'est bornée à reprendre quelques uns des termes du communiqué des jeunes UMP, sur un fond visuel censé avoir été filmé à leur réunion. A aucun moment, elle n'a donné la parole à l'un des responsables de ce mouvement, après quoi elle a fait semblant d'équilibrer la présentation du problème en donnant la parole à un juge pour enfant du Tribunal de BOBIGNY, monsieur Jean-Pierre ROSENCZVEIG. Les questions qu'elle lui posait contenaient les réponses, et le magistrat n'avait qu'à enfoncer la proposition par des critiques et des remarques (qui n'étaient pas toutes inintéressantes du reste) de nature strictement juridique. Il en rajouté, a crié à la régression, à l'antigaullisme. A aucun moment, il n'a évoqué l'idée  juste qu'un jeune de 12 ans a le devoir de réparer les torts qu'il a causé à autrui et qu'aujourd'hui cette réparation n'est pas assurée.
-
En fait, j'avais déjà été frappé par l'apparente insensibilité de ce magistrat, à qui un journal gratuit (est-ce Direct matin ? Je ne sais plus) avait donné la parole à propos du traitement médiatique du meurtre de la jeune Agnès, et du suivi judiciaire de son meurtrier présumé, le jeune MATTHIEU. Pas un mot pour la famille, pas la plus petite remise en question du fonctionnement de la justice, pas le moindre indice d'une quelconque interrogation sur la qualité de ce fonctionnement. Et, dans l'interview donnée à BFMTV, la sempiternelle revendication quantitative en matière de personnel, d'éducateurs spécialisés,  et que sais-je encore. C'est toujours la faute des autres, jamais celle des jeunes justiciables.
-
Alors deux conseils. Le juge pour enfant devrait lire les ouvrages de Jean-Marie PETITCLERC, ce prêtre polytechnicien de formation, qui a consacré sa vie aux jeunes du Val d'Argent à Argenteuil. Peut-être que cela lui donnerait une autre vue sur la différence qu'il y a entre sanctionner (proposition des jeunes de l'UMP) et punir. S'il n'a pas le temps de lire ces contributions essentielles, qu'il jette un petit coup d'oeil sur le billet que j'ai consacré à cet éducateur de rue sous le titre "sanctionner ou punir"
-
Et un petit rappel des cinq dangers de la Presse "pressée" que BENOÎT XVI a identifié dans un message destiné aux médias à l'occasion du 150e anniversaire de l'Osservatore romano :
La banalisation (on banalise les délits des jeunes).
L'immédiateté (on réagit à chaud sans lire, analyser, comparer).
Le piquant (on parlera par exemple de "mesurettes" pour qualifier les propositions mentionnées plus haut).
L'approximation (on extrait d'un ensemble, des faits ou des propositions qui sont décontextualisés).
Les préjugés (ça vient de l'UMP, ça vient du Président SARKOZY, "c'est pas bon").
La présentation de la journaliste de BFMTV est dotée des cinq caractéristiques d'une communication manipulatrice. Mais la journaliste a un bel avenir dans les médias français. Nous savons maintenant dans quelle direction penche le coeur de cette chaîne.
-
C'est tout pour aujourd'hui

mardi 29 novembre 2011

Quartiers sensibles

-
Il y a quelques jours je vous parlais du livre de Sylvain TESSON et de son opinion sur l'écologie. Voici un autre passage de ce livre, un passage qui mérite d'être médité et qui a trait à l'expérience de l'ermite volontaire du lac BAÏKAL, dans les quartiers sensibles de nos grandes villes.
-
Je me souviens de mes interventions dans les quartiers sensibles (adjectif dont on affuble les endroits où règne un certain parfum de brutalité). Les petits gamins étaient très énergiques et me faisaient le plaisir de s’intéresser à ce que je racontais mais se moquait de mon accoutrement, raillaient ma manière de parler. Je retenais de ces rencontres qu’ils accordaient un prix immense à la reconnaissance vestimentaire, cultivaient l’esprit de quartier et le conformisme comportemental, aimaient les objets coûteux, développaient un souci maladif de l’apparence, croyaient à la loi des forts, ne nourrissaient pas beaucoup de curiosité pour l’autre et possédaient leurs codes de langage : les signes distinctifs de l’esprit bourgeois
-
Je trouve assez pertinent ces remarques. Les petits gamins de ces quartiers, sans doute, se récrieraient. Ils auraient tort. Et ce ne sont pas les événements violents qui agitent MARSEILLE et sa région qui sont de nature à me faire changer d'avis.
-

lundi 28 novembre 2011

Une contribution intéressante sur la sortie du nucléaire

-
Un ami alsacien m'envoie ce texte dû à un Sénateur honoraire sur le nucléaire et ses enjeux. Il est long. Mais il mérite d'être lu dans son entier. Je ne ferai aucun commentaire. Le texte est équilibré et bémolise des propos qui pourraient ne pas être objectifs. Il est factuel et se borne à exposer des données chiffrées pour éclairer nos choix.
-
Après la décision de l'Allemagne de sortir définitivement du nucléaire d'ici 2022, la banque d'investissement allemande KFW a estimé, le 19 septembre, à 250 milliards d'euros au total les investissements nécessaires en Allemagne d'ici 2020 pour sortir du nucléaire et financer les énergies renouvelables.
-
Mais si la France décidait elle aussi de sortir du nucléaire, combien cela coûterait-il ? Sur cette question capitale qui est devenue l'un des enjeux politiques majeurs des prochaines présidentielles, il existe peu d'études rigoureuses et objectives récentes et les chiffres avancés varient bien entendu considérablement en fonction des acteurs interrogés.
-
Le patron d'EDF, Henri Proglio, a par exemple affirmé le 9 novembre qu'abandonner le nucléaire "menacerait 400.000 emplois directs et indirects de la filière nucléaire et 500.000 emplois dans les entreprises actuellement localisées en France, qui risqueraient de partir à l'étranger." Selon lui, un million d'emplois seraient menacés et le coût pour le pays serait d'au moins 0,5 point de PIB. Dans le scénario d'un remplacement du parc nucléaire français par une production constituée pour moitié d'énergies renouvelables et pour moitié de centrales au gaz, il estime que les prix seraient multipliés par deux et que 400 milliards d'euros seraient nécessaires pour substituer les énergies propres au nucléaire et adapter le réseau à cette mutation énergétique.
-
On peut bien sûr rétorquer que les hypothèses de Monsieur Proglio manquent d'objectivité mais il n'en demeure pas moins qu'une sortie du nucléaire aurait un coût très important et, qu'en s'appuyant sur les données disponibles et publiées dans différents rapports officiels, on peut essayer de l'évaluer.
-
Avec 62 600 MW de puissance nucléaire installée, la France représente à elle seule 17 % de la puissance nucléaire mondiale. Le parc nucléaire français, le deuxième au monde, compte 58 réacteurs répartis sur 19 sites. Avec environ 410 TWh par an, la production d'électricité nucléaire représente les trois quarts de la production totale d'électricité française et 80 % de notre consommation brute d'électricité.
-
En supposant, par souci de simplification des calculs, que notre consommation électrique puisse être stabilisée à son niveau actuel et que la part de l'électricité thermique et hydraulique reste constante, pourrions-nous remplacer notre production électrique nucléaire actuelle par des sources d'énergies renouvelables ?
-
Imaginons que, d'ici 2040, on veuille remplacer notre électricité nucléaire pour moitié par de l'énergie solaire et pour moitié par de l'éolien (un quart avec de l'éolien terrestre et trois quarts avec de l'éolien marin). Dans cette hypothèse, il faudrait, en se basant sur les rendements moyens actuels de production de ces énergies, installer au moins 2000 km2 de panneaux solaires, plus de 3 400 éoliennes terrestres géantes (115 par an) et 8 400 éoliennes marines (280 par an). Une telle montée en charge des énergies renouvelables représenterait au moins 100 milliards d'euros d'investissement.
-
A ces sommes, il faudrait encore ajouter la construction probable d'une quinzaine de centrales thermiques supplémentaires de 400 MW (soit un investissement de 5 à 10 milliards d'euros), pour pallier, dans tous les cas de figure, les inévitables fluctuations de la production d'électricité solaire et éolienne (ces énergies étant par nature diffuses, intermittentes et irrégulières). Il faudrait encore financer l'adaptation complète de notre réseau (environ 5 milliards d'euros) et sa transformation "en grille" avec des compteurs intelligents et des moyens massifs de stockage de l'électricité (air comprimé, hydrogène, gaz, sels fondus). Il faut enfin ajouter le coût considérable du démantèlement de nos centrales nucléaires, de l'ordre de 26 milliards d'euros (450 millions d'euros par réacteur selon les dernières estimations).
-
En supposant même que nous puissions réussir à stabiliser notre consommation globale d'énergie au niveau actuel, ce qui serait déjà très difficile, une telle transition énergétique serait donc longue, très coûteuse et très complexe à mettre en œuvre : un ordre de grandeur d'au moins 150 milliards d'euros semble réaliste. Encore faut-il préciser que cette estimation a minima ne prend pas en compte le coût de reconversion des 125 000 emplois directs (4 % de l'emploi industriel) et 410.000 emplois au total (directs et indirects) et de l'impact économique sur ce secteur industriel stratégique : 12,3 milliards d'euros de valeur ajoutée, soit 0,71 % de la contribution au PIB.
-
Elle n'intègre pas non plus le gain économique et environnemental considérable que représentent les 380 millions de tonnes de CO2 évitées par an (l'équivalent des émissions réelles annuelles de la France), grâce à notre production d'électricité nucléaire. Si l'on retient comme "valeur-carbone", sur le marché européen d'échange de quota, l'hypothèse défendue par Christian De Perthuis (100 € la tonne de CO2 en 2030), c'est donc au moins 38 milliards d'euros que la France devrait débourser en 2040 si elle devait se passer du nucléaire à cette date pour produire son électricité, sauf si elle parvenait à produire en 30 ans plus de 400 TWh d'électricité en émettant aussi peu de CO2 qu'avec le nucléaire, ce qui semble, sans rupture technologique majeure, un objectif très difficile à atteindre.
-
Il faut en effet rappeler que, comparée à d’autres pays développés, la France émet moins de CO2 grâce à son énergie électrique produite à 90 % avec des technologies non émettrices de CO2 : énergie nucléaire (entre 75 % et 78 %) et énergie hydroélectrique (entre 11 et 13 %). En 2010, un Français émettait en moyenne 6,1 tonnes de CO2 par an, contre 10,5 tonnes pour un Allemand et 8 tonnes pour un Européen (moyenne par habitant des 27 pays de l'UE). Rappelons le : grâce au nucléaire, un Français émet 40 % de CO2 en moins qu'un Allemand, soit une différence de plus de 4 tonnes de CO2 par habitant et par an de part et d'autre du Rhin !
-
Il est vrai que la production d’un kWh entraîne en France l’émission de seulement 80 grammes de CO2, contre 620 g aux Pays Bas, 670 g en Allemagne, 870 g au Danemark ! Si nous voulions sortir du nucléaire en maintenant notre consommation électrique à son niveau actuel et en continuant à diminuer nos émissions de CO2 pour lutter contre le réchauffement climatique, nous devrions, non seulement développer de manière massive les énergies renouvelables, mais également généraliser l'installation dans les centrales thermiques de systèmes de capture et de séquestration de carbone et accélérer la mise aux normes énergétiques très coûteuse de l'ensemble des bâtiments et logements.
-
Au total, si l'on prend en compte l'ensemble des coûts économiques, sociaux et environnementaux d'une sortie du nucléaire, la facture totale serait en tout état de cause de plusieurs centaines de milliards d'euros. Cette sortie du nucléaire, même étalée sur 30 ans, aurait pour notre pays un coût global direct et indirect très important qui se traduirait inévitablement par une hausse de nos émissions de CO2 (alors qu'elles ont fortement diminué depuis 1990) et une augmentation sensible du prix de l'électricité pour les entreprises et les ménages, même si l'ampleur de cette augmentation fait l'objet d'âpres débats entre spécialistes et varie en fonction des hypothèses énergétiques retenues.
-
Or, toutes les enquêtes d'opinion récentes montrent que, si une majorité de Français semble plutôt favorable à une sortie progressive du nucléaire sur une longue période, nos concitoyens refusent à 72 % de payer plus cher leur facture d'énergie pour sortir du nucléaire ! Il y a là un paradoxe français redoutable dont il faut absolument sortir.
-
La question de la sortie du nucléaire est donc une question politique qui relève d'un choix démocratique majeur. Cette question peut être formulée ainsi : quand nous aurons estimé, en nous appuyant sur les scénarios les plus probables et les plus objectifs possibles, le coût réel global de sortie du nucléaire et son impact inévitable sur le prix de l'énergie, serons-nous prêts à assumer toutes les conséquences de ce choix et à payer en outre sensiblement plus cher notre énergie en échange de la suppression d'un risque certes réel mais d'une faible probabilité de survenue dans notre pays, compte tenu du très haut niveau de sûreté de nos installations et de la spécificité géographique et climatique de la France ?
-
Certains écologistes lucides et non des moindres, comme Patrick Moore, ex-dirigeant et fondateur de Greenpeace, ont changé de position sur le nucléaire et admettent l'idée que le recours au nucléaire, comme énergie de transition, est inévitable, avec des normes de sûreté accrues, pour les décennies à venir, si nous considérons que la priorité absolue de l'humanité est de limiter le réchauffement climatique en réduisant drastiquement ses émissions de CO2.
-
Le mouvement écologiste n'échappera pas à ce débat et devra évoluer sur la question du nucléaire qui constitue avec les autres grands leviers définis par Solow (économie d'énergie, amélioration de l'efficacité énergétique, lutte contre la déforestation, réorientation de l'agriculture, capture du CO2 et développement des énergies renouvelables) un moyen de production massif d'énergie non carbonée que nous ne pouvons pas nous permettre de refuser, face à l'immense péril du réchauffement que de nouvelles observations et études scientifiques confirment chaque jour.
-
Les réponses paradoxales de nos concitoyens, qui souhaitent majoritairement, après le traumatisme de Fukushima, sortir du nucléaire mais refusent totalement de prendre en charge le coût de cette sortie, montrent bien à quel point il est nécessaire d'ouvrir un vrai et long débat démocratique pour ne pas céder aux visions réductrices et idéologiques qui polluent et dominent ce débat et éclairer sereinement ses enjeux économiques, sociaux et politiques, complexes mais décisifs pour notre avenir.

René TRÉGOUËT
Sénateur Honoraire
Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

dimanche 27 novembre 2011

La démocratie est bien malade

-
Un parti qui  représente environ 7 % des électeurs n'aura aucun mal à trouver les 500 signatures requises pour valider la candidature de son champion aux élections présidentielles ; un parti qui recueille entre 18 et 20 % des voix peine à trouver chez les élus les dites signatures. C'est ce qu'on appelle la démocratie.
-
Je n'ai de sympathie ni pour les écologistes ni pour le Front National. J'ai dit ailleurs que ces partis présentent dans leurs programmes des propositions qui me paraissent utiles ou bonnes. Il est donc tout à fait normal que madame Eva JOLY puisse se présenter. Mais je trouve scandaleux que Marine LE PEN ait du mal à recueillir ces signatures et que les ténors de la politique, sous le prétexte qu'il faut éviter les candidatures farfelues à l'élection présidentielle, aient porté de 100 à 500 le nombre de signatures d'élus pour valider la candidature d'un citoyen français, en l'assortissant de la publication de l'identité de ces soutiens. En démocratie, tout citoyen doit avoir le droit de se présenter à cette élection, sans aucune barrière. Toutes les mesures dites de précautions sont des arguties pour préserver le pré-carré et les prébendes de ceux qui depuis trente ans ne cessent de nous conduire tout droit dans le mur. Bien entendu, cette liberté doit être associé la responsabilité. Les frais de campagne ne doivent pas être remboursés au candidat, et encore moins à ceux qui ont obtenu plus de voix en pourcentage que le seuil requis par la loi. Le candidat doit les payer de ses fonds personnels, ou des dons de ses partisans, ou sur les fonds du parti qu'il représente. Et je trouve curieux que les champions des "plus démunis" fassent justement pleuvoir les deniers publics (notre argent, je le redis) sur les plus gros partis, et assèchent les plus petits.
-
La vérité, c'est Simone WEIL qui l'a exprimée dans ce petit livre, ce petit bijou de réflexion dont j'ai si souvent parlé : Note sur la suppression générale des partis politiques. Elle décrit les caractères des partis. Elle en voit trois essentiels. Voici ce qu'elle dit du dernier :
-
"Quant au troisième caractère des partis, à savoir qu'ils sont des machines à fabriquer de la passion collective, il est si visible qu'il n'a pas à être établi. La passion collective est l'unique énergie dont disposent les partis pour la propagande extérieure et pour la pression exercée sur l'âme de chaque membre."
-
Feu le Président MITTERRAND excellait dans l'art d'attiser les passions collectives. En soutenant le "Touche pas à mon pote", par exemple, ou en modifiant in extremis la loi électorale pour éviter un désastre, il a fait entrer 50 députés du FN, tout en poussant les siens à taper dessus à bras raccourcis. C'est un moyen d'accéder au pouvoir, de s'y maintenir ou de s'y accrocher. je doute fort que c'en soit un de gouverner. Un excellent article sur la nécessité de l'union nationale en ces moments de crise terrifiants (car nous n'avons pas tout vu, loin de là) a paru dans Le Figaro de vendredi sur ce sujet. J'y reviendrai.
-

samedi 26 novembre 2011

L'insulte n'est pas un argument

-
Le parti socialiste et les verts ont répondu à la charge du Président de la République sur leur politique nucléaire par des injures (c'est un has been sur le nucléaire) ou des accusations (il ment, il triche, il utilise le chantage à l'emploi). Tout cela est misérable et souligne la pauvreté et la petitesse d'esprit de ces politiques qui se disent responsables et dont les jugements moraux s'adaptent à leurs désirs du moment comme une peau de boudin blanc à la farce qu'elle protège.
-
D'abord, rappelons les grands exemples. Il aura fallu que les stigmates de la maladie qui rongeait le Président MITTERRAND ne puissent plus être dissimulés pour que l'opinion publique connaisse, oh, fort peu, ce qu'il en était. Les bulletins de santé étaient faux ; la maladie était déjà installée au début du premier septennat. Pour l'avoir dit, le Dr GUBBLER a été radié de l'ordre des médecins. Mais n'est-ce pas un terrible mensonge que de dissimuler aux électeurs l'état de santé d'un responsable politique qui aspire à des fonctions requérant le maintien de toutes ses capacités physiques ? Arrêtez-moi si je me trompe. Qui a couvert de son aile protectrice l'affaire du Rainbow Warrior laquelle a coûté son portefeuille à Charles HERNU, comme s'il avait pu prendre seul une telle initiative ? Qui a organisé l'affaire des Irlandais de Vincennes. Et ce sont ces gens-là qui ne cessent de brûler de l'encens devant l'autel du défunt Président et qui vont donner des leçons ? Ne serait-ce point là une triche avérée ?
-
Quand le chemin-de-fer a commencé à se développer en France, il s'est trouvé un très grand savant - je crois que c'était ARAGO - pour mettre en garde les voyageurs contre un possible éclatement des poumons lors du passage du train dans les tunnels en raison de la surpression de l'air qu'y provoquait son passage. La crainte écolo-socialiste me rappelle un peu  ce curieux épisodes de l'histoire des chemins-de-fer.  Si les écologistes et les socialistes veulent nous convaincre de la nécessité de supprimer l'énergie nucléaire, ils doivent apporter la preuve qu'elle est, en France, effectivement dangereuse et expliquer pourquoi, et non pas invoquer des dangers innommés, et faire appel à la peur primale des origines de l'humanité. Ils doivent également présenter un plan d'investissement en équipements susceptibles de remplacer les centrales nucléaires. En évaluer le coût.  Mais si c'est pour nous enfumer avec le charbon ou le pétrole (dont le prix dépassera bientôt celui de la truffe), je préfère le doux panache de vapeur qui s'échappe des tours de refroidissement des centrales. Il faut qu'ils nous disent le prix de revient de l'énergie ainsi produite, qu'ils nous expliquent comment ils entendent évacuer les déchets nucléaires produits depuis l'ouverture des centrales, mais attention dans des conditions qui n'offusquent point l'épiderme délicat de Cécile DUFLOT ou de Dominique VOYNET. Des solutions, il y en a qui sont en cours de réalisation, mais qui n'ont pas l'heur de plaire à ces messieurs-dames. J'ajoute encore une chose. Dans la nature, rien ne se crée, rien ne se perd (le cas du surgénérateur de CREYS-MALVILLE mis à part ; il a été abandonné). Il en résulte que la radioactivité du coeur des centrales n'est pas plus importante que celle qui est dispersée dans la nature (la pechblende par exemple). Elle est tout simplement concentrée : là est le problème, le seul d'ailleurs. Et c'est là-dessus qu'il faut travailler, investir, chercher, protéger.
-
Je trouve très curieux que des gens qui se disent de progrès puissent être à ce point aussi ringards. Et je frissonne de terreur à l'idée de voir un jour des milliers, des dizaines de milliers, des centaines de milliers d'éoliennes barrer nos horizons. Bien des Don Quichotte, au lieu d'y voir de modernes moulins à vent, risquent d'y voir des géants. Ça promet.
-
Monsieur HOLLANDE est un démagogue. Son parti est un parti totalitaire. Leur projet politique est un concentré de mesures qui abaissent notre patrie, appauvrit les citoyens et engraisse les apparatchiks. Le pouvoir déploie de grandes délices aux yeux des hommes, c'est entendu ; je veux bien que ceux qui y prétendent nous mènent au bord du RUBICON, mais pas pour pécher à la ligne.
-

vendredi 25 novembre 2011

Individu, personne et libéralisme

-
L'individu est à la personne ce que l'atome est à la molécule. L'analogie est paradoxale. J'aurai l'occasion d'y revenir ce soir, car je dois partir dans quelques instants. Mais si l'on se rappelle que l'atome est la plus petite quantité de matière pouvant exister à l'état combiné, et que la molécule est la plus petite quantité de matière pourvant exister à l'état libre, on conviendra aisément qu'une personne, sujet social est toujours en relation avec l'autre et que c'est précisément cette interdépendance qui lui confère sa liberté. Un atome, son nom l'indique, est insécable, c'est un être insaisissable ou difficilement saisissable puisqu'il est toujours dissimulé dans une combinaison. Un individu est un tome qui croit qu'il existe indépendamment des autres ; il ne voit pas que cette existence d'isolé n'a aucune réalité psychologique, sociale, ou ontologique, sans parler de la réalité physique ; il est combiné à l'autre, mais il l'ignore ou veut l'ignorer, et pour cette raison il ne réalise pas qu'il ne doit sa liberté qu'à cette combinaison. Il est prisonnier et il ne le sait pas.
-
Toute la problématique du libéralisme repose sur l'opposition entre individu et personne. A ce soir pour des éclaircissements.

jeudi 24 novembre 2011

Dans les forêts de Sibérie

-
Sylvain TESSON a eu le Prix Médicis 2011 pour le livre dont le titre sert d'en-tête à mon billet. Il a des bonheurs de plume, des images insolites, un vocabulaire riche, une très vive sensibilité, des aphorismes aussi précis qu'un profil de camée. On regrette que parfois, son écriture trahisse l'effort du créateur et paraisse affectée. Mais c'est une petite critique pour une immense approbation de la manière dont il rend compte de ses six mois passés en ermite dans une cabane au bord du Lac BAÏKAL. Je recommande vivement la lecture de ce récit à tous ceux que tente l'aventure d'une vie érémitique, transitoire ou définitive, c'est selon. La frugalité de la vie d'ermite l'amène à réfléchir à ce qu'est la vie de subsistance, la vie âpre et dure qui oblige à tirer sa nourriture, son couvert et son chauffage d'une lutte incessante avec l'hostile nature. Je me permets de proposer à la réflexion  d'Eva JOLY et des fans, une petite réflexion que Sylvain TESSON fait sur l'écologie et la décroissance.
-
"Les théoriciens de l’écologie prônent la décroissance. Puisque nous ne pouvons continuer à viser une croissance infinie dans un monde aux ressources raréfiées, nous devrions ralentir nos rythmes, simplifier nos existences, revoir à la baisse nos exigences. On peut accepter ces changements de plein gré. Demain, les crises économiques nous les imposerons.


"La décroissance ne constituera jamais une option politique. Pour l’appliquer, il faudrait un despote éclairé. Quel gouverneur aurait le courage d’imposer pareille cure à sa population ? Comment convertirait-il une masse à la vertu de l’ascèse ? Convaincre des milliards de Chinois, d’Indiens, d’Européens qu’il vaut mieux lire SÉNÈQUE qu’engloutir des cheeseburgers ? L’utopie décroissante : un recours poétique pour individus désireux de se conformer aux principes de la diététique."
-
Je crois que l'écologie à la française est un luxe de riche. Il est toujours facile de prendre du bicarbonate pour digérer quand on a la panse (j'ai corrigé une erreur orthographique qui est un lapsus calami, grâce à Roparzh Hemon) bien remplie.
-

mercredi 23 novembre 2011

Libéralisme(s)

-
A plusieurs reprises, Pierre-Henri a protesté contre la condamnation que j'aurais porté contre le libéralisme. Je viens de découvrir que nous ne parlions pas toujours de la même chose. Je me suis un peu documenté sur la question, et j'ai confronté cette documentation (a) à ma propre perception ; (b) à celle des médias. Un petit résumé de la documentation puis un commentaire montreront à Pierre-Henri que nous sommes entièrement d'accord, ou presque, sur le fond.
-
Voici d'abord ce que dit Wikipédia dans son introduction à l'article "Libéralisme".
Le libéralisme est un courant de pensée de philosophie politique, né d'une opposition à l'absolutisme et au droit divin dans l’Europe des Lumières (XVIIIe siècle), qui affirme la primauté des principes de liberté et de responsabilité individuelle sur le pouvoir du souverain. Il repose sur l’idée que chaque être humain possède des droits fondamentaux qu'aucun pouvoir n'a le droit de violer. En conséquence, les libéraux veulent limiter les obligations sociales imposées par le pouvoir et plus généralement le système social au profit du libre choix de chaque individu. Le libéralisme repose sur un précepte moral qui s'oppose à l'assujettissement, d'où découlent une philosophie et une organisation de la vie en société permettant à chaque individu de jouir d'un maximum de liberté, notamment en matière économique. Pour la plupart des libéraux, la dichotomie entre « libéralisme économique » et « libéralisme politique » n'existe donc pas, puisqu'il s'agit de l'application d’une même doctrine dans des domaines différents.
-
Au sens large, le libéralisme prône une société fondée sur la liberté d'expression des individus dans le respect du droit du pluralisme et du libre échange des idées. La satisfaction et l'expression libre de l'intérêt de chacun permet une société qui valorise les meilleures adaptations. Elle doit joindre, d'une part, dans le domaine économique, l'initiative privée, la libre concurrence et son corollaire l'économie de marché, et d'autre part, dans le domaine politique, des pouvoirs politiques encadrés par la loi librement débattue, et des contre-pouvoirs. Elle valorise ainsi le mérite comme fondement de la hiérarchie. Cela suppose idéalement un État de droit où sont respectées les minorités jusqu'à la plus petite, l'individu ; l'État n'étant que le garant de ce respect et devant rendre des comptes de son action.
-
Cette position théorique implique le respect du pluralisme et une adaptation aux évolutions sociales: le libéralisme peut donc se manifester de façon fort diverse, voire opposée; le libéral peut ainsi être, selon le lieu, voire en fonction des moments, celui qui exige de l'État qu'il brise un traditionalisme religieux ou social oppresseur pour l'individu (caste, statuts, discriminations et privilèges, ...) ou qui défend la liberté de pratiquer une religion ou une tradition, il peut demander que l'État intervienne pour donner à chacun une véritable capacité d'action économique (bridée par un monopole, la pauvreté, le manque d'éducation, de crédit ou autre), ou inversement celui qui s'oppose à l'intervention du pouvoir. Les limites à fixer à l'action de l'État, ainsi que les modalités de l'action publique (notamment aux rôles respectifs de l'action administrative et de la loi), sont donc sujets à débat au sein même du libéralisme. La plupart des libéraux considèrent que l'action de l'État est nécessaire à la protection des libertés individuelles, dans le cadre de ses fonctions régaliennes, et nombre d'entre eux (comme Adam Smith, Raymond Aron, Karl Popper ou Benedetto Croce) acceptent et même recommandent certaines interventions de l'État dans l'économie, notamment en matière de contrôle et de régulation. À l'opposé, les libertariens de tendance anarcho-capitalistes refusent à l'État toute légitimité dans quelque domaine que ce soit.
-
(a) Comment je vois les choses. ? Quand Pierre-Henri défend le libéralisme, il défend finalement le libéralisme philosophique, celui qui reconnaît à la personne (et non à l'individu) des droits fondamentaux et inviolables au nombre desquels il faut reconnaître la liberté de conscience. Il en résulte qu'un régime politique qui reconnaît ces droits ne peut-être que démocratique (ce qui du reste ne préjuge pas de sa forme concrète, monarchie ou république : la Suède, monarchie constitutionnelle, est plus démocratique que la France, république à président élu). C'est le libéralisme politique lequel s'oppose à toutes les autres formes de régime politique au motif qu'il ne respecte pas ces droits (liberté d'expression et d'échange, liberté de la conscience, droit à la propriété, etc.). Et puis il y a l'application de ces principes au domaine économique. Et dans ce domaine, il y a l'excroissance monstrueuse d'un libéralisme économique qui dit respecter ces droits, mais les ignore superbement, et notamment ceux des personnes et des communautés naturelles. C'est malheureusement la forme prédominante du libéralisme économique mondiale. Oui à la liberté des échanges d'idées et de biens, non à l'injustice sociale suscitée par l'avidité d'actionnaires sans scrupules. L'erreur de raisonnement des contempteurs du libéralisme économique en général clair : ils ne voient pas que ces déviations sont les fruits vénéneux du comportement de quelques uns imposant leurs vues hégémoniques au plus grand nombre. C'est très exactement cela la domination : dissymétrie des pouvoirs, subordination obligatoire, arbitraire des décisions. Et cela, aucun être humain digne de ce beau nom ne le peut supporter.
-
(b) La malhonnêteté des médias consiste à mélanger tous les genres, à ignorer que des hommes parfaitement identifiables sont à l'origine de ces honteuses déviations, que celles-ci ne sont pas inhérentes aux systèmes mais à la nature humaine, et que toutes les autres formes d'organisation sont par essence totalitaires. En sommes, ils nous profilent pour un autre esclavage, autrement plus dangereux puisqu'il fait intervenir la coercition et la force aveugle de la force étatique : police, police secrète, tribunaux aux ordres, militaires prêts à casser du dissident ou des manifestants.
-
Je préfère bien entendu un vrai libéralisme, celui qui respecte les droits naturels de la personne humaine.
Je suis trop long. J'arrête. A demain.




mardi 22 novembre 2011

Servante des anges

-
Comme toujours dans une affaire où son mode de fonctionnement est mis en cause par l'opinion publique, la "Justice", entendons les magistrats (procureurs et juges d'instruction) se défend. Elle a bien fait son travail. Elle n'a rien à se reprocher. Il est donc possible en France, "mères des arts, des armes et des lois" selon du BELLAY, FA3 GUO2, pays de la loi selon les Chinois, d'être violée et et assassinée le plus légalement du monde, sans que la magistrature se sente concernée par les conséquences de ses décisions. La justice française est la servante des anges, et elle est donc quasiment angélique. Cette qualité tend à se diffuser auprès des malfrats, trafiquants, assassins dont elle a à connaître, et qui souvent sont traités comme des anges au bord de la repentance et prêts d'être admis dans la cohorte rousseauiste des hommes gâtés, pourris, ou détruits par la société.
-
Je vais donc répondre à CORATINE. Oui, j'ai hésité à parler de ce meurtre affreux commis par un adolescent violeur, placé d'office dans un internat, suivi semble-t-il par un psychiatre ou un psychologue et interdit de séjour dans le département où il avait commis son premier crime (j'utilise ce mot au sens juridique). Il paraît aux dires des "experts" que ce jeune homme ne présentait aucune dangerosité et qu'il était réinsérable. Le Proviseur du Lycée Cévenol prétend ne pas avoir été mis au courant des faits qui lui étaient reprochés hormis celui d'un passé judiciaire. Et il affirme que jamais il n'aurait accepté de l'accueillir s'il avait connu exactement le contenu de l'incrimination. Quant au procureur, il déclare, proclame et trompette, droit dans ses bottes - lesquelles, me semble-t-il, sont de petite pointure et de matériau léger, du coton, du feutre, peut-être - que le contrôle judiciaire imposé au jeune Matthieu était très strict. Peut-être, mais il faut admettre qu'il était insuffisant, et que les décisions prises à son égard manquaient de discernement. Méfions-nous des experts !
-
Nous sommes-là devant un mystère effroyable, un mystère où se joue la liberté qui donne à l'homme toute sa dignité. Nous sommes confrontés à la complexité de l'organisation sociale. Nous avons devant nous le corporatisme arrogant d'homme et de femmes qui n'acceptent pas d'être remis en cause et qui s'identifient à la JUSTICE, sans en saisir la contingence et l'imperfection.  Nous baignons dans l'hédonisme médiatique et consumériste. Tout est érotisé. Et la liberté dont parlent les médias n'est pas la liberté intérieure, mais celle de donner droit à tous ses désirs. Nous avons le devoir absolu de prendre en compte tous ces éléments pour tenter de comprendre l'enchaînement des causes et des effets dans ce drame : nous sommes dans l'obligation de réfléchir aux moyens à mettre en oeuvre pour changer les choses dans le bon sens. Et honnêtement, je ne crois pas qu'il y suffise d'une loi, d'une circulaire ou d'un décret !
-
Nous ne pouvons que partager la douleur des parents d'Agnès et dans le silence de notre coeur profond prier - pour ceux qui croient - le Dieu de miséricorde de les envelopper dans son manteau d'amour.
-

lundi 21 novembre 2011

Français...

-
Je poursuis avec passion la lecture des notes inédites de Gustave THIBON, notes dont j'ai parlé il y a quelques jours. Voici un constat qui ma paraît d'une actualité brûlante, et ce n'est pas la vue des hordes déferlant hier soir sur le Parc des Princes pour voir un match entre le PSG et je ne sais plus quelle équipe qui me fera dire le contraire.
-
"Mépris du Français à l'égard de tout ce qui est collectif : il souille les jardins publics, les wagons, etc. Il ne respecte que les biens privés, les siens par intérêt personnel, et ceux d'autrui par honnêteté ou délicatesse*. Aucune honnêteté ou délicatesse pour la chose publique ! Et c'est peut-être pour cela que le pouvoir de tous - la démocratie - est souillée en France comme une allée de jardin public après une nuite de fête."
* Sur ce point, je suis moins assuré que Gustave THIBON de la délicatesse des Français...
-
Voilà sur quel esprit public doivent s'appuyer les hommes politiques. J'en vois très peu qui soient conscient du problème. La plupart se contentent de sauter comme des cabris sur leur chaise en chantant la démocratie avec des sanglots trémolisés dans la voix mais aucun d'eux n'avance de solution pour faire aimer la chose publique, l'espace public, le bien de tous, par chacun de leur concitioyen. Sans doute faudrait-il voir ce qui cloche du côté de l'Education Nationale.
-
Bonne journée.

dimanche 20 novembre 2011

Une histoire d'éléphants

-
Aurais-je voulu l'inventer que jamais je n'aurais pu y arriver. Dans le livre qu'il a intitulé Une nouvelle conscience pour un monde en crise (Les Liens qui libèrent, Paris, 2011), Jeremy RIFKIN rapporte cette histoire d'éléphants.
-
"[…]. Il y a plusieurs années, dans une réserve d’Afrique du Sud, des zoologistes ont constaté un étrange changement de comportement chez les éléphants adolescents. Ils s’étaient mis à défier les rhinocéros et d’autres animaux, et même à les tuer : c’était du jamais vu. Leur curieuse conduite laissaient perplexes les scientifiques, qui n’arrivaient pas à trouver d’explication satisfaisante. Puis l’un des zoologistes s’est souvenu que, quelques années plus tôt, pour éviter le surpeuplement, on avait abattu tous les vieux éléphants mâles. Peut-être y avait-il un lien – mais les scientifiques se demandaient bien lequel. Néanmoins, ils ont réintroduit deux adultes mâles dans la réserve et, en quelques semaines seulement, les éléphants adolescents avaient cessé de manifester ce comportement, qui était en fait antisocial, et commençaient à s’aligner sur celui des mâles plus âgés. Ce qu’ont observé à cette occasion les zoologistes, c’est que les jeunes éléphants apprennent de leurs aînés, exactement comme les enfants humains, et que, lorsque les modèles sont absents, ils n’ont aucun guide pour leur enseigner le comportement social convenable."
-
Je vous jure que cette histoire est authentique. Et je me demande si nous ne vivons pas une histoire analogue au PS. Après qu'on a tué de diverses façons les vieux éléphants mâles, Lionel JOSPIN, Laurent FABIUS, Pierre MAUROIS, Michel ROCARD, Dominique STRAUSS-KAHN par exemple, quelques éléphants adolescents, Manuel VALLS, Arnaud MONTEBOURG se sont mis à ruer dans les brancards et ont commencé à vouloir démolir d'autres éléphants, Alexandre GUERINI, les députés de plus de 72 ans, et les éléphants archaïques qui avaient survécu au massacre purificateur, jusqu'à ce que la réintroduction d'éléphants mâles adultes, François HOLLANDE, Pierre MOSCOVICI, Michel SAPIN, viennent remettre un peu d'ordre dans le troupeau, au détriment des éléphantes du reste, Martine AUBRY, Ségolène ROYAL. La nature est un livre dont il suffit de tourner les pages pour tirer les enseignements les plus pointus. L'UMP a fait un peu plus de place aux éléphants adolescents. Je crains qu'ils n'aient appris de leurs aînés un comportement social convenable qui leur fait plier la trompe au moindre coup de défense des vieux adultes.
-

samedi 19 novembre 2011

Paris vaut bien une messe...

-
... et l'Elysée un honteux compromis.
-
Monsieur HOLLANDE, en effet, vient de passer avec les Écologistes un accord parfaitement honteux. Il a troqué l'indépendance énergétique de sa patrie et l'avance prise par elle en matière d'industrie nucléaire, contre un soutien électoral du parti écologiste. Moyennant quoi, il cède à ses partenaires une soixantaine de circonscriptions électorales où ces amis de rencontre pourront présenter des candidats ayant des chances d'être élus. Monsieur DELANOE, qui n'a pas été consulté, s'étrangle de stupéfaction et parle de tripatouillage à l'annonce de la candidature de Cécile DUFLOT à Paris. Madame AUBRY (qui ferait mieux de sonder de plus près les marais nauséabonds du Carlton) prétend que son premier adjoint cède sa circonscription à un écologiste ; à Bordeaux, Marie BOVE se présente dans la circonscription représentée aujourd'hui par une députée socialiste, et qui fut il y a peu celle d'Alain JUPPE. Voilà très exactement la traduction concrète de la tiédeur et de la mollesse (disait Martine AUBRY) de l'homme qui aspire à la magistrature suprême. Tous ces accords de coulisse, ces compromis rappellent la bonne odeur du cassoulet que fricotaient en leur temps les radicaux du Sud-Ouest.
-
L'accord électoral prévoit la fermeture de 24 réacteurs nucléaires d'ici 2025, et une réduction à 50 % de la proportion d'électricité d'origine nucléaire, qui est aujourd'hui de 75 %. Bien entendu, les responsables des centrales nucléaires touchées par ces mesures de fermeture n'ont pas été consultés, ni le personnel d'entretien, ni le personnel d'exploitation. Personne n'est en mesure de dire exactement ce qu'il est en est de la filière Mox, le combustible nucléaire nécessaire au fonctionnement du réacteur EPR en cours de construction à Flamanville dans la Manche.
-
Il se trouve que je suis passé très souvent devant la centrale de FESSENHEIM dont la fermeture est décidée par ces messieurs au lendemain de l'élection (à mon avis problématique) de monsieur HOLLANDE. Je n'ai jamais vu ni entendu qui que ce soit habitant la région proche se plaindre de la présence de ce site nucléaire, fournisseur d'emplois et de ressources financières. Mais je conviens que ces seules raisons ne suffisent pas à justifier le maintien d'un site qui serait dangereux. Il s'agit donc de savoir si l'est vraiment et pourquoi.
-
Il est donc intéressant de s'adresser à ceux qui y travaillent. Le Figaro nous apprend que Bernard DODIN, délégué syndical CFDT à FESSENHEIM dit à qui veut bien l'entendre, sinon l'écouter : "Mon coeur est à gauche, je suis un homme de gauche. Devrais-je compter sur la droite pour sauvegarder notre outil de travail ? Ce serait une bêtise sans nom de fermer FESSENHEIM qui a eu l'agrément de l'Autorité - indépendante - de sûreté nucléaire." De son côté, son collègue de la CGT, Jean-Luc CARDOSO renchérit : "On ne démantèle pas une centrale parce qu'on en a envie, mais parce qu'elle est obsolète." Tel n'est pas le cas, dit-il de la centrale alsacienne. "Les socialistes ont eu tort de céder aux écologistes" dit le premier ; "On sacrifie les salariés d'une industrie au profit de quelques places pour des hommes et des femmes politiques" dit le second. Je ne parle pas des réactions mitigées de nombreuses autres personnalités alsaciennes de gauche.
-
Il me semble qu'il faut poser à l'industrie nucléaire deux questions bien distinctes qui, du reste, semblent bien refléter les positions respectives, l'une, chèvre-choutante et mollassonne du candidat socialiste, l'autre, radicale, celle des fidèles de l'écologisme (j'utilise ce mot à dessein).
-
(a) La première question est raisonnable. Elle consiste à apprécier la dangerosité putative de ces sites nucléaires. Deux types de causes, l'un extrinsèque, l'autre intrinsèque, peuvent caractériser cette dangerosité. Les causes extrinsèques sont des causes naturelles : inondations ou tremblements de terre sont les deux principales. S'il est vrai que l'Alsace est une région sismique, surtout dans sa partie méridionale, les séismes n'y sont jamais très importants. J'en ai personnellement ressenti trois en 30 ans dans la région de STRASBOURG dont un à l'automne 1978, assez fort ; il n'a entraîné aucun dégât, aucune destruction, aucune perte humaine. Et, depuis la destruction quasi totale de BALE à la suite d'un séisme important au XVe siècle, aucun autre protestation de la Terre n'a atteint une ampleur telle qu'elle justifie la terreur. Certes, elle est toujours possible, mais hautement improbable. La question des inondations est réglée depuis longtemps grâce à l'aménagement du cours et du lit du RHIN. Par ailleurs, la centrale de FESSENHEIM est construite sur des normes anti-sismiques. Les causes extérieures de dangerosité peuvent être écartées avec une vraisemblance considérable. Les causes intrinsèques dépendent de la technique elle-même. Je recommande vivement la lecture de l'interview d'Alexandre FAURE par Benoît FIDELIN, publiée dans le numéro 6729 du Magazine Pélerin du 17 novembre 2011. Alexandre est ingénieur de sécurité à la centrale nucléaire de CHOOZ dans les Ardennes. Il expose avec précision les précautions prises pour la surveillance continuelle de la centrale : 200 agents de conduite se relayent 24 h sur 24 pour surveiller la bonne marche des deux réacteurs. Dans la salle de contrôle, des dizaines d'écrans et de voyants fournissent des indications instantanées sur la maintenance électrotechnique, les systèmes informatiques, la conduite des opérations, la sécurité des personnels, et quantité d'autres paramètres. On aimerait bien que des contrôles aussi minutieux soient opérés, mutatis mutandis, dans des secteurs politiquement, médiatiquement et sociétalement moins sensibles, comme celui des hôpitaux, des transports routiers ou ferroviaires, des banques, pour ne citer que quelques uns d'entre eux.
-
(b) Et puis il y a les mauvaises questions de l'écologisme radical, pour qui les idées passent avant les hommes, l'irrationnel avant le rationnel, la doctrine avant les faits. Supprimons les centrales disent les vestales et les flamines de ce culte nouveau qu'est devenue l'écologie. Remplaçons-les par des éoliennes, des panneaux solaires, des sources d'énergie renouvelable, sur la nature éthérée desquelles les desservant du dieu nouveau restent très vagues. Au moment où EDF s'engage dans une campagne d'enfouissement de nombreuses lignes à haute tension qui salissaient de leur pylônes et de leur fils les paysages de nos campagnes et des banlieues, on propose d'implanter des éoliennes. Allez-donc voir du côté de MILLAU, de PERPIGNAN ou de la Vallée du Rhône ces forêts métalliques qui se dressent sur les crêtes des monts et des collines, ne tendez pas l'oreille pour entendre le bruit de leur moulin à vent, (c'est inutile, il s'impose, omniprésent, obsédant, obscène), ne cherchez surtout pas à vous renseigner sur le rendement de ces dispositifs (je vais vous le dire tout de même 17 %), ni sur le nombre de ces horreurs qu'il nous faudrait dresser pour produire autant d'électricité que les centrales supprimées. Vaclav KLAUS (je l'ai déjà écrit il y a longtemps dans un billet de ce Blog) a calculé qu'il faudrait implanter une éolienne tous les 50 m entre la frontière slovaque et la mer du Nord pour produire une quantité d'électricité équivalente à celle que produit une petite centrale nucléaire implantée à la frontière de la SLOVAQUIE et de l'AUTRICHE. Par ailleurs le bilan carbone de ces installation est désastreux : il faut du béton pour les socles, du métal pour les piliers et les pales, tout matériau dont la production exige des dépenses d'énergie thermique considérable. Les panneaux solaires demandent des quantités de matières premières rares, coûteuses, et qu'il nous faudrait importer. Reste la géothermie (fort coûteuse, mais certainement d'avenir) et la micro-hydraulique (il faudrait alors qu'EDF abandonne le monopole de distribution du courant).
-
Désolé d'avoir été aussi long. Mais quand un homme politique aspirant à la magistrature suprême choisit des voies aussi manifestement contraire à l'intérêt de son pays, il est du devoir des citoyens de le lui faire savoir. Rajouté au vote des étrangers, les choix de monsieur HOLLANDE donnent à penser que pour lui le pouvoir est plus attrayant que la survie de la patrie. Monsieur HOLLANDE risque de tomber avant peu sous le coup d'une accusation très grave : celle de représenter les intérêts de l'anti-France.
-



vendredi 18 novembre 2011

Gustave est toujours prophète

-
Quand elle m'a prêté ce livre, alors que je lui rendais visite, cette vieille amie parisienne ignorait que Gustave THIBON est l'un de mes auteurs préférés. Je n'ai jamais fait mystère de l'admiration que je porte à un penseur aussi lucide. Ces notes inédites publiées en 2011 aux Éditions du Rocher, sous la responsabilité minutieuse de Françoise CHAUVIN, portent le titre mélancolique de Parodies et mirages ou La décadence d'un monde chrétien.
-
Le ton général de ces notes rédigées entre 1935 et 1978, est donné dès la page 21, dans ce passage qui n'a pas besoin de commentaires :

"L'erreur individuelle, consciente, morale, est infiniment  moins dangereuse que l'erreur généralisée, fondue, diluée, inconsciente, passée incognito dans les institutions, les coutumes, le climat. La plupart des aberrations morales conservent quelque chose d'accidentel, de curable, de révocable, tant qu'elles n'ont pas gâté le milieu humain. Mais quand l'âme de la Cité même est malade, l'individu est menacé, non plus seulement dans les parties supérieures de son être, mais dans son existence immédiate, dans son socle vital. Le "péché" devient proprement catastrophique quand il cesse d'être péché : quand il ne procède plus d'un choix individuel et délibéré, mais d'une conscience collective corrompue. Alors, il ne se borne plus à dégrader l'homme, il le détruit."
-
THIBON appelle mal socialisé cette corruption de la conscience collective. Nous y sommes et nous continuons de nous précipiter vers l'abîme : euthanasie active, mariage homosexuel, dépénalisation de la drogue, avortement, pour ne citer que les innovations sociétales les plus mortifères. Sans parler de la théorie du gender introduite par monsieur CHATEL comme donnée scientifique dans le programme de sciences naturelles des élèves de terminale. Je reviendrai demain sur cette théorie, fruit élucubrée, hybride monstrueux du constructivisme, du féminisme agressif et de la pression des lobbies homosexuels. Je n'ignore pas que je risque de blesser certains de mes lecteurs qui me sont chers, qui sont des amis que je retrouve régulièrement avec joie, et avec qui j'aime discuter. Mais j'irai contre ma conscience si je disais que j'approuve toutes les innovations comportementales introduites dans l'espace social par des apprentis-sorciers en quête des voix d'électeurs très ciblés et du soutien occulte de diverses sociétés de pensée. Afin de préciser ma pensée, j'ajouterai ceci : non à ces innovations condamnables ; amitié, soutien, miséricorde, compréhension, absence de jugement largement donnés à tous les hommes et femmes qui, pour des raisons et à des titres divers, ont pu à un moment de leur vie ou dans leur vie, adopter ces comportements. C'est pourquoi je trouve que Gustave THIBON est prophétique.
-
PS : je m'y attendais, mais suis déçu. Pas le moindre commentaire sur les persécutions des chrétiens de Corée du Nord. C'est loin la Corée, en effet, et, quoi qu'en dise mon ami Marcel, il y a une très étroite relation entre les soucis des 35 heures, de la retraite à 60 ans, et l'insouciance que nous manifestons à l'égard de nos frères persécutés.

jeudi 17 novembre 2011

Un témoignage bouleversant

-
J'ai reçu hier la feuille d'information de l'association "Aide à l'Église en Détresse". Elle s'ouvre sur le témoignage de Lee Ok Soon, une Coréenne du Nord, prisonnière politique, libérée après 7 ans de détention, et qui a pu fuir en Corée du Sud. Convertie au contact de chrétiens emprisonnés comme elle, voici ce qu'elle écrit aux Églises d'Occident :
-
"Dans mon pays, toute personne soupçonnée d'être chrétienne est emprisonnée ou exécutée. Oui, dans mon pays les chrétiens doivent être tous tués jusqu'à la troisième génération.
Dans mon pays, il est interdit aux chrétiennes de donner naissance. C'est pour cela que dans les camps, on injecte un poison aux femmes enceintes. Après 24 heures de souffrance atroces, l'enfant meurt dans leur ventre. Si elles accouchent d'un enfant vivant, les gardes le tue immédiatement sous leurs yeux.
Dans mon pays, on envoie des familles entières dans des camps. Les chrétiens ont un traitement spécial, ils travaillent davantage, 18 heures par jour, et on leur réserve les travaux les plus pénibles. Ils n'ont pas le droit de lever la tête ou de regarder le ciel. Ils ne reçoivent pratiquement pas de nourriture et ont de l'eau sale à boire. Contrairement aux prisonniers politiques, ils n'ont aucun espoir de libération.
Mon pays, c'est la Corée du Nord."
-
"L'idéologie ne se soucie pas de l'homme concret !"
"La plus atroce offense que l'on puisse faire à un humain, c'est de nier qu'il souffre !" (voir mon billet d'hier sur l'idéologie).
-
Voilà à quoi la folie des tyrans peut conduire. Je n'entends guère nos responsables politiques dénoncer ces atrocités. Je les entends beaucoup parler des 35 heures, de la retraite à 60 ans, des droits et des exigences de leur clientèle respective. Pendant ce temps, on tue des nouveau-nés sous les yeux de leur mère, parce qu'elles sont chrétiennes et qu'ils pourraient devenir chrétiens. Mais c'est loin la Corée du Nord, et le Stade de France c'est tout près.
Et puis c'est beau le communisme ! Et c'est beau le socialisme qui en fut l'escabeau, avant d'en devenir la carpette ! Et c'est beau le commerce international qu'alimente le libéralisme (enfin, une certaine forme de libéralisme pour faire droit aux remarques judicieuses de Pïerre-Henri THOREUX) !
-
Rachel pleure ses enfants dans Rama et nous n'entendons point ses sanglots. Vous qui me lisez, je vous en supplie, envoyez votre obole, si minime soit-elle, à Aide à l'Église en Détresse, 78109 SAINT-GERMAIN-EN-LAYE. Un reçu fiscal vous sera envoyé.
-
PSD : J'en profite pour dénoncer l'idiotie politique et morale de monsieur CARREZ (un député UMP) qui ne veut plus que l'on défiscalise les dons faits aux organismes agréés. Nous en avons ras le képi des interventions intempestives des députés fiscalistes, surtout quand ils refusent de diminuer leur indemnité de 10 % (comme l'avait demandé un autre deputé UMP, monsieur Lionel LUCAS). Oui aux sacrifices qu'exige la situation de notre Patrie, non à une mesure qui risque de faire crever des dizaines d'associations grâce auxquelles un minimum de lien social, d'entraide et de charité perdure chez nous, et auxquelles l'Etat n'est pas à même de se substituer.
-

Europe, quand tu nous tiens...

Un ami parisien me transmet l'adresse d'une vidéo fort édifiante. Réalisée par des journalistes allemands au Parlement européen, elle montre comment il est possible à un député européen de toucher ses jetons de présence sans assister aux séances publiques ou au travail des commissions, et détaille les différents revenus (environ  14.000 euros par mois) que ces messieurs et dames encaissent pour un travail dont l'utilité est très problématique. On comprend pourquoi il y a des bagarres féroces entre les postulants à une place éligible sur les listes présentées au moment des élections !
-
Ils voudraient nous faire détester l'Europe et la supposée démocratie qu'elle proclame instituer, qu'ils ne s'y prendraient pas autrement. Je le redis ici hautement. L'argent dit "de l'Etat" est notre argent et aucunement celui des responsables politiques à qui nous déléguons le soin de le dépenser. Il s'agit du fruit de notre travail ou de notre épargne ou de nos retraites, et non pas d'un quelconque pactole descendu du ciel à la prière de ces messieurs-dames... Que les dépenses judicieuses des Etats et des Institutions puissent favoriser la production de richesses est une évidence. Mais ces richesses sont toujours créées par notre travail, et non par la vertu du verbe des politiciens. Voici l'adresse.
-
http://dotsub.com/view/01ad2718_073c-474a-ac40-c7a72e199d55

mercredi 16 novembre 2011

Idéologie

-
Il y a quelques jours, j'expliquais à un ami la différence entre un conservateur et un réactionnaire. Il vous souvient sans doute que j'avais évoqué le caractère fondamentalement conservateur des processus vitaux. Il convient donc de se demander pourquoi les idées, transformées en idéologies changent si rapidement. Dans son livre Les Dieux et les Rois, très intéressant à bien des égards, mais critiquable sur certains points, Jacques RUEFF jette une belle lumière sur ces phénomènes ; il ne le fait pas toujours de son cru. Je trouve dans cet essai une extrait tiré du livre de Pierre AUGER, L'homme microscopique. Il vaut la peine de l'écouter :
-
"La conservation des caractères [dans l'idéologie] n'est pas garantie ici, comme dans les règnes vivants, par ces molécules bien définies et autoreproductrices qui se multiplient indéfiniment dans les milieux appropriés. Les espèces "idées" sont donc beaucoup moins stables que les espèces animales ou végétales ; de nombreux mutants apparaissent constamment chez les hommes qui les portent ou lors d'un passage d'un individu à un autre. [...] En conséquence toute population humaine portera généralement les représentants de plusieurs variétés d'une idée initialement introduite ou apparue. Une sélection entre ces mutants, analogue à la sélection naturelle [note du transcripteur : on sait aujourd'hui que ce concept est infondé pour ce qui est de l'évolution du vivant, et DARWIN lui-même sur la fin de sa vie, j'y reviendrai, avait radicalement modifié sa conception de l'évolution ; ce point est capital pour ce qui nous occupe aujourd'hui, car le darwinisme est au fondement de la prolifération des idéologies comme l'explique Pierre AUGER], ne pourra manquer de s'établir et ce sont les critères de cette sélection qui orienteront l'évolution résultante. De même que dans la génétique biologique, deux types de facteurs joueront : les uns internes, dépendant de la stabilité ou de la facilité de la reproduction, les autres externes ou somatiques, résultant de la sélection qui s'exerce non sur les idées elles-mêmes, MAIS SUR LES HOMMES QUI LES PORTENT EN EUX. Il en résulte une double adaptation : celle des idées aux caractères des hommes dans le cerveau desquels elles se multiplient, et celle des hommes porteurs des idées, aux milieux dans lesquels ils vivent.  [...] C'est ainsi que sont sélectionnées certaines idéologies, vigoureuses et prolifiques, qui tendent à couvrir la terre de la masse de masse des hommes qui les portent sans qu'elles TIENNENT COMPTE DES SATISFACTIONS INDIVIDUELLES de ces hommes, pourvu qu'ils prospèrent et restent toujours accueillants pour elles."
-
Rappelez-vous ! J'ai souvent cité cette phrase : "Le propre de l'idéologie est d'être insensible aux sort de l'homme concret."
-
Et que ce cri de C. PAVESE atteigne le profond de vos entrailles : "La plus atroce offense que l'on puisse faire à un humain, c'est de nier qu'il souffre." Toutes les idéologies, tous les systèmes de pensées qui prolifèrent à travers le monde sont hélas marqués du sceau infamant de l'insensibilité à l'autre : libéralisme, socialisme, communisme, nazisme, fascisme ont pu épanouir leurs fleurs vénéneuses parce qu'ils ne s'intéressaient pas en effet  "au sort de l'homme concret", mais satisfaisaient la volonté de puissance de leurs concepteurs, et flattaient par des promesses captieuses les aspirations de leurs partisans. Pas le moindre gramme, le moindre atome de pensée, dans ces systèmes engendrés et enfantés dans le cerveau des orgueilleux. Il faut tout reprendre à zéro. Et la tâche, hélas, est irréalisable. La seule chose qui est à notre portée est de mettre notre comportement en accord avec quelques principes simples au nombre desquels figurent la règle d'or de la réciprocité et la sensibilité empathique
-

mardi 15 novembre 2011

Géométrie non euclidienne

-
Ils pratiquent depuis très longtemps une géométrie non euclidienne dont le principal théorème s'énonce ainsi : par un point extérieur à une droite, il passe plusieurs parallèles, une bonne, la nôtre, des mauvaises, des quantités de mauvaises, toutes les autres.
-
Les médias, Marianne, Charlie Hebdo en tête, ont le droit de surnommer Nabotléon le Président de la République (bonne parallèle), mais il est ignoble d'affubler du sobriquet de Babar François Hollande (mauvaise parallèle) [je n'ose imaginer le sort très incertain d'un fragile esquif dirigé par un capitaine qui serait un éléphant ; je comprends l'angoisse de monsieur MELANCHON qui traite le candidat socialiste de capitaine de pédalo !].
-
Nicolas SARKOZY n'a pas le droit d'aller prendre un verre au Fouquet's le soir de son élection (mauvaise parallèle), mais Dominique STRAUSS-KAHN peut louer, d'abord une suite luxueuse au Sofitel de NEW YORK, ensuite un appartement à X milliers de dollars mensuels dans le quartier le plus chic de la ville (bonne parallèle).
-
Monsieur Eric WOERTH n'a pas le droit d'être ministre si sa femme est employée par une grande banque comme gestionnaire de fortune (mauvaise parallèle), mais pendant des années monsieur GUERINI a pu continuer à gérer  comme Président du Conseil Général des Bouches-du-Rhône, les affaires publiques tout en étant mis aujourd'hui en examen pour association mafieuse sans émouvoir les caciques solfériniens dont l'ouie et la vue semblent avoir été fort déficientes (bonne mais transitoire parallèle, car les affaires commencent  à sentir le roussi, et il aura fallu un Arnaud MONTEBOURG pour la faire rentrer dans la catégorie des parallèles interdites).
-
Monsieur Airy ROUTIER a le droit de faire état d'un prétendu texto qu'aurait envoyé Nicolas SARKOZY à Cécilia SARKOZY pour la faire revenir à lui (bonne parallèle), mais Jacques LANG, en archange effarouché de tant de turpitudes journalistiques, s'étrangle à moitié quand il condamne la propagation de rumeurs portant sur un possible divorce de Dominique STRAUSS-KAHN et d'Anne SINCLAIR (mauvaise parallèle). [Pour dire le vrai, on  comprendrait cette dernière, et dans un pays ou le mariage a pris le statut d'un contrat à durée déterminée, on ne voit pas ce qu'il y aurait d'ignominieux à divorcer d'un homme dont on n'accepte pas ou plus les comportements.]
-
Il n'y a qu'une bonne parallèle : celle du respect de l'autre, de la vérité et de la justice. On est très loin du compte. Et l'on aimerait qu'en géomètre scrupuleux, monsieur HOLLANDE et ses amis respectent ce principe, surtout ceux qui font profession de servir l'équerre et le compas.
-

lundi 14 novembre 2011

Diagnostic chinois

-
JIN LIQUN est président d'un fonds souverain chinois. Il est intéressant d'entendre le diagnostic qu'il porte sur la vieille Europe ; il serait encore mieux de l'écouter :
-
"Les troubles qui se sont produits dans les pays européens résultent uniquement de problèmes accumulés par une société en fin de course, vivants d'acquis sociaux. Je pense que les lois sociales sont obsolètes. Elles conduisent à la paresse, à l'indolence, plutôt qu'à travailler dur. Le système d'incitation est complètement détraqué."
-
Venant d'une personnalité très importante de la République Populaire de Chine, ces propos devraient être pris en considération par tous les adeptes de papa MARX. Ils se semblent pas pressés d'emboîter le pas à cet économiste iconoclaste. Et pourtant... société en fin de course ! vivant d'acquis sociaux ! système d'incitation obsolète. JIN LIQUN semble reprendre à son compte une formule du Président SARKOZY, laquelle en son temps fit mouche : "Travailler plus pour gagner plus". Il semblerait nécessaire de réfléchir à l'équilibre qu'il convient de trouver entre la solidarité nécessaire et le devoir de contribuer par son travail à la bonne marche de la société. Il n'est pas normal que les personnes bénéficiant de l'aide de leurs concitoyens (n'oublions jamais que l'argent de l'Etat est NOTRE ARGENT, le fruit de notre travail que nous acceptons, plus ou moins librement, de mettre à la disposition de la communauté nationale) n'aient aucun devoir à leurs égards. Il est difficile de trouver des réponses concrètes à ce problème, mais puisque nous souffrons d'un déficit de production de richesse, et d'un excès de salariés privés de responsabilités professionnelles, on peut se demander s'il ne faudrait pas chercher de ce côté là... Monsieur HOLLANDE ne semble pas prendre le chemin d'une telle réflexion, pour qui tout est dû "aux plus démunis" et tout doit leur être donné "par les riches". Au fait, quels sont ses revenus mensuels ? Je veux dire, les revenus qu'il tire de son travail, bien sûr.
-
Bonne journée.
-

vendredi 11 novembre 2011

Absence momentanée

-
Je m'absente pour trois jours. Reprise lundi 14 novembre. Bon week-end

jeudi 10 novembre 2011

A propos de la crise

-
Je ne le dissimulerai point. L'apparition de monsieur HOLLANDE à la télévision, me donne des boutons.  Dès que le Président SARKOZY a dit ou fait quelque chose, il intervient et ses interventions n'ont d'autre but que d'ancrer dans l'esprit des Français que tout ce que fait le Président est criquable et que lui, François HOLLANDE ferait beaucoup mieux ! Mais je n'entends point sur les lèvres la moindre proposition concrète, à l'exception du recrutement de 60 000 enseignants (dans quel ordre veut-il les affecter : primaire, secondaire, supérieur ?), et de l'augmentation des impôts. Pas le moindre phonème relatif au traitement de la crise qui s'annonce. Monsieur HOLLANDE semble ignorer que le peuple français représente moins d'un pourcent de la population mondiale, et que la voix de la France dans le concert des nations est à peine audible. Il croit,  oh certes avec sincérité, mais avec une touchante naïveté ! qu'il lui suffit de condamner les systèmes financiers et les marchés, monstres anonymes, monstres froids, pour les faire changer. Mais il y faut une autre force et d'autres atouts que ceux aimablement puisés dans les vieux tiroirs de Tonton, de Jules GUESDE, Léon BLUM, et des autres caciques socialistes. Ils nous ont conduit à la ruine, au seul profit de leurs électeurs et des sociétés de pensée qui ne cessent d'exercer un pouvoir occulte et néfaste sur la conduite de nos politiques. Comment va-t-il s'y prendre pour taxer les échanges financiers ? Comment va-t-il augmenter les impôts et de qui ? Comment va-t-il juguler les dépenses sociales ? Empêcher qu'on dilapide l'argent des Français, qui n'est que le fruit de leur travail, en finançant sans discernement et sans distinction tout étranger qui se présente aux caisses de l'Etat ? Je conçois que cette politique, il la choisisse. Mais alors il doit dire qu'elle a un coût, et le faire accepter loyalement par les Français.
-
Plutôt que de désigner les riches comme les ennemis des autres Français, il devrait chercher à s'en faire des alliés (je ne dis pas des amis ; c'est difficile en effet) en promouvant le mécénat, la création de fondations charitables, des déductions d'impôts plus importantes pour les dons faits aux associations agréées. Bref, au lieu de monopoliser la solidarité au profit du PS, par intérêt politique, il devrait au contraire la répandre, la promouvoir, la bénir. Mais il n'a que des imprécations, des condamnations, des insinuations, des invectives... contre les créateurs et les possesseurs de richesses. Il semble que le candidat rebuté par les circonstances, monsieur DSK, n'ait pas eu ces scrupules qui lui auraient fait refuser les "avantages" procurés (conditionnel, j'insiste) par certains industriels du BTP, du côté de LILLE.
-
Quand ces messieurs comprendront-ils, à droite comme à gauche, que les Français sont prêts à faire des sacrifices, mais qu'ils ne supportent ni les mensonges, ni la démagogie, ni les contradictions ?

mercredi 9 novembre 2011

Suite orientale

-
Dans les années 1930, un voyageur allemand, Egon Erwin KISCH visitait la Chine. Il était assez proche et même très proches de ceux des Chinois qui croyaient au communisme. Mais son regard était acéré et il était assez bien documenté.
-
On apprend dans le livre qui relate son voyage, La Chine secrète (Gallimard, Paris, 1935), qu'il y avait à l'époque 2 499 00 fuseaux chinois, 1 821 000 fuseaux japonais et 178 000 fuseaux anglais dans les filatures installées sur le sol du Céleste Empire. Il consacre un chapitre de son ouvrage aux Enfants à l'usine. Après avoir décrit les conditions qui sont faites aux ouvrières et enfants qui travaillent dans les filature, puis décrit une scène terrible où l'on voit un groom chinois, un gamin, qui veille sur les entrées et sorties des clients dans un bar, s'amuser à taper sur les coolies qui s'arrache le client à transporter dans leur rickshaw, il reprend : "Mais retournons à la filature, chez les condamnés à perpétuité. Ici, la notion de perpétuité est prise dans un sens plus littéral que dans le code pénal : le nouveau-né gît sous le métier à tisser, la petite soeur surveille le métier à filer, la maman travaille au dévidoir, la grand-mère coud les ballots. Et c'est ainsi que s'écoulera ta vie, bébé, selon la loi qui t'échut en partage."
-
Les choses n'ont guère changé, au bébé près. Les ouvriers travaillent dans les mêmes conditions ; ils sont houspillés par les mêmes contremaîtres pour le profit de quelques privilégiés, et celui des exportations . Quand ils sont exténués de fatigue, usés par les heures de veille, on les renvoie.
-
Permettez-moi, lecteurs attentifs qui avez la bonté de lire ces billets, de vous rapporter une Parabole qui nous vient du TIBET, et qui ressemble étrangement à ce que dit Simone WEIL ; je la dois à un ami alsacien qui vient juste de m'envoyer un diaporama magnifique :

"J'ai regardé au loin ! J'ai vu quelque chose qui bougeait. Je me suis approché. J'ai vu un animal. Je me suis encore approché. J'ai vu un homme. Je me suis encore approché, et j'ai vu que c'était mon frère."
-
Souvenez-vous de la Parabole du Bon Samaritain. Jésus ne dit-il pas à propos de l'homme laissé pour mort sur le bord du chemin : "De qui cet homme a-t-il été le prochain ?" Il a été le prochain du schismatique, honni des juifs orthodoxes ; il a été le prochain du Samaritain. Ma fois, je trouve une certaine analogie avec les situations dont nous discutons depuis deux ou trois jours.
-
Bonne soirée.

L'égoïsme, une erreur de perspective

-
J'ai trouvé il y a quelques années, dans une brocante de charité, l'édition originale, fort délabrée, des Intuitions préchrétiennes de Simone WEIL. Je suis en train de la restaurer et de la relier. Figurez-vous qu'à la page 73, premier paragraphe, feuillet 5, je trouve ceci qui vient singulièrement éclairer les propos que je tenais hier sur la concurrence déloyale et l'état terrible dans lequel des milliers d'ouvriers sont maintenus en Chine. (J'ajoute que ce texte traduit exactement, très exactement, ma pensée. Un agent, en effet, agit toujours en vue d'un bien. Je ne mets donc pas en doute la volonté des promoteurs de la mondialisation de vouloir un bien, et même un bien pour tous. Ce que je conteste c'est que ce bien soit le bien le meilleur.)
-
"Ce qu'on nomme généralement égoïsme n'est pas amour de soi. C'est un effet de perspective. Les gens nomment un mal l'altération d'un certain arrangement des choses qu'ils voient du point où ils sont ; de ce point, les choses un peu lointaines sont invisibles. Le massacre de cent mille Chinois altère à peine l'ordre du monde tel qu'ils le perçoivent, au lieu que si un voisin de travail a eu une légère augmentation de salaire et non pas eux, cet ordre est bouleversé. Ce n'est pas par amour de soi, c'est que les hommes étant des êtres finis n'appliquent la notion d'ordre légitime qu'aux environs immédiats de leur coeur.

"Ils ont le pouvoir de transporter leur coeur en choisissant quelque part un trésor. Il n'est pas si rare de voir un homme absolument dévoué à un autre homme, connu ou non de lui personnellement, à une femme, à un enfant, à un parti, à une nation, à une collectivité quelconque, à n'importe quelle cause. On ne peut pas dire alors qu'il est égoïste. Mais le mécanisme des erreurs de perspective reste le même, et les erreurs restent aussi graves. Un tel dévouement n'est pas plus élevé, est à peine plus élevé que ce qu'on nomme égoïsme.

"Pour échapper aux erreurs de perspective, le seul moyen est de choisir son trésor et de transporter son coeur hors de l'espace, hors du monde, en Dieu."
-
Je me demande si nous ne sommes pas tous, les uns et les autres, victimes de ces erreurs de perspective. J'ajoute, pour terminer, que je me mets dans le lot de ceux que dénonce avec une telle lucidité une des plus grandes philosophes françaises du XXe siècle. Il me faut faire encore beaucoup d'efforts sur moi-même pour parvenir à cette fin.

mardi 8 novembre 2011

Concurrence déloyale

-
Dans son  commentaire de mon billet sur un "économiste courageux", Pierre-Henri dit que quand nous parlons de concurrence déloyale, nous voyons les choses de notre point de vue. Je ne suis évidemment pas du tout d'accord avec lui. Mais je pars d'une perspective différente.
-
On peut, en effet, comme Pierre-Henri ou Aerelon, se placer sur le terrain de l'économie et des échanges de biens et services, sans regarder le moins du monde les conditions dans lesquels ces derniers sont produits. Je voudrais placer ici le résumé d'une analyse que j'ai faite d'un chapitre du livre de Thierry WOLTON, Le grand bluff chinois. Comment Pékin nous vend sa "révolution" capitaliste. Robert Laffont, Paris, 2007 :

Dans le capitalisme le plus sauvage, les exploités s'organisent pour défendre leurs intérêts. Rien de tout cela en Chine. L'absence d'espace de liberté empêche l'expression d'un marché régulateur. La population est étouffée par un encadrement très strict et ne peut contester, et le flic est ici l'unique syndicat autorisé. Les mines de charbon sont emblématiques de cette spécificité chinoise. Le secteur est massivement privatisé depuis une dizaine d'années. N'importe qui peut creuser un trou pour ouvrir une exploitation. Mais la quasi-totalité des mines privatisées a été récupérée par la nomenklatura communiste. La famille, au sens large, n'a pas laissé échapper un business si rentable dans un pays qui manque cruellement d'énergie. Les nouvelles exploitations, elles, restent le patrimoine de l'État-Parti, unique propriétaire du sol. Ainsi, le 14 février 2005, le contrôleur de la sécurité de la mine SUN JIANWAN (LIAONING) constate que les veines d'exploitation présentent une densité anormale de gaz. Le patron passe outre et menace d'une forte amende les ouvriers qui voudraient sortir du puits. Ce jour-là, l'explosion a fait 213 morts. Il y a en Chine dix fois plus de décès de mineurs qu'en INDE, trente fois plus qu'en AFRIQUE DU SUD, cent fois plus qu'aux Etats-Unis par million de tonnes de charbon extraites. Selon le China Labour Bulletin de HONG-KONG, il y a 20.000 morts chaque année dans les mines chinoises, qui n'ont aucun équipement (foreuses, trépans), et laissent leurs ouvriers attaquer les veines à la pioche. Absence totale de sécurité, corruption des inspecteurs, carence des dirigeants décuplent le danger. Partout ailleurs dans le monde, de vrais syndicats, le droit de grève, une justice indépendante ont fait reculer la mort dans les mines. Le PC chinois n'en veut rien savoir. Beaucoup d'accidents sont cachés au public. La zone sinistrée est interdite aux journalistes. Et le syndicat officiel se charge de calmer les esprits, de disperser les familles endeuillées, de prévenir toute velléité de révolte. Un journal du HEBEI a révélé l'existence d'un réseau de professionnels spécialisés dans la dissimulation des explosions minières : enterrements discrets, achat du silence des familles. Les médias se taisent sur ordre des autorités. Mais le mépris de l'État-Parti est encore plus manifeste dans le secteur de la santé. Le pouvoir n'assure là aucun minimum garanti. La maladie est en Chine la pire des catastrophes qui puissent arriver à un paysan chinois. L'accès aux soins lui est financièrement interdit. Toute intervention à l'hôpital nécessite un dépôt de garanti égal à un an de revenus. Il faut tout payer d'avance. Les médicaments sont vendus par les médecins à des prix prohibitifs. Tuberculose, malaria, choléra, dysenterie frappent des centaines de millions de citoyens. Soixante pourcent d'entre eux seraient atteints d'hépatite B, dix millions du SIDA. Dans le HUNAN, on compte des centaines de milliers de paysans qui sont morts contaminés par le VIH, ou frappés d'hépatite, après avoir vendu leur sang pour une poignée de yuans. En réponse à ces vies sacrifiées, LI CHANGCHUN, le responsable du drame, a été promu.IL est chargé de la propagande au Bureau Politique, instante suprême du PC. En termes d'équité, le système de santé chinois arrive au 181e rang mondial, sur les 191 qu'a examiné l'OMS. La nomenklatura, cependant, est bien soignée. Lors de l'épidémie de SRAS, en 2003, les puissants du parti se sont mis à l'abri avec leur famille, en organisant un pont aérien pour s'installer loin du danger sur le littoral, sans se soucier du sort du peuple. Une noria d'Airbus A300 a transporté en un jour, de la capitale aux lieux refuges, 1.700 dignitaires, escortés de forces spéciales, de médecins, et de services d'urgence, alors que la population ignorait tout du danger. Même MAO avec ses médecins aux pieds nus n'a jamais été vraiment préoccupé de santé publique. Il y a en Chine un peu plus de 2 millions de médecins, soit 6 pour 100.000 habitants, comme dans un pays en voie de développement. Dans ce pays-là, il n'y a pas d'avenir pour les plus pauvres. Du reste, signe révélateur, la Chine est le seul pays au monde où les femmes se suicident plus que les hommes, signe de leur infini désespoir face aux violences de tous ordres dont elles sont les victimes. Ainsi, la vie est peut-être une chance pour ceux qui parviennent à s'enrichir, mais c'est une menace pour le plus grand nombre. Dans cette situation de contention totalitaire, la violence est une tentation quotidienne. L'absence de rapports institutionnels entre le pouvoir et la population engendre la révolte, seule voie possible de réaction pour ceux qui souffrent. Des tonnes d'explosifs ont été volées, nombre d'armes sorties des casernes lors de la Révolution Culturelle n'ont jamais été rendues ; la moindre étincelle peut mettre le feu aux poudres dans ce pays où flotte une odeur de poudre. Les informations sur les grèves, émeutes, explosions diverses qui secouent régulièrement le pays, sont soigneusement filtrées. N'en ont connaissance en détail que les responsables du PC. Émeute contre l'implantation d'une usine polluante, manifestation contre la corruption de la police, jacquerie contre la réquisition de terres par un potentat du Parti, 80.000 incidents de ce genre ont été recensés pour la seule année 2005. Tous les ans, des millions de Chinois se rebiffent contre le sort injuste qui leur est réservé, surtout dans les campagnes où sévit l'arbitraire fiscal, le contrôle des naissances, les expropriations, l'enrichissement des cadres du Parti.
-
Avec ces conditions lamentables de production, il est facile d'inonder les marchés de produits peu chers (je n'ai parlé que des mines ; même raisonnement pour les aciéries [émeutes dans les aciéries de WUHAN il y  a deux ou trois ans, après le licenciement de milliers d'ouvriers dont le salaire n'avait même pas été versé] ou pour les usines de chaussures, d'appareils électo-ménagers. Certes, on peut  comprendre que le niveau de vie d'une grande partie du peuple chinois étant très faible (essentiellement la population rurale qui, sans travail sur place, émigre en masse dans les grandes villes, y espérant trouver un travail salarié, et le trouvant en effet, mais à quelles conditions !), il est normal que le prix de revient des objets manufacturés soient moins élevé que chez nous. Il n'empêche que le bon marché excessif est financé avec la sueur des MING GONG  ! En achetant ces produits, souvent de médiocre qualité du reste, nous nous rendons complices de cette exploitation, au seul motif qu'ils coûtent moins chers et sont bons pour le pouvoir d'achat de nos concitoyens. Oubliées les délocalisations, évaporés les scrupules des belles âmes de gauche, envolées les tirades lyriques sur la défense des travailleurs. C'est loin la Chine, et nous ne les voyons pas ces pauvres hères, accablés de travail et de sommeil. Plutôt que de se satisfaire de voir leur pays être l'atelier du monde, les responsables chinois devraient tourner leurs efforts vers leur population et l'énorme marché intérieur que constitue les 800 millions de personnes exclues des bienfaits du progrès économique qui explose en effet dans la partie orientale de l'Empire.
-
Concurrence déloyale il y a. Et pas pour des raisons purement économiques, mais pour des raisons sociales et morales. Devons-nous nous satisfaire d'une telle situation ?
-

Technique et servitude

-
Avant d'expliquer à mes lecteurs pourquoi il ne faut pas accepter de concurrence déloyale de la part de pays qualifiés, à tort ou à raison d'émergents, et pour compenser mes récents silences, je voudrais faire part à mes lecteurs d'une réflexion que ma chère Simone WEIL fait dans un ouvrage à tous égards remarquable, qu'elle a intitulé : Réflexions sur les causes de la liberté et de l'oppression sociale. Il me semble que tout honnête homme, surtout les responsables politiques, devrai(en)t lire ce livre avant de s'embarquer dans la nef de la chose publique. Après avoir livré à votre méditation ce court extrait et en prévision du prochain billet de ce jour, je ferai un très bref commentaire.
-
"Nous acceptons trop facilement le progrès matériel comme un don du ciel, comme une chose qui va de soi ; il faut regarder en face les conditions au prix desquelles il s'accomplit. La vie primitive est quelque chose d'aisément compréhensible ; l'homme est piqué par la faim, ou tout au moins la pensée elle-même lancinante qu'il sera bientôt saisi par la faim, et il part en quête de nourriture ; il frissonne sous l'emprise du froid, ou du moins sous l'emprise de la pensée qu'il aura bientôt froid, et il cherche des choses bonnes à créer ou à conserver la chaleur. Quant à la manière de s'y prendre, elle lui est donnée tout d'abord par le pli, pris dès l'enfance, d'imiter les anciens, et aussi par les habitudes qu'il s'est donné lui-même. [...].

Au contraire, dès qu'on passe à un stade plus avancé de la civilisation, tout devient miraculeux. On voit alors les hommes mettre de côté les choses bonnes à consommer, désirables, et dont cependant ils se privent. On les voit abandonner dans une large mesure la recherche de la nourriture, de la chaleur et du reste, et consacrer le meilleur de leurs forces à des travaux en apparence stériles. A vrai dire, ces travaux, pour la plupart, loin d'être stériles, sont infiniment plus productifs, car ils ont pour effet un aménagement de la nature extérieure dans un sens favorable à la vie humaine ; mais cette efficacité est indirecte, et souvent séparée de l'effort par tant d'intermédiaires que l'esprit peine à les parcourir ; elle est à longue échéance, souvent à si longue échéance que seules  les générations futures en profiteraont ; alors qu'au contraire la fatigue exténuante, les douleurs, les dangers liés à ces travaux se font immédiatement et perpétuellement ressentir. Or chacun sait par sa propre expérience combien il est rare qu'une idée abstraite d'une utilité lointaine l'emporte sur les douleurs, les besoins, les désirs présents. Il faut pourtant qu'elle l'emporte dans l'existence sociale, sous peine de retour à la vie primitive."
-
Et, après avoir analysé la complexité des travaux humains modernes, la nécessaire division des tâches qui en est la compagne importune et obsédante, la parcellisation des responsabilités, la déshumanisation qui souvent accompagne ce processus lié au progrès technique, Simone WEIL ajoute (ce qui est capital pour comprendre l'erreur anthropologique fondamentale des doctrines socialistes) : "Plusieurs esprits humains ne s'unissent point en un esprit collectif, et les termes d'âme collective, de pensée collective, si couramment employés de nos jours, sont tout à fait vides de sens."
-
Pour faire bon ménage avec ce qu'il est convenu d'appeler "le progrès", dont, faute d'en avoir peser les conséquences, on ne mesure pas toujours la nocivité (car le "progrès" est un concept lui aussi vide de sens ; il est en réalité fait de l'accumulation de myriades de petits ou de grands changements dans tous les domaines qui intéressent la vie humaine ; et on confond souvent "progrès" et "nouveauté"), il faut penser, et passer du monde existentiel utilitaire au monde existentiel moral, pour ne pas parler du monde existentiel transcendant, évacué depuis longtemps de la conscience de nos dirigeants et de l'espace public. Nous en sommes loin. Pour l'instant, l'homme contemporain est réduit à l'homo economicus, au consommateur que les promoteurs du marketing font rentrer dans des cases socio-économiques prédéterminés de façon à optimiser les profits de ceux qui ont commandités les études de marché. Il me semble qu'il faut interroger sérieusement la notion de "croissance" et qu'il est urgent de mettre en usage un appareil qu'il y a quelques années j'ai proposé d'appeler le "bonheuromètre". S'il existait et qu'on eût valider scientifiquement les items servant à la mesure du bonheur, je pense que nous aurions des surprises.
-
A tout à l'heure.
-

dimanche 6 novembre 2011

A propos de Gaël Giraud, réponse à Pierre-Henri

-
Il me semble que l'on peut résumer l'argumentaire Gaël GIRAUD en quatre points : (a) les dépenses de l'Etat n'ont pas augmenté et l'Etat ne joue pas vraiment son rôle ; (b) la monnaie unique nous prive du moyen d'ajuster notre politique économique aux particularités, en partie idéologiques certes, mais aussi bien réelles de la France ; (c) la concurrence déloyale de pays dits émergents ruinent notre économie ; (d) les financiers, pudiquement appelés "le système financier" sont devenus fous, aveugles et sourds, c'est-à-dire incapables de remplir la mission qui normalement leur est assignée : aider au développement des peuples et des personnes.
-
(a) Les dépenses de l'Etat. Que ces dépenses soient souvent injustifiées est l'évidence et je partage sur ce point l'opinion de Pierre-Henri THOREUX. Mais Gaël GIRAUD nous présente des chiffres qui semblent tirés des statistiques officielles et nous n'avons aucune raison de les mettre en doute. Il y a seulement un hic. Ces statistiques sont présentées en valeur relative, c'est-à-dire en pourcentage de la richesse nationale produite qui est réinjectée dans les dépenses de l'Etat. Il aurait fallu nous donner les dépenses en valeurs absolues et à monnaie constante (en tenant compte de l'inflation). C'est là où le raisonnement de Gaël GIRAUD me semble le plus faible. Cette baisse de pourcentage peut tout simplement signifier que nous avons produit plus de richesses que l'Etat n'a produit de dépenses. Cette augmentation de la richesse qui n'est pas utilisées dans le circuit étatique, si elle était prouvée, pourrait être due à une augmentation de la productivité. Toujours si elle était prouvée, il serait intéressant de savoir comment elle a été distribuée. Malheureusement, il semble bien que ce soit surtout aux actionnaires et fort peu aux salariés. Notons qu'il ne s'agit même pas de parler de la spéculation sur les actions, mais tout simplement de faits économiques relatifs à la production. A force de vouloir s'occuper de tout, du diamètre des pommes à l'allure des prises de courant, l'Etat ne joue son rôle souverain, celui de conduire les citoyens à la fin qui leur est due. Je la résume : permettre à chacun de porter ses capacités et ses talents à la puissance maximum, donner à chacun (et à tous) les moyens d'une vie décente pour lui même, ses proches, sa famille, et lui ouvrir suffisamment l'esprit et le coeur pour le rendre sensible à des réalités autres que celles de la Star Ac, de la Bourse ou du foot (encore que ces activités ne soient pas méprisables ; on peut les qualifier de ludiques, peut-on les dire vraiment humanisantes ?)

(b) Il est tout à fait anormal que les responsables politiques soient privées des moyens de leur politique dans l'actuel système européen. Ou bien nous allons vers un système fédéral, le budget est vraiment européen, le gouvernement est démocratiquement constitué, et nous abandonnons le concept révolutionnaire d'Etat-nation, ou bien nous restons immobiles, au milieu du gué partagé entre le souvenir des splendeurs passées de la patrie et la contrainte imposée par des Traités internationaux que le peuple français ou ses représentants légitimes ont ratifiés. Imposer à la Grèce et de l'extérieur une cure d'austérité sans exemple dans le passé est sans doute insupportable au peuple grec ; laisser à ses dirigeants incompétents l'initiative de revenir à la drachme et de dévaluer de 55 % cette monnaie (niveau de dévalution nécessaire pour tenter de régler la question de la dette) imposerait de très cruels sacrifices au peuple hellène, mais au moins il ne s'en prendrait pas à des boucs émissaires (enfin, partiellement boucs émissaires). Exit l'euro hors du Péloponèse. Il y a un hic là encore, c'est que de nombreux épargnants grecs seraient ruinés, ainsi du reste que les banques créancières (qui, je le rappelle ne travaillent qu'avec l'argent que nous leur confions). Par conséquent, et enfin, ou bien nous récupérons notre entière liberté de manoeuvre nationale, mais nous devons supporter les conséquences désastreuses de la politique politicienne conduite depuis trente ans chez nous et dont tout indique qu'elle va se poursuivre, avec ou sans Europe, ou bien nous allons vers un système politique européen de nature fédérale. Pour ce qui est de l'inflation, je répondrais encore ceci. Dans le cadre d'une monnaie commune et de protections douanières légitimes, il y aurait certes quelques pertes pour les épargnants, mais il y aurait augmentation des traitements des salariés, et sans doute une amélioration de la situation économique.

(c) Quand on lu les livres de WOLTON, ou de CAI CHONGGUO ou de Bruno ASTARIAN (j'en ai parlés ici-mêmes dans divers billets) relatifs à la manière dont l'actuel régime communiste chinois dirige les affaires économique, on se persuade que l'on se rend complice de l'exploitation des pauvres (qui travaillent 12 et 14 heures par jour dans des usines insalubres de CANTON ou SHANGHAI, logent sur place dans des taudis, n'ont aucune couverture sociale, doivent avoir un passeport intérieur (le hukou), sont payés avec un lance-pierre) si l'on accepte d'acheter à des prix dérisoires des biens produits dans de telles conditions. Ah oui ! C'est bon pour le pouvoir d'achat ! C'est bon pour notre nombril ! Mais c'est inique et les grands esprits de gôôôôche (je suis obligé à ce point de reprendre l'ironique vocable) ne me semblent pas pressés de dénoncer le scandale. Ne parlons des petites filles qui travaillent à s'en crever les yeux dans les sous-sols des gourbis pakistanais ou dans des usines des Indes pour le compte de grandes marques sportives. Alors on peut en effet acheter peu cher un ballon de foot-ball ou des chaussures de sport. Une seule solution pour mettre fin à ce qui reste une honte (pour la Chine, je dirai que les Chinois ont repris les habitudes des investisseurs européens, anglais spécialement, des années 30 ; des femmes à peine accouchées étaient rivées à leurs machines, surveillant d'un oeil distrait et épuisé leur bébé et la navette qui filait à un train satanique entre les fils des métiers à tisser). C'est bien là où le commerce rejoint le vice, la cupidité et le jeu immonde des flux de fric.

(d) Qu'un MADOFF, que des GOLDMAN-SACHS, des LEHMAN-BROTHERS puissent mettre en péril l'économie mondiale, en fabriquant des "produits structurés", en spéculant, en vendant de l'air (car ces gens ne font rien d'autres que de transférer de l'argent d'un poste à l'autre), en faisant de la carambouille ou de la cavalerie, est inacceptable. Bien sûr, dans une civilisation développée, et très malheureusement ultra-technique, il faut des capitaux pour investir dans la production. Mais il s'agit-là d'un capitalisme à vocation industrielle, et non financière. On parle de système financier. Mais on se fout du monde. A la tête de ces navires en folie, il y a bien des hommes et des femmes qui décident, qui conçoivent, qui dirigent, non ? A-t-on le droit de leur laisser faire n'importe quoi ? Pour moi c'est non. J'aurais l'occasion demain de revenir sur des solutions qui me paraissent plus humaines.
-
Je résume : (a) moins de dépenses de l'Etat ou en tout cas des dépenses mieux ciblées, sans aucun doute ; (b) ou bien fédéralisme politique, ou bien retour au concept d'Etat-nation, pas de demi-mesures dont on voit les limites et les nuisances ; (c) vigoureuses mesures de protection douanière contre les concurrences déloyales ; elles flattent et les statistiques de la croissance et les vices de quelques puissants ; (d) non à l'argent comme marchandise : c'est un moyen, et non un objet. Pas d'actions en bourse, seulement des obligations nominatives et incessibles, une définition plus claire des objectifs assignés aux banques (ce ne peut être un beau bilan, de beaux dividendes, de gros bonus, des traitements mirobolants ; non, non et non. Ce doit être le bien de tous).
-
Voilà pourquoi je crois que dans les grandes lignes Gaël GIRAUD dit des choses intéressantes.
-
A demain.