dimanche 31 octobre 2010

Bernard Friot et les retraites

-
Ainsi que je l'ai déjà dit, je n'ai pas pu me procurer le livre de Bernard FRIOT sur les retraites. Néanmoins, j'ai reçu avant hier le message d'un ami de POITIERS qui me demandait ce que je pensais des propositions de cet économiste qui lui avaient été transmises par un tiers. C'est donc sur ce message et non sur ce livre que je réagis, en faisant l'hypothèse de départ que ce sont bien les positions de l'éminent collègue qui a publié cette étude. J'espère répondre ainsi, au moins provisoirement, à POTOMAC.
-
Bernard FRIOT est économiste ET sociologue. Il enseigne à l'Université de PARIS X (Nanterre ?). Il a donc une double formation. Avant de dire pourquoi cette analyse me paraît irrecevable, je vais m'efforcer de vous la transmettre, à partir de ce message, j'insiste bien sur ce point, et non à partir du livre. Ceci signifie que le message anonyme a très bien pu déformer les propos de l'auteur.
-
Le message porte donc sur l'article qu'a publié Bernard FRIOT : "Financement des retraites : l'enjeu des cotisations patronales." Il commence par en citer quelques extraits : "On oublie toujours, quand on raisonne sur l'avenir des retraites, que le PIB progresse d'environ 1,6 % par an, en volume, et qu'il double, à monnaie constante, en 40 ans. C'est pourquoi nous avons pu multiplier par 4,5 les dépenses de pension depuis 1960."
-
L'auteur du message s'indigne qu'une telle information ait été passée sous silence et s'en sert pour fustiger la reforme des retraites. Par un calcul (exact), il indique que dix actifs produisent aujourd'hui un gâteau de 100 et qu'ils ont à charge 4 retraités. Quatorze personnes se partagent donc un gâteau de 100, soit 7,14 par personne. Si dans quarante ans, 10 actifs produisent un gâteau de 200 et qu'ils ont à charge 8 retraités, ce sont 18 personnes, dit-il, qui se partageront un gâteau de 400, soit 11,1 par personne. Et l'auteur du message de poursuivre en prétendant que ce sont les patrons qui veulent faire des plus-values boursières sur les 40 % de part salariale qui représentent les "fameuses cotisations patronales" (dixit l'anonyme du message). Et de rager, en prétendant que les patrons veulent faire main-basse sur ce qu'il appelle des "salaires différés".
-
Je ne vais pas faire l'injure à Bernard FRIOT d'avoir produit une telle analyse. Si c'était le cas, je douterais de ses compétences, ceci pour plusieurs raisons.
-
(a) Les chiffres de références qu'il donne prennent pour point de départ l'année 1960, en pleine période des Trente Glorieuses, avec des investissements énormes liés à la reconstruction de la France (après la guerre), et la nécessaire industrialisation. L'auteur du message semble méconnaître ce point, et il fait l'hypothèse très hasardeuse que le PIB continuera de croître sur le même rythme. On peut penser que cette hypothèse est fausse ; (1) en raison de la concurrence internationale, de la mondialisation, du développement des pays émergents (Chine, Inde Brésil), les parts du marché mondial dont nous disposons ont toutes les chances de diminuer et ne pourront être compensées entièrement par l'accroissement de la population française ; (2) nous ne pouvons continuer de vivre sur un mode de développement qui épuise les richesses naturelles, les pille, et les gaspille, et on peut imaginer que les théoriciens de la décroissance vont sans doute faire valoir leur point de vue, un point de vue plus respectueux des générations futures et de l'avenir de la planète.
-
(b) Le concept de 'salaire différé' en matière de retraite est une imposture. Si cela était vraiment le cas, cela voudrait dire que la retraite par répartition est en réalité une retraite par capitalisation, et que nous serions assurés de voir intégralement réparties, au moment de la retraite entre tous les cotisants, les sommes mises de côté pendant la durée de cotisation, et seulement aux cotisants concernés par cette période. Or justement, la retraite par répartition consiste à faire payer par les actifs les pensions des inactifs, en mutualisant totalement les cotisations (ou presque, car les régimes spéciaux échappent à ce système), et en faisant le pari que le renouvellement des personnes rentrées en "inactivité" sera assuré par celles qui rentrent dans "l'activité". C'est précisément parce que c'est un pari dont les termes initiaux ont grandement changé que le problème se pose. Il y a une solution alternative à cette solution. Elle consiste à ne plus payer de cotisations sociales, ni patronales, ni ouvrières, à verser la totalité du fruit du travail aux salariés, et à laisser à l'épargne le soin de régler la question ou à la solidarité celui de prendre en charge ceux qui, faute de ressources, n'auraient pu suffisamment épargner pour assurer leurs vieux jours. Est-ce cela que veut l'auteur du message qui joue entre les deux solutions, celle du salaire différé, et celle de la solidarité, pour étayer une démonstration boiteuse ?
-
(c) Je ne sais pas où l'auteur de ce message a puisé ses renseignements sur la démographie prévisible des inactifs. Je sais simplement que j'ai vu récemment dans divers journaux, que la France comptera très vraisemblablement près de 200.000 centenaires au milieu du siècle. Je ne vois pas comment cet allongement de la durée de vie peut aboutir aux chiffres donnés par cet auteur.
-
(d) Enfin et surtout, je constate que l'analyse est fortement idéologique. Cela n'est pas grave en soi. Tout le monde a le droit de penser que MARX a raison EN TOUT. Mais il serait plus honnête que l'auteur dise d'où il parle, et ne tente pas de faire passer pour information objective ce qui est une analyse fortement contestable sur le plan économique, fausse (pour ne pas dire plus) sur le plan intellectuel, et teintée très fortement de haine de classe.
-
Je ne peux pas imaginer que le livre de Bernard FRIOT reprenne ces arguments sans les nuancer, sans marquer les hypothèses et leur niveau de vraisemblance, et sans comparer ses solutions avec des solutions alternatives. Voilà ce qui, intellectuellement, me paraît honnête.
-

samedi 30 octobre 2010

Réponses à divers commentaires

-
Sur les Lumières.
-
Qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai jamais dit. Je reprends donc ici mon argumentation, à l'intention d'un lecteur dont je lis seulement ce matin le commentaire et qui juge dangereux l'opinion (partagée par un nombre croissant de personnes, je le précise) que j'exprime dans le billet : "Il est temps d'éteindre les Lumières".
(a) Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait pas de valeurs universelles. J'ai dit simplement que les Lumières n'étaient pas porteuses de [la totalité de] ces valeurs et que leur niveau d'analyse est identique à celui des Chinois et de CONFUCIUS. J'ai aussi dit que la France s'est servie de ces idéaux prétendus universels pour tenter d'imposer sa prépotence culturelle et politique au monde entier. Et que cette prétention nous a valu d'être trouvés insupportablement arrogants aux yeux des autres peuples.
(b) Le seul message vraiment universel que je connaisse, et qui prouve son universalité par l'adhésion profonde, existentielle, d'hommes et de femmes de toutes races, de toutes cultures, de toutes conditions sociales, est celui de Jésus. J'ajoute que la prétention des Lumières à l'Universel s'appuie sur cette réalité christique, et qu'elles ne l'eussent jamais théorisé si Jésus n'avait dit : "Allez dans le monde entier. De toutes les nations, faites des disciples".
(c) Pour que ce message soit entendu, il faut rentrer dans un mode de relation très particulier avec l'autre : reconnaître en lui le visage de Dieu.
-
Sur l'histoire et sur les contestations qu'a faites Rama YADE, à propos de "l'Afrique qui commence à peine à rentrer dans l'histoire".
-
(a) J'ignorais que Rama eut fait cette remarque. Mais si elle l'a faite, c'est par méconnaissance de ce que signifie l'histoire, qu'elle assimile à la civilisation ou à la culture. C'est là qu'intervient la fameuse objurgation de CONFUCIUS sur la "rectification des noms". Pour comprendre ce qu'est l'histoire, il suffit simplement de s'interroger sur l'existence de la préhistoire, de se demander pourquoi l'on a cru bon d'isoler cette branche particulière du savoir, de l'histoire proprement dite et de la protohistoire.
(b) On constate alors que l'histoire commence avec l'écriture, à SUMER plus de trois millénaire avant J.-C., en CHINE à sensiblement la même époque, en ÉGYPTE également. Autrement dit, pour qu'il y ait histoire, il faut que des hommes aient relaté des faits qui leur étaient contemporains et qu'ils les aient datés (peu importe le calendrier utilisé). S'ils relatent des faits très anciens, on les soupçonnera d'avoir rédigé des écrits mythiques en les parant des couleurs de l'histoire. Ainsi en Chine, à propos des Empereurs mythiques, CONFUCIUS a-t-il paré YAO, SHUN, les Augustes Souverains, de couleurs historiques parfaitement controuvées. Les peuples qui n'ont pas d'écriture n'ont pas d'histoire. Mais cela ne veut pas dire qu'ils n'ont pas de civilisation, de littérature (orale, transmise ainsi) ou d'art. C'est même le contraire, et c'est si vrai que les préhistoriens parlent de "culture" pour désigner un ensemble particulier de pratiques artistiques, artisanales, funéraires. On parle de la "culture des steppes", ou de la "culture azilienne", de la "culture de Bangpo" ou de "Longshan" [en Chine] ou de la "culture" de tel ou tel peuple.
(c) Sauf erreur ou ignorance de ma part, ce que j'admets tout à fait, peu de peuples africains ont connu l'écriture : les Égyptiens, plus tardivement les Éthiopiens, encore plus tardivement et avec l'arrivée des peuples arabes en Afrique du Nord, les populations du Maghreb. L'invasion de l'Afrique du Nord par les Vandales n'a pas été décrite par des Africains du Nord, mais par un auteur qui s'appelait PROCOPE et était de culture grecque. Assez curieusement, j'ai discuté pas plus tard qu'hier, avec un camerounais, homme distingué et cultivé, qui m'affirmait le plus sérieusement du monde que l'histoire de l'Afrique tropicale avait été écrite par des Africains sur des peaux d'animaux mais que le Portugais avaient falsifié ces documents. J'ai demandé des précisions que j'attends. Après tout, peut-être est-ce vrai. Mais il faut le prouver.
-
Autres remarques.
-
Une des remarques les plus fécondes que j'ai entendue, hier encore, est la suivante. Yves, un ami, me disait ceci : l'originalité et sans doute la supériorité longtemps maintenue de l'Occident sur le reste du monde tient à l'existence d'une double tradition, puisée à des peuples différents : la tradition philosophique grecque et ses nombreuses écoles (il n'y a pas qu'ARISTOTE et PLATON) et la religion chrétienne venue du judaïsme. Ces deux pensées se sont constamment frottées l'une à l'autre, sans jamais empiéter sur leur domaine respectif. Il en est résulté une stimulation réciproque et continue. Cette idée mériterait d'être creusée. Car abandonner un domaine (celui de la religion, par exemple ; même si je n'aime pas ce mot, dans le cas qui nous intéresse, il est opératoire) revient à marcher sur une jambe. Même remarque si l'on oublie la philosophie. Il faudrait voir comment cette stimulation réciproque s'est faite et en repérer les étapes. Mais cette remarque me paraît lumineusement juste. En somme l'erreur des Lumières seraient d'avoir voulu régenter un domaine qui n'était pas de sa compétence. Réciproquement, l'erreur du clergé, des théologiens, de l'Église-institution aurait été de vouloir régenter la pensée dans un champ qui n'était pas de sa compétence, celui de la société et de la politique.
-
L'historiette promise hier vous sera relatée demain.

vendredi 29 octobre 2010

Femme politiquement incorrecte, suite

-
Je vous promettais hier de vous donner la suite de l'interview de madame Malika SOREL. La voici. Et comme promis, je vous raconterai une petite anecdote dont j'ai été le témoin avant-hier. Pour les références de ma source, reportez-vous au billet d'hier.
-
"Question 4 : Qu'opposer aux doctrines que vous dénoncez ?
Réponse : Rien d'autre que le modèle d'intégration républicain qui fonctionnait très bien ! On doit doit accueillir les gens dans la communauté française et non l'inverse. Ils doivent respecter le système français. Si on avait fait ça, on aurait suscité le désir d'intégration. Mais comment y parvenir quand on injecte 200.000 nouveaux entrants par an dans une société en proie à des des difficultés majeures ? C'est irresponsable, grave et fondamentalement dangereux. Il est évident que là réside le défi des prochaines années : si l'on continue comme aujourd'hui, nous irons vers des troubles majeurs. Trop de gens arrivés récemment n'éprouvent plus le besoin de respecter la loi de la République, et reconstituent leurs sociétés d'origine sur le territoire français... Si rien n'est fait pour y mettre un terme, la pression va devenir rapidement intenable.
-
Question 5 : Quelles pressions, justement, exercent ces sociétés reconstituées ?
Réponse : Dans les cultures maghrébines et africaines, le groupe prend possession de l'individu. Or, plus la société est déstructurée et permet des accommodements, plus les membres des groupes mieux structurés sont tentés de bafouer les règles françaises, qu'on peut défier à moindre risque. La culture de l'école de la République est aussitôt rejetée parce qu'elle ne correspond pas aux normes culturelles d'origine. Le racisme antiblanc est une réalité. L'insulte suprême utilisée, c'est "céfranc". Les professeurs nous le disent : être sérieux en cours, c'est déjà, pour certains, vouloir devenir français : une honte, car assimilé à une traîtrise. Les bons élèves sont, de ce fait, de plus en plus soumis à des pressions par les enfants de la même origine culturelle.
Le fait que les institutions françaises - la police et l'école - soient attaquées - n'est évidemment pas anodin. Or on continue à excuser les auteurs de ces attaques, à les déresponsabiliser en invoquant leurs conditions sociales. Or, ces mêmes populations, avec des conditions sociales nettement inférieures, ne se comportent pas ainsi dans leur pays d'origine. C'est bien la preuve que l'attitude de notre société a joué un rôle déterminant dans l'apparition des problèmes que nous connaissons.
-
Question 6 : Vous accusez le droit du sol. Pourquoi ?
Réponse : Devenir français est un processus qui doit être personnel, car il faut être prêt à assumer d'inscrire ses propres descendants dans un nouvel arbre généalogique qui n'est pas celui de ses ascendant biologiques et culturels. Il y a là une véritable rupture, très difficile à assumer. C'est pourquoi aujourd'hui, pour une multitude de raisons, peu de gens ont le désir de devenir français. Ils prennent les papiers parce qu'ils savent que c'est le sésame avec lequel ils n'auront plus jamais faim. Ils sont honnêtes et ils l'avouent : je ne suis pas français, j'ai juste les papiers. C'est la classe politique, dans son ensemble, qui ment et occulte ce que signifie l'identité française. La communauté française reste pour l'instant silencieuse car elle est bâillonnée mais, comme dans tous les pays du monde, elle n'est pas prête à accepter comme françaises des populations étrangères à son identité. Il y a aujourd'hui, en France, une négation fondamentale du droit des Français à être français.
-
Question 9 : Que pensez-vous de la déchéance de la nationalité ?
Réponse : Il faut la mettre en place. Et il faut cesser de donner la nationalité à tout le monde. Les gens qui risquent aujourd'hui la déchéance de la nationalité n'auraient jamais dû l'obtenir. Il faut vraiment que les politiques s'occupent de toutes ces questions très rapidement. Beaucoup, parmi eux, sont habités par la peur car les populations de l'immigration leur apparaissent comme ayant facilement recours à la violence. Il va pourtant falloir avoir le courage de traiter toutes les dimensions de ce sujet. C'est dans l'intérêt de tous. Notre société est chaque jour plus déstabilisée. C'est la cohésion nationale qui est désormais en jeu ! Tout accepter met la France par terre !"
-
Je rappelle à mes lecteurs que madame Malika SOREL est d'origine algérienne, et je leur fais remarquer que si un homme politique français avait tenu ces propos, tous les bien pensants de gauche et d'ailleurs, tous les cultureux et d'autres qui vont passer du bon temps au Maroc, tous les média eussent crié à la xénophobie et au racisme. Or il n'y a aucune violence dans ces propos, simplement beaucoup de bon sens lié à une intelligence aiguë, et à une connaissance du sujet par l'intérieur.
-
Voilà l'anecdote dont j'ai été le témoin. Dans une boutique de produits exotiques, quatre adolescents africains discutent entre eux dans une langue incompréhensible pour nous, sans doute celle de la région d'origine de leurs parents. Ils me bousculent, mais pas plus pas moins que d'autres adolescents. Au moment où ils vont quitter le magasin sans avoir rien acheté, je vois que l'un d'eux dissimulent dans sa main un citron vert. Et moi de lui dire : "Ça serait bien si tu payais ton citron". Il me réponds goguenard : "Il me l'a donné". J'avise le propriétaire du magasin, un homme souriant et aimable, d'origine maghrébine qui répond : "C'est vrai ! Je lui ai donné." Les jeunes sortent. Je dis alors : "Il l'a volé, n'est-ce pas ?" - "Oui ! J'ai dit que je l'avais donné. J'ai eu tort." Il ne me revient pas d'interpréter les attitudes respectives des protagonistes de la scène. Je vous la livre pour ce qu'elle vaut, en vous laissant tirer les conséquences que vous pensez pouvoir en tirer.
-
A demain, pour une autre historiette qui en dit long sur ce sujet.
-

jeudi 28 octobre 2010

Encore une femme politiquement incorrecte

-
Madame Malika SOREL est née en France, y a passé les dix premières années de sa vie, avant de suivre ses parents en Algérie, dont ils sont originaires. Après de très belles études là-bas, elle revient en France, suit le troisième cycle de Science Politique à PARIS. Elle est membre du Haut Conseil à l'intégration. Je dois ces renseignements à un ami alsacien qui m'a aussi transmis la copie de l'interview que madame SOREL a donné dans le N° 571 (octobre 2010) du Spectacle du monde. Il est très important, pour la suite, de bien avoir en tête que madame SOREL est d'origine algérienne, et qu'elle a quelques connaissances de la question de par sa formation intellectuelle, et ses fonctions dans le Haut Conseil à l'intégration. A la suite de la publication de son livre Le puzzle de l'intégration : les pièces qui vous manquent (Éditions des Mille et Une Nuits, Paris, 2007), et compte tenu des difficultés croissantes que les citoyens français rencontrent au contact de certains immigrés ou enfants d'immigrés, notamment maghrébins et africains, la revue a jugé utile de recueillir l'avis d'une personne que l'on ne peut accuser de racisme ou de sympathies xénophobes. Voici quelques réponses aux questions posées par la journaliste du Spectacle du Monde.
-
"Question 1 : Pourquoi avez-vous écrit ce livre ?
Réponse : Les émeutes de 2005 m'ont poussé à écrire ce livre parce que je me sentais responsable de n'avoir, alors, rien dit. Moralement, mais aussi sur le plan affectif, je ne supportais plus cette injustice vis-à-vis du peuple français : les Français sont bâillonnés ; et quand ils osent s'exprimer, on leur fait un procès en racisme ou en xénophobie, alors qu'ils veulent simplement préserver leur identité. Mes origines me permettaient, peut-être, de dire que la véritable victime de l'immigration est le peuple français.
-
Question 3 : Pourquoi l'idée de "discrimination positive" est-elle dangereuse à vos yeux ?
Réponse : Parce que c'est une escroquerie. L'intégration n'est pas un ascenseur automatique, mais un parcours d'obstacles ! L'idée que l'on puisse progresser dans la société de manière passive est absurde. C'est un engagement sur plusieurs générations, la famille entière doit s'engager autour du projet éducatif. Aujourd'hui beaucoup d'élèves ne font plus rien. Il faut arrêter de les bercer de mensonge : pour réussir, il faut se prendre en main. Et puis, la "discrimination positive" est injurieuse pour les immigrés eux-mêmes : on part du principe que les gens issus de l'immigration n'y arriveront pas seuls parce que les Français les détesteraient. Quand vous travaillez dans une équipe, il faut acquérir sa légitimité auprès des autres. Si vous n'avez pas respecté le même processus de sélection, c'est impossible. Pour devenir légitime, les personnes issues de l'immigration doivent se plier aux mêmes exigences que les autres.
-
Question 4 : Vous êtes également très sévère avec la HALDE...
Réponse : Elle joue un rôle d'exaspération et de crispation entre les groupes. Elle passe le plus clair de son temps à exacerber les tensions en disant que les gens issus de l'immigration sont victimes de notre société, alors que c'est l'ignorance des codes sociaux et culturels qui empêche les jeunes d'être recrutés. [...]. [...]il faut à terme que [la HALDE] disparaisse. Le système judiciaire français est là pour traiter les vraies affaires de discrimination. On n'a nul besoin d'une institution qui participe, vraisemblablement sans le vouloir, à dresser les gens les uns contre les autres."
-
Je continuerai demain à vous donner connaissance des réponses explosives de madame SOREL. Ce que j'aime chez elle, dont je suis fier d'être le compatriote, c'est son amour de la France, sa manière de présenter les problèmes, l'affirmation sans complexe de ses origines algériennes, la haut niveau de réflexion. Et puis je vous raconterais une scène vécue hier dans un magasin de produits exotiques, qui illustrent parfaitement ce que dit Malika SOREL, une femme politiquement incorrecte.
-
A demain donc.
-

mercredi 27 octobre 2010

Une femme politiquement incorrecte

-

Notre jeune et jolie secrétaire d'état au sport, Rama YADE, vient de publier un petit ouvrage intitulé Lettre à la jeunesse. Les journaux en ont peu parlé. Et pour cause. Rama est politiquement incorrecte. Tout de même, Le Point du 7 octobre (N°1986), après avoir consacré un article fort intéressant à la jeune femme, publie une bonne feuille de cette lettre. Je me fais un devoir de vous la communiquer :
-
"Contrairement aux vains débats de ces dernières années, ni la question des moyens (nous dépensons plus que voisins pour l'éducation nationale), ni la qualité de nos enseignants (qui sont bons) ni le nombre d'élèves par classe (pas plus élevé que chez nos voisins) n'expliquent la gabegie : le fond du problème est le collège unique. Crée en 1975, il prévoit que l'entrée au collège, après le primaire, est accessible à tous et que la formation y est la même pour tous. Autant dire un moule homogène auquel les élèves doivent se conformer... ou pas. Pour ceux qui n'y arrivent pas, c'est le découragement qui guette (...). A moins qu'ils ne finissent par en être exclus. Comme de toutes les façons, avec le collège unique, tout le monde doit être conduit au forceps jusqu'en troisième, ils seront obligatoirement re-scolarisés dans un autre collège. On tourne en rond. [...]. En démocratisant massivement l'accès à l'enseignement secondaire, on avait sans doute eu de bonnes intentions : répondre à la passion profonde des Français pour l'égalité. Le problème c'est que vouloir faire faire la même chose à tout le monde ne fait pas l'égalité des chances. L'école républicaine, version collège unique, n'a pas su gérer la diversité des situations et des aptitudes. [...]."
-
Voilà des propos de bon sens, qui ont le mérite de prendre en compte les situations concrètes. La véritable égalité des chances consiste à donner les mêmes possibilités à ceux qui ont des aptitudes analogues ou voisines ainsi que des vocations et des désirs proches. Mais dire cela est politiquement incorrect. Pourtant, je puis vous affirmer qu'ayant conduit des dizaines d'entretiens (sur la prise en charge des élèves en difficultés) auprès de personnels de l'Education Nationale dans près de 20 % des collèges du Bas-Rhin, c'est bien ce lancinant problème qui était constamment mis sur le tapis par mes interlocuteurs. Vous pouvez consulter les références de cette étude sur le site internet de l'Institut pour la Promotion du Lien Social.
-
Je vous parlerai bientôt d'une autre femme politiquement incorrecte. Mais saluons déjà le bon sens, le sens de l'homme concret de notre pétillante ministre.

mardi 26 octobre 2010

Quand un prix Nobel se pique de non-morale

-
En 1970, Jacques MONOD déclarait : "La connaissance vraie ignore les valeurs". Il rejetait hors du domaine de la science tout ce qui relevait de "l'éthique individuelle ou collective "par essence non-objective" ajoutait-il.
-
Voilà qui est terrifiant. Car si la science vraie ignore les valeurs, j'aurais aimé savoir sur quoi se serait appuyé MONOD pour condamner les "expériences" conduites par les médecins nazis dans les camps d'extermination, expériences qui cherchaient à déterminer, par exemple, les limites de la résistance humaine à la souffrance, au manque de sommeil, ou aux toxiques.
-
En fait, notre prix Nobel défendait là une position intenable. Mais bien avant lui, toute une pléiade de savants, au nom du transformisme, de l'objectivité de la science, de "l'observation" (disaient-ils), justifiaient l'esclavage, et notamment l'esclavage des sujets africains : on n'en finirait pas de citer les noms de ces "savants" et des horreurs qu'ils ont écrites en vertu de la science. Ainsi, au milieu du XIXe siècle, VOGT osait dire "La crainte des conséquences pratiques ne doit jamais avoir aucune influence sur les conclusions scientifiques. La nature n'est pas faite pour être l'esclave théorique de l'homme". Et c'est au nom d'une nature annexée par leur suffisance, que se fondant sur des "observations" prétendues scientifiques, il osait dire que les noirs étaient plus près des singes que de l'homme blanc. Et il ajoutait, tenez-vous bien : "Il nous sera fort égal que le démocrate des Etats du Sud trouve, dans les résultats de nos recherches, la confirmation ou la condamnation de sa prétention que l'esclavage est ordonné par Dieu [...], ou que le Yankee, dans son orgueil de race, qui lui permet de manger ce qu'un nègre a préparé pour sa table, mais qui lui défend de s'asseoir à côté d'un nègre dans la même chambre ou dans le même wagon, cherche un appui dans nos allégations." VOGT enseignait à GENEVE.
-
Mais pas le Docteur Julien-Joseph VIREY qui disait : "le nègre est et sera toujours un esclave ; l'intérêt l'exige, la politique le demande, et sa propre constitution s'y soumet presque sans peine". Ce "savant" était français. Mais d'autres savants, français ou étrangers lui emboîtaient le pas, sur le même ton, avec la même virulence ignoble : Georges CUVIER, Samuel-Thomas SÖMMERING, Charles WHITE, William LAWRENCE, et notamment TIEDEMANN qui jugeait, avec une hypocrisie abominable, l'esclavage naturel dans son existence, mais politiquement détestable. Il faudrait encore mentionner GOBINEAU et son Essai sur l'inégalité des races. GRATIOLET, BROCA, élaboraient des théories racistes tout aussi scientifiques. Il faudrait que je cite encore Abel HOVELACQUE, linguiste et anthropologue. Tous ces hommes avaient en commun une haine viscérale du christianisme, et étaient profondément anti-religieux, tout comme MONOD, du reste, qui l'a dit haut et fort. Je vous renvoie aussi au billet que j'ai consacré au discours honteux de Jules FERRY prononcé en juillet 1898, par lequel il défendait le droit des "races supérieures "à imposer la civilisation aux "races inférieures".
-
Pour l'honneur de la science et de la politique, il s'est trouvé quelques savants comme Frédéric LACROIX, ou hommes politiques, comme Victor SCHOELCHER, pour condamner, le premier la "colossale bouffonnerie" des travaux de CUVIER ou de VIREY, le second pour lutter contre une atteinte si grave à la dignité humaine.
_
Mais pour ces savants-là, il s'agissait de lutter contre "le mythe d'Adam" et le monophylétisme, ou théorie qui fait descendre d'un ancêtre unique l'humanité entière, affirmation proclamée par l'Eglise dès son origine.
-
Ne croyez pas que le XIXe siècle a le triste privilège de défendre ces théories. Encore en 1907, un certain THULIE osait dire : "Il y a des races qui sont restées dans une immobilité presque totale et ont été incapables de s'organiser en société".
-
Pour terminer, je voudrais citer un passage de l'article de Claude BLANCKAERT, publié dans le Volume I de la livraison Des Sciences contre l'homme, Éditions Autrement, série Science et société, N°8, Paris, 1993 (j'y ai puisé les citations et les noms des chercheurs que j'ai évoqués plus haut) :
"Aussi bien est-il permis à l'historien, au philosophe ou à l'honnête lecteur des ouvrages scientifiques de s'étonner. Les biologistes affirment souvent que la loi inflexible de la 'nature humaine' est génétiquement programmée, et qu'elle est sinon immuable, du moins fort contrainte dans ses accomplissements. Pourtant les biologistes ne cessent depuis un siècle de faire évoluer la notion commune que se font les hommes vulgaires : tour à tour définis par leur race, leur sang, leurs pulsions, leurs neurones, leurs gènes, ceux-ci se retrouvent assignés à une biologie en perpétuelle mutation. Qui plus est, on requiert d'eux qu'ils révisent régulièrement leur 'conception' de la nature humaine en fonction des 'progrès' d'une discipline dont les représentants sont loin d'être unanimes." [...]
"Le gouvernement des experts fait encore violence aux aspirations morales - risquons le mot- de tous ceux qui n'ont pas rejeté la problématique religieuse traditionnelle. Selon le récit biblique, Adam et Eve perdirent leur prétention au Paradis pour avoir mangé des fruits de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, 'un arbre inconnu de la science. C'est cette connaissance qui fait notre transcendance, notre danger, notre humanité' (citation de l'historien John GREENE entre ' ')".
-
Je sais ! Vous allez me dire que vous ne voyez pas ce que ce long billet a à voir avec l'actualité. Et pourtant ! Si les idéologies (dont tous les concepteurs affirment le caractère scientifique, de MARX à Adam SMITH et sa "main invisible du marché") consistent à ne pas se soucier de l'homme concret, le seul qui selon moi vaille que l'on s'intéresse à lui, elles ne peuvent être que fondamentalement insensibles aux valeurs, c'est à dire qu'elles sont immorales. Voilà pourquoi certaines formes de grèves sont fondamentalement empreintes d'immoralité. Mais voilà pourquoi aussi la cupidité et la volonté d'accaparement des plus riches sont tout aussi immorales et sans doute plus, car ceux-ci n'ont pas l'excuse de l'ignorance.
-
J'espère ne pas vous avoir enquiquiné avec ce prix Nobel qui se pique de non-morale. Mais quelqu'un n'avait-il pas dit, il y a assez longtemps : Science sans conscience n'est que ruine de l'âme". J'ajoute que ce billet est tout particulièrement destiné à un lecteur ami qui comprendra pourquoi c'est maintenant que je produit ce poulet.
-

lundi 25 octobre 2010

Effaré, je suis effaré

-
C'est une chose entendue : le droit de grève est un droit constitutionnel. Il donne aux grévistes un droit unique : celui de cesser de travailler ; mais il ne leur donne pas le droit d'empêcher les autres de le faire. Or c'est très exactement ce que les ouvriers et employés des dépôts de carburants sont en train de nous imposer.
-
J'ai entendu le responsable syndical de l'un de ces dépôts dire que ce qu'il cherchait était de provoquer un maximum de dégâts économiques. Il ne précisait pas dans quel secteur, et sans doute peut lui importait. Cette position implique deux dispositions d'esprit particulières et peut- être même plus. (a) Ce responsable défend les intérêts d'un groupe au détriment d'autres groupes sociaux ; il ne cherche pas le bien de tous, mais un bien particulier ; son raisonnement a sans doute une valeur idéologique et politique, mais il n'a aucune valeur morale. Il ne doit donc pas s'étonner, dès lors, de trouver devant lui des groupes ou des personnes tout aussi dépourvues de moralité. Je le redis pour la cinquième fois dans ces billets : le propre de l'idéologie est d'être insensible au sort de l'homme concret. Foin des artisans, des professions libérales, des agriculteurs, des commerçants qui, simplement pour vivre, ont besoin de se déplacer. Qu'ils crèvent, pouvu que nous leur survivions ! (b) Ce responsable, en deuxième lieu, raisonne comme Louis XV : "Après lui, le déluge". Il y a des entreprises au chômage technique dont les employés sont privés de salaire ; le pays est obligé d'importer à grands frais des produits pétroliers de Belgique, de Hollande, d'Italie, et aggrave ainsi le déficit du commerce extérieur, qu'il faudra financer par un emprunt que tous les Français, les employés des dépôts y compris, devront rembourser. (c) L'image de notre pays est durablement affectée : la France est synonyme de chaos, de désordre en tous genres, de pays dont les citoyens sont en grèves incessantes. Mais de cela, les responsables syndicaux (je ne parle pas des grands responsables, type Jean-Claude MAILLY, Bernard THIBAULT ou CHEREQUE) n'en ont cure. Ils donnent l'impression de vivre au jour le jour : "Puisque ces événements nous échappent, feignons de les organiser" semblent-ils nous dire. Ils ont ouvert la boîte de PANDORE et regardent, ébahis, les démons qui s'en sont échappés.
-
Il n'y aura ni vainqueurs, ni vaincus dans cette lutte suicidaire. Il n'y aura que des victimes. Et une aggravation prévisible de l'état de notre économie, d'insolubles difficultés quand il s'agira de parler plus tard des nouveaux et indispensables ajustements du régime des retraites et une pauvreté croissante. C'est ce que l'on appelle la solidarité dans le dénuement.
-
Je souhaite simplement qu'aucun des proches des irréductibles grévistes n'ait à être transporté d'urgence à l'hôpital et ne puisse le faire faute de véhicules approvisionnés en carburant. Ces aveugles n'auraient que leurs yeux pour pleurer, et ne pourraient s'en prendre qu'à eux-mêmes. Je souhaite que jamais ils ne voient leur réfrigérateur vide et qu'ils ne puissent le remplir en raison des ruptures de stock des magasins qui ne seraient plus livrés. Je souhaite que jamais ils ne soient obligé de laisser seuls leurs enfants à la maison, sans surveillance, au motif que les établissements scolaires sont fermés, les transports scolaires supprimés, et les personnes susceptibles de les dépanner incapables de se déplacer. Politique de l'autruche, l'un des animaux les plus bêtes de la création.
-
Effaré, je suis effaré devant tant d'inadaptation à la réalité, d'égoïsme, d'idiotie. Je redis ici qu'étant un privilégié, je comprendrais très bien que l'on diminuât le montant de ma pension pour permettre à d'autres d'en avoir une plus élevée. C'est même une proposition formelle. Je ne suis pas immortel, et je n'emporterai pas avec moi mes billets de banque. On me demandera, Il me demandera, simplement : "As-tu aimé ? " Comme je voudrais pouvoir répondre : "Oui, Seigneur, j'ai aimé". Mais sachant que ce serait un mensonge, je dirais :" j'ai essayé mais je m'en remets à ta miséricorde".
-
-

samedi 23 octobre 2010

Silence étourdissant

-

Il est au Parti Socialiste des hommes qui pensent. Mais on ne les écoute pas. Il y a deux jours, Manuel VALLS a affirmé que "l'allongement de la durée des cotisations étaient inévitable". J'ai vu cette information en bandeau défilant, sur une chaîne d'information continue. Curieusement, les médias nationa(lisés)ux n'ont pas repris cette information. Je crains fort que Manuel VALLS, dont j'ai toujours pensé beaucoup de bien pour sa probité intellectuelle, n'ait définitivement ruiné ses chances lors des primaires organisées pour la désignation du candidat du PS aux futures élections présidentielles. Et j'imagine qu'il a dû se faire copieusement enguirlander par les éléphants de son parti, notamment par madame AUBRY laquelle aurait besoin de consulter un ophtamologiste afin de corriger sa myopie partisane .

-

Parlons-en de ces éléphants. Ils sont démagogues, inconséquents, incompétents, et menteurs. Démagogues, car ils entretiennent dans leur clientèle ordinaire (fonctionnaires essentiellement, et nombreux salariés du privé) l'illusion que le système actuel des retraites peut être maintenu en l'état. Inconséquents, lorsqu'ils prétendent qu'il serait possible de régler le problème en augmentant les impôts (proposition vague) tout en réclamant une augmentation du pouvoir d'achat. Incompétents car ils sont incapables de proposer une réforme qui tienne compte de tous les éléments du problème (ils sont nombreux, complexes et sans aucun doute ; mais la défense des égoïsmes individuels et des avantages indus, le tout sur le ton déclamatoire du principe d'égalité, ne saurait tenir compte d'une analyse sérieuse). Et menteurs, menteurs par-dessus tout. Car s'ils veulent que notre pays maintienne son niveau de vie, produise des richesses et puisse les distribuer, il seront obligés de modifier le système actuel des retraites et la modification sera nécessairement douloureuse ; ils le savent et ne le disent pas, mais je peux vous garantir qu'ils le feront parce qu'il n'y a pas d'autre choix.
-
Ceci explique pourquoi les propos de Manuel VALLS n'ont été repris ni par les médias, imbibés de haine ou de dérision, ou de mépris contre le Président, ni par les membres éminents du PS, plus préoccupés des élections et de leur sort que du bien de notre patrie. Décidément, Manuel VALLS, s'il est isolé parmi les siens, mérite notre respect et notre estime pour son courage. Lui seul ose dire, comme le petit enfant du conte : "Le Roi est nu".
-

vendredi 22 octobre 2010

Lettre ouverte aux lycéens et étudiants

-
Chers lycéens,
Chers étudiants,

Vous manifestez bruyamment contre une réforme des retraites dont vous ne percevez, me semble-t-il, ni les raisons ni les enjeux. Permettez à un homme rentré dans la dernière partie de sa vie, qui a élevé six enfants, enseigné pendant quarante ans à l'Université, été chef scout pendant cinq ans au temps de sa jeunesse, de m'adresser à vous au nom d'une expérience dont vous ne pouvez vous prévaloir.
-
Il me semble que votre colère n'est pas tournée contre cette réforme, mais contre vous-même, et qu'elle traduit un mal-être très profond. Acceptez-vous que nous discutions en faisant appel à la conscience de chacun de nous et à la raison ? Acceptez-vous que l'on vous pose quelques questions ?
-
Connaissez-vous dans le détail les dispositions de cette réforme ?
Pouvez-vous dire avec précision en quoi elle vous lèse ?
Savez-vous qu'il y a d'autant plus d'emplois pour les jeunes qu'il y a de seniors actifs ?
Acceptez-vous le principe de la retraite par répartition qui fait payer les pensions des inactifs par les actifs ?
Connaissez-vous avec précision l'évolution de la démographie du monde du travail ?
Avez-vous des solutions pour trouver l'argent nécessaire au financement de pensions à une hauteur convenable ?
Pensez-vous qu'il n'y ait d'avenir professionnel que dans une situation de salarié ?
Croyez-vous que vous avez les aptitudes personnelles nécessaires pour créer votre propre entreprise ?
Trouvez-vous juste que les grèves n'aient qu'un seul but, celui de nuire au fonctionnement économique du pays ?
Accepteriez-vous de payer plus d'impôts pour abonder le fond de retraite ?
Accepteriez-vous de devenir chef d'entreprise ?
-
Vous êtes dans la protestation si chère aux adolescents. On vous manipule en vous assimilant à un groupe, et un groupe de pression, au service de l'ambition politique de tel ou tel responsable. Les médias, la presse en particulier, depuis trois ans, ne cesse d'accabler la personne du Président de la République, faute de pouvoir critiquer sur le fond les mesures qu'il prend. Mais la détestation d'un homme n'a jamais tenu lieu de politique. Et pour être crédible, il ne suffit pas de bloquer les portes des lycées ou des facultés avec des poubelles, voire d'y mettre le feu. Il faut avoir un projet, une vision de la politique, une vision de l'homme. Et je n'entends rien de tout cela, je n'entends que le cri d'une partie de la jeunesse, déboussolée par le manque de sens d'une civilisation marchande, consommatrice, hédoniste. Cela n'a jamais fait le bonheur, simplement le plaisir, ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Et quand je vois, comme hier, un cortège de jeunes manifestants dont l'une des meneurs porte un blouson de cuir du meilleur faiseur, et qu'un autre se balade avec un djambé de luxe en tapant dessus comme un sourd, je me dis qu'il y a des contradictions entre le discours et les comportements qui sont insupportables à tout esprit droit.
-
Votre seul devoir civique, je dis bien le seul, est de vous adonner de toutes vos forces à vos études, de trouver de sains loisirs en compagnie d'amis sûr, et de ne pas oublier que vous avez une conscience dont il convient de faire un constant usage.
-
S'il advenait qu'un leader étudiant lise ce message, je serais heureux qu'il réponde à mes questions. Je l'assure d'emblée de ma bienveillance, croit à sa bonne foi, mais pas forcément à la justesse de ses vues.
-
J'ai consacré ma vie professionnelle à des jeunes de votre âge. Je les ai passionnément aimés, et j'ose le dire, servis. Je leur dois des joies qui n'ont d'équivalent que dans les joies familiales. Et je suis désolé de voir que nombre d'entre eux réagissent aux sollicitations de la vie avec des réflexes de vieux. J'essaye de comprendre. Cela m'est difficile. Ce n'est pas une raison pour démissionner.
-
A tous ceux qui me liront, amitié, rude amitié, mais amitié vraie.

jeudi 21 octobre 2010

Pointes sèches

-
Elle se croit courageuse ; elle n'est qu'insolente. Elle pense qu'elle est intelligente ; elle parle comme un perroquet. La xyloglossie est une maladie contagieuse. Mais madame Audrey PULVAR est jolie. C'est sans doute pourquoi monsieur ESTROSI, en galant homme, n'a pas envoyé promener la péronnelle qui l'interrogeait sur je ne sais quelle chaîne de télévision numérique. Elle ne cherchait pas la vérité ; elle ne cessait de l'interrompre ; elle voulait l'entraîner à la faute, le déstabiliser. Il lui a quand même fait remarquer qu'elle ne le laissait pas parler. Personnellement, j'aurais quitté le plateau en expliquant publiquement que je refuserais désormais d'y mettre les pieds tant qu'elle officierait dans cette émission. C'est ce qu'on appelle l'objectivité dans l'optique pulvarienne.
-
Vue dans le métropolitain, ce matin, une petite affichette de la CGT. "Ma retraite (ou la retraite, je n'ai pas gardé en mémoire ce point), je veux décider", comme s'il s'agissait d'une question individuelle. Curieux pour un syndicat qui se réclame du marxisme, du collectivisme et nie la personne. Mais il n'en est pas à une contradiction près. La dialectique a toujours raison de la vérité, jusqu'au jour où le réel explose à la figure. C'est ce qu'on appelle la vérité dans l'optique marxiste.
-
Des manifestants bloquent ce matin les voies du RER A à ACHERES. La tradition prétendue contestataire ne s'est pas perdue à ACHERES, où vivent de nombreux agents de la SNCF. Je connais bien, très bien, cette ville pour y avoir été chef scout pendant 5 ans. A l'époque, le maire, une femme, était communiste. Il me souvient lui avoir demander un rendez-vous pour qu'elle me signe un papier qui m'eût permis, grâce au Conseil Général de Seine-et-Oise, d'obtenir du matériel (des tentes en l'occurrence) pour camper. Nous n'étions pas riches, et les familles des jeunes qui fréquentaient la troupe étaient de condition modeste. Savez-vous ce qu'elle m'a répondu ? "Mais je ne sais pas, moi, si votre dernier camp s'est bien passé. Je ne peux pas signer un papier qui atteste ce point-là". J'ai eu beau lui dire que s'il en avait été autrement, elle aurait eu vent de plaintes, de récriminations. Rien n'y a fait. Et elle a rajouté : "Si je vous aide, je retarde la paupérisation de la classe ouvrière, et la venue de la révolution". Et je n'ai pu obtenir ce matériel. Je précise que cette troupe scoute était chrétienne. C'est ce que l'on appelle la justice dans l'optique communiste.
-
La police, fort justement, lève le blocage des dépôts pétroliers. Qu'à cela ne tienne ! Les grévistes vont dégonfler les pneus des camions citernes dont les chauffeurs, non grévistes, attendent aux portes pour charger. C'est ce que l'on appelle le respect de l'autre dans l'optique syndicale.
-
Si vous estimez qu'il est temps de dire tout haut que la liberté ne consiste pas à faire tout ce que l'on veut, et que ces grèves sont non seulement injustifiées, mais désastreuses pour l'image de notre pays, pour notre économie, pour notre avenir, dites-le, et dites-le ici.

mercredi 20 octobre 2010

Les collectivités ne pensent pas

-
En cette période trouble où les foules, la passion et la déraison semblent submerger les médias, les citoyens, les syndicats et les hommes politiques, il est bon de se rafraîchir aux sources les plus pures de la réflexion. Je n'ai jamais caché l'admiration que je porte à Simone WEIL, trop tôt disparue. Souvent je l'ai citée. Et je vais aujourd'hui continuer à le faire car elle exprime des choses que tout être raisonnable, amoureux de la liberté, devrait sans cesse avoir en tête. Voici ce qu'elle dit dans cet essai admirable et d'une rare densité, Réflexions sur les causes de la liberté et de l'oppression sociale.
-
"Pas plus que l'homme n'est fait pour être le jouet d'une nature aveugle, il n'est fait pour être le jouet des collectivités aveugles qu'il forme avec ses semblables ; mais pour cesser d'être livré à la société aussi passivement qu'une goutte d'eau à la mer, il faudrait qu'il puisse et la connaître et agir sur elle. Dans tous les domaines, il est vrai, les forces collectives dépassent infiniment les forces individuelles ; ainsi l'on ne peut pas plus facilement concevoir un individu disposant même d'une portion de la vie collective qu'une ligne s'allongeant par l'addition d'un point. C'est là du moins l'apparence ; mais en réalité il y a une exception et une seule, à savoir le domaine de la pensée. En ce qui concerne la pensée, le rapport est retourné ; là l'individu dépasse la collectivité autant que quelque chose dépasse rien, car la pensée ne se forme que dans un esprit se trouvant seul en face de lui-même ; les collectivités ne pensent point."
-
Tout est dit. Dans ce livre, Simone WEIL développe plus longuement cette idée que ne le laisse percevoir cette citation. Mais déjà ce bref fragment ouvre à notre esprit une perspective de vérité.
-
Prétendre connaître la vérité de ce que pensent le peuple français à coup de sondage est au mieux une erreur intellectuelle, au pire une imposture et une manipulation. Les sondeurs peuvent nous dire que 59 % (ou 69 %, peu importe) de nos concitoyens demandent que les manifestations contre la réforme des retraites se poursuivent, même si la loi est votée, je dis que de ce sondage ne sort aucune vérité. La vérité, que chacun peut vérifier de ses yeux, c'est que si les Français étaient pour la grève, ils ne se précipiteraient pas aux pompes des stations-services pour faire leur plein de précaution, par exemple. Ils auraient la pudeur de soutenir les grévistes en minimisant les effets de leur mouvement sur la vie sociale ; ils argumenteraient avec des statistiques économiques, démographiques, sociales, pour montrer que cette réforme est inutile, injuste, inefficace. Ils donneraient de leur argent pour soutenir les caisses syndicales de solidarité en faveur des grévistes. Ils proposeraient des mesures, y compris douloureuses, pour remédier à la situation catastrophique des comptes sociaux. Bref, ils se comporteraient en citoyens solidaires (puisqu'ils n'ont que ce mot à la bouche) et responsables. Le comportement de nombre d'entre eux - ne généralisons pas - me semble bien éloigné des valeurs affichées par les responsables syndicaux. Il me semble refléter plus vraisemblablement le chacun pour soi.
-
Allons, encore une petite citation, cette fois-ci de Thomas MERTON. Ce moine trappiste, auteur entre autre de ce 'best seller' intitulé La nuit privée d'étoile, a écrit dans un autre ouvrage, remarquable à tous égards, Nul n'est une île :
-
"Une société dont le seul but est d'éliminer la souffrance et de donner à ses membres les plus grands conforts et les plaisirs les plus recherchés est condamner à périr." Bien entendu, il ne s'agit pas de justifier la pauvreté, et ce n'est pas ce que dit MERTON dans son livre, bien au contraire. Ce qu'il fustige, ce sont les courtes vues de l'hédonisme et du plaisir à tout prix, y compris à celui du sang des plus pauvres et des plus faibles. Je dois dire que je ne mets pas les conducteurs de TGV ou de trains dans cette population.
-

mardi 19 octobre 2010

Histoires vraies

-
Première histoire.
Mathilde vient de démissionner de son emploi. Elle était en CDI, mais elle ne supportait pas le bruit des travaux qui se faisaient dans l'entreprise où elle travaillait à deux pas de chez elle. En ces temps où les emplois sont rares, il faut être soit inconscient, soit amoureux risque. Mais Mathilde est plutôt inconsciente. Un voisin, la croisant dans la rue, discute avec elle, et lui suggère d'envoyer son CV à un de ses amis, susceptible de la recruter dans sa compétence. Il contacte cet ami pour la recommander et lui indique que le CV va être envoyé. L'ami accepte de recevoir Mathilde que le voisin prévient de ces bonnes nouvelles. Mais entre temps, Mathilde a été recrutée par une instance prestigieuse à la porte de laquelle des dizaines de candidats (malheureux) se pressent en vain. Le CV de Mathilde n'est pas très fourni. Mais enfin elle a convaincu le recruteur. Elle bénéficiera d'un statut très privilégié dans la fonction publique. Le voisin la croise, la félicite, et celle-ci répond d'un ton furieux : "C'est de l'esclavagisme ; bientôt il faudra payer son employeur pour trouver du travail, etc." Et elle se répand en amertume en raison de la prétendue modicité de son traitement, alors qu'elle n'aura chômé qu'un petit mois, et que son lieu de travail est à 5 min à pieds de chez elle, ce qui lui permet de remplir au mieux ses obligations de mère de famille. [Je garantis l'absolue véracité de cette histoire. Le prénom a été changé, et les détails permettant d'identifier Mathilde n'ont pas été donnés.] Pour Mathilde, c'est l'emploi qui doit se plier à son désir.
-
Deuxième histoire.
Josiane a 48 ans. Elle a travaillé pour une compagnie d'assurance, géré un restaurant de poissons avec son mari, fait le guide touristique dans un château en Provence. Elle est mère de trois enfants. Les emplois qu'elle occupait sont précaires. Elle les perd. Après trois ans et demi de chômage et plus de 2.000 CV envoyés sans succès, elle décide de se prendre en main et de créer sa propre entreprise en Bretagne, Digital Story pour la nommer. Cette micro-entreprise se consacre au montage de récits de vie sous forme de petits films ou d'album de photos. Josiane a été aidée pour le lancement de son affaire par l'Adie (Association pour le droit à l'initiative économique ; téléphone vert : 0 800 800 566) qui lui prête 1500 euros pour acheter un ordinateur, un scanner, une plastifieuse. Les affaires tournent si bien, qu'après avoir remboursé son emprunt, elle s'apprête à en contracter un nouveau pour acheter un nouvel appareil de photo. (Cette histoire est racontée par le Journal gratuit 20 minutes dans son numéro daté du 14 octobre 2010). N'hésitez pas à confier vos travaux à cette femme courageuse qui n'attend pas que tout lui tombe rôti dans le bec. Josiane a écouté son désir de vivre, et a compris que le remplir ne dépendait pas des autres mais d'elle.
-

lundi 18 octobre 2010

Les hommes de ce temps ont des bleus à l'âme

-
Je ne mets pas en doute un seul instant la bonne foi des leaders syndicaux dans la contestation qu'ils mènent contre la réforme des retraites. Je mets en cause la justesse de leurs analyses, et par conséquent la justice de leurs actions. Tout ça mérite une explication.
-
Que les leaders syndicaux défendent les intérêts de leurs adhérents, c'est tout à fait légitime. Mais qu'ils le fassent en considérant que ceux-ci forment des groupes complètement indépendants de la société dans laquelle ils vivent, est une erreur de perspective fondamentale qui ne peut conduire qu'à des impasses. Penser que l'on agit justement parce que l'on est le plus fort (j'ai déjà évoqué dans un billet l'opinion de notre grande Simone WEIL sur cette position, hélas très répandue) est tout simplement le comble de l'injustice. Car si nous avons besoin d'agents de la SNCF ou de la RATP ou de dockers, ou d'ouvriers des raffineries, eux ont besoin de plombiers, d'électriciens, de médecins, de boulangers, de bouchers, que sais-je encore. Et la qualité de salarié ne donne aucun avantage particulier dans le champ social sur celle d'indépendant. Qu'arriverait-il si les médecins cessaient tous de travailler ? Et pourquoi faudrait-il qu'interrompre les transports fût de moindre gravité que de cesser de soigner les malades ?
-
Alors, il faut revenir à la réalité : les Français sont attachés, justement, au système de retraite par répartition. Dans ce système, les actifs cotisent pour les inactifs et l'on répartit ce qu'il y a dans le pot. Il se trouve que pour diverses raisons, le pot est devenu sinon minuscule, du moins petit et que son contenu doit être distribué à un nombre croissant d'ayant-droit. Il est donc nécessaire de l'abonder. Quand madame AUBRY proclame qu'il faut tout remettre à plat, elle admet sans le dire que le système est à bout de souffle. Si la seule solution consiste à augmenter l'impôt, déjà fort lourd en France, ce sont les classes moyennes qui vont encore payer. Je reviens à mon idée de prélever sur les dividendes versés aux actionnaires, et de verser ce prélèvement à une ou des caisses de compensation (une par entreprise ? une caisse générale ?) pour augmenter le montant des pensions.
-
En vérité, il me semble que ces protestations traduisent un malaise plus profond, une sorte de mal-être propre à nombre d'hommes et de femme de la post-modernité. Ils ont des bleus à l'âme, et protester sans raisons valables, quoi qu'ils disent, n'est que l'expression de cette blessure intérieure : la vie est devenue matériellement meilleure, mais elle a perdu son sens.

dimanche 17 octobre 2010

Il est temps d'éteindre les Lumières

-
Peut-être vous ai-je déjà raconté cette anecdote ? Si c'est le cas, je vous prie d'excuser mon radotage. Je me trouvais à l'Université de Lausanne, et discutais avec un de mes collègues francophones, un homme délicieux et très compétent. Je ne sais pas pourquoi, il me dit tout à trac, au beau milieu d'une savante conversation : "Vous les Français, vous ne pouvez vous empêcher de penser à l'échelle du monde ; nous pensons, nous, à l'échelle de notre Canton". Jacques était trop courtois pour marquer de l'ironie dans cette remarque, mais elle m'avait frappé. Et puis la fréquentation quasi hebdomaire de collègues allemands et suisses germanophones m'avait fait prendre conscience que cette attitude de prétendre penser l'universel passe auprès des étrangers pour une insupportable arrogance. Et la fréquente rencontre d'autres collègues européens, anglais, belges, néerlandais, italiens ou des pays de l'Europe centrale et orientale m'avait ancré dans l'idée que quelque chose clochait dans notre manière à nous, Français, de concevoir et d'exposer les choses. Et je me disais aussi que c'est cette prétention affichée ou sous-jacente, et non la difficulté de notre langue, qui avait fait préférer l'empirique anglais au très abstrait français, comme langue de communication internationale. Enfin, certaines remarques de mes lecteurs m'avaient fait prendre conscience que je n'échappais pas à ce travers national d'immodestie de la pensée.
-
Vous vous souvenez aussi que je vous avais transcrit le fameux discours dans lequel FERRY parle du droit des races supérieures à éduquer les races prétendues inférieures, ce qui ne laissait pas de m'étonner de la part d'un homme de cette envergure.
-
La lecture attentive du livre d'Ivan P. KAMENAROVIC, philosophe et sinologue, livre intitulé Agir, non-agir en Chine et en Occident et l'abord encore succinct de celui de Michael SINGLETON, ex-missionnaire, et professeur à l'Université Catholique de LOUVAIN, viennent d'entraîner définitivement ma conviction : il est temps d'éteindre les Lumières.
-
Nous nous gargarisons de nos VOLTAIRE, DIDEROT, ROUSSEAU, d'ALEMBERT, CONDORCET, etc. Ces hommes sont des écrivains de premier ordre dans notre langue, et la France post-révolutionnaire a largement utilisé leurs pensées pour, en les diffusant, tenter d'établir une hégémonie culturelle, et une prépotence politique mondiales. La tentative est à l'origine du colonialisme, énergiquement combattu par les députés de droite, monarchistes inclus, quand elle fut inaugurée par Jules FERRY. Mais ces "philosophes" n'ont pas pensé l'universel, comme nous l'avons prétendu et continuons de le faire. Ils ont théorisé une forme de pensée commune à l'Occident. C'est déjà beaucoup, mais ce pas le tout de la pensée humaine.
-
KAMENAROVIC montre comment la pensée chinoise, si différente de la nôtre dans sa conception de l'homme et du monde, est tout aussi cohérente que la nôtre et explique la réalité tout aussi bien que nous. C'est une pensée qui ignore les oppositions contrastées et les contraires, mais voit dans les couple de notions que nous oppposons parce que nous les séparons, des aspects complémentaires d'une même réalité, une vibration incessante entre le blanc et le noir, la lumière et les ténèbres, l'esprit et la matière, l'actif et le passif, par exemple. Ce livre m'a apporté des arguments rationnels et convaincants sur la puissance mais aussi les limites de notre philosophie occidentale.
-
Quant au déconcertant SINGLETON, dans sa Critique de l'ethnocentrisme. Du missionnaire anthropophage à l'anthropologue post-développementiste, il a des formules à l'emporte-pièce qui auraient fait le bonheur de LEVI-STRAUSS s'il était encore de ce monde : "L'homme tout court n'existe pas. Je suis papou ou patagon, et à une période particulière". Il reprend ainsi à son compte la boutade de Joseph de MAISTRE : "J'ai rencontré des Allemands, des Anglais. Je sais, depuis MONTESQUIEU qu'on peut même être persan, mais je n'ai jamais rencontré l'homme". En d'autres termes, les mots ne font pas exister des choses qui n'ont aucune réalité.
-
Bien entendu, un effort d'abstraction est indispensable, et les peuples qui usent de langues indo-européennes sont bien placés pour le faire. Les concepts sont utiles pour raisonner. Mais ils ne sont pas le réel, seulement un moyen commode de l'appréhender.
-
Décidément, il est temps d'éteindre les Lumières.

samedi 16 octobre 2010

A Sylvain

-
Cher Sylvain,

Je ne suis pas RILKE, et je suis bien incapable d'écrire une oeuvre du genre Lettres à un jeune poète inconnu. Qu'importe. Je vais m'efforcer de répondre, comme je l'avais promis, à votre commentaire désenchanté du billet du 13 octobre. Je ne vous connais pas, mais vous devine.
-
Oui, cela est vrai. Ceux qui font grève aujourd'hui sont ceux que la réforme des retraites ne concernent pas. J'ai pris soin de vérifier, sur le site officiel de l'organisme qui gère les retraites des agents de la SNCF, certains points mentionnés par TIPPEL dans un commentaire. Les agents de la SNCF partent à 55 ans. Ceci figure, pour autant que je m'en souvienne, dans l'article 1 du règlement des retraites. Il est parfaitement inacceptable de voir ces agents faire grève pour protester contre une réforme qui ne les concernent pas, ou pas encore. Il ne s'agit pas d'un privilège (mot que l'on confond souvent avec "avantage" ; un privilège [private lex] est un règlement particulier qui s'applique à un groupe humain particulier, qui est élaboré par les membres de ce groupe en contrepartie des efforts qu'il consent à titre de groupe). Il s'agit tout bonnement d'un avantage indu. Le temps des locomotives à vapeur est révolu. Il n'y a plus de mécaniciens et de chauffeurs noircis par la fumée du charbon et fouettés par le vent âpre dans leur habitacle inconfortable. Les amplitudes de voyage se sont considérablement raccourcies en raison de l'avènement des TGV. Les conducteurs et les contrôleurs ont encore à souffrir de ces soirées qu'ils passent dans les locaux destinés à les accueillir pour une nuit, le temps pour eux de faire le retour. Mais cela est de plus en plus rare. Et c'est bien. Un raisonnement analogue s'applique aux agents de le RATP à PARIS. Je ne sais pas si la convention collective qui règle les droits et devoirs des agents employés dans les lignes de bus et de métros régionaux comportent les mêmes avantages.
-
Ce qui me paraît le plus touchant dans votre commentaire c'est l'expression d'une blessure, de cette blessure intime qui vous fait regarder avec tristesse et désenchantement le monde contemporain tel qu'il va. Non ! Ne vous laissez pas aller au désespoir. Le monde sera ce que vous en ferez. Et il suffit de quelques jeunes à l'âme bien trempée, pour le changer ce monde. C'est ma conviction profonde. Et vos réactions, leur profondeur, la sensibilité très fine qui est la vôtre l'indiquent à l'évidence : vous êtes de ceux qui peuvent, par la conscience vive des dysfonctionnements sociaux, des atteintes à la relation entre les hommes, du délitements du lien social, contribuer au nécessaire redressement. Le gémissement, disait un jour le Cardinal Alexandre RENARD, n'est pas un don du Saint Esprit. J'ai entendu de mes oreilles cette homélie mémorable qui invitait les disciples à l'action nourrie par la prière.
-
Voilà cher Sylvain ce que voulais vous dire pour aujourd'hui. J'aurai encore des commentaires à faire qui nécessitent de ma part plus de réflexion ; les remarques que je vous livre aujourd'hui sont celle d'un homme dans la dernière partie de sa vie certes, mais un homme plein d'espérance, sans laquelle il n'est pas d'amour possible. J'attends votre réaction avec impatience
-

vendredi 15 octobre 2010

Si j'étais socialiste...

-
Si j'étais socialiste, voilà ce que je dirais :
-
"Nous croyons à la destination universelle des biens terrestres. Nous pensons qu'il est injuste qu'un petit nombre d'êtres humains accumulent des richesses dont ils ne peuvent avoir l'usage, tandis que des millions d'autres vivent dans la misère.
Nous n'entendons pas porter de jugement moral sur les riches, mais attirer leur attention sur cette situation d'injustice que nous combattons et continuerons de combattre.
-
"Nous croyons que tout être humain doit pouvoir se nourrir, se vêtir, se loger, qu'il doit pouvoir fonder une famille et élever les enfants qui lui viendront, se cultiver, recevoir ses amis, prendre un repos bienfaisant, avoir de sains loisirs.
-
"Nous savons que l'égalité absolue de toutes les conditions humaines est une utopie ; qu'il y a de légitimes différences dans les revenus et que ces différences sont des moteurs de progrès. Nous affirmons que la principale source de revenus doit être le fruit du travail et non de la spéculation. Nous croyons que l'épargne jointe à la solidarité intergénérationnelle est nécessaire aussi bien pour l'emploi que pour le financement des retraites.
-
"Nous condamnons la marchandisation de l'argent et les manipulations financières, mais nous reconnaissons la nécessité qu'il y a de rétribuer les capitaux risqués par ceux qui le peuvent dans des entreprises créatrices d'emplois et de biens. Nous affirmons que les salariés d'une entreprise sont des acteurs essentiels de la valorisation de cette dernière et qu'il est juste de les voir bénéficier de cette valorisation comme il est juste que les chefs d'entreprise aient pour souci principal de pérenniser leur affaire, en modernisant grâce à leurs investissements l'outil de production (dont ils ne sont pas les propriétaires exclusifs en raison de l'apport des salariés à la valorisation de leur entreprise).
-
"Nous croyons que chaque peuple a le droit et le devoir de suivre les voies de développement qui conviennent à son histoire et à sa culture. Nous désirons entretenir des relations fraternelles avec tous les peuples du monde. Nous les respectons mais nous exigeons qu'en retour ils nous respectent de la même manière.
-
"Nous croyons que la Patrie mérite d'être aimée et défendue par des moyens qui exigent le concours de tous les citoyens et le respect des lois. Nous affirmons que l'intérêt général est supérieur aux intérêts particuliers, mais que ces intérêts particuliers doivent être reconnus quand ils n'offensent pas le bien commun. Nous croyons que les divergences des opinions politiques sont respectables et nous respectons ceux qui ne partagent pas nos convictions. Nous nous interdisons de les injurier, de porter contre eux l'anathème.
-
"Nous condamnons tous les avantages et désirons les voir disparaître. Nous affirmons enfin que les services publics ne sont pas la propriété de ceux qui y travaillent, mais celle de la collectivité nationale, et que, par conséquent, le recours à la grève doit être exceptionnel, encadré par la loi, et ne survenir qu'après épuisement de toutes les médiations, discussions et conciliations.
-
Enfin nous réaffirmons que nul n'est au-dessus des lois et que la qualité d'étranger en séjour sur notre sol n'est pas un motif suffisant pour les violer constamment."
-
Si les socialistes disaient cela, je voterais pour eux.

jeudi 14 octobre 2010

Un nouveau concept politique : la rétropédalitude

-
Madame ROYAL vient d'inventer un nouveau concept politique : celui de rétropédalitude. Elle nie avoir appelé les lycéens à manifester pour protester contre la réforme des retraites, lors de son interview par Laurence FERRARI. Apparemment, elle a oublié la teneur exacte de ses propos. Elle a même eu ce lapsus très révélateur lorsqu'elle a indiqué, dans sa tentative de rectification, conduite sur les ondes de France Info qu'elle a prétendu vouloir dire que "s'ils devaient le faire, ils devaient le faire POLITIQUEMENT", avant de corriger son lapsus (je voir les os de papa FREUD frétiller de joie) en "PACIFIQUEMENT". Madame ROYAL aurait dû les dissuader de manifester. En essayant de corriger son tir, elle fait machine arrière : c'est bien ce que je disais, c'est de la rétropédalitude.
-
Monsieur de VILLEPIN lui, en bon avocat et bon manieur de notre langue prétend (et vous allez apprécier la nuance) qu' "on ne fait pas une réforme crédible sur un sentiment d'injustice". Il ne dit pas "sur l'injustice", non, il dit "sur un sentiment". La véritable question est donc bien de savoir si cette réforme est injuste ou non. Si elle comporte des aspects manifestement injustes, il faut les supprimer. Il semble bien que de très réelles modifications aient été apportées par les sénateurs. Là où les socialistes avaient maintenu le départ à 60 ans pour tous, il devient possible de partir plus tôt et avec un taux plein, si l'on a cotisé un nombre suffisant d'année, par exemple.
-
Parlons des jeunes qui manifestent. Ils sont manipulés, et ils défendent l'indéfendable. J'ai entendu l'argumentation de responsables de l'UNEF et de syndicats de lycéens. C'est hallucinant d'égoïsme et de bêtise : il faut maintenir la retraite à 60 ans, disent-ils, parce que ça libèrera des places pour nous les jeunes ! "Ôte-toi de là que j'm'y mette" en quelque sorte. Ce qui m'épouvante, en fait, c'est que ces jeunes n'aient d'autre aspiration que celle de devenir salarié, et de préférence fonctionnaire. Ils n'imaginent pas qu'ils puissent faire autre chose, créer leur propre entreprise par exemple.
-
Vous me direz : il cause, il cause celui-là. Mais ne fut-il pas fonctionnaire ? Je vais leur répondre. Certes, je le fus. Mais, avec quelques amis et collègues, nous avons créé une entreprise de Recherche sur Contrat, en 1996, avec 14 emplois à la clé. Cette entreprise a été rachetée et elle continue de fort bien fonctionner. Et il a bien fallu que nous investissions de nos économies pour constituer l'assez modeste capital de cette entreprise. Par conséquent, j'estime ne pas avoir de leçon à recevoir. J'ai mis mes compétences, des économies personnelles, au service de jeunes dont nombre étaient du reste mes élèves. Que tous les enseignants syndiqués du SNESUP et autres appellations en fassent autant. Après, on parlera.
-
Revenons aux jeunes, si gracieusement invités à manifester par madame ROYAL. Ils n'ont strictement rien compris, comme tant de Français, hélas, à l'économie en général et à celle des retraites en particulier. Ils n'ont pas compris que c'est eux qui, en rentrant dans la vie professionnelle, vont payer par leurs cotisations sociales les pensions des inactifs. Comme ils seront insuffisamment nombreux à travailler (démographie oblige), il sera nécessaire d'emprunter des capitaux sur les marchés internationaux pour payer les pensions, et il faudra rembourser ces emprunts et les intérêts par l'impôt. Quant à les voir crier qu'ils défendent leur retraite à eux, il y a de quoi se tordre de rire. Ils y pensent déjà avant même d'avoir travaillé ? S'ils y pensent, ils sont déjà vieux dans leur tête. S'ils n'y pensent pas mais manifestent, c'est une manifestation politique, sans rapport avec l'objet officiel des protestations. Qu'ils le disent clairement. Mais qu'ils ne roulent pas le bon peuple dans la farine.
-
En vérité, je le redis, il y a trois moyens pour trouver l'équilibre du financement des retraites : l'allongement de la durée du travail et du nombre d'annuités, l'augmentation de la contribution des uns et des autres, patrons et salariés, et la diminution du niveau de pension. Sans doute faudra-t-il avoir recours au trois moyens un jour, notamment au dernier, si cette réforme de la dernière chance ne passe pas.
-

mercredi 13 octobre 2010

Cet homme est-il dangereux ?

-
Monsieur MELANCHON a cru bon traiter David PUJADAS de salaud et de larbin. Arrêtez-moi si je me trompe : ouîtes-vous les confrères de ce pauvre David protester contre ces propos, comme ceux de TF1 l'ont fait des propos de Jean-Pierre PERNAUD ? C'est que monsieur MELANCHON incline vers les opinions de ces journalistes qui ont le coeur à gauche, mais ne dédaignent pas de fréquenter les dîners en ville, où, entre la langouste et le chevreuil grand-veneur, on démolit l'actuel gouvernement, le Président de la République, et tout, ce qui de près ou de loin, peut ressembler à des valeurs prétendues "de droite". Ces gens correspondent très exactement à la définition que BERNANOS donne des "imbéciles" dans La France contre les robots.
-
Mais revenons à nos moutons mélanchoniques. Le leader de la Nouvelle Gauche, ou de quelque chose comme ça, se veut un homme responsable. Il inaugure bien mal cette responsabilité. Je le soupçonne de l'avoir usurpée. Et je ne vois guère de différence entre le "casse-toi pauvre c..." présidentiel (lancé à un citoyen qui, tout de même il faut le rappeler, avait insulté publiquement le Président) et le "salaud" lancé au visage de ce pauvre David PUJADAS qui ne l'a jamais insulté. David PUJADAS est un salaud, selon monsieur MELANCHON, parce qu'il ne se fait pas l'écho ou le soutien inconditionnel des opinions du Nouveau Gauchant. L'objectivité, selon monsieur MELANCHON, consiste à enfoncer les ennemis et à encenser tous ceux qui pensent comme lui. Cela augure bien de la tolérance de ce citoyen-là. C'est un totalitaire de la plus belle eau, un SAINT-JUST au petit pied (en moins élégant), et il laisse bien voir comment il traiterait le pays, s'il arrivait au pouvoir. Mon cher David, heureusement que vous n'avez pas les cheveux long. Le bourreau serait obligé de vous les couper avant de vous pousser sous la guillotine.
-
Bref, monsieur MELANCHON a perdu une belle occasion de se taire, et sans doute la bienveillance de nombreux citoyens qui estiment nécessaires, en effet, de changer bien des règles du jeu.
-

Quelques précisions

-
Fourmi, dans un commentaire, dit que je n'ai pas à faire état des opinions sur mes billets, si elles ne figurent pas en commentaires. Je répondrai que nombre de ces opinions "privées" n'y sont jamais reprises, et que si j'ai cru bon de le faire récemment, c'est qu'elles reflétaient des avis donnés publiquement par d'autres lecteurs ; je les résume (a) vous assénez doctement ; (b) vous êtes pessimiste et semblez aigri ; (c) vous êtes un inconditionnel du Président SARKOZY. J'ai essayé de répondre le plus honnêtement possible à ces critiques en en reconnaissant le côté bien fondé.
-
J'ajoute que deux de ces lectrices sont plutôt assidues et qu'elles ont mis du temps à élaborer leur avis. Raison de plus pour le prendre en compte.
-
Mais dorénavant, je tiendrai compte de l'avis de Fourmi, et je ne ferai pas état de ces avis, en tout cas pas comme je l'ai fait il y a deux jours.

mardi 12 octobre 2010

Deux points de vue sur les lois

-
Il est de bon ton, en notre pays, de critiquer les lois, de les contourner, ou de les ignorer. Aujourd'hui, nombre d'insatisfaits s'apprêtent à battre le pavé de nos bonnes villes, au motif qu'une loi, votée par des représentants librement et démocratiquement élus, ne leur convient pas. J'ai trouvé par hasard, en lisant le très beau livre de Jacques SANCERY sur CONFUCIUS, deux citations qui disent fortement des choses intéressantes à propos des lois. Cris dans le désert que ce billet ? Certes ! Agacement de Potomac qui va me reprocher mes chinoiseries ? Sans doute. Pour apaiser son très prévisible courroux, je commencerai par citer SENEQUE et son traité De la colère (II, 27) : "La vertu, dit-il, est bien imparfaite lorsqu'on ne fait d'autre bien que celui qui est commandé par les lois. La règle de NOS DEVOIRS est beaucoup plus étendue que celle de la justice rigoureuse. Combien de choses qu'exigent la piété, l'humanité, la libéralité, l'équité, LA BONNE FOI, dont les lois ne font aucune mention ?"
-
Je me lance dans ma seconde citation ? Oui, je me lance en tirant des Mémoires historiques (Shiji) du grand historien chinois SIMA QIAN (que vous connaissez peut-être sous le nom de SSEU MA TSIEN) ceci, qui paraît tellement juste et vient souligner que la loi est le moins mauvais moyen de faire vivre ensemble les hommes, peu vertueux par nature : "Les rites [entendez ici la courtoisie, la politesse, les usages sociaux du bien vivre ensemble], c'est ce qui empêche que le mal se produise, tandis que les lois, c'est ce qu'on applique une fois que le mal est commis. L'utilité des lois est facile à percevoir ; mais les hommes saisissent difficilement l'utilité préventive des rites" (Shiji, CXXX ; traduction de Jacques PIMPANEAU).
-
SENEQUE et SIMA QIAN disent la même chose, chacun selon le génie propre de sa langue et de sa culture. Les lois sont là pour régler la vie ensemble. Elles n'épuisent aucunement les obligations et devoirs moraux de tout homme qui préfère habiter sa vie plutôt que la subir. Et plutôt que de défiler en aboyant des slogans (quand ce ne sont pas des injures), les manifestants, s'ils avaient de vrais chefs qui pensent, devraient s'interroger sur les raisons qui ont poussé les pouvoirs publics à prendre des mesures impopulaires, amendables sans doute, prises sans trop de concertations, mais cependant indispensables : fardeau de la dette sociale, trop lourdes charges qui bientôt peseraient sur les épaules des jeunes générations, abus d'avantages injustifiés de la part de certains secteurs, consommation immédiate au détriment de l'épargne qui aurait pu venir abonder chaque pension individuelle, aveuglement sur les devoirs qui incombent à chaque citoyen de contribuer à la vie commune. J'ai déjà dit, et je le maintiens, que si cela était nécessaire - me considérant comme un très grand privilégié - j'accepterais de voir diminuer ma pension pour ne pas affaiblir ma patrie et permettre à de moins bien lotis d'avoir meilleure enseigne pour se loger. Que puis-je dire de plus ?
-
Allons, encore SENEQUE : La colère est une courte folie.

lundi 11 octobre 2010

A trois amies chères

-
Trois amies très chères, qui ne se connaissent pas du reste, viennent de me donner par courriel, leur avis sur mes billets. Je désire leur répondre ainsi, du reste, qu'à tous ceux qui pourraient partager leur opinion.
-
Il est vrai que je puis donner l'impression d'avoir des avis péremptoires sur des sujets très divers, et de disserter de tout. Je conçois que cela puisse étonner, agacer et même indisposer. Je demande à mes lecteurs de l'indulgence : dans la mesure du possible, je m'efforce d'argumenter, de faire appel à la raison, de citer mes sources et de m'appuyer dessus. Je lis énormément et travaille de même. Il y a aussi des billets où j'emprunte plutôt le style discursif avec infiniment moins de bonheur, bien sûr, que CONFUCIUS, le Maître du genre et un penseur admirable selon moi, ou que PASCAL, un génie inégalé. Les deux ont largement fait appel à ce style qui enchaîne les idées proches les unes des autres, les lient par la force de l'évidence, et entraînent ainsi l'adhésion du lecteur. Si je puis donner l'impression d'être très sûr de moi, en vérité il n'en est rien. Je prie donc mes lecteurs d'excuser cette tendance - imputable sans doute à mon métier - à être soit docte soit magistral. Et je leur demande de croire à ma bonne foi tout en reconnaissant bien volontiers que je puis être souvent dans l'erreur. J'accepte donc les critiques, et je m'efforce de les accueillir avec humilité.
-
Une autre lectrice trouve que nombre de mes propos trahissent de l'aigreur ou du pessimisme. Et elle trouve que cela ne correspond pas du tout à ma gaieté naturelle. J'aime rire, j'aime faire rire en effet. Je dois donc m'expliquer sur la couleur morose de certains de mes billets. Je déteste le conformisme de la pensée et tiens de mon père cette détestation pour les idées toutes faites, celles que nous distillent les médias ou qu'ils nous assènent quand l'assènement sert leurs intérêts. Je hais le mensonge, la fausseté et la mauvaise éducation. Le politiquement correct me fait horreur. Par exemple nier que la concentration de communautés étrangères en des points précis, des communautés souvent coupées de tout lien commode avec l'extérieur, pauvrement pourvues de services publics, de loisirs, de commerces, conduit à la création de ghettos nationaux et à l'alimentation de la violence, voire de la délinquance, me paraît être suicidaire. TOUTES LES COMMUNAUTÉS ÉTRANGÈRES ne sont pas dans cette situation, tant s'en faut, bien sûr (ainsi en est-il de la communauté chinoise ou de la pakistanaise, qui savent très bien s'adapter à leur pays d'accueil). Mais il y en a. Et cela suffit pour que nous nous posions des questions. Un meilleur accueil, une meilleure formation, des habitations plus dignes, certes, mais aussi l'exigence absolue de respecter les lois et les valeurs de la République, me semblent être normal. Comme il est normal de sanctionner les abus dont ces communautés pourraient se rendent coupables. Il n'y a là rien d'extraordinaire à le dire, aucun racisme, aucune xénophobie, mais une conception saine de la vie en commun. Considérer que la critique systématique des mesures gouvernementales par l'opposition, critique par ailleurs vide de toute proposition, est indigne d'un responsable politique ne me semble pas offensant. On devrait relire JAURES ou BARRES ou CLEMENCEAU ou BERNANOS ou THIBON pour comprendre ce que veut dire proposer.
-
A cette troisième amie qui trouve que je fais la part belle au Président SARKOZY, je dirais ceci : (a) on ne peut parvenir à disqualifier un message ou une politique, en disqualifiant le messager ou celui qui l'inspire ; (b) le Président SARKOZY a commis de graves erreurs ; il a donné l'impression qu'il soutenait les riches au détriment des pauvres, je dis bien donné l'impression, car il a pris nombre de mesures en faveur des classes moyennes (déduction des intérêts d'emprunt pour l'achat d'un logement principal, suppression des droits de succession pour les héritages de taille relativement importante, prime à la casse), et je trouverais juste qu'on le créditât de cette initiative. Mais sa plus grave erreur est d'avoir voulu faire "peuple" par des propos indignes de la fonction. Je crois que le "casse-toi pauvre c..." lui a aliéné un grand nombre de nos concitoyens qui se font une autre idée de la fonction présidentielle ; (c) il s'est attaqué à des féodalités qui ruinent la vie du pays, au nombre desquelles il faut compter la magistrature et les syndicats. Tout n'a pas toujours été fait dans la concertation ou la discussion. Mais est-il possible de reformer la France en profondeur ? Bref, je respecte la fonction, j'approuve certaines mesures qui me paraissent aller dans le bon sens. Mais personne ne me forcera à exprimer pour l'homme une sympathie que je n'éprouve pas.

samedi 9 octobre 2010

Sur la pudeur

-
Un scandale agite présentement le monde des cultureux : pensez-donc, l'adjoint à la culture du Maire de Paris a fait interdire aux moins de 18 ans l'exposition consacrée aux photos de Larry CLARK. Au nombre de ces photos qui traitent du comportement d'adolescents américains, on peut voir des jeunes en train de faire l'amour, des jeunes tout nus et qui ne dissimulent rien de leur anatomie (en tout cas, c'est ce que j'ai lu dans les journaux, car je n'ai pas vu et ne compte pas voir cette exposition), des jeunes en train de se shooter. Toutes les photos, paraît-il, ne sont pas de cette eau, mais un pourcentage non négligeable.
-
Pour protester contre ce qu'il appelle la "censure", le journal Libération a publié à la une d'une récente livraison une photo du même Larry CLARK. A moitié allongés sur un canapé, deux jeunes, nus, sont sur le point de faire l'amour. La jeune fille empoigne visiblement le sexe de son ami. C'est ce que l'on appelle une "oeuvre de l'esprit".
-
Il faut bien réaliser ce que cela implique. Deux jeunes, peut-être épris l'un de l'autre, en tout cas se désirant, acceptent d'être photographiés en cette posture devant un photographe qui ne se sent pas gêné de violer leur intimité et de la révéler au public. Il est possible et même très vraisemblable que pour avoir un excellent cliché, CLARK ait dû faire plusieurs photos, modifier les poses, changer les éclairages. Nous ne savons pas s'il a payé ses modèles. La chose est possible mais non avérée.
-
L'adjoint au Maire a eu raison de prendre cette décision et nous ne pouvons que l'en féliciter. On objectera qu'il est possible de voir de ces clichés sur internet. Soit. Mais en responsable politique réfléchi, imaginant la gêne ou le choc que peuvent provoquer ces photos dans l'esprit de jeunes, enfants ou adolescents, l'adjoint a réagi en homme pondéré. Peut-être a-t-il lui même des enfants, des adolescents. Il lui a semblé juste de ne pas "pousser au crime" et de ne pas donner une prime à l'impudeur, et de laisser aux adolescents, à leur liberté et à leur conscience éclairée par l'éducation, l'usage intime et secret de leur sexualité.
-
Cette exposition verra sans doute un grand nombre de visiteurs, des voyeurs peut-être. Mais il me paraît très difficile de lutter contre la pédopornographie quand, sous prétexte que ces photos sont des "oeuvres de l'esprit", on n'hésite pas à stimuler ce qu'il y a d'animal dans l'homme, à le mettre en scène. Le siège de l'animalité est situé dans le cerveau reptilien. Il porte bien son nom.
-
Dans un billet qui commence à dater, je vous avais invité à écrire à votre député pour protester contre la distinction qui avait été décernée, lors d'un concours de photos, à un "artiste". La photo primée était celle d'un homme en train de s'essuyer le derrière avec le drapeau français. J'avais donc écrit à mon député-maire, monsieur BAGUET. Navré, il m'a répondu qu'il était impossible de condamner ou de censurer ces provocations, au motif, justement, que ce sont des "oeuvres de l'esprit". Il l'ont curieusement placé, l'esprit, ces furieux qui croient que faire de l'art c'est "provoquer le bourgeois". Ils se font une bien médiocre opinion du peuple, et croient s'attirer ses faveurs en flattant les penchants qu'ils lui attribuent sans discernement et en s'annexant ses goûts présupposés. Un bon conseil : n'allez pas voir ces expositions, protestez autant qu'il est nécessaire, ne craignez pas de paraître ringard.
-
Car tout le monde n'est pas Michel-Ange qui a sculpté un David, entièrement nu, mais d'une beauté à couper le souffle, ni BOTTICELLI et ses trois grâces, ni MANET et son déjeuner sur l'herbe, ni GOYA et sa maja nue. Idem pour des sculptures de RODIN ou de Camille CLAUDEL qui célèbre les corps et leur rapprochement. Il y a une manière de voir le corps qui est chaste, et une autre qui est impudique, qui possède autrui et met la main sur lui, et qui est insupportable. Ce n'est pas la nudité qui est scandaleuse, c'est l'impudeur.
-
A bientôt.
-

vendredi 8 octobre 2010

Et ils n'ont pas honte

-
Je ne sais pas qui est à l'origine de l'appel lancé aux lycéens et collégiens, un appel qui les invite à manifester contre le projet de réforme des retraites. Si les leaders syndicaux ou leurs relais sont responsables de ce mauvais coup, je partage l'avis de monsieur Raymond SOUBIE, conseiller du Président de la République qui souligne l'irresponsabilité de tels agitateurs.
-
Nos jeunes sont manipulés. On ne cesse de leur délivrer un message univoque, emprunté à papa MARX, pimenté d'un hédonisme égoïste. L'éducation nationale, les médias audiovisuels, les sites internets, les réseaux sociaux et une grande partie de la presse écrite se font les haut-parleurs de cette vision de la vie. Tout dans l'immédiateté, après nous le déluge.
-
Demander [officiellement] à des jeunes de 15-17 ans de penser à une retraite qu'ils prendront au mieux dans 50 à 55 ans est tout simplement irrationnel. Nul ne peut prévoir ce que sera à ce moment-là notre situation économique et démographique ni même ce que seront les métiers d'alors dont certains ne sont pas encore nés. En réalité, cette initiative consiste à demander à nos jeunes de soutenir l'opposition de certains salariés, essentiellement des fonctionnaires, à des mesures qui les touchent dans un proche avenir, mais dont nul ne peut dire si elles seront encore en vigueur, adoucies, ou, plus vraisemblablement aggravées en l'an 2060.
-
De plus, ces jeunes que l'on sollicite, ce sont eux qui, dans 5 à 10 ans, vont devoir cotiser pour payer les pensions de futurs retraités aujourd'hui inflexibles dans leur égoïsme. Qu'ils ne s'y trompent pas, ces jeunes, ils seraient les premières victimes d'un statu quo explosif. Si des jeunes, à qui s'ouvre grand la vie, et qui normalement aiment le risque, adhèrent du fond d'eux mêmes aux revendications des grévistes, ils sont déjà vieux, et ils participent à la décadence de notre patrie.
-
Mon père, qui était pharmacien, a cessé de travailler à 72 ans révolus. Il ouvrait son officine à 8 h 30, et fermait à 20 h. Il fallait y ajouter les gardes de nuit. Il restait debout toute la journée. Celui qui n'a jamais fait ce métier ne peut savoir combien il est harassant : piétinement, contrôle de la délivrance des médicaments, enregistrement des adresses dans l'ordonnancier. Mon voisin, en Alsace, était cardiologue. Moi-même très matinal, je partais souvent à la faculté vers les 6 heures-6 heures 30 du matin, en même temps que lui. Il n'était jamais rentré avant 22 heures. Et n'hésitait pas à se déranger la nuit pour ses malades ou pour les gardes. Il a cessé de travailler à 70 ans. Un ami très intime a exercé le métier de kinésithérapeute - métier où l'on travaille debout et où l'on utilise beaucoup d'énergie musculaire - jusqu'à ses 70 ans, malgré des douleurs dorsales obsédantes. Un autre ami qui exerce le même métier ne cessera pas ses activités avant 70 ans. Un ami, éleveur de mouton dans les montagnes de SISTERON, a travaillé jusqu'à 75 ans, âge de sa mort. Je n'en finirai pas de donner une liste de personnes de mes connaissances qui sans jamais se plaindre d'un métier pénible, ont très largement travaillé au-delà des 60 ans fétiches. Allez, messieurs les leaders syndicaux, direz-vous que ces métiers ne sont pas pénibles ?
-
J'ai moi-même travaillé jusqu'à 65 ans. J'aurais pu aller jusqu'à 68 ans. Si j'ai cessé mes activités universitaires, c'est (a) pour ne pas bloquer la carrière d'un de mes collaborateurs qui venaient d'être nommé professeur ; (b) pour ne pas perdre le poste budgétaire de professeur et ainsi permettre à un jeune d'être recruté sur un poste vacant ; (c) et je n'ai pas désiré être professeur émérite, ce qu'il m'eût été facile d'être. J'aurais fait piaffer d'impatience et d'irritation les enseignants-chercheurs en quête d'un bureau tranquille. Ah ! Je précise : j'avais 40 annuités, c'est-à-dire plus qu'il n'était nécessaire, et je suis parti pile le jour de mes 65 ans.
-
Les manipulateurs de jeunes n'ont pas honte ? Ils ont tort. Et leur initiative tordu leur reviendra dans la figure comme un boomerang. Honte à eux, en effet, et une honte durable qui m'ôterait toute l'estime que je porte à certains d'entre eux s'il s'avérait qu'ils ont trempé dans la combine.
-

jeudi 7 octobre 2010

De l'importance des symboles

-
Le Petit Robert donne une excellente définition de l'une des significations du mot symbole : "Objet ou fait naturel de caractère imagé qui évoque, par sa forme ou par sa nature, une association d'idées spontanée [dans un groupe social donné] avec quelque chose d'abstrait ou d'absent". Il y a une convention arbitraire entre le symbole et l'opération qu'il désigne, précise le Robert. Le dictionnaire ajoute que le symbole, en une autre signification dérivée, établit une relation non causale [à la différence de l'indice] et non analogique [à la différence de l'icône] entre l'objet ou le fait naturel et ce qu'il évoque.
-
Deux éléments paraissent essentiels dans ces définitions imbriquées et qui dérivent l'une de l'autre : le côté arbitraire du symbole ; l'absence de relation causale ou analogique entre le fait et ce qu'il désigne.
-
En allant prendre un verre (ou dîner ?) au Fouquet's immédiatement après son élection à la Présidence de la République, monsieur SARKOZY a donné un signal mal perçu par les Français : cet homme, se sont-ils dit, est l'homme du luxe et des riches. Rationnellement, il n'y a aucun lien de causalité entre ce fait et la plus ou moins grande richesse des Français, mais il suggérait spontanément une association avec "le monde des riches", parfaitement abstrait. Le nouvel élu aurait été jouer au golf, que le résultat eût été le même. La relation entre le fait et ce qu'il suggère est donc tout à fait arbitraire. Même raisonnement en ce concerne le bouclier fiscal. Mais le mal est fait. Car en politique, c'est ainsi, la passion l'emporte sur la raison.
-
Pourquoi ce long détour ? Oh ! C'est très simple. Je précise que que je ne désire pas tomber sous le coup de la loi en critiquant un jugement rendu au nom de peuple français. Mais tout de même.
-
En notre beau pays de France, en effet, il ne fait pas bon d'offenser le dieu MAMON. Jérôme KERVIEL l'a appris à ses dépends : 3 ans de prison ferme, et 5 milliards d'euros de dommages et intérêts à verser à la Société Générale. A aucun moment, au cours du procès, il n'a été question de mettre en cause un ou des responsables pour les défaillances de leurs systèmes de contrôle, ou leur inertie devant des informations données très largement avant que le scandale n'éclate. (Voyez mes billets consacrés à ce sujet). Les dirigeants de la Société Générale peuvent continuer à digérer sans avoir à prendre de bicarbonate, à toucher leur bonus, à réaliser leurs "stock options", comme si de rien n'était. Bons princes, il remettent à Jérôme KERVIEL la dette de 5 milliards d'euros (177.000 années de versement pour ce malheureux) sans renoncer à réclamer des dédommagements. Il me semble que ce jugement est un symbole qui m'évoque un bel aphorisme de notre bon La FONTAINE : "Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir". Il est vraisemblable que le jugement est juridiquement fondé. Mais on ne peut s'empêcher de sourire en entendant le montant des sommes que doit rembourser le trader. Nul homme au monde n'est en mesure de le faire, intérêts compris, dans le cours de sa vie. Si le jugement est inexécutable, alors on a le droit de s'interroger sur ce qu'il signifie.
-
Dans le même temps à GRENOBLE, on remet en liberté un des auteurs présumés du braquage d'un casino dont le complice a été tué au cours d'une fusillade avec les forces de l'ordre, on maintient en détention préventive dans l'Hérault, un homme connu pour être très paisible, et qui a tué un cambrioleur introduit frauduleusement chez lui. On libère par anticipation un délinquant sexuel, non sans qu'un médecin ne lui ait prescrit du Viagra avant sa libération, et il va enlever et violer un petit garçon, peu de temps après son élargissement ; plus récemment un autre délinquant sexuel, lui aussi libéré, viole et tue une jeune fille dans le Nord du pays.
-
Le peuple ne peut s'y reconnaître. Il a un sens inné de la justice (je parle du peuple au sens fort) et il sent bien qu'il y a dans ces jugements des décisions qui heurtent. C'est ce qu'on appelle, là encore, le sens symbolique des événements. Les citoyens que nous sommes ont le droit de demander aux responsables politiques et au magistrat qu'ils pèsent le poids de leurs actes et de leurs décisions avant de les arrêter.
-