vendredi 27 novembre 2009

Relâche

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Je m'absente jusqu'à mercredi soir, et reprendrai les billets le jeudi 4 décembre. Juste un petit mot avant de clore momentanément nos échanges.
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En consacrant un billet à l'Esprit de Vérité, je ne visais personne, que ce soit bien clair dans la pensée de tous mes lecteurs. J'accepte parfaitement la remarque que certaines de mes présentations "absolutistes" relèvent de l'esprit de mensonge que je dénonçais hier. J'ai dit, et je le ferai, que je m'efforcerai désormais d'éviter les effets, la rhétorique, tout ce qui relève justement du père du mensonge. J'admets tout à fait que mes opinions n'ont pas de valeur absolue et que je puis me tromper. Mais j'affirme qu'en Jésus, il n'y a pas de ténèbres, qu'en lui tout est lumière, et qu'il nous invite à dire "un oui qui soit un oui, un non qui soit un non".
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Je vous souhaite une bonne semaine. A bientôt.

jeudi 26 novembre 2009

Que la lumière soit !

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Je vous ai déjà dit le choc qu'a été pour moi la lecture du petit ouvrage d'Arthur KATZ et Paul VOLK, intitulé "L'Esprit de Vérité. Un message prophétique." Je voudrais en citer ici un assez long passage, sans commentaires.
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"Le relativisme est l'essence même de la sagesse de monde. Le monde exalte la tolérance, y voit une vertu cardinale, et veut bien tout tolérer, sauf les valeurs absolues et la vérité absolue. Rien n'est plus abominable pour la sagesse et les lumières de ce monde, rien n'est plus ridicule à ses yeux que ce qu'il appelle le "dogmatisme". Derrière le souci qu'affiche ce monde pour les situations complexes, derrière cette vérité qui veut que pour toute situation il y ait un contexte particulier qu'il faut toujours prendre en compte, il y a un rejet de l'absolu sous toutes ses formes. Dans son zèle pour condamner le "dogmatisme", le monde place la tolérance au-dessus de la justice et dénigre la vérité.
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Le relativisme s'exprime par ses formules toutes faites "il se peut que ce soit vrai pour toi, mais ce n'est pas vrai pour moi." "Tout dépend de la façon dont on considère la chose." "Rien n'est tout noir ni tout blanc." C'est ainsi que l'adultère, au même titre que la beauté, dépend du regard de celui qui considère la chose. Pour la sodomie, on a trouvé cet euphémisme :"Un autre style de vie". Tout ce qui est valeur ou jugement se dissout et devient brouillard, grisaille généralisée. Ce brouillard est mortel pour la vérité. Il résulte de la mise en pratique du relativisme, de la confusion entre le bien et le mal, entre le blanc et noir, entre les ténèbres et la lumière. Mais Dieu est lumière et il n'y a pas en lui de ténèbres. La lumière est vérité ; ce brouillard grisâtre est mensonge, séduction, tout autant que les ténèbres si ce n'est davantage. Les premières paroles que Dieu prononça sur une création encore à l'état de chaos furent "Que la lumière soit" et il sépara la lumière des ténèbres (Genèse 1, 3-4). Cet acte de séparation n'a jamais été résilié : lumières et ténèbres ne peuvent se mélanger pas plus que ne le peuvent vérité et mensonge. [...] La sagesse de ce monde cherche sans cesse à nier les distinctions que Dieu a établies pour l'éternité, à rendre floue la ligne de démarcation entre vérité et mensonge, à fabriquer ce brouillard, cette grisaille qui permet de redéfinir et de justifier tout ce que nous désirons être ou faire. Le relativisme est séduisant, car à la différence de la vérité, il fait tellement bien notre affaire !"
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Le commentaire viendra tout à l'heure.

mercredi 25 novembre 2009

Non !

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J'aurais pu donner à ce billet un titre drôle, cruel, et qui aurait fait mouche, en disqualifiant un peu la personne à qui je désire dire non ! Je veux parler de monsieur Pierre BERGE qui déclare que le Téléthon vient parasiter la générosité des français, et accuse l'Association Française contre les Myopathies (AFM) d'investir les sommes recueillies dans l'achat de bâtiments. Désireux de mettre en pratique la décision d'infléchir mes remarques dans un sens plus argumenté et plus objectif, je n'ai pas cédé à la tentation de la facilité.
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Pour répondre à monsieur BERGE, je vais me prévaloir de deux réalités : la première a trait à l'AFM. Son actuel directeur scientifique, le Dr Serge BRAUN, est un de mes élèves. Il a réalisé son travail de thèse dans le laboratoire dont j'étais le responsable ; puis y est revenu pour un second séjour post-doctoral, après en avoir passé un premier à l'Université de Californie, à LOS ANGELES, dans le laboratoire du Pr Valérie ASKANAS. Notre laboratoire a bénéficié pendant des années de subventions de l'AFM destinées à soutenir nos recherches sur l'amyotrophie spinale progressive, et - je l'ai déjà dit - nous avons pu faire des travaux qui ont marqué un tournant dans la compréhension de la pathogénie de cette maladie. Grâce à l'AFM, la France est devenue l'une des toutes premières nations du monde en matière de recherche sur les maladies génétiques et de décryptage du génome humain. Le Généthon d'Evry, centre de séquençage de l'ADN, a été un modèle du genre, copié dans le monde entier. Le soutien au Centre d'Etude du Polymorphisme Humain a été également décisif pour placer notre pays au tout premier plan dans ce domaine. L'AFM ne se borne pas à subventionner des recherches sur les maladies musculaires ou neuro-musculaires. Elle subventionne aussi de très nombreuses recherches sur d'autres maladies orphelines (maladies qui ne frappent que quelques dizaines de personnes par an). Il faut bien comprendre qu'il est impossible à la recherche publique de subventionner des travaux sur des maladies qui ne sont pas un problème de santé publique (comme le cancer, le SIDA, la maladie d'Alzheimer, ou les maladies cardiovasculaires). Il est donc logique de faire appel à la générosité privée.
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Monsieur BERGE se dit atteint d'une myopathie. Je dis bien "une", et non pas "de". Il n'est pas atteint de myopathie de Duchenne de Boulogne, car il ne serait plus ce monde ; il l'aurait quitté en atteignant l'âge de 20-25 ans. Il existe des dizaines de "myopathies" de topographie, d'intensité et de gravité variables. Je ne rentre pas dans les détails, inutiles pour mon propos. Mais je souligne qu'il y a un risque de confusion entre cette très grave myopathie, celle que connaissent la majorité des gens, et les très nombreuses autres formes d'atteinte musculaire.
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La deuxième réalité est mon engagement à l'Association Tibériade, qui accueille des séropositifs. La vérité m'oblige à dire que nos accueillis approuvent la sortie de monsieur Pierre BERGE, lui-même séropositif et président du SIDACTION dont Line RENAUD est vice-présidente. La vérité m'oblige à dire aussi que j'avais sollicité madame Line RENAUD pour qu'elle vienne rendre visite à Tibériade, et que je n'ai jamais eu de réponse. Elle n'a sans doute jamais eu mon message, car je le lui avais envoyé par le biais de son Association.
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Les réactions de nos accueillis sont purement émotionnelles. On peut les comprendre. Quoique l'on fasse et dise, nos amis s'identifient à leur "maladie" (je mets des guillemets, car la séropositivité n'est pas une maladie, mais un état immunitaire particulier), et ils réclament une attention de tous les instants, une bienveillance inépuisable. Ils sont en grande détresse. Et c'est le regard que porte notre société qui en est responsable en grande partie. La raison de ce regard oblique est facile à comprendre : hormis les accidents transfusionnels (aujourd'hui rarissimes), le principal mode de transmission du virus de l'immunodéficience humaine est bien connu : addiction à la drogue utilisée par voie parentérale ; pratiques homosexuelles (encore que la transmission hétérosexuelle augmente en fréquence, en raison du vagabondage sexuel, et que la tranmission post-natale de la mère à l'enfant, en Afrique soit un très réel problème). Une chose est de ne pas condamner les personnes ; une autre est de considérer ces pratiques comme normales, tant sur le plan personnel que sur le plan social. Le fait est cependant que le SIDA est devenu une question de santé publique, du fait de ces comportements personnels à risque. Il y a là une grande différence d'avec une maladie génétique dont le porteur n'est en rien responsable de son état.
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Monsieur BERGE croit, ou feint de croire que le Téléthon siphonne l'argent privé et détourne la générosité des particuliers, au détriment de la recherche sur le SIDA. C'est faux. L'ANRS subventionne par millions d'euros des recherches fondamentales et appliquées (vaccin) sur le SIDA, et la France est un des tout premiers pays du monde dans ce domaine. Monsieur BERGE reproche au Téléthon de susciter la pitié des donateurs potentiels en leur montrant des enfants en fauteuil roulant. Voyez-vous, j'en ai vus et beaucoup, qui sont venus visiter notre laboratoire. Et j'en avais le coeur serré. Il n'est pas normal de mourir à 12 ans, à 16 ans ou à 20 ans... On ne meurt plus du SIDA, ou plus exactement des infections opportunistes liées à la séropositivité. Et rien ne prouve que l'argent soustrait au Téléthon irait dans les poches du SIDACTION. Je crois même pouvoir affirmer qu'il n'irait certainement pas pour les raisons que j'ai dites et que je résume. On n'est pas responsable d'une maladie génétique qui n'intéresse pas les pouvoirs publics ; on a une responsabilité certaine dans sa contamination par le virus de l'immunodéficience humaine. Et ceci explique cela. Je regrette de devoir dire ici non, monsieur BERGE, vous n'avez pas raison.

mardi 24 novembre 2009

A Hicham

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J'ai eu l'occasion de dire tout le bien de ce jeune homme qui travaille au Monop de le Route de la Reine. Ce matin, alors que j'allais acheter des lames de rasoir, il tenait la caisse. Peu de chalands à cette heure relativement matinale. Nous avons pu discuter. Je lui ai dit que j'avais parlé de lui dans un commentaire de commentaire. Il n'en croyait pas ses oreilles. Et pourtant. Et il m'a bien dit qu'il ne fallait pas faire l'amalgame entre les voyous qui sont des voyous non pas parce qu'ils viennent ou que leurs parents viennent d'Algérie ou du Maroc, mais parce qu'ils sont mal élevés, sans principes et sans repères, et que nous n'avons pas su ou pu les accueillir et les intégrer convenablement - ce qui n'excuse en aucune manière leur comportement de voyous.
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Je souhaite que nombre de professionnels puissent recruter des jeunes comme HICHAM - tel est son prénom - qui allie la gentillesse à l'élégance du comportement et au sourire bienveillant, la compétence à la dignité. Allons ! Merci Hicham pour ce que vous êtes et qui permet aux yeux qui savent voir de ne pas désespérer d'une situation apparemment sans issue.

Exactitude, sincérité, vérité

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Chers lecteurs, vous l'avez constaté, je n'ai pas produit de billet hier. Je vais m'en expliquer le plus précisément possible. D'abord, je ne partage pas l'irritation que les commentaires divers expriment vis-à-vis de tel ou tel lecteur. Et il me semble parfois que ces commentaires ne sont pas exprimé en vérité mais plutôt en référence à un système de pensée préformé que j'appelle système idéologique. Bien entendu, j'aurai pu moi-même, chaque fois qu'une telle situation se présente, exprimer mon désaccord. Je ne l'ai pas fait, je le regrette.
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La lumière sur ce point m'est venue dimanche soir, à l'Eglise Saint-Ignace, desservie par les jésuites du Centre Sèvres. Un membre de notre petite fraternité de prière nous avait invité à venir à "La Messe qui prend son Temps", qui y est offerte tous les dimanches soirs aux étudiants et aux jeunes professionnels, mais aussi à tous ceux qui veulent bien passer près de deux heures à écouter un enseignement solide, à prier en silence, à partager le fruit de leur méditation avec leurs voisins de rangée.
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C'était la fête du Christ Roi. L'Évangile du jour relatait la fameuse scène où Pilate demande à Jésus : "Qu'est-ce que la vérité ?" et se voit répondre : "Quiconque procède de la Vérité écoute ma voix", par un Roi issu non de la Terre mais du sein du Père, un Roi dont le Royaume n'est pas de ce monde. L'enseignement fut d'une densité remarquable, accueilli dans un silence plein, attentif, réceptif. Impossible de dire plus sur ce silence habité, sur l'attention, la concentration des fidèles. On y insistait sur l'exactitude, qui a pour contraire l'erreur, et qui est l'adéquation de la parole avec les faits, sur la sincérité qui est l'adéquation de la parole avec les sentiments éprouvés par le locuteur et dont le contraire est le mensonge lequel a pour prince et père Satan. La père jésuite qui enseignait insista sur un point essentiel : la vérité n'est pas au terme d'un raisonnement ; la vérité est une personne, celle de Jésus ; être dans la Vérité c'est rencontrer Jésus, qui ne fait rien de lui-même mais fait ce que son Père lui indique. Et d'ajouter : l'exactitude et la sincérité sont les conditions essentielles de la rencontre, et Jésus est le seul chez qui la parole et l'être se confondent, sans erreur ni mensonge.
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En tant que scientifique, bien entendu, j'ai chassé l'erreur. Ce fut même mon métier. Et c'est la raison pour laquelle le relation minutieuse et aussi exhaustive que possible des faits me paraît essentielle à tout dialogue, aussi bien dans la sphère privée que dans l'espace public. Autant que faire se peut, j'ai cherché la sincérité, mais je réalise que par souci de plaire, ou de produire un effet, je n'ai pas toujours été sincère. Oui, c'est là que le bât blesse. Car nous avons beaucoup de mal à être sincère. Je vous renvoie à ce billet où je citais Arthur KATZ et Paul VOLK : "Ce n'est pas l'ignorance qui nous empêche de devenir vrais, c'est la lâcheté".
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Je remercie fraternellement Olibrius qui, maladroitement parfois, a pointé l'approximation, disons-le mot, l'insincérité de certains de mes propos, et leur absolutisme. Il m'a rendu un grand service. Je partage certaines indignations de Tippel, mais comment ne lui dirais-je pas que ces remarques procèdent d'un système de pensée préétabli, dans le cadre duquel il tente de faire rentrer les faits, racontés toujours avec exactitude, il faut le souligner, et avec courage, ce que nous ne savons pas toujours faire ? Bien entendu, les commentaires de Fourmi, d'Adèle, de Ropartz, de Norman, de Meise, et d'autres lecteurs m'ont toujours paru utiles.
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Ces réflexions ne sonnent pas le glas du Blog, mais une certaine inflexion. Je dirai pourquoi les remarques de madame AUBRY, les initiatives du Président SARKOZY me paraissent, les unes issues du père du mensonge, les autres, de la pauvre chair (au sens de Paul de Tarse) de l'homme, et parfois aussi du père du mensonge. Et je m'efforcerai de justifier ces analyses en étant le plus exact possible dans la relation des faits, aussi sincère que possible dans l'expression de mes sentiments et de mes opinions, et dans l'espérance que mes paroles soient vraiment celles d'un disciple.
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Bonne journée.
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dimanche 22 novembre 2009

Le tri, pas l'amalgame

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Un lecteur a fait référence, dans un commentaire, aux "incidents" qui ont eu lieu à MARSEILLE et à LYON après le match aller de football entre l'équipe égyptienne et l'équipe algérienne, et il se demandait qui allait payer les dégâts entraînés par ces débordements. Il avait en tête, à l'évidence, le débat sur l'identité nationale, et les difficultés nées de l'octroi automatique de la nationalité française à tout étranger né sur le sol français.
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Le match retour qui a vu la victoire et la qualification de l'Algérie a suscité de nouveau des manifestations violentes. L'AFP, repris par le site de France Info, a présenté ainsi les événements. Première dépêche : "Légers incidents aux Champs Elysées après le match Algérie-Egypte". Deuxième dépêche, quelques heures plus tard "Soixante-trois personnes interpellées après les violences des Champs Elysées". Je cite de mémoire le titre des dépêches et il se peut que mes citations ne soient pas totalement exactes. Mais je suis sûr de la formule "légers incidents", et "soixante-trois personnes interpellées" à la suite des "événements" des Champs Elysées.
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Ainsi, de légers incidents peuvent être suivis de l'interpellation de soixante-trois personnes. Il y a comme un léger décalage dans la présentation des faits et de leurs résultats... Mais plus encore, on apprend que ces "légers incidents" et ces interpellations sont consécutifs au pillage (en moins de deux minutes disent d'autres dépêches d'agence) du magasin Mont Blanc, et du Magasin Swatch et du bris de plusieurs vitrines dont celle d'un restaurant.
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On peut supposer que ces rassemblements sont le fait de jeunes gens d'origine algérienne, fiers de voir que leur pays d'origine ait gagné son billet pour l'Afrique du Sud. On peut comprendre qu'ils aient besoin d'exprimer collectivement et publiquement cette fierté. Mais enfin, c'est le pays de leurs aïeux, ce n'est pas ou ce n'est plus leur patrie, et l'Algérie n'est pas une province française. On ne peut donc assimiler ces explosions de joie spontanée à celles qui surviennent après des matchs entre l'équipe de RENNES et celle de MARSEILLE par exemple. Les bretons, s'ils ont gagné, brandissent le drapeau blanc et noir de la Bretagne, aux beaux motifs d'hermine, et les provençaux, agitent les couleurs de leurs clubs, et font de même s'ils sont vainqueurs. Et de surcroît, ces victoires ne sont pas suivies d'émeutes, car c'est bien le nom qu'il faut donner aux mouvements ici évoqués.
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Il y a donc un problème, et ce problème est bien lié à l'origine de ces jeunes. Je refuse de voir en chacun d'entre eux un islamistes en puissance, un haineux, un délinquant. Cet amalgame, s'il était accepté comme vérité établie, entretiendrait un soupçon perpétuel, une animosité entre les citoyens, et finalement un climat de guerre civile larvée. Il y a dans ces rassemblements de jeunes ce que la presse appellent des "casseurs" qui entraînent leurs compagnons d'aventure et qui eux sont de véritables fléaux. Ce sont eux qu'il faut viser. La première des mesures consiste à les déchoir de la nationalité française, s'ils sont nés en France de parents étrangers, et, en cas de récidive, de les renvoyer dans le pays de leurs parents. S'ils sont nés français de parents français, il faut les déchoir de leurs droits civiques. Il n'est pas concevable que de tels voyous puissent par leur vote (dont on connaît la couleur...) infléchir la politique française. Il faut confisquer leurs motos, leurs téléphones portables, leurs ordinateurs, bloquer leurs éventuels compte en banque pour payer les dégâts, et se donner le moyen de suivre leurs déplacements grâce au bracelet électronique. La prison ne sert à rien.
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Ce ne sont pas des mesures inhumaines. Elles n'attentent aucunement à la dignité de la personne. Et elles permettent à la société de se protéger des exactions de ces bandes connues, fichées et rarement punies. Il s'agit aussi, et c'est le point le plus important de mon billet, d'accueillir fraternellement, les bras grands ouverts, tous ceux de nos banlieues que dégoûtent les pratiques des voyous ; il s'agit de ne pas pratiquer l'amalgame entre les délinquants en puissance ou les délinquants avérés, et ceux qui désirent vivre comme tous les autres jeunes français. Le tri oui, l'amalgame non. Ainsi, et en changeant ce qui doit l'être, nous séparerons "les boucs des brebis." Et c'est justement l'amalgame qui nous empêche de le faire. Car, dans nos têtes encombrées de préjugés, condamner les uns (ce qui est tout à fait légitime) reviendrait à condamner les autres (ce qui est une imbécilité de pensée).

samedi 21 novembre 2009

Un génie, vraiment ?

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René GROUSSET est un grand connaisseur de l'Orient en général et de la Chine en particulier. J'ai lu nombre de ses livres, car - je l'ai déjà dit - je me suis pris de passion pour l'Empire du Milieu et je suis fasciné par son histoire, son art, sa littérature. Je m'intéresse de très près à ce que dit cet historien. Mais je voudrais, à propos de certains de ses avis, expliquer comment fonctionnent nos mentalités modernes, et comment il nous est possible de trier dans les faits du passé ceux qui nous conviennent ou nous plaisent et ceux que nous préférons passer sous silence.
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Pour René GROUSSET, le Premier Empereur Jaune, celui dont on a retrouvé la tombe habitée de milliers de soldats et de personnages en terre cuite (on a pu en admirer quelques uns à Paris, car la Pinacothèque a consacré une exposition à cet Empereur et à son tombeau), est un des plus puissants génies de l'humanité, un génie qui dépasse César et Alexandre. Le compliment n'est pas mince, et l'on se précipite pour en savoir plus.
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Un génie vraiment, celui qui fit brûler en 212 avant J.-C. les livres classiques et avec eux 460 lettrés qui critiquaient les innovations de l'Empereur et son mépris de la tradition ? Un génie, l'homme qui fit bouillir vivant les féodaux qu'il jugeait hostiles à sa personne ou dangereux pour sa politique ? Un génie vraiment, celui qui fit creuser sa tombe par 700.000 condamnés, castrés au préalable, qui fit ensevelir tous les artisans qui avaient contribué à installer les machines destinées à protéger sa tombe, et toutes les nombreuses épouses qui ne lui avaient pas donné d'enfants ? Un génie ? Un génie l'homme qui envoyait des milliers de jeunes garçons et de jeunes filles se perdre sur la mer à la recherche des Îles habitées par des Immortels ?
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L'intérêt de l'opinion de René GROUSSET réside dans les présupposés de sa pensée. Un homme qui réunifie et centralise un pays, l'uniformise sous une poigne de fer avec l'aide de légistes inhumains, qui unifie poids, monnaie, écriture, largeur des essieux des chars, est un génie à cause de résultats qu'il obtient, et qui sont les effets de sa volonté de puissance. N'est-ce pas dire que la fin justifie les moyens ? Et n'est-ce pas ainsi que la Révolution - mutatis mutandis - a transformé la France ?
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Le même fonctionnement intellectuel est à l'oeuvre dans l'enseignement de la Révolution à nos jeunes. Il ne s'agit pas de nier les améliorations réelles apportées à la Chine par QIN SHIHUANGDI, le Premier Empereur Jaune des QIN, ni celle de certaines lois révolutionnaires. Mais il s'agit de savoir s'il était possible de faire l'économie de ces horreurs pour arriver aux mêmes résultats ? Les uns diront que non, et c'est l'opinion de la majorité des intellectuels français ; les autres diront que oui, et je prétends que cela était possible. Du reste, chez nous, le mouvement avait été donné, le 4 août 1789, par le duc d'AIGUILLON et le vicomte de NOAILLES à l'initiative desquels des privilèges nobiliaires qui, avec le temps étaient devenus des avantages injustifiés, furent abolis. Ne suffisait-il pas d'aller dans cette direction pour obtenir en douceur ce qui fut instauré ensuite par l'injustice, la cruauté et la violence ?
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Bien entendu, la bonne foi de René GROUSSET n'est pas en cause. C'est sa manière d'envisager la fonction du politique qui m'interpelle. Et je me demande si finalement notre système démocratique qui consiste pour une majorité à imposer à une minorité qui ne peut ni discuter ni négocier ni amender n'est pas une forme adoucie de cette manière de triompher par la seule volonté de puissance. Je maintiens que le compromis (pas la compromission) est nécessaire et devrait être imposé par la Constitution.

vendredi 20 novembre 2009

L'homme pressé

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L'homme marche d'un pas rapide. Il veut aller à la messe, et il ne lui reste plus que quelques minutes. Déjà la nuit est tombée ; les lampadaires de la rue de Varize jettent une lumière oblique sur un trottoir antique, jonché de feuilles. Peu de passants. Eux aussi se hâtent de rentrer. Ce n'est pas la froidure qui les presse, mais une sorte de peur archaïque ; l'atmosphère est blafarde, sinistre, étrange.
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Au coin de la rue, deux hommes sont assis par terre sur le rebord d'un portail métallique, fermé depuis longtemps, et qui le sera sans doute pour toujours. Ils parlent fort ; leur gaieté est factice : ils ont bu. L'un d'eux, un grand noir, coiffé d'un chapeau de feutre d'où sortent d'abondantes tresses qui tombent sur les épaules, se lève et dit à l'homme pressé :
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"Quand on n'a pas de réseau, est-ce qu'on est encore vivant ?"
La question mérite réponse. Elle lui est donnée par l'homme pressé.
"Vous n'auriez pas deux ou trois euros, par hasard ?" L'histoire du réseau, un piège ?
"Je ne les ai pas pas."
"Si vous les avez."
"Non. Si je les avais, je vous les donnerai." L'homme pressé ment. Il sait qu'il ment.
"Vous les avez."
"Non. Je vais voir ce que je peux faire"
Il ment. Il les a, un billet de cinq euros. Il a bien l'intention de ne rien faire du tout. Il ment, mais il se souvient de ce qu'il a dit sur le mensonge.
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Allons ! Il va faire de la monnaie chez l'épicier arabe ; "Au panier du Prince", n'est-ce pas un beau nom pour une enseigne d'épicier ?
L'homme pressé achète un rocher au chocolat, prend sa monnaie, retourne voir le grand noir. Il lui donne le rocher et les deux euros.
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"Respect, monsieur ! Respect" dit le grand noir qui a bu et sent l'alcool, un alcool blanc et parfumé, sans doute du kirsch.
L'homme pressé a l'impression de s'être fait avoir, de s'être laissé manipuler par un habitué de la manche, un habile. Mais il ne regrette rien. Le grand noir voulait deux ou trois euros. Il les a eus. Et un gros rocher au chocolat en plus.
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Je connais bien l'homme pressé. Je suis arrivé à l'heure à la messe.

jeudi 19 novembre 2009

Manipulation

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A plusieurs reprises, un lecteur que j'apprécie plus qu'il ne l'imagine, a supposé que par mes propos je cherchais à manipuler les familiers de ce Blog. J'ai quelque peu répondu avant hier à ses remarques. Néanmoins, l'affaire est trop importante pour être traitée à la légère. Je vais donc essayer de répondre à Olibrius le plus clairement possible, et le plus honnêtement surtout.
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(a) Il est évident que toute personne qui parle ou qui écrit vise à obtenir un effet dans l'esprit de celui qui l'écoute ou le lit. Les questions qui se posent alors sont les suivantes : cet effet est-il contraignant ? Vise-t-il à entraîner à des paroles ou des comportements qui sont mauvais pour le lecteur ou l'écoutant ? A-t-il pour fin l'intérêt de celui qui parle ou qui écrit ?
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(b) Il n'est pas simple de répondre à ces questions. J'ai toujours dit qu'il y a une grande différence entre communiquer et être en relation. Quand on communique, on ne se soucie pas de la réaction d'autrui, même si on escompte un effet de son message. C'est le mode d'influence utilisé principalement par la publicité et, dans une certaines mesure, par les hommes politiques. Il ne faut pas sous-estimer la manipulation qu'entraîne une communication soustraite à toutes règles déontologiques ou morales.
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(c) Quand on écrit, ce qui est mon cas, on utilise évidemment les moyens de la rhétorique. Et ces moyens - Olibrius le sent bien, quand il parle de magie du verbe - peuvent être perçus comme des manipulations. Sauf qu'il est toujours possible d'analyser un discours écrit et d'en dévoiler les faiblesses ou les contradictions. La chose est plus difficile quand il s'agit d'un parole dite. L'émotion qu'elle entraîne, et le fait que les paroles volent, ne permettent pas cette analyse critique. Le risque de manipulation est donc plus grand dans ce cas.
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(d) J'appelle donc manipulation tous les moyens (paroles ou écrits) qui visent à obtenir un effet sur autrui, un effet contraignant, ou contraire au bien de celui qui le subit, ou soustrait à son sens critique, au seul bénéfice de celui qui les met en oeuvre.
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(e) Dans la mesure où quelques lecteurs suivent mes billets, sans les commenter, j'admets que ces derniers puissent avoir l'effet que je vise, celui d'entraîner la conviction, et de modifier, le cas échéant, les comportements. Il faut donc qu'à ce point j'interroge ma conscience : ces effets sont-ils bons, neutres, ou mauvais ? Dénoncer la désinformation, le mensonge, la déformation des faits, les positions et propositions politiques qui me semblent avoir des conséquences désastreuses pour mon pays, pour mes concitoyens, pour les familles, pour les personnes, voire pour l'humanité, me semble légitime. J'admets un certain parti-pris contre le socialisme et ses séides. Je me suis toujours efforcé de justifier mes critiques.
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(f) Pour ce qui concerne l'institution Eglise, dans son aspect purement humain, je prie Olibrius de me croire : il y a bien des choses qui me déplaisent, et par-dessus tout la prudence et le retrait, l'hypocrisie et la lâcheté, alors même qu'il faudrait une parole forte et juste. Sur ce point, Benoît XVI a toujours raison. Mais une vérité qui va à l'encontre du plaisir à tout va, de l'égoïsme et de la jouissance ne peut être entendu, "car le monde ne connaît pas l'Esprit de Vérité".

mercredi 18 novembre 2009

De quoi je me mêle ?

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Effaré. Je suis effaré ! Si j'habitais la Région de Poitou-Charentes, je manifesterais, je pétitionnerais, j'enragerais de voir que mes impôts servent à soustraire les adolescentes à l'éducation parentale, introduisent le mensonge et la distance entre les enfants et leurs parents, dissolvent le peu de retenue morale qui pourrait subsister dans notre civilisation.
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Désormais, en effet, les adolescentes (il semble que ce soit surtout les lycéennes) de Poitou-Charentes recevront un "chèque contraception" (de 144 euros, s'il vous plaît !) qui leur permettra de satisfaire leur libido, et surtout celle de leur copain, à l'insu de leurs parents, car elles pourront se procurer directement pilules et stérilets sans qu'il leur en coûte. Vous me direz : "Mais le nombre de grossesses des adolescentes ne cesse d'augmenter ! Il faut faire quelque chose !" A quoi je répondrai : "Et pourquoi donc ce phénomène, si ce n'est à cause de l'hypersexualisation de notre société, de la propagande en faveur des moyens contraceptifs qui en découlent et des fausses assurances qu'ils induisent ?" Il me semble que former les parents à l'éducation sexuelle de leurs enfants serait plus humanisant que de lâcher la bride à ces derniers.
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Curieusement, le journal gratuit Vingt minutes publie dans son numéro du mardi 17 novembre, le résultat d'un sondage qu'il a commandité. L'article qui le résume et en commente les résultats est intitulé : "Les Françaises plébiscitent le chèque contraception de Royal". On se précipite donc pour voir de quoi il en retourne. Les choses sont plus nuancées qu'il n'y paraît. Les femmes de 65 ans et plus n'approuvent la mesure qu'à 52 % ; les 18 - 24 ans, à 79 % (rien de bien extraordinaire ; on leur facilite le travail, si je puis m'exprimer ainsi), et les 35 - 49 ans, à 70 %. Et le journal fait le commentaire suivant à propos des chiffres relatifs à l'opinion des femmes de cette dernière classe : "Or c'est dans cette tranche d'âge que l'on retrouve précisément le plus de mères d'adolescentes". Il s'agit là d'une interprétation des résultats, j'en conviens, mais d'une interprétation vraisemblable. Si nous allons un peu plus loin, nous pouvons aussi dire que les mères de ces adolescentes ne savent plus ou pas comment s'y prendre avec leurs filles pour les éduquer à une vie sexuelle saine et humanisante, qu'elles laissent flotter le ruban avec soulagement, et que ma foi si les galipettes de leurs filles ne leur coûtent rien, il n'y a plus qu'à laisser faire. Il n'y a aucun jugement dans ce que je dis là, je le précise à l'intention d'Olibrius. Il s'agit pour moi d'aller au bout de l'analyse. Ne serait-il pas préférable de favoriser le dialogue entre la fille et la mère dans ce domaine ?
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Je trouve que l'intrusion du politique dans la vie intime des citoyens est absolument insupportable. Madame ROYAL a lutté, avec raison, il faut lui rendre cette justice, contre la pédophilie. Mais il me semble que sa mesure relève de cette curiosité malsaine des adultes pour l'initiation des adolescents à la vie sexuelle. Elle relève de l'intimité de la famille et des consciences, pas de la démagogie d'un politique en mal de popularité. Et j'ai envie de dire : "De quoi je me mêle ?"

mardi 17 novembre 2009

Robespierre, Mao et la structure

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L'actualité internationale me fournit, sans que je l'ai cherché, une excellente illustration de deux thèmes que je développe depuis longtemps dans mes billets : la Révolution et la structure. Le Président américain fait ami-ami avec la Chine. Il a de bonnes raisons de le faire, mais ces raisons sont avant tout économiques ; elles n'ont rien à voir avec la manière horrible dont le régime communiste s'est implanté en Chine, et notamment avec les horreurs de la Révolution Culturelle. Il convient donc de rafraîchir la mémoire de nos contemporains et de montrer que la Révolution Culturelle se nourrit du même sang que la Révolution Française. Pour s'en convaincre, il suffit de se souvenir de la définition d'une structure, définition que j'ai rappelée il y a peu.
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SONG YONGYI a rassemblé des témoignages de victimes et d'acteurs de la Révolution Culturelle. Il a participé à celle-ci lorsqu'il était adolescent, à SHANGHAI ; il y a été emprisonné quatre ans pour d'obscurs motifs. Il est historien. Arrêté en Chine en 1999 alors qu'il recherchait, au cours d'un voyage - il résidait alors aux États Unis -, des documents sur les événements déclenchés par ce fou sanguinaire qu'était MAO, il a été arrêté, emprisonné quatre mois, puis libéré et expulsé, sous la pression de l'opinion internationale. Il enseigne aujourd'hui dans une grande université américaine de la côte occidentale, la Librarian Faculty de l'Université d'Etat de Californie.
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Dans la Préface du livre intitulé Les massacres de la Révolution Culturelle (Buchet Chastel, Paris, 2008), SONG YONGYI écrit ceci (page 11) :
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"Puisque le gouvernement chinois continue à étouffer toute velléité de dévoiler la réalité historique, il nous appartient de soutenir les tentatives des quelques rares historiens et chercheurs courageux qui tentent de sauver d'un oubli généralisé cette tranche peu glorieuse du passé récent de la Chine. N'est-il pas, en effet, stupéfiant de penser que, quarante ans après que les faits se sont produits, si peu de gens pensent à associer ces deux mots : "massacres" et "Révolution Culturelle" ? C'est perturbant à plusieurs niveaux, car cela signifie que l'on ne prend toujours pas en compte le caractère profondément criminel de cette "révolution". Cela veut dire que le gouvernement chinois a réussi à transformer progressivement l'image de ce mouvement en celle d'un événement folklorique, durant lequel, certes, des mouvements de critiques et d'accusations ont provoqué quelque inconfort à certains, mais qui connut aussi des heures exaltantes. Nous reviennent des images de défilés grandioses, de ballets contemporains à la chorégraphie merveilleusement exécutée, et d'affiches bigarrées qui ornent désormais nos calendriers et nos agendas. Cela signifie enfin que, la réalité historique n'ayant jamais pu être exposée de façon incontestable, le fait de passer sous silence des massacres d'une violence inégalée ne provoque pratiquement aucune levée de boucliers dans les milieux scientifiques, politiques ou universitaires."
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Remplacez dans ce texte Gouvernement chinois par Gouvernement français, MAO ZEDONG par ROBESPIERRE, silence officiel et majoritaire des scientifiques, politiques et universitaires chinois, par silence imposé à Ronald SEYCHER, Jacques HEER, Jean SEVILLIA, Jean DUMONT, Hippolyte TAINE, etc., pensez aux défilés grandioses promus par le Président MITTERRAND à l'occasion du bicentenaire, visitez l'exposition qui se tient actuellement aux Archives Nationales sur les prétendus progrès du droit imputables à la Révolution (Vingt Minutes dans son numéro d'aujourd'hui ne craint pas de rapporter les propos de monsieur Régis LAPASIN : "cette rénovation profonde, dit-il, passe souvent inaperçue à cause des Tribunaux de la Terreur", ce qui revient à dire "Faites ce que je dis, mais ne faites pas ce que je fais"), et vous aurez compris que la Révolution Culturelle plonge ses racines dans notre Révolution, qu'elle en traite la mémoire comme nous en avons traitée la nôtre, et qu'il n'y a pas de différences de fond entre les deux événements. Eh oui ! Une structure est bien un ensemble de relations non quelconques entre des objets quelconques."
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En voulez-vous une preuve supplémentaire ? Vous apprendrez, épouvantés, que le 8 août 1968, au moins trois mille membres du "mouvement du 22 avril" trouvèrent refuge dans un abri antiaérien de NANNING (GUANGXI), et qu'ils y furent noyés à l'instigation, ou plus exactement dans l'indifférence de WEI GUOQING, commissaire politique de la zone militaire. Il suffisait pour cela d'ouvrir les vannes du barrage situé en amont de la ville sur la rivière YONG, pour inonder l'abri. On le fit. Mais l'eau monta de 74 mètres, menaçant des milliers d'habitations, et il y eut des dizaines de milliers de morts. Vraiment, WEI GUOQING n'avait rien à envier au sinistre CARRIER qui noya 32.000 personnes à NANTES.
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Comment peut-on faire si peu de cas de tous ces morts, que ce soit chez nous ou là-bas ? Comment est-il possible de passer par pertes et profits le sang de ces innocents ? Comment voulez-vous que nous puissions nous réconcilier avec nous-mêmes, ici comme là-bas, si nous vivons dans le mensonge ? Ah, oui, vraiment ! Amour et Vérité se rencontrent. Et, à cet égard, nous avons bien des leçons à recevoir du peuple allemand qui a su regarder en face son passé, et des autorités sud-africaines qui ont instauré des sortes de Comité de la réconciliation et du pardon, après la fin de l'apartheid, sans rien cacher des excès, des crimes, des injustices qui eurent lieu pendant cette période.

dimanche 15 novembre 2009

Amour de la vérité

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Un ami très cher m'a prêté un livre intitulé "L'Esprit de Vérité", écrit par Arthur KATZ et Paul VOLK, deux pasteurs américains (Editions Emmaüs). Le livre est absolument passionnant, et il m'interroge très profondément. Vous n'êtes pas obligé de me croire, mais son contenu m'a empêché de dormir cette nuit. En voici, par exemple, un petit extrait :
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"Recevoir l'amour de la vérité et de l'Esprit qui nous conduit dans la vérité, c'est inévitablement nous ouvrir à une certaine souffrance, car la désillusion, l'incertitude et l'humiliation sont des formes de souffrance, et la souffrance, c'est ce que je tiens à éviter de toute force ; en effet, j'en ferai l'économie à n'importe quel prix, au prix de la vérité elle-même s'il le faut, à moins que je n'aime la vérité encore plus que je ne la crains.
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Ce n'est pas l'ignorance qui nous empêche de devenir vrai, c'est la lâcheté."
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L'Esprit de Vérité ! Est-ce que je sais le recevoir ? C'est une vraie question. Elle s'impose avec d'autant plus de force mon horizon proche est celui du grand passage et du face à face. Arrivé à ce point, je voudrais répondre à Olibrius qui me dit que mon absolutisme produit l'effet contraire de celui que je recherche. Je ne cherche aucun effet, en tout cas pas au sens où l'entendent les "communicants", les hommes politiques, les écrivains, les médias. Je cherche obstinément, et parfois au prix de durs efforts, ce qui me paraît juste, et vrai, au regard de Celui en qui je crois. Bien entendu, je puis me tromper. Et emporté par le désir du bien écrire, il m'arrive de faire quelques bons mots, souvent un peu cruels. Mais il n'y a aucune intention maligne contre les personnes. En revanche, je peste contre les esprits faux, et hélas, ils sont nombreux.
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La thèse centrale du livre que j'évoque ici est la suivante il n'y a pas d'amour possible sans vérité. Voilà une affirmation qui permet de donner un autre éclairage à toutes les discussions, parfois vives, qui animent ce Blog, quand il s'agit d'identité nationale. Je ne crois pas qu'on puisse nier la nécessité pour l'homme d'avoir une patrie, je ne crois pas que toutes les patries doivent avoir les mêmes lois, cultures, modes de vie, je ne crois pas qu'il soit possible de les faire coexister paisiblement en un même lieu si l'on n'est pas prêt à renoncer à nombre d'avantages, et si l'on ne veut pas partager en acceptant la différence. Ces conditions me paraissent vraies. Elles ne sont pas remplies, et je doute fort qu'elles puissent l'être jamais complètement. Ce simple constat m'amène à penser qu'il est préférable d'aider les peuples émergents sur place que d'aspirer chez nous des milliers de miséreux que personne ne veut loger, employer, soigner, et traiter humainement.
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Et pour terminer, voici ce que dit l'Apocalypse, Chapitre 21, versets 7 et 8 : "Tel sera l'héritage du vainqueur ; je serai son Dieu et il sera mon fils. Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les débauchés, les magiciens, les idolâtres et tous les menteurs, leur part sera dans l'étang brûlant de feu et de soufre : cela c'est la seconde mort."
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Voilà de bonnes raisons, me semble-t-il, pour dénoncer le mensonge partout où il se tapit, pour rechercher les faits, pour reconnaître ses erreurs, et son propre mensonge quand on l'a débusqué en soi.

samedi 14 novembre 2009

Le Journal Libération, un spécialiste de la propagande

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Les journaux de gauche sont décidément et définitivement disqualifiés. Le Journal Libération d'hier fait un titre sur l'intervention d'Eric RAOULT dans l'affaire Marie N'DIAYE que nous n'aurions sans doute jamais connue sans lui. Et c'est de cette intervention qu'il veut faire polémique.
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L'intervention de monsieur RAOULT est maladroite, je le dis tout net. Madame N'DIAYE n'est tenue à aucun devoir de réserve. Elle écrit et dit ce qu'elle veut. Et de plus, les propos infamants qu'elle a tenus en août 2009 l'ont été bien avant qu'elle ne reçoive le Prix Goncourt. Il faut incriminer les membres du jury ; ils ont trouvé bon de distinguer un écrivain qui dénigre son pays, un pays qui l'a accueilli et qui lui a donné des chances et des outils qu'il aurait eu beaucoup de difficultés à avoir en Afrique, dont elle est, me semble-t-il, originaire. Ce qui est inacceptable, ce n'est pas son jugement ; c'est que ce jugement n'est fondé sur aucune argumentation, sur aucun fait, mais sur des impressions parfaitement subjectives, et sur ce que NIETZSCHE appelait le ressentiment, dont il faut trouver sans doute la racine dans un inexplicable sentiment d'infériorité.
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Madame N'DIAYE est libre de critiquer monsieur SARKOZY. Elle ne l'est pas de critiquer la France en la jugeant monstrueuse. Monsieur PUJADAS, curieusement, a prétendu en donnant les titres de son Journal Télévisé, que madame N'DIAYE avait dit "détestable". Elle n'a pas dit "détestable", elle a dit "monstrueuse". Et elle persiste. Quant à monsieur PIVOT, il crie que c'est ne rien comprendre au monde de la culture que de protester contre le choix du jury. Mais il ne dit rien des propos insultants de la lauréate. Ainsi, dans ce déni de la réalité, se creuse un infranchissable fossé entre ces privilégiés de la notoriété, de la fortune et du savoir, et les humbles.
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Vous me direz que Victor HUGO a vilipendé Napoléon Le Petit, et Alphonse de LAMARTINE, Louis-Philippe (dans son "Nouveau voyage en Orient"). Mais si madame N'DIAYE était Victor HUGO ou LAMARTINE, il me semble que ça se saurait.
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Quand le Journal Libération détourne l'objet de la polémique sur monsieur RAOULT, en le disqualifiant, alors que celui-ci exprime l'opinion d'une énorme majorité de nos concitoyens, il commet, une fois de plus une mauvaise action. Il le fait en utilisant toutes les ficelles bien connues de la propagande, celle de l'agit-prop, comme celle de GOEBBELS. Nous sommes en droit d'attendre de lui qu'il explique pourquoi il approuve les propos de madame N'DIAYE et en quoi il trouve que notre pays est monstrueux. Une chose est de dire ; une autre d'argumenter et de prouver. L'ayant prouvé, il doit alors déménager ses bureaux à l'étranger, à LA HAVANE, à PYONG YANG, ou à PEKIN. Son comité de rédaction trouvera dans l'une ou l'autre de ces villes l'atmosphère idyllique qu'il appelle de ses voeux ; la liberté de dire, de faire, de se mouvoir, de se réunir, de critiquer, de participer à des élections pluralistes. Tandis que nous, nous continuerons de courber l'échine sous les prestations sociales, les avantages de toutes sortes dont nous sommes les cibles malheureuses.
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Je vais vous dire ce que je pense de ces journalistes : il gagne leur vie grâce à l'approximation de leurs idées, et en vertu d'une immense malhonnêteté intellectuelle.
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Ite missa est.
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vendredi 13 novembre 2009

Identité nationale : Henri Hude donne son avis

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Henri HUDE est un philosophe politique qui enseigne à Saint-Cyr Coetquidan. Il est chrétien et ne cherche pas le cacher. Dans son remarquable livre "Ethique et politique" publié aux Éditions Universitaires, en 1992, dans la collection Philosophie Européenne, il expose les principes de philosophie politique d'inspiration chrétienne. Je donne quelques extraits de cet ouvrage, en vous demandant instamment de ne pas vous lasser de l'apparent longueur de mon billet, et en vous invitant à acheter ce livre essentiel.
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Son chapitre VI est intitulé : Immigration et identité. A la section 2 de ce chapitre, il dit ceci :
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"La nation n'a pas pour fin de devenir un égoïsme collectif. Elle doit pouvoir accueillir ceux qui frappent à sa porte, rendre service à ceux qui sont au dehors. Mais pour que la valeur d'hospitalité ne soit pas rejetée, il faut la distinguer de ce qui n'en est qu'une imitation caricaturale. L'hospitalité qui est une valeur, c'est l'hospitalité responsable.
L'hospitalité responsable est juste envers tous : envers ceux qui sont reçus et envers ceux qui reçoivent.
A l'égard de ceux qui sont reçus. Dès lors qu'une personne est admise chez nous, il faut la traiter convenablement. Nous avons énormément à faire à cet égard. Mais ce n'est pas faire preuve d'hospitalité que de dire à des personnes : entrez donc chez nous, vous coucherez dans des galetas et vous travaillerez pour nous comme des esclaves dans des entresols et des arrière-cours. Ou bien nous avons le besoin d'employer quelqu'un et les moyens de le faire vivre convenablement, et nous le payons bien [...], ou bien nous avons l'intention de l'exploiter et aucun souci de lui assurer une condition décente, et dans ce cas le thème de l'hospitalité devient une couverture pour l'exploitation d'un sous-prolétariat.
A l'égard de ceux qui reçoivent. Un homme qui se laisse tyranniser par les pique-assiette et les casse-pieds n'est pas un être hospitalier, mais un faible et un gogo. [...] Une nation n'est pas une gamelle. Il faut savoir faire preuve de fermeté. Bonté n'est pas sensiblerie. La fermeté ne doit pas être inspirée par la peur d'être envahi, submergé, étouffé par le monde extérieur. La fermeté doit être avant tout inspirée par le sentiment de la responsabilité, et sans cette fermeté, il n'y a pas d'hospitalité responsable."
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Dans la section 3 de ce chapitre, notre philosophe poursuit :
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"Si la morale publique n'avait pas été abaissée par le matérialisme et le cynisme, on aurait pu espérer des citoyens un niveau de compréhension, d'ouverture et d'hospitalité qu'il est aujourd'hui inconcevable de leur proposer, et qu'on ne peut prétendre leur imposer qu'en provoquant l'inverse de ce qu'on voudrait obtenir. Les démolisseurs de la culture et des moeurs de nos nations, ceux qui jettent le pays dans le scepticisme et la jeunesse dans le désespoir sont les derniers à avoir le droit de crier au fascisme car s'ils en savaient la définition, ils verraient qu'ils en sont les premiers fauteurs.
Le peuple, déculturé par le progressisme, et faute de retrouver son identité perdue, se rabattra forcément sur une réidentification à base de simple opposition aux autres. Il n'y a pas d'autre manière d'éviter la haine raciale que de rendre au peuple sa culture profonde, qui est si belle et si universelle, à la place de cette anti-culture dérisoire et misérable dont il est ridiculement affublé. Mais entre-temps, pour éviter le pire, on sera bien obligé de tarir le flot d'immigrants, puisque sa continuation nous ferait glisser du progressisme déjà cynique à une réaction fasciste.
Compte tenu de la perte relative d'identité, due à la déculturation progressiste, et compte tenu du besoin d'identité chez tout homme, le risque est de voir survenir la réidentification la plus pauvre, c'est-à-dire celle qui consiste, pour un homme, à s'identifier par le simple fait de ne pas être l'autre considéré dans son apparence."
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Il faut être aveugle et de mauvaise foi pour ne pas voir la justesse de cette analyse. En favorisant l'émergence du Front National, le Président MITTERRAND a commis une mauvaise action contre son pays. Et je crains fort que les défenseurs de Marie N'DIAYE, et le chèvre-choutant Ministre de la Culture rendent un bien triste service à la cause qu'ils prétendent défendre. Je reviendrai sur ce point.

jeudi 12 novembre 2009

Identité nationale : l'exemple de Mère Térésa

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Un ami très cher me transmet ce texte de Mère Térésa. Dans le débat actuel sur l'identité nationale et sur le traitement de l'immigration clandestine qui lui est lié, ce texte donne un éclairage tout à fait intéressant sur ce qu'il convient que chacun d'entre nous fasse.
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"Ne vous souciez pas de chercher la cause des grands problèmes de l'humanité ; contentez-vous de faire ce que vous pouvez faire pour les résoudre en apportant votre aide à ceux qui en ont besoin.
Certains me disent qu'en faisant la charité aux autres, nous dédouanons les États de leurs responsabilités envers les nécessiteux et les pauvres. Je ne me tracasse pas pour autant, car ce n'est généralement pas l'amour qu'offrent les États. Je fais simplement tout ce que je peux faire, le reste n'est pas de mon ressort.
Dieu a été si bon avec nous ! Travailler dans l'amour est toujours un moyen de se rapprocher de lui. Regardez ce que le Christ a fait durant sa vie sur terre ! Il l'a passée à faire le bien (Ac 10,38). Je rappelle à mes soeurs qu'il a passé les trois ans de sa vie publique à soigner les malades, les lépreux, les enfants et d'autres encore. C'est exactement ce que nous faisons en prêchant l'Evangile par nos actions.
Nous considérons que servir les autres est un privilège et nous essayons à chaque instant de le faire de tout notre coeur. Nous savons bien que notre action n'est qu'une goutte d'eau dans l'océan, mais sans notre action cette goutte manquerait. "
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Les approximatifs diront : "vous voyez bien, Mère Térésa nous invite à aider les pauvres sans nous soucier de leur origine, ni de ce que font les États". Les réalistes et les amoureux diront que Mère Térésa a été servir les pauvres chez eux, en Inde, tout comme Soeur Emmanuelle l'a fait en Egypte, sans chercher, ni l'une ni l'autre, à transposer l'immense problème de la pauvreté dans le chant de la politique politicienne. Elles n'ont pas réclamé l'aide des États, de l'ONU, des ONG, des comités Hippolyte ou Théodule. Elles y ont été, armées de leur courage, de leur foi, et de la certitude que faire un petit quelque chose, c'était mieux que de pérorer sur la Place du Trocadéro ou l'Esplanade des Droits de l'Homme.
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Je fais donc une suggestion à mes lecteurs. Qu'ils prennent comme filleul un jeune indien de BOMBAY, orphelin ou abandonné par ses parents, qu'accueille en ses foyers un jésuite indien. Ils peuvent adhérer pour cela à l'Association pour l'Enfance Abandonnée, dont le siège est à NANTES. Je donnerai l'adresse dans un prochain billet. Ils correspondront avec leur filleul, pourront lui rendre visite, ou même l'accueillir pour quelques jours chez eux.
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Ni monsieur SARKOZY, ni madame N'DIAYE ne peuvent nous empêcher de le faire. Et ça c'est concret.

mercredi 11 novembre 2009

Identité nationale et l'opinion inacceptable de madame Marie N'Diaye sur son pays d'accueil

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Je ne sait plus quel critique a dit MONTAIGNE a mis vingt ans pour pousser son fameux cri du coeur "Parce que c'était lui, parce que c'était moi", à propos de LA BOETIE. Il n'aura fallu que quatre mois à peine à madame Marie N'Diaye pour regretter les propos qu'elle a tenue sur la France, et sur l'élection de monsieur SARKOZY à la Présidence de la Républiquele 18 août, dans les Inrockuptibles (ou un nom comme ça). Encore a-t-elle formulé ces regrets mezzo voce en qualifiant ses propos d'alors "d'excessifs".
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Madame N'Diaye ne dédaigne pas qu'un jury français lui décerne le prix Goncourt, et elle ne renverra pas à ses compatriotes les droits d'auteur qu'elle en a reçus, (je dis compatriotes puisqu'elle est française). Et pourtant, elle n'a pas hésité à qualifier de "monstrueuse" la France de monsieur SARKOZY. Pour montrer le mépris dans lequel elle tenait ce dernier, elle est partie habiter BERLIN immédiatement après l'élection présidentielle. Elle confondait ainsi un homme et un pays. Comment est-il possible de se dire Français dans ces conditions ? Elle peut ne pas apprécier le Président de la République et le dire, en argumentant. Elle préfère l'invective à l'explication et surtout elle dénie toute légitimité à une élection démocratiquement tenue. Peut-être préfère-t-elle les élections à la GBAGBO, à la BONGO ou à la BEN ALI ?
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Le plus étonnant encore est qu'un jury français, désirant honorer un écrivain français de langue française ait cru bon choisir madame N'Diaye comme lauréate, alors qu'elle méprise un pays auquel elle doit beaucoup, sinon tout. Ces gens participent au déclin de notre pays. Ils ne méritent pas les honneurs dont la presse les entourent et avec eux leurs travaux. Ils n'ont pas l'excuse de l'ignorance. Les propos de Marie N'Diaye ont été tenus en août ; l'élection du lauréat du Goncourt, en octobre.
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Paris est morose, dit-elle, et Berlin exaltant ? Un bon conseil, quelle y reste le plus longtemps possible. Du reste, BERLIN, de l'avis de tous ceux qui l'ont visité, est une ville superbe. L'exil n'est donc pas trop rude. Oui qu'elle y reste. Car ce n'est pas avec des gens de son acabit que l'on trouvera un consensus sur ce qui fonde l'identité nationale. Elle prétend qu'elle n'a pas eu l'idée d'un exil politique. Aurait-elle envie de se promener sur les quais de Seine et de prendre un café au Flore ou Aux deux Magots, qu'elle adoucisse son ton aujourd'hui ?
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Identité nationale : les vues de René Girard

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Il est impossible d'extraire d'une oeuvre aussi riche et foisonnante que celle de René GIRARD une citation étroitement applicable à la notion d'identité nationale. René GIRARD - qui s'est opposé à plusieurs reprises à LEVI-STRAUSS dans ses livres - a un autre point de vue que l'ethnologue. Il se place plus en anthropologue et philosophe qu'en observateur des sociétés humaines, même s'il utilise abondamment les travaux de ceux qui font profession d'étudier les peuples.
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J'en suis donc réduit à résumer ce qui dans la théorie lumineusement exposée (entre autre) dans Des choses cachées depuis la fondation du monde peut éclairer le propos du jour.
Pour René GIRARD, notre désir n'est jamais autonome ; nous désirons ce qui est proposé à notre désir. Il en découle que nous désirons d'autant plus le désir de l'autre que nous lui sommes proche. Qu'y-a-t-il de plus proche que des frères ? Caïn tue Abel ; Etéocle et Polynice s'entretuent ; il s'en est fallu de peu que les fils de Charlemagne ne s'étripent, à la mort de leur père qui sagement pourtant, avait procédé au partage équitable de son Empire entre eux. Il s'agit là d'exemples que l'on peut étendre à d'autres ressemblances : ainsi plus près de nous, la rivalité mimétique entre "deux amis de trente ans", messieurs BALLADUR et CHIRAC. En somme, plus nous nous ressemblons, et plus nous faisons bouillir en nous la marmite des violences. René GIRARD observe que dans les périodes de crises, les distinctions sont abolies, les rôles eux-mêmes parfois inversés ; il en est ainsi dans les bacchanales ou le carnaval ; il en a été ainsi pendant la Révolution Française, et ce n'est pas pour rien que le Duc d'Orléans a pris le nom de Philippe Egalité, lui qui a péri finalement sur l'échafaud. La seule situation attestée où une telle rivalité mimétique n'explose pas est celle de Jean-Baptiste et Jésus, et elle est dans l'Evangile : Jean est le cousin de Jésus ; il baptise et Jésus aussi. Les disciples de Jean vont lui rapporter que Jésus l'imite, et ils s'en offusquent. La réponse du Baptiste est tranchante : "Il importe qu'il croisse et que je diminue ; opportet eum crescere, me autem minui".
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On voit par ces quelques explications très sommaires que la rivalité mimétique explose quand la ressemblance, ou plus exactement l'indifférenciation, l'indistinction des personnes est à son paroxysme. Voilà pourquoi le concept d'égalité est imbécile dans la manière dont il est présenté et surtout compris par nos concitoyens.
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Sommes-nous si loin de la question de l'identité nationale ? Certes non. Nous vivons sur un sol, nous avons un paysage, une histoire que chacun peut s'approprier. Mais en même temps, nous savons qu'il est nécessaire qu'il y ait de la différenciation, pour exister tout simplement. A mon avis, il ne faut pas voir ailleurs que dans cet effort de différenciation la création et la prolifération des bandes ethniques dans les banlieues. Mais d'un autre côté, en vertu de la cohabitation et du partage non pas d'une même culture, mais des mêmes besoins, biens et habitudes de confort, nous rentrons dans cette violence mimétique : lui, il a une Porsche, moi pas. J'en veux une.
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Où est l'issue de ce qui se présente comme une impasse politique ? Je n'en vois pas d'autre que le maintien d'une différenciation par le retour dans leur pays d'origine des étrangers clandestins, et par une assimilation (et non pas une intégration) des Français d'origine étrangère dans le respect de la spécificité d'origine tant qu'elle ne prétend pas s'imposer aux autres. Cela porte un nom et même plusieurs : fraternité, respect, amour.

mardi 10 novembre 2009

Identité nationale : une réflexion de Levi-Strauss

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Dans une réponse au commentaire de l'un de mes lecteurs, je faisais allusion à trois penseurs qui me paraissent éclairer puissamment le débat sur l'identité nationale. Avant de citer le premier des trois, je voulais simplement souligner que l'intensité des échanges (euphémisme) et le nombre de contributions montrent bien que le sujet est important, qu'il fait réagir les hommes concrets que nous sommes, en fonction de nos expériences personnelles : la patrie, le sentiment d'identité et de participation active à une communauté humaine sont inscrits dans le coeur de l'homme, en relief - pour ceux qui en vivent - en creux pour ceux qui, en étant dépourvus -cherchent dans le désespoir un port ou jeter l'ancre.
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Le premier des trois, dans l'ordre logique (vous verrez pourquoi ce mot dans trois jours) est Claude LEVI-STRAUSS, le célèbre ethnologue qui vient de nous quitter, alors qu'il avait plus de cent ans. J'ai trouvé ce texte dans le dernier numéro du Figaro Magazine et n'ai pas lu l'ouvrage dont il provient, et je subodore que le choix n'est pas innocent qu'en a fait le Comité de Rédaction du journal. Voici de quoi il s'agit :
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"La contribution que l'ethnologue peut apporter au problème racial se révélerait dérisoire et il n'est pas certain que celle qu'on irait demander aux psychologues et aux éducateurs se montrerait plus féconde, tant il est vrai que, comme nous l'enseigne l'exemple des peuples dits primitifs, la tolérance réciproque suppose réalisée deux conditions que les sociétés contemporaines sont plus éloignées que jamais de connaître : d'une part, une égalité relative, de l'autre, une distance physique suffisante. [...] (les caractères en gras sont de votre serviteur).
Sans doute nous berçons-nous du rêve que l'égalité et la fraternité régneront un jour entre les hommes sans que soit compromise leur diversité. Mais si l'humanité ne se résigne pas à devenir la consommatrice stérile des seules valeurs qu'elle a su créer dans le passé [...], elle devra réapprendre que toute création véritable implique une certaine surdité à l'appel d'autres valeurs, pouvant aller jusqu'à leur refus, sinon même leur négation.
Car on ne peut, à la fois, se fondre dans la jouissance de l'autre, s'identifier à lui, et se maintenir différent. Pleinement réussie, la communication intégrale avec l'autre condamne, à plus ou moins brève échéance, l'originalité de sa et de ma création. Les grandes époques créatrices furent celles où la communication était devenue suffisante pour que des partenaires éloignés se stimulent, sans être cependant assez fréquente et rapide pour que les obstacles indispensables entre les individus comme entre les groupes s'amenuisent au point que des échanges trop faciles égalisent et confondent leur diversité."
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Il me semble que beaucoup de choses importantes sont dites dans ce texte magistral. Le père du structuralisme appliqué à l'ethnologie, celui qui sous les diverses modalités des cultures, découvre les éléments sous-jacents communs à toutes les sociétés humaines, plaide, ô paradoxe, pour le maintien de la diversité. Vous comprendrez encore mieux si je vous rappelle la définition que mon collègue et ami, le Pr Michel TARDY, donnait de la structure : "une structure est un ensemble de relations non quelconques entre des objets quelconques". Je réclame, nous réclamons que le côté "quelconque" des éléments constituants la structure demeurent variés, riches et foisonnant pour maintenir à la fois la bonne distance et la bonne communion entre les groupes humains. Dans une structure, deux objets différents ne peuvent occuper la même place. Et c'est pourtant ce que les utopistes de la fraternité universelle imposée veulent instaurer chez nous en acceptant tout et n'importe quoi. LEVI-STRAUSS a parlé avec raison de "négation de certaines valeurs". Je partage ce pont de vue, l'ai déjà dit maintes fois (moins bien), mais tout aussi clairement. Voilà un bon point de départ.
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Demain, contribution du deuxième penseur René GIRARD, sur l'indifférenciation et la violence mimétique.
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lundi 9 novembre 2009

Le prophète, l'utopiste et l'homme concret.

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Un ami, fidèle lecteur du Blog, m' a téléphoné hier matin pour me dire qu'il s'y passait des choses très graves, que les échanges étaient violents, et qu'il convenait que je lusse tous les commentaires sur l'identité nationale afin d'y réagir. J'ai bien réfléchi. Je ne l'ai pas fait. Car cette lecture préalable aurait eu pour effet de soulever des approbations ou des préventions que je qualifierais volontiers de narcissiques "Tiens, c'est bien ! Il pense comme moi" ou "Il raconte des bêtises !"
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Il se trouve qu'une amie m'a prêté l'article d'un théologien protestant, Alain HOUZIAUX, intitulé : "L'idéal de chasteté dès les débuts du christianisme. Pourquoi ?" in Études théologiques et religieuses, 2008/1, pp 73-103. Et c'est dans cet article que je crois avoir trouvé la réponse aux conflits d'opinions qui traversent la réflexion sur l'identité nationale ; HOUZIAUX fait une distinction très remarquable, et opératoire entre le prophète et l'utopiste. Que dit-il ? Ceci :
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"Les prophètes font du Royaume un idéal eschatologique qui appelle et attire. Les utopistes prétendent vouloir instaurer (souvent de force) le Royaume, les prophètes se souviennent que le Royaume ne peut et ne doit être de ce monde. Les utopistes oublient que l'utopie caractérise un "sans lieu" et un "non-lieu" et veulent l'instituer dans le lieu de monde." Et reprenant la distinction de FREUD entre "l'idéal du moi" et "le surmoi", HOUZIAUX poursuit "Notre idéal du moi nous appelle à suivre un idéal, une promesse, un exemple. [...] Notre surmoi édicte des règles, des carcans, des interdictions. L'idéal du moi suscite chez le sujet plutôt des sollicitations positives et idéalistes alors que le surmoi s'exprime plutôt sous forme de prohibitions répressives."
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Et il m'apparaissait que, quelle que soi l'opinion professée en matière d'identité nationale, nous étions tous à la fois un peu prophète et un peu utopiste. Comment, en réalité, le problème se présente-t-il ? Avec les clandestins, nous avons devant nous des hommes concrets, nous sommes nous-mêmes des hommes concrets. Les choses se manifestent alors ainsi :
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On peut imaginer sans peine, que pour les étrangers venus clandestinement en Europe, le départ de leur patrie est un arrachement, une amputation, une douleur. On quitte une terre, des paysages, des coutumes, sa famille, ses amis, un mode de vie, pour aller vers un avenir que l'on croit meilleur et l'on se retrouve dans un pays qui ne peut offrir ce que l'on cherche. On découvre que c'est un mirage, on a honte de son échec (surtout dans le cas d'un Africain qui, venu en Europe, passe pour le grand homme de la famille laquelle se repose alors entièrement sur lui pour sa vie matérielle) et l'on se saigne aux quatre veines pour ne pas perdre la face. On va de petits boulots en petits boulots, de petits larcins en petits larcins, on fraude dans le métro pour se déplacer, on essaye de tirer le maximum des prestations sociales ; à dire le vrai, on n'a guère d'autre choix.
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Comment se présente pour les Français, hommes concrets que nous sommes, cette situation ? Nos enfants, malgré de longues études, ne trouvent pas de travail. Les médias ne cessent de nous rabâcher que le pouvoir d'achat est en régression. Certaines bandes de jeunes font peur et sont dangereuses - on glisse là de la question des étrangers clandestins à celle des jeunes issus de l'immigration - les nuisances engendrées par les campements sauvages de clandestins deviennent insupportables aux riverains. La CGT met de l'huile sur le feu en organisant des grèves sur le tas dans les entreprises ou établissements qui emploient des étrangers sans titres de séjour, et réclame pour eux une régularisation, légitimable par certains côtés : ils font le travail que nous ne voulons plus faire. Ces dysfonctionnements sont sans doute peu nombreux par rapport à la masse des étrangers. Mais ce sont eux que les médias commentent. D'où le mécontentement d'une partie de l'opinion qui, se sentant abandonnée des autorités, durcit son discours et ses pratiques. Bref, on va peu à peu vers une situation qui a été prévue par HOBBES si je ne m'abuse : celle de "Tous contre tous". Les Français contre les étrangers, les pro-étrangers contre les anti-étrangers, les ruraux contre les citadins, les clandestins de langue arabe contre les clandestins d'Afrique noire, les blogueurs pour contre les blogueurs contre, etc.
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Si nous gardons raison, nous voyons bien (a) qu'il nous est impossible d'accueillir dignement ces milliers d'immigrants, alors que nous avons du mal à faire vivre nombre de nos compatriotes ; nous ne sommes pas prêts - me semble-t-il - à partager notre terre et nos richesses avec ces clandestins, au prix d'une diminution notable de nos revenus ; (b) nous ne voudrions pas nous arracher à notre patrie, quand bien même nous ne cessons de protester et d'en vouloir toujours plus ; la situation n'est donc pas si mauvaise que cela pour nous ; (c) ce que nous ne voulons pas pour nous, nous ne pouvons le vouloir pour ces miséreux ; une seule solution par conséquent : leur permettre de rester chez eux, d'y plonger très naturellement leurs racines, en favorisant le développement de leur pays par notre contribution technique, scientifique, médicale, financière, en respectant des échanges équitables, en étant très rigoureux sur les critères de régularisation des sans-papiers, et humains dans les mesures d'accueil transitoire que nous réservons aux étrangers ; (d) en étant absolument intransigeant, en cas de naturalisation, sur la bonne connaissance de la langue française, du fonctionnement politique de notre pays, de ses traditions, de ses lois essentielles.
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Tout cela est du bon sens. En agissant ainsi, nous savons que le Royaume n'est pas de ce monde et ne peut l'être. Et nous sommes prophètes. En évitant de faire peser sur les épaules de nos compatriotes qui vivent difficilement et quotidiennement un fardeau que nous ne portons pas nous-mêmes, nous quittons l'utopie. Et c'est bien l'homme concret et non un système d'idées que nous servons.

vendredi 6 novembre 2009

Clarification

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Juste avant de partir en voyage, un billet qui me semble nécessaire, une clarification sur le problème de l'identité nationale. Il m'apparaît en effet que dans mes remarques sur cette question, j'ai été insuffisamment précis.
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Une première constatation : le débat sur l'identité nationale n'a de sens que parce que nombre de jeunes français, qui ont des parents d'origine étrangère, souvent africaine ou nord-africaine, ne se reconnaissent pas ou ne veulent pas se reconnaître comme tels. Il s'agit donc de voir comment il est possible d'agréger ces jeunes gens à la communauté nationale sans leur faire renier leurs origines.
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J'ai eu d'assez nombreux élèves dont les parents ou grands parents étaient d'origine portugaise, italienne, espagnole ou polonaise. Aucun d'eux n'avait oublié d'où venait sa famille, mais aucun n'aurait songé à revendiquer une autre appartenance que française. La pauvreté, le fascisme, la guerre civile avaient poussé ces familles à émigrer ; elles s'étaient intégrées sans difficulté. Mais ces pays étaient tous européens et de tradition chrétienne. Et les différences n'étaient pas considérables entre le pays d'origine et le pays d'accueil. J'ai eu un beau-frère d'origine roumaine ; il était plus amoureux de sa nouvelle patrie que nombre de Français nés en France de parents français. Il parlait admirablement notre langue. Et pourtant, il aimait tout naturellement sa patrie d'origine. J'ai eu aussi des élèves d'origine nord-africaine. Là encore, pas de problèmes avec eux, avec comme seule réserve (et encore), certaines manières de voir la réalité propre à la langue arabe et à la religion musulmane. Certains la pratiquaient avec ferveur, d'autres un peu plus mollement. J'ai eu aussi des élèves venus de l'Afrique noire, et qui, hormis le fait qu'aucun d'eux n'a songé à revenir dans son pays où sa compétence aurait été utile, n'ont eu la moindre difficulté d'intégration. Dans tous les cas, je le reconnais bien volontiers, il s'agissait d'une élite, douée, travailleuse, intelligente.
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La question de l'intégration se pose essentiellement pour les "jeunes des banlieues", des cités. Des bandes organisées et rivales se disputent des territoires pour pouvoir organiser leur trafic de drogues, de voiture, de téléphones portables volés, etc. Ces bandes sont marquées ethniquement. On peut tourner autour du pot autant que l'on veut, c'est ainsi. Bien entendu, cette organisation n'est pas imputable à un quelconque facteur racial. C'est un effet culturel. On se regroupe par affinité de culture, de langue, de religion. Et comme on s'ennuie, qu'il n'y a pas d'emplois, et que la société de consommation étend ses ravages et ses mirages, on veut des voitures, des I-phones, des appareils de photos, des blousons de cuir, "comme les autres". L'argent du trafic étant facilement gagné, il est inutile de se donner du mal pour travailler à l'école, pour acquérir un diplôme ou une compétence professionnelle. La pression exercée par les pairs sur les individus achève de désagréger le reste de sentiment d'appartenance à une communauté nationale. On peut toujours dire qu'il faut éduquer, enseigner, etc. Si ces jeunes n'y trouvent pas d'intérêt, ils ne se laisseront ni éduquer ni enseigner. La conclusion me semble claire : la prévention des trafics et leur répression doivent être exemplaires et impitoyables. Encore faut-il en avoir la volonté politique, et l'ayant, y mettre les moyens. Ceux-ci viendront avec.
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Tout autre est le cas des étrangers. Il y a des étrangers en situation régulière, qui travaillent, payent leurs impôts, etc. Prenons seulement conscience que leurs enfants nés en France seront presque automatiquement français, et qu'il convient de prendre en compte dès maintenant cette question. Et puis il y a des étrangers en situation irrégulière, c'est-à-dire sans titre de séjour régulier. Des employeurs peu scrupuleux les recrutent, les payent avec un lance-pierre, et ne déclarent rien aux URSAFF et autres caisses de ceci et de cela. Ils doivent être très sévèrement sanctionnés, leur établissement ou leur entreprise fermée voire confisquée. Et le cas des étrangers ainsi exploités doit être examiné en détail pour une éventuelle régularisation qui ne peut être automatique. D'autres étrangers sont en situation irrégulière. Ou bien ils se cachent, et souvent vivent de rapines ou de mendicité à la sauvette. Ou bien, comme ceux de la jungle de CALAIS, ils attendent dans des conditions misérables de passer en Grande Bretagne. Ils excitent la pitié et, ce qui est bien naturel, se voient offrir des aides ponctuelles par des personnes généreuses. On doit les admirer, car il n'est pas question de fermer ses entrailles à un frère qui a faim. Mais on doit les mettre en garde contre les effets pervers d'une telle aide, et leur faire comprendre qu'il n'est pas d'autres solutions politiques acceptables que de renvoyer ces malheureux dans leur pays d'origine.
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On voit bien qu'il ne s'agit plus là d'identité nationale, encore que des idéologues voudraient nous le faire croire. Une absence de droit ne saurait créer de droit. C'est ainsi. Où alors qu'on n'exige pas de nos compatriotes qu'ils aient un comportement civique.
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J'espère voir été clair.
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jeudi 5 novembre 2009

Relâche

Je m'absente quelques jours et reprendrai mes billets lundi soir ou mardi. J'espère en produire un demain vendredi aux aurores.

Le cumul des mandats, une vieille affaire

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Les problèmes soulevés par le cumul des mandats ou des fonctions ne datent pas d'hier. NIZAM AL-MULK (titre honorifique donné à ABU HASAN ALI), vécut au XIe siècle. Il était d'une vieille famille iranienne, et fut ministre des premiers souverains seldjoukides, d'origine turque, ALP ARSLAN et MALIK CHAH. Au chapitre 42 de son Traité de Gouvernement, il écrit :
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"Les souverains perspicaces et les ministres intelligents n'ont jamais confié deux emplois à une même personne ; de cette manière, leurs affaires étaient conduites avec ordre et d'une manière brillante ; car si l'on donne deux places à un même individu, il n'aura jamais d'ordre, et il arrivera de deux choses l'une : il y aura ou confusion ou insuffisance dans l'expédition des affaires. Si l'on prête à ce sujet une sérieuse attention, on verra que celui qui doit remplir deux fonctions sera constamment la proie du désordre, qu'il sera constamment accablé de reproches et de soucis et insuffisant dans son travail" (In Traité de Gouvernement, traduit du persan et annoté par Charles SCHEFER, et préfacé par Jean-Paul ROUX. Chapitre 42, pp 245 ss. Editions Sindbad, Paris, 1984).
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Remplaçons emplois par mandats, et souverain par corps électoral, et nous pourrons transposer sans difficulté la résolution des problèmes liés au cumul des mandats. Bien entendu, les détenteurs de plusieurs mandats prétendront qu'il est plus facile de régler les questions délicates qui se posent à sa ville, son canton, ou son département quand on est député, au motif que l'on est plus près des ministres, ministères et centres de décision. C'est avouer avec ingénuité que la résolution des problèmes ne vient pas de leur analyse sérieuse par ceux qui sont chargés de leur trouver une issue, mais dépend des relations, des pressions, et des circonstances. Ce n'est pas ainsi qu'une démocratie en bonne santé devrait fonctionner.
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Décidément, il n'y a rien de nouveau sous le soleil.

mercredi 4 novembre 2009

Identité nationale

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Monsieur Benoit HAMON devrait pratiquer plus souvent "l'heptaglossogyration antédiscursive" (en un mot tourner plus souvent sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler), lui, le porte-parole du PS. Comme toujours quand on n'est idéologue et rien qu'idéologue, hanté d'abord par la prise de pouvoir, on passe à côté du réel. Monsieur BESSON aurait lancé le débat sur l'identité nationale, dit-il, pour piper les voix de l'extrême droite avant les élections régionales. Autrement dit, il n'y aurait pas lieu de débattre de ce qui est un faux sujet. C'est une idiotie de plus, motivée par le seul souci de galvaniser les troupes au lieu de les faire réfléchir.
Ce n'est pas l'avis de madame ROYAL qui, depuis quelques temps, ne cesse de m'étonner par ses éclairs de bon sens. Elle reconnaît la légitimité de la réflexion lancée par monsieur BESSON.
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Le marxisme n'aurait pas pu émerger si des dirigeants d'entreprise, peu scrupuleux n'avaient pas honteusement abusé de leur position de force pour exploiter leurs salariés. De même, la réaction nationaliste qui s'est exprimée avec la montée en puissance du Front National n'aurait jamais vu le jour, si la notion même de patrie, malheureusement détournée en celle de nation n'avait pas été si bêtement raillée par la gauche. Quand les larmoyants se pâment lors d'expulsion de sans-papiers, souvent violents, dépourvus de tous droits, mais désireux seulement de profiter de la bonne vache à lait qu'est la France, lorsque les grands censeurs du show-bizz, de la presse, de la "philosophie" trouvent normal les comportements communautaristes d'immigrés africains, maghrébins, voire asiatiques, lesquels comportements se déclinent souvent en fraudes dans les transports (j'en vois tous les jours dans le métro), en trafics de drogue, en vols et rapines de toutes sortes, lorsque les éléphants ne protestent pas quand la Marseillaise est sifflée par des jeunes qu'ils ont fait nos compatriotes par démagogie, il ne faut pas s'étonner de voir les petits qui souffrent de ces comportements se tourner vers un tribun qui prétend les défendre.
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Madame Fadela AMARA est bien plus intelligente. Elle met en avant ceux de nos concitoyens, venus en France de toutes les parties du monde, et qui se sont intégrés dans leur nouvelle patrie, ont fait de brillantes études, créé des entreprises modèles, sans renier leurs origines. Et, heureusement, ils sont nombreux, mais plus discrets que les braillards défendus par Harlem DESIR. J'ai encore récemment rencontré un chercheur d'origine algérienne, né français, qui est un modèle de finesse, de compétence dans son domaine (je m'y connais tout de même un peu), qui parle avec recul des événements de la guerre d'Algérie, et d'une manière équilibrée, factuelle, et juste. Je pense aussi à tous mes élèves venus d'Afrique noire, d'Afrique du Nord, du Proche-Orient, d'Europe de l'Est, qui sans faire de bruit ont travaillé d'arrache-pied, passé leur DEA puis leur thèse avec brio. Et tous n'étaient pas né avec une cuillère d'argent dans la bouche, je vous prie de me croire.
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La réflexion sur l'identité nationale doit d'abord porter sur la définition des valeurs communes à tous les français : la langue, les us et coutumes, les lois et les règlements (qu'il faut sans doute alléger dans leur nombre), les symboles, ancrés, DANS UNE HISTOIRE. La France a été accusée de colonialisme pour avoir imposé ses vues aux anciennes colonies. Il ne faudrait pas qu'elle tombe dans l'erreur inverse qui consisterait à laisser des populations étrangères lui imposer les leurs. En un mot, il ne peut y avoir identité, s'il n'y a pas reconnaissance préalable des différences, et distinction entre différences légitimes et différences inacceptables au regard de nos valeurs communes essentielles. Je suis désolé de le dire aussi crûment.
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Je ne doute pas qu'un français de fraîche date soit heureux d'être devenu français. Je doute (mais c'est un doute) qu'il puisse vibrer à l'évocation de la Patrie : la terre des pères, la terre qui héberge les tombes des ancêtres, la terre des champs de bataille où sont tombés tant de français, de BOUVINES à VERDUN, de POITIERS aux PLAGES DE NORMANDIE. Il peut se reconnaître dans la Nation, mais il faudra à sa famille quelques générations pour que, sans qu'elle perde le souvenir de ses origines, elle puisse se sentir charnellement liée au sol. Et dans un pays qui fait du droit du sol le fondement juridique du droit à la nationalité française, il serait bon de rappeler ces vérités humaines élémentaires. Viendra alors le temps pour cette famille d'examiner en toute justice et justesse l'histoire de la Patrie et de s'y reconnaître enfin.

mardi 3 novembre 2009

Curieuse manière d'informer

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Dans son édition d'hier, le journal gratuit Métro publie (édition de Paris), en page 4, en bas à droite, un petit entrefilet ainsi intitulé : "Un ex-salarié assassin ?"
Et il poursuit :
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"L'employé de la société de transport qui aurait tué vendredi à Toulouse son patron et le fils de ce dernier a été mis en examen pour assassinats. Selon le vice-procureur du parquet de Toulouse, le suspect, âgé de 47 ans, avait évoqué lors de son audition 'des idées suicidaires'. Il avait annoncé sa démission deux jours avant le drame."
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Je dois dire que cette manière de présenter les choses est pour le moins surprenante, et même scandaleuse. Pourquoi ? Il suffit de procéder à une analyse de la typographie et des temps verbaux utilisés pour se convaincre que le Journal tend à présenter les faits comme hypothétiques, et cherche à trouver des excuses à l'assassin.
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L'homme a tué, le fait est avéré. Pourquoi mettre un point d'interrogation au titre ? Pourquoi utiliser un conditionnel qui jette le doute sur la matérialité des faits ("aurait tué"). Rapporter les faits n'est pas condamner. La justice est là pour instruire l'affaire et établir le degré de responsabilité et d'implication personnelle et libre dans l'acte homicide. Il me parait impossible que le journal ait ignoré ce point. Il faut donc qu'il ait une intention. Soit une intention de prudence : tout accusé est présumé innocent avant son jugement, et le journal ne tient pas à être mis en examen par la défense de l'homme qui a tué, soit, et plus vraisemblablement, une utilisation juridique subtile entre un assassinat et un meurtre, le premier impliquant la préméditation, utilisation qui fait qu'il ne ment pas mais se contente de jouer sur les mots. "L'homme a tué, mais je me garderai bien de dire qu'il l'a fait avec préméditation" semble dire le journal. Un lecteur pressé ou peu au fait de la qualification des crimes ne peut faire autrement que de se demander si l'homme a vraiment tué ou non, d'autant que le conditionnel est bien utilisé : "aurait tué" ; à la rigueur et pour donner de l'épaisseur à l'utilisation subtile du mot "assassin" dans le titre, le Journal aurait pu dire "qui aurait assassiné" etc.
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En quoi les idées suicidaires peuvent-elles atténuer l'horreur des faits ? Et fallait-il pour s'en purger ôter la vie à deux personnes ? On aurait pu comprendre que par désespoir ou vengeance l'homme s'en prenne à son patron et à son fils. Mais il n'a pas été licencié, il a démissionné. Certes, je ne sais s'il l'a fait sous une intolérable pression intérieure, puisque, dit Olibrius dans un commentaire, lui-même avait une entreprise de transport, rachetée semble-t-il par son patron (ou, dans ce cas son nouveau patron). L'idée de n'être plus son propre chef a pu lui être intolérable. La justice le dira. Mais on m'accordera qu'il n'était pas obligé de vendre son entreprise, et qu'il a dû trouver son intérêt dans cette transaction.
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De tout cela, pas le moindre mot dans la presse. C'est un patron qui a été tué, et son fils. Ce n'est si grave que ça... On va gloser pendant des pages et des pages sur la mort, certes épouvantable, de deux jeunes qui se jetés contre une voiture de police, et qui ont tout de même une part de responsabilité dans cette tragédie. Mais on passe par pertes et profits un événement (la violence en train de se développer entre les patrons et les salariés) que l'on présente comme un fait divers, pour mieux présenter des faits divers comme des événements. Signe des temps, vous dis-je, et curieuse manière d'informer.

dimanche 1 novembre 2009

Aux absents

Saint Augustin avait un fils qui répondait au prénom d'ADEODAT ("Donné par Dieu"). Baptisé en même temps que son père, l'adolescent mourut quelques temps après avoir reçu ce sacrement. Dans ses Confessions, Augustin parle de son fils avec une indicible émotion. Le saint évêque d'Hippone met dans la bouche du jeune défunt cette prière ; je n'ai aucun titre à la dédier à ceux de mes lecteurs qui pleurent un enfant ou un proche, aucun autre titre que celui de l'audace d'un pauvre disciple. Je le fais donc et la dis avec eux et pour eux.

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Ne pleure pas, si tu m'aimes !

Si tu savais le don de Dieu et ce que c'est que le ciel !

Si tu pouvais d'ici entendre le chant des Bienheureux, et me voir au milieu d'eux !

Si tu pouvais voir se dérouler sous tes yeux les immenses horizons et les nouveaux sentiers où je marche !

Si, un instant, tu pouvais contempler comme moi la Beauté devant laquelle toutes les beautés pâlissent !

Quoi... ? tu m'as vu... tu m'as aimé dans le pays des ombres et tu ne pourrais ni me revoir ni m'aimer dans le pays des immuables réalités ?

Crois-moi, quand la mort viendra briser tes liens comme elle a brisé ceux qui m'enchaînaient, et quand, un jour que Dieu seul connaît et qu'il a fixé, ton âme viendra dans ce ciel ou l'a précédée la mienne...

ce jour-là, tu me reverras et tu retrouveras mon affection purifiée.

A Dieu ne plaise qu'entrant dans une vie plus heureuse, je sois infidèle aux souvenirs et aux vraies joies de mon autre vie et sois devenu moins aimant !

Tu me reverras donc, transfiguré dans l'extase et le bonheur, non plus attendant la mort, mais avançant, d'instant en instant, avec toi, dans les sentiers nouveaux de la lumière et de la Vie !
Alors... essuie tes larmes, et ne pleure plus si tu m'aimes... !


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En ce jour ou la tradition des Eglises d'Occident prient pour les baptisés endormis dans la Paix, je souhaite à tous mes lecteurs de rester dans la certitude de ce bonheur promis aux fidèles et humbles serviteurs, et je me joins à eux pour évoquer avec eux le souvenir des absents.

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Signes des temps

Trois événements récents ont été traités très différemment par la presse : l'expulsion de trois afghans en situation irrégulière, le renvoi du Président CHIRAC devant le Tribunal correctionnel, l'assassinat à TOULOUSE, d'un chef d'entreprise et de son fils par un employé sur le point de quitter l'entreprise (je n'ai pas pu savoir s'il avait démissionné ou s'il avait été licencié).
Indignation pour l'expulsion, compréhension amusée pour les petites incartades supposées du Président, indifférence totale ou presque pour cet assassinat. Et cette différence de traitement me semble bien être un signe des temps, marqué par le politiquement correct, la tripe facile, le coeur sec, et la conscience élastique.
Les expulsions ? Indignation de la CIMADE, indignation de la gauche, indignation de toutes ces belles consciences qui, après tout, auraient pu se porter garant de ces Afghans, leur trouver du travail et les héberger. Indignation verbale, "paroles verbales", absence de propositions concrètes pour régler ce problème de l'immigration clandestine, absence de réflexion profonde sur ce qu'est un vrai partage qui ne consiste pas à offrir à des étrangers misérables une situation qui est jugée déjà difficile à vivre par des gens pourvus d'un salaire, de la sécurité sociale. Ils se plaignent de leur situation, mais ils veulent pour ces étrangers la même chose que pour eux. Nous avons perdu en Afghanistan des jeunes hommes dans la fleur de l'âge pour permettre aux Afghans de vivre en paix dans leur pays, et c'est ainsi que l'on salue leurs efforts ? C'est tout simplement incohérent.
Le Président au Tribunal ? Après tout ce n'est pas si grave que ça, dit la presse amusée, et une bonne part de l'establishment politique. Bien entendu, je ne sais pas si les accusations sont fondée ou non. Mais je me doute qu'elles ont un semblant de justification. A dire vrai, l'indulgence générale est imputable au fait que ces pratiques limites ont été et sont toujours en vigueur, et qu'il est plutôt urgent de ne pas généraliser ce genre d'enquête. On risquerait de voir que pour conquérir le pouvoir, tous les moyens, y compris les moins justifiables sont bons.
L'assassinat ? Avez-vous entendu un homme politique essayer de comprendre, par exemple qu'a force de monter les ouvriers, les salariés, les employés contre les salauds de patron, on finit par leur faire croire qu'il n'est pas illégitime de les supprimer. Monsieur BESANCENOT a-t-il condamné ? Et monsieur le maire de TOULOUSE ? Et les responsables syndicaux ? Non ! J'ai vu à la télévision sortir le fourgon qui emportaient deux corps recouverts d'un drap, mais je n'ai guère entendu s'exprimer la compassion de qui que ce soit.
Voilà les signes des temps, du déboussolement général, de l'absence de pensée. Olibrius contestera-t-il cette analyse ?

Un petit coucou de Saint Basile

Voici le premier billet de ce jour. Il y en aura un autre tout à l'heure.

J'ai eu l'occasion de tomber - est-ce un hasard après le billet d'hier ? - sur le commentaire que Saint Basile, un Père de l'Église, originaire d'Orient, fait de l'épisode du repas que prit Jésus chez un chef des pharisiens. Jésus observait que les invités se précipitaient aux premières place, (ce qui, incidemment, signifie que lui n'y était pas), et mettait en garde les convives : "Ne vous mettez pas à ces premières place de peur que celui qui invite vous demande de la céder à un plus digne que vous", disait-il en substance.
Saint Basile donc, nous fait un petit coucou, et commente ainsi l'épisode :
"Nous devons laisser au Maître du Festin [...] le soin de placer ses convives. C'est ainsi que nous nous supporterons mutuellement en toute patience et en toute charité, nous traitant les uns les autres avec déférence et fuyant toute vaine gloire et toute ostentation. Nous ne chercherons pas à pratiquer une humilité affectée. Car l'amour de la contestation et de la dispute est un plus grand signe d'orgueil que de s'asseoir à la première place quand on ne la prend que par obéissance."
Il me semble qu'il y a dans ce commentaire l'expression d'une grande sagesse à la fois humaine et spirituelle. Les deux aspects de cette sagesse sont du reste si intimement mêlés, qu'ils peuvent fort bien inspirer la conduite des disciples dans la vie de tous les jours, sociale et spirituelle.
Sur le plan humain, il nous invite à reconnaître que les dons faits à l'homme par le Créateur, - nommons-les "dons de la nature" - sont divers, et qualifient chacun d'entre nous pour des fonctions diverses dans la communauté humaine. Ces différences ne sont pas des inégalités ; elles constituent le bien propre, unique, inaliénable de tout être humain et font sa dignité. Mais ces différences n'instituent pas de hiérarchie naturelle entre les hommes. C'est nous qui l'instituons et en cela nous rendons responsables des disputes et de la contestation, voire de la violence qui se font jour dans la cité, quand elle est infondée. Il ne s'agit pas non plus d'affecter une humilité dépourvue de raisons objectives. Si telle qualité nous qualifie pour l'exercice de telle fonction, il ne faut pas refuser de la remplir, dans la mesure où nous ne l'avons pas cherché. Il n'y a pas de hiérarchie de dignité entre les hommes ; il peut y avoir une hiérarchie sociale légitime ; en bref, les sociétés ont besoin d'être dirigées. Mais celui qui dirige doit y être appelé, et il n'est pas dispensé de la déférence due à ses semblables. Ce n'est pas là un message de résignation à l'injustice, mais un constat qu'il est facile de faire à chacun d'entre nous.
Sur le plan spirituel, on voit alors comment le chef n'est plus celui qui est servi, mais celui qui sert. Jésus a maintes fois donné l'exemple du service que tout pasteur des peuples doit remplir.
On comprend dès lors pourquoi le Maître dit à Pilate : "Tu n'aurais sur moi aucun pouvoir s'il ne t'avait été donné d'en haut", et pourquoi Paul de Tarse nous invite à obéir aux autorités politiques, sans cesser de rendre au Créateur la louange de gloire qui lui est due.
Le petit coucou de Saint Basile est décidément un petit coucou bien riche.
A tout à l'heure.
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