Voici comment on désinforme. Hier soir est de nouveau présenté à la télévision le témoin dont j'ai parlé hier. Cette fois-ci on donne sont nom, monsieur Robert WAHICKO. Il redit qu'il a vu des policiers faire des massages cardiaques aux adolescents victimes du terrible accident qui leur a coûté la vie.
Sur le site Web de France Info, figure en page de titre cette mention : "Le témoin qui réfute la thèse officielle". Et, dans l'article attaché, le témoignage de... monsieur Robert WAHICKO qui affirme que les policiers ne sont pas restés auprès des corps des adolescents et ont "même déplacé la moto". Voilà un article qui appelle deux sortes de remarques. Les une de forme, les autres de fond.
Sur la forme, il est tout de même curieux que des journalistes présentent le récit des policiers comme une "thèse", eux qui la veille présentaient comme des faits avérés leur propre récit. Il est également assez curieux de les voir accoler l'adjectif "officielle" au mot thèse. Ils laissent entendre qu'il y a des "versions" plus crédibles et que les autorités essayent de maquiller la vérité, et notamment celle du témoin que la station de radio invoque, monsieur WAHICKO. C'est ce que l'on appelle un discours connoté. Il est rempli de l'esprit du temps, de cet esprit qui empoisonne nos relations, et qui consiste à mettre systématiquement en doute la bonne foi des "autres", à rechercher dans leurs propos, par des interprétations qui fleurent une psychanalyse de pacotille, des intentions cachées. C'est le sensationnel à tout prix.
Sur le fond, je m'interroge aussi. S'agit-il du même Robert WAHICKO dans les deux cas ? S'il en est ainsi, quel est le VRAI témoignage ? Comment concilier deux versions aussi contradictoires ? Est-ce possible ? Il me semble que l'on peut donner à ces questions une réponse vraisemblable. France Info ne donne pas l'heure à laquelle monsieur WAHICKO dit avoir vu les policiers quitter les lieux. Or c'est capital. Contrairement à ce que j'avais cru, l'accident a eu lieu vers 16 h 50. Les pompiers, le SAMU, et tous les services appelés par les policiers impliqués dans l'accident - services qui notent minute par minute les appels - montrent qu'ils sont restés au moins jusqu'à 17 h 15 jusqu'à l'arrivée des pompiers. Pendant ce temps, la foule des jeunes a sans doute pu se masser, devenir menaçante ; la seule solution, les secours étant sur les lieux, était de partir pour éviter le lynchage (celui du commissaire de Villier-le-Bel a eu lieu ; or cet homme n'était pour rien dans l'accident). Enfin dernière certitude, les deux victimes ne portaient pas de casque, et ils venaient de gauche, ce qui laisse supposer qu'ils n'ont pas respecté la priorité.
Voilà un récit qui me paraît plausible, sans doute proche de la réalité et qui ne met pas en doute le double témoignage de monsieur WAHICKO non plus que sa bonne foi, mais qui soulève une question sérieuse : les journalistes de France Info sont-ils crédibles ?