Monsieur,
Ce
n’est pas de la promotion Léon BLUM que vous auriez dû sortir de l’ENA, mais de
la sinistre (du latin sinister :
situé à gauche) promotion VOLTAIRE. Comme vous aujourd’hui, en effet, l’ancêtre
calamiteux dont se réclament quelques grossiums méprisants et arrogants, osait
dire « le gros du genre humain a été et sera très longtemps insensé
et imbécile » (Essai sur les mœurs) ou encore « Le peuple non pensant
[…] n’est que machine aveugle ». Ou encore dans l’article Cul de l’Encyclopédie : « Il n’y
a de bas que les idées populaires et les idées du peuple grossier ». Ou
encore : « Ce n’est pas le manœuvre qu’il faut instruire, c’est le bon
bourgeois, c’est l’habitant des villes ».
Jean-Jacques
ROUSSEAU écrivait à DIDEROT, cette ordure ambulante : « Vous êtes
plaisants, vous autres philosophes, quand vous regardez les habitants des
villes, comme les seuls hommes auxquels vos devoirs vous lient ». Il avait
bien vu le mépris que les philosophes des prétendues Lumières
affichait pour les paysans, les artisans, les gens de « petite naissance »
et sur ce point il avait bien raison, le promeneur solitaire.
Je
pourrai multiplier par cent les exemples de la morgue que les philosophes dits
des Lumières affichaient, comme vous le faites – oh, de manière très subtile –
pour les gens moins diplômés qu’eux, moins riches qu’eux, moins polis (dans
tous les sens du terme) qu’eux. VOLTAIRE, du reste, disait tout « le
plaisir noble de se sentir d’une autre nature que les sots ». Il me semble
bien que vous parlez tout enduit de cette délectation d’être un tout autre !
Vous
avez osé dire que "Ce vote pour le Brexit, c'est la victoire de
'Downton Abbey' sur les bobos, les créateurs d'entreprises et surtout les
jeunes. Mais
les aristocrates et la classe ouvrière n'avaient pas vu la conséquence du
Brexit, c'est-à-dire l'éclatement possible du Royaume-Uni."
Et de manière plus éclairante et
très mensongère : "Ce
référendum n'est pas la victoire des peuples sur les élites, mais des gens peu
formés sur les gens éduqués". Le glissement sémantique de peuples à gens peu formés est bien symptomatique de votre manière de faire. Ainsi, selon vous, seuls les gens éduqués
auraient une vue juste, la vôtre, et feraient de bons choix politiques ?
Autant aller jusqu’au bout et transformer en droit cet état de fait :
Notre patrie est aux mains d’une oligarchie incapable, cruelle, méprisante.
Disons-le dans la Constitution. N’auront voix désormais au chapitre que les
énarques, les centraliens, les polytechniciens, les normaliens ; on
conférera un strapontin à quelques chercheurs et universitaires. Les autres n’auront
qu’un droit, celui d’être guidés par vos mains de fer, qui me semblent assez
bien pourvues de griffes. Vous auriez dû, dans votre position, trouver des
moyens de loger les sans-abris, de donner du travail aux chômeurs, du lustre à
notre patrie. Par vos choix, et ceux de votre caste, vous illustrez à la
perfection cette autre phrase immortelle de VOLTAIRE : « Tous les
paysans ne seront pas riches ; et il ne faut pas qu’ils le soient. On a
besoin d’hommes qui n’aient que leur bras et de la bonne volonté ». Le peuple
britannique saura vous donner, monsieur, par sa constance, son courage et son patriotisme,
le démenti le plus cinglant, et bientôt aussi, le Peuple français qui vous
signifiera votre congé.
Vous
avez commis une mauvaise action, bien dans la ligne de la caste à laquelle vous
vous vantez d’appartenir. C’est pourquoi, monsieur, j’ai bien l’honneur de
ne vous point saluer.
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