Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir disait déjà notre bon La Fontaine. Rien n'a changé depuis l'époque où le fabuliste, fin observateur de la vie sociale, mettait en vers son indignation cachée.
Le Président d'un directoire, un haut responsable par conséquent, peut si mal surveiller son entreprise qu'il lui ait fait faire 751 millions d'euros de perte, démissionner (c'est le moins qu'il ait pu faire) de son poste, et retrouver quelques temps après un poste analogue dans une filiale de l'affaire qu'il avait si mal gérée. Ainsi, monsieur Charles MILHAUD, est-il devenu Président du directoire d'Oceor, une filiale de la Caisse d'épargne pour l'outre mer et l'international. Je trouve cela scandaleux et indigne. Scandaleux de la part des responsables de cette Banque. Ils se protègent les uns les autres, et prouvent par cette nomination qu'ils entendent continuer à profiter, quelles que soient les circonstances, de leur fauteuil doré. Indigne de la part de monsieur MILHAUD qui n'aurait jamais dû accepter d'occuper ce poste. On imagine l'autorité qu'il pourra avoir dans ces conditions.
Il se peut que monsieur MILHAUD n'ait aucune responsabilité factuelle directe ou indirecte dans l'histoire des traders véreux de sa banque. Mais enfin il était responsable, et en ces périodes de crise, où toute spéculation était hautement risquée, il aurait dû redoubler de vigilance, renforcer les systèmes de contrôle, demander des rapports quotidiens sur l'évolution de la situation de son entreprise. J'ai lu quelque part que si la position risquée avait été dénouée le premier jour qui a suivi la découverte du trou, celui n'eût été "que" de 180 millions d'euros. Le déficit s'est creusé de jour en jour, faute d'avoir été pris en compte à temps.
Aucune conscience droite ne peut accepter une telle irresponsabilité, et son incompréhensible récompense. Combien de mises à pied, d'avertissements, de révocations pour des transgressions autrement plus bénignes, dans des usines ou des centres commerciaux ? Quand donc les élites comprendront-elles que leurs privilèges et leurs revenus ne se justifient que par l'assomption inconditionnelle de leur responsabilité ? Il ne faut pas s'étonner de voir grandir l'irritation, la révolte des "petits", devant de telles différences de traitement.
Il est loin le temps ou dans les geôles de la Convention, tel marquis, ou tel comte pouvait dire au moment de l'appel des condamnés à mort : "Souffrez, marquise, que pour une fois, je passe avant vous", et prendre une place qu'on ne lui réclamait pas. Ainsi en a-t-il été lors de l'appel de la dernière charrette de la Terreur. Cela s'appelle l'esprit aristocratique, et, voyez-vous, je le préfère à l'esprit petit-bourgeois qui se répand comme une peste dans la société contemporaine. Bon appétit tout de même, monsieur MILHAUD !
1 commentaire:
Vous avez bien raison concernant M. MILHAUD, mais si par extraordinaire il lui arrivait de prendre connaissance de votre billet, je doute qu'il éprouverait une culpabilité quelconque ... C'est une question d'éducation sans doute. Celui à qui l'on a appris ce qu'il n'est pas bien de faire dans les petites choses, désobeira peut-être dans ces mêmes petites choses, mais pas dans les grandes. Le grand arbre de la lâcheté et de l'irresponsabilité doit être tué à l'état d'arbuste ; après, il est trop tard ..
Je profite de ce commentaire pour faire un petit aveu concernant un de vos billets plus anciens. Avec quelques deux mois de retard, je viens subitement
de comprendre ce que voulait dire votre phrase "Vous devez surement faire partie de l'Alma Mater"; sur le coup, j'avais cru que vous parliez de quelque organisation catholique, alors qu'en fait
ce n'était qu'une désignation "littéraire" de l'Université, n'est-ce-pas ... Mieux vaut tard que jamais!
Bien cordialement,
E. D.
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