mardi 27 janvier 2015

27 janvier 2015. Nouvelles de la Résistance : Suicide français, pas nouveau !

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Pour une fois, je me demande si l'ignorance n'est quand même pas une des causes de notre mensonge.

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1. Les citations du jour.
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"Nous ne pouvons considérer la France, quant à ses forces politiques, que comme étrangère au système de l’Europe. Peut-être même est-il impossible de prévoir l’époque où elle pourra se replacer au rang qu’elle occupa, au rang de première puissance ; mais à présent, elle a perdu son existence politique, et très certainement il faudra un long espace de temps pour lui rendre son ancienne prépondérance :

Gallos quoque in belle floruisse audivimus.

Tel sera vraisemblablement le langage de la génération prochaine. […].

Si la France reste plongée dans son anéantissement, et que nous continuions d’accroître nos dépenses, très certainement cette conduite nous mettre hors de lutter contre elle, si elle parvient jamais à reprendre son ancienne puissance.
On dit qu’elle peut se relever aussi promptement qu’elle s’est rapidement écroûlée [sic]. On s’abuse. Quand un corps tombe d’une grande hauteur, il se précipité avec une vîtesse [sic] accélérée. Le replacer à son ancienne élévation, offre des difficultés insurmontables, et la politique est soumise aux lois de la gravitation aussi impérieusement que la physique.

[…].

[…]. Les Français se sont montrés les plus habiles architectes qu’eût encore produit le monde pour s’entourer de ruines, de décombres. Dans un si petit espace de temps, ils ont détruit, jusque dans leurs fondemens [sic], leur monarchie, leur église, leur noblesse, leurs loix [sic], leurs revenus, leurs armées, leur marine, leur commerce, leurs arts, leurs manufactures. […]."

In
Sur la Révolution arrivée en France. Ouvrage traduit de l'anglais de très honorable M. Edmund BURKE, par le B. de B***
A Londres et à Paris, quai des Augustins, N°25, 1796.

J'ai utilisé pour cette citation la version numérisée par BnF Gallica. Curieusement, ne figure sur BnF Gallica aucune des éditions en français, publiées à LONDRES en 1790, dont vous pourrez trouver les références ci-dessous et les liens qui vous permettraient d'acheter l'un de ces livres via Abebooks .Comme le titre de l'ouvrage de BURKE traduit par le B. de B*** ne reprend pas exactement le titre anglais, je ne suis même pas assuré qu'il s'agisse de la version de l'ouvrage original de BURKE quoique cela soit très vraisemblable.
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Printed for J DODSLEY. London, 1790.
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Réflexions sur la Révolution de France.

BURKE Edmund
Edité par chez Laurent |& fils, et chez Edwards, London. (1791)
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Réflexions sur la Révolution de France et sur Les Procédés de certaines Sociétés à Londres. Relatifs à cet événement

Burke, Edmund
Edité par Laurent/Edward, Paris/London (1790)




Et, comme je le disais dans ma réponse à Pascal HUTTEN dans un de mes récents billets, je signalais que BURKE avait loué le zèle des évêques français. On trouve la traduction des passages qui le soulignent dans la quatrième édition des Réflexions sur la Révolution de France, publiée à PARIS et à LONDRES en 1790, aux pages 309 à 313 (citées par Jean DUMONT dans son magistral ouvrage : La Révolution française ou les prodiges du sacrilège. Criterion, Paris, 1984). Je les reprends intégralement.

"[...]. J'ai vu en eux [BURKE parle des évêques français], en outre du caractère clérical, noblesse et franchise ; ils avaient les sentiments du gentilhomme et de l'homme d'honneur ; rien de servile, rien d'insolent dans leurs manières et dans leur conduite. je les ai réellement considérés comme composant une classe tout à fait supérieure. [...]. Un certain nombre parmi eux était remarquable par un savoir éminent et une charité sans borne. [...]. Quelques individus parmi eux, s'ils étaient moins réguliers dans leurs moeurs, rachetaient par des qualités nobles, ce qui manquait à la sévérité de leur vertu. Ils avaient ces grands talents qui rendent les hommes utiles à l'Eglise et à l'Etat."
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2. Commentaires.
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Il est très intéressant d'entendre le témoignage d'un contemporain des événements qui ont bouleversé notre patrie. Bien entendu, les beaux esprits du siècle considèrent que BURKE est un champion de la contre-révolution. Avec ce mot abstrait, les hommes qui nous gouvernent pensent avoir chassé du champ de l'histoire la part de vérité que contient l'ouvrage de BURKE.
On voit que le parlementaire britannique s'étonne de la soudaineté du naufrage de la France. Mais on voit aussi que dans le titre de son ouvrage original, il parle des "proceedings of certain societies in London" entendus comme procédés de certaines sociétés.
Il est donc tout à fait intéressant de lire - et j'y reviendrai - l'analyse que le très grand et trop tôt disparu - englouti dans le feu et le vacarme de la guerre de 14 - Augustin COCHIN a écrit dans son ouvrage magistral Les sociétés de pensée et la démocratie moderne. Études d’histoire révolutionnaireLibrairie Plon, les Petits-fils de Plon et Nourrit, Paris, 1921.
Je maintiens donc, contre Pascal HUTTEN, que la Révolution a été voulue par les membres des Sociétés de pensées, entendons par là essentiellement les Loges maçonniques, dont les Philosophes, VOLTAIRE en tête, étaient des affiliés. Elle a été voulue non pas dans sa sanglante version, certes, mais elle a été voulue comme subversion d'un ordre qui ne convenait pas à l'idée que les dites Loges se faisaient de la Liberté. C'est bien pourquoi monsieur CAZENEUVE réunit autour de lui, ces temps-ci huit hauts dignitaires des diverses obédiences maçonniques pour concocter un programme d'enseignement de la laïcité, entendez encore par là un programme de démolition de toute religion en général, et de la religion chrétienne en particulier. Ce faisant, il essaye de parachever le travail de la Révolution qui, par son avènement, a détruit de nombreuses formes vivantes et concrètes de lien social dont les célébrations religieuses étaient un élément essentiel, et véritablement religieux au sens noble.
Eric ZEMMOUR a raison. On va le mettre au placard comme tant d'autres historiens et penseurs qui avec une rare obstination s'efforcent de mettre de la vérité dans les faits et de remplacer nos mythes fondateurs républicains par une histoire factuelle de leurs origines. En vérité, il y a longtemps que nous avons commencé à nous suicider. Et la décomposition actuelle de notre patrie n'est que le résultat de cet empoisonnement qui achève aujourd'hui de produire son effet.
3. Infos diverses.
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Marche pour la Vie : une photo.


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Même le journal Libération ! (via le Salon beige).
Lu dans ce journal :

"Confidentielle à ses débuts, limité aux milieux cathos les plus tradis, la Marche pour la vie prend, d’année en année, de l’ampleur. Cette année, les organisateurs revendiquent 45 000 manifestants. Ils sont, de fait, sûrement plusieurs dizaines de milliers. (...)
La Marche pour la vie profite de l’élan donné par la Manif pour tous et surfe sur la capacité renouvelée du catholicisme français à se mobiliser. Peu à peu, elle élargit sa base, surtout générationnelle. Parmi les «marcheurs», il y a ce dimanche un bon tiers de jeunes d’une vingtaine d’années, signe d’une nouvelle militance. «Depuis la Manif pour tous, la parole s’est libérée. Maintenant nous osons défendre publiquement nos convictions», acquiesce Sixtine, 18 ans. Elle n’a pas loupé une manifestation contre le mariage pour tous comme les trois copines qui l’accompagnent. «Nous sommes là à cause de nos convictions catholiques, reconnaît Marie qui est, elle, venue spécialement de Lyon. Mais c’est un combat culturel que nous menons.» Gonflés à bloc, ces jeunes croient dur comme fer que demain, leur voix portera…"
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Témoignage intéressant (merci à mon très cher ami Dominique).

2 commentaires:

Pascal Hutten a dit…

"Je maintiens donc, contre Pascal HUTTEN, que la Révolution a été voulue par les membres des Sociétés de pensées, entendons par là essentiellement les Loges maçonniques, dont les Philosophes, VOLTAIRE en tête, étaient des affiliés. Elle a été voulue non pas dans sa sanglante version, certes, mais elle a été voulue comme subversion d'un ordre qui ne convenait pas à l'idée que les dites Loges se faisaient de la Liberté."

Je nie formellement avoir écrit ce que vous m'imputez. J'ai en revanche dit et je maintiens que les philosophes des Lumières comme Voltaire n'ont jamais appelé de leurs vœux une Révolution, et moins encore une Révolution sanglante. Vous pouvez me contredire en cherchant dans toutes les œuvres de Voltaire un appel à la Révolution... Je suis friand de lire des textes qui m'auraient échappé! Il y a même des tas de gens depuis le XIXe siècle qui ont reproché à Voltaire son "conservatisme" (en fait il n'était ni vraiment conservateur, ni non conservateur; c'est davantage quelqu'un qui posait des questions que quelqu'un qui imposait des réponses; mais si vous voulez faire l'amalgame entre Voltaire et Danton car cela cadrerait bien avec le "système" que vous prônez, après tout, libre à vous; je ne saurais vous contredire davantage que qui voudrait demeurer persuadé, pour la cohérence de ses convictions anticléricales, qu'un pape comme Alexandre VI fut le plus représentatif de tous les papes). Durant l'été 89, les soulèvements furent populaires en France. S'il y eut des gens pour récupérer le mouvement, on ne peut pas en imputer la faute à tous ceux qui étaient morts depuis déjà plusieurs années. Mais à dire vrai, je vous avoue n'avoir ni le temps, ni d'ailleurs l'envie de me mettre à polémiquer sur la Révolution française. Je ne suis intervenu sur votre blog que parce que je suis souvent étonné de lire sur internet ces temps-ci à peu près tout et n'importe quoi à propos de Voltaire, à coups de citations proposées hors-contexte,pour "justifier" des jugements catégoriques sur un auteur qui faisait pourtant plus que la plupart des autres dans la nuance... Mais après tout, il est mort, et n'est plus là pour se défendre. Il va donc de soi qu'il vaut mieux le rendre responsable de tous les maux de notre société que d'agir pour réformer celle-ci. Excusez-moi si je termine sur un propos ironique. Je crois que me voir prêtées des opinions que je n'ai jamais formulées m'a quelque peu agacé. Bonne continuation.

Philippe POINDRON a dit…

Cher Pascal, entendons-nous bien sur le mot Révolution. Les penseurs que j'ai cités dans le billet sur la prophétie de CAZOTTE, voulaient détruire un ordre social, moral et politique qu'il jugeait oppressif. Fort justement vous dites dans un commentaire que les Révolutionnaires ont puisé dans les idées des philosophes des Lumières les idées qui leur convenaient et qui souvent étaient assez contradictoires. Oui, VOLTAIRE était un conservateur social ; mais il était un subversif de l'ordre - je n'ose pas dire moral, car on va me démolir - qui séparait le domaine humain du domaine transcendant divin ; Marcel GAUCHET a très bien analysé ce désenchantement du monde et la prodigieuse originalité du christianisme qui a rendu possible la maîtrise de la création, puis aujourd'hui - Dieu étant chassé de l'espace public - sa destruction méthodique. En somme la question philosophique de fond est la suivante : est-ce le relativisme qui doit diriger les affaires du monde, ce qui revient à abandonner cette direction aux seuls puissants du jour, ou bien la philosophie spéculative a-t-elle encore une place dans le débat philosophique ?
Aussi bizarre que cela puisse paraître, je suis scientifique, pur et dur, mais je me suis toujours intéressé au statut de la "vérité" qu'il est toujours possible d'opposer à l'erreur ou au mensonge. J'ai bien conscience que la "vérité" n'est possédée par personne en ce bas monde. Pour moi la Vérité est une personne : "Je suis le chemin, la vérité et la vie".
Pour terminer, compte tenu de la qualité érudite de vos interventions, je vous invite à commenter très souvent et à corriger s'il le faut (ou à tempérer, ou à nuancer) mes propos que je suis obligé de raccourcir et donc de schématiser. Mais je vous suis très reconnaissant de votre hauteur de vue.