mardi 19 mai 2020

Mardi 19 mai 2020. Première réponse à un article du HuffPost sur l'inutilité prétendue de l'hydroxychloroquine

Le HuffPost a cru utile, dans sa version française, de faire état de trois articles affirmant que l’usage de l’hdroxychloroquine était inutile et n’améliorait en rien l’état des patients infectés par le SARS-Cov-2, agent de la Covid-19. J’ai donc été voir ces articles. Voici déjà ma réaction à l’article des auteurs chinois, invoqué pour défendre la thèse de l’inutilité.

Wei Tang, Zhujun Cao, Mingfeng Han, Zhengyan Wang, Junwen Chen, Wenjin Sun, Yaojie Wu, Wei Xiao,  Shengyong Liu, Erzhen Chen, Wei Chen, Xiongbiao Wang, Jiuyong Yang, Jun Lin, Qingxia Zhao, Youqin Yan, Zhibin Xie, Dan Li, Yaofeng Yang, Leshan Liu, Jieming Qu, Guang Ning, Guochao Shia and Qing Xi.
Hydroxychloroquine in patients with mainly mild to moderate coronavirus disease 2019: open label, randomised controlled trial
(British Medical Journal), BMJ 2020;369:m1849 http://dx.doi.org/10.1136/bmj.m1849

OBJECTIVE To assess the efficacy and safety of hydroxychloroquine plus standard of care compared with standard of care alone in adults with coronavirus disease 2019 (covid-19). DESIGN Multicentre, open label, randomised controlled trial.
SETTING 16 government designated covid-19 treatment centres in China, 11 to 29 February 2020.
PARTICIPANTS 150 patients admitted to hospital with laboratory confirmed covid-19 were included in the intention to treat analysis (75 patients assigned to hydroxychloroquine plus standard of care, 75 to standard of care alone).
INTERVENTIONS Hydroxychloroquine administrated at a loading dose of 1200 mg daily for three days followed by a maintenance dose of 800 mg daily (total treatment duration: two or three weeks for patients with mild to moderate or severe disease, respectively).
MAIN OUTCOME MEASURE Negative conversion of severe acute respiratory syndrome coronavirus 2 by 28 days, analysed according to the intention to treat principle. Adverse events were analysed in the safety population in which hydroxychloroquine recipients were participants who received at least one dose of hydroxychloroquine and hydroxychloroquine nonrecipients were those managed with standard of care
RESULTS Of 150 patients, 148 had mild to moderate disease and two had severe disease. The mean duration from symptom onset to randomisation was 16.6 (SD 10.5; range 3-41) days. A total of 109 (73%) patients (56 standard of care; 53 standard of care plus hydroxychloroquine) had negative conversion well before 28 days, and the remaining 41 (27%) patients (19 standard of care; 22 standard of care plus hydroxychloroquine) were censored as they did not reach negative conversion of virus. The probability of negative conversion by 28 days in the standard of care plus hydroxychloroquine group was 85.4% (95% confidence interval 73.8% to 93.8%), similar to that in the standard of care group (81.3%, 71.2% to 89.6%). The difference between groups was 4.1% (95% confidence interval –10.3% to 18.5%). In the safety population, adverse events were recorded in 7/80 (9%) hydroxychloroquine non-recipients and in 21/70 (30%) hydroxychloroquine recipients. The most common adverse event in the hydroxychloroquine recipients was diarrhoea, reported in 7/70 (10%) patients. Two hydroxychloroquine recipients reported serious adverse events. CONCLUSIONS Administration of hydroxychloroquine did not result in a significantly higher probability of negative conversion than standard of care alone in patients admitted to hospital with mainly persistent mild to moderate covid-19. Adverse events were higher in hydroxychloroquine recipients than in non-recipients.

En premier lieu, il n’y a aucune raison scientifique de dénier la bonne foi des auteurs qui, du reste, notent les limites de leur travail. L’article appelle cependant quelques commentaires. Le protocole de l’équipe marseillaise utilise des doses d’hydroxychloroquine nettement inférieures à celle qu’utilise l’équipe chinoise et il inclut l’azithromycine. Le traitement dure six jours. Il dure trois semaines dans le cas de l'étude chinoise. Par ailleurs, l’équipe marseillaise, dans la fixation des issues du traitement assigne un délai de 10 jours pour vérifier la disparition du virus dans les sécrétions nasopharyngées, alors que l’équipe chinoise note qu’après réflexion, ce délai est trop court et elle fixe un délai de 28 jours pour vérifier la disparition du virus. Or, dans les résultats marseillais, la disparition du virus est assurée dans 91,7 % des cas au bout de 10 jours. Et ce délai est pénalisant pour l’évaluation de l’efficacité du traitement, car quelques patients marseillais ont vu le virus disparaître après ces dix jours, consécutifs au traitement de six jours, et sont classés dans les mauvaises issues virologiques, mais jamais ces délais n’ont été aussi longs que 28 jours. L’article de TANG et al, ne donne aucune classification détaillée chiffrée des patients en termes cliniques : asymptomatique, infections du tractus respiratoire supérieur, infection du tractus respiratoire inférieur. Si je comprends bien le Tableau 2 de cet article, les sujets ayant reçu de l’hydroxychloroquine étaient également traités par d’autres agents antiviraux, dont l’arbidol, le virazole, le lopinavir/ritonavir, l’oseltamivir, l’antecavir, des antibiotiques (nature non précisées) ou des glucocorticoïdes, le tout en des pourcentages variables selon les patients. Les sujets témoins, traités par des techniques classiques (standard of care) avaient également reçu, en des pourcentages variables selon les patients, ces mêmes traitements supplémentaires.
La conclusion critique qui s’impose, me semble-t-il, est que les traitements antiviraux ou anti-inflammatoires associés pourraient avoir perturbé l’effet antiviral de l’hydroxychloroquine. Dans l’étude marseillaise, aucun patient ne reçoit ces traitements additionnels, d’où la négativation de la présence du virus dans les prélèvements nasopharyngés au bout de 10 jours. Je m’étonne que les auteurs n’aient pas évoqué cette possibilité et je m’étonne qu’ils aient allongés à 28 jours le délai de négativation de la présence du virus dans les sécrétions nasopharyngées.
En somme, il y a trois biais : usage de la seule hydroxychloroquine comme variable indépendante (alors que c’est inexact puisqu’il y a des traitements additionnels), à des doses nettement supérieures à celles de l’équipe marseillaise et pendant des délais plus longs ; administration d’antibiotiques dont la liste n’est pas précisée aussi bien chez certains des sujets témoins que chez des sujets traités. De sorte que si, comme il est probable, les antibiotiques utilisés chez 39 % de la totalité des patients sont des macrolides, il est normal, car c’est prouvé (voir les résultats du groupe de PERRONNE), que leur état soit amélioré par ce seul traitement, enfin l’addition d’antiviraux au traitement des patients témoins ou traités à l’hydroxychloroquine ne permet pas de conclure à l’inefficacité de cette dernière, sans qu’il soit possible du reste de dire, au vu de ces résultats si ces antiviraux ont eu ou non un effet bénéfique sur l’évolution de la maladie des patients témoins ; selon moi, il semblerait plutôt que non.
J’ajoute que cet article est paru dans le British Medical Journal lequel s’est illustré par la publication d’un éditorial de commande (commissioned), non analysé par des referees, et dénigrant systématiquement l’usage de l’hydroxychloroquine.
Je vais continuer de montrer que le HuffPost, pour des raisons que l’on peut prouver, mais qu’il est possible de soupçonner sans avoir de certitude, défend des intérêts qui ne relèvent pas de la vérité scientifique.

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