samedi 1 décembre 2007

Euthanasie ou assassinat ?

TF1 s'apprête à diffuser un téléfilm sur ce qu'on appelle l'affaire HUMBERT. Il est intéressant de constater qu'à cette occasion, son kinésithérapeute, Hervé MESSAGER vient, tardivement sans aucun doute, rétablir certains faits, que les journalistes, toujours en recherche de sensationnel et de sentimental, eussent été bien inspirés de vérifier plu tôt. Et il affirme que le jeune Vincent ne voulait pas mourir.
D'abord quelques faits distillés par les médias, et qui sont avérés. La mère de Vincent HUMBERT, Marie a injecté à son fils, prétendument tétraplégique et aveugle, une forte dose de barbituriques. Cette injection a plongé le jeune homme dans le coma. C'est alors que le Dr Frédéric CHAUSSOY, anesthésiste, a pris la décision de débrancher le respirateur artificiel de Vincent, puis lui a injecté un produit létal, sans doute du chlorure de potassium, ce qui a entraîné un arrêt cardiaque. Le 26 février 2006, l'instruction de l'affaire était close par le juge d'instruction de Boulogne-sur-mer, et elle se soldait par un non-lieu pour Marie HUMBERT et pour l'anesthésiste.
Entre-temps, divers courants de pensée, avait réussi à lancer un débat très médiatisé et à faire adopter par le parlement, le 22 avril 2005, une loi nouvelle sur l'accompagnement en fin de vie, instituant un droit à laisser mourir.
Monsieur MESSAGER a soigné Vincent HUMBERT pendant presque deux au centre héliomarin de Berck-sur-Mer. On conviendra de bonne foi qu'il est mieux placé que les journalistes, les parlementaires et les juges d'instruction pour parler de l'état de son patient. Il a été déformé, cet état. "Profondément je ne crois pas que Vincent ait eu envie de mourir" ajoute le kinésithérapeute.
Dans un DVD et une lettre-témoignage envoyés à des députés, sénateurs et journalistes, il exprime son indignation : « Ce qui m'a le plus révolté dans l'avalanche médiatique, c'est la répétition en boucle d'une multitude de mensonges. Tous les médias ont repris ces inepties comme s'ils n'avaient aucun souci de vérifier la vérité. Vincent n'était pas tétraplégique. Aucun médecin n'a dit à Marie que son fils avait une lésion de la moelle épinière. Vincent n'était pas aveugle même s'il ne voyait pas bien. Vincent n'avait pas de perfusion (...). Vincent, pour ceux qui l'ont connu et véritablement aimé, n'est pas mort dans la dignité ».
« La disparition forcée de Vincent Humbert a été chez nous à Berck un cas unique dans l'histoire de notre hôpital. Mais elle a fait naître beaucoup d'angoisse ici et, j'imagine, ailleurs. (...) Pourquoi avoir tué Vincent ? S'il y a une logique à cette mort, on devrait admettre qu'il y a, dans notre hôpital, des centaines de patients de plus qu'il faudrait tuer ! Si on commence à tuer pour ça, on va finir par tuer tous ceux qui entrent à l'hôpital. Et ceux qui survivent sans progrès au bout de deux ans, qu'est-ce qu'on en fait ? Doit-on les achever ? »
« Au nom de la vérité et de l'amitié, j'ose vous dire que Vincent avait encore plein de choses à vivre. Il y a aujourd'hui, dans nos hôpitaux, beaucoup de Vincent qui sont dans des situations dix fois pire que lui. Et les familles veulent que leur proche continue à vivre. Même le patient, quand il peut s'exprimer, veut continuer l'aventure de la vie. Il y a certes, des jours, des moments de dépression. A nous, personnel soignant, de les soutenir, on est là pour cela. Mais il nous faut un climat de confiance ».
Pour les médecins qui ont accompagné Vincent Humbert, le téléfilm truque et manipule la réalité. « C'est une accumulation d'éléments tous plus misérabilistes les uns que les autres qui trempent dans l'eau de rose et ne visent qu'à une chose : faire verser des larmes à la ménagère de moins de 50 ans », dit le Dr Pascal Rigaud, chef du service de rééducation fonctionnelle où séjournait Vincent (« Le Quotidien du Médecin » du 6 septembre 2007). Le Dr François Danzé, chef du service de neurologie du centre héliomarin de Berck-sur-mer surenchérit : « C'est une opération indigne, qui vise à faire du pathos à bon marché sur une histoire qui a profondément bouleversé les membres de nos équipes ».
Pendant 35 ans, j'ai collaboré, en tant que chercheur en pharmacologie, avec des professeurs du CHU de Strasbourg, de haute qualité morale et professionnelle : je n'en ai JAMAIS rencontré qui acceptent l'idée d'une euthanasie active. Tous, certes, étaient bien d'accord qu'il n'est pas nécessaire de laisser souffrir inutilement des patients en fin de vie, et ils savaient que certains analgésiques puissants, en déprimant la respiration, peuvent accélérer l'issue fatale. Mais je n'en connais aucun qui eussent de sang froid administré du chlorure de potassium pour abréger la vie de leurs patients. Tant mieux. Je n'aurais pas confiance en de tels médecins. Et si la médecine a fait tant de progrès, c'est qu'il s'est trouvé nombre d'entre eux bien décidés à faire reculer la maladie et la souffrance et à faire autant que possible reculer la mort.

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