mardi 2 novembre 2010

Pensées des morts

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En ce jour où, nous recueillant en nous-même, nous faisons mémoire de nos morts, voici quelques extraits du poème de LAMARTINE que BRASSENS a mis en musique et qu'il a si merveilleusement chanté.
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A ceux de mes lecteurs qui ont reçu la grâce de la foi, l'Agneau de l'Apocalypse dit : "Voici que je fais toutes choses nouvelles. De pleurs, il n'y en aura plus".
A ceux qui croient en l'homme, TAGORE affirme : "A l'homme qui espère toutes choses se révèlent, pourvu qu'il ne renie pas dans les ténèbres ce qu'il a vu dans la lumière".
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Voilà les feuilles sans sève
Qui tombent sur le gazon
Voilà le vent qui s'élève
Et gémit dans le vallon.
Voilà l'errante hirondelle
Qui rase du bout de l'aile
L'eau dormante des marais.
Voilà l'enfant des chaumières
Qui glanent sur les bruyères
Le bois tombé des forêts.
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L'onde n'a plus le murmure,
Dont elle enchantait les bois ;
Sous les rameaux sans verdure,
Les oiseaux n'ont plus de voix.
Le soir est près de l'aurore,
L'astre à peine vient d'éclore
Qu'il va terminer son tour.
Il jette par intervalle
Une heure de clarté pâle
Qu'on appelle encore un jour.
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L'aube n'a plus de zéphire
Sous ses nuages dorés.
La pourpre du soir expire
Sur les flots décolorés.
La mer solitaire et vide
N'est plus qu'un désert aride
Où l'oeil cherche en vain l'esquif,
Et sur la grève plus sourde
La vague orageuse et lourde
N'a qu'un murmure plaintif.
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[...]
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C'est alors que ma paupière
Vous vit pâlir et mourir
Tendres fruits qu'à la lumière
Dieu n'a pas laissé mûrir !
Quoique jeune sur la terre
Je suis déjà solitaire
Parmi ceux de ma saison,
Et quand je dis en moi-même
Où sont ceux que ton coeur aime ?
Je regarde le gazon.
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Leur tombe est sur la colline.
Mon pied le sait : la voilà !
Mais leur essence divine,
Mais eux, Seigneur, sont-ils là ?
Je sais qu'à l'indien rivage,
Le ramier porte un message
Qu'il rapporte à nos climats ;
La voile passe et repasse,
Mais de son étroit espace
Leur âme ne revient pas.
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Ah ! quand les vents de l'automne
Sifflent dans les rameaux morts,
Quand le brin d'herbe frissonne,
Quand le pin rend ses accords,
Quand la cloche des ténèbres
Balance ses glas funèbres,
La nuit, à travers les bois,
A chaque vent qui s'élève,
A chaque flot sur la grève,
Je dis : N'es-tu pas leur voix ?
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[...]
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Ah ! vous pleurer est le bonheur suprême
Mânes chéris de quiconque a des pleurs.
Vous oublier c'est s'oublier soi-même :
N'êtes vous pas un débris de nos coeurs ?
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Les extraits de ce poème se suffisent à eux-mêmes sans qu'il soit nécessaire de les commenter.

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