mardi 16 novembre 2010

Progrès moral et progrès spirituel, même combat (1)

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Dans le commentaire d'un récent billet, un lecteur oppose le progrès moral au progrès spirituel. Elle fait du premier l'apanage du héros, et du second celui du saint. Je ne partage pas ce point de vue. Il me semble que le progrès moral sert de marchepied au progrès spirituel. Dans les deux cas, en effet, c'est la conscience qui en est le moteur. Et plus exactement la conscience morale, c'est-à-dire cette capacité que nous avons tous de juger de la valeur de nos actes.
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Il y a du reste deux manières d'envisager ce jugement. La première est très superficielle, et consiste à voir si ce que l'on fait ou pense est conforme à un système d'idées toutes faites et préconçues. C'est une conscience morale idéologique. La seconde consiste à rentrer en soi-même, à rendre la pensée observatrice d'elle-même ; elle est plus profonde. Un moyen très simple de juger avec une conscience droite consiste à se demander ceci ; que dirais-je, comment réagirais-je si tel ou tel que je connais ou ne connais pas, disait ou faisait ce que je m'apprête à dire ou à faire ? Il convient de rappeler que la morale n'est pas un ensemble de lois, de normes, de contraintes mais un art de vivre qui permet de répondre à la question : que dois-je faire pour avoir une vie bonne ?
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Vue ainsi, la morale prend une tout autre dimension. Il s'agit de porter un jugement sur soi, non sur les autres, et de distinguer le for interne du for externe. Le for interne relève de l'activité de jugement sur soi-même ; la responsabilité d'une être humain informé, éduqué, est évidemment plus fortement impliquée dans ses choix que celle d'une personne qui ne l'est pas. Du reste la loi tient compte de cet état de fait, puisqu'elle reconnaît qu'il y a des criminels irresponsables, car aliénés. Le for externe est un jugement de valeur que l'on peut porter sur des actes, et non sur des personnes. C'est la raison pour laquelle je pense qu'il ne faut pas légiférer sur l'euthanasie, en soustrayant au for interne le choix déchirant devant lequel des proches sont placées devant la souffrance intolérable d'un être cher qui souffre. Il faut maintenir qu'au for externe l'euthanasie est un crime, mais qu'au for interne, il est bien difficile de porter un jugement moral sur celui qui a activement aidé à mettre fin aux jours d'un malade.
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Je ne sais pas si cet éclairage permet de comprendre les commentaires que j'ai faits en réponse à plusieurs lecteurs. Je le souhaite, mais je maintiens mon opposition formelle à toute loi sur le sujet. qui peut se permettre de rentrer dans les pensées d'un mourant ou d'un parent de mourant ?
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Demain je m'efforcerai d'expliquer comment une conscience morale peut servir de réceptacle à la conscience spirituelle. Mais j'aime à citer cette affirmation de saint Jean Chrysostome : "Même si je dois être excommunié, je dois suivre la voie de ma conscience". Jean parle bien entendu d'une conscience éclairée.

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