Le Pr Abdennour BIDAR enseigne la philosophie à SOPHIA-ANTIPOLIS. Il a fait paraître dans la livraison du journal Le Monde datée du 21 décembre 2010, un article fort intéressant et qui stimule le réflexion. Il le consacre à la nécessité qu'il y a de mettre en oeuvre dans notre pays une pédagogie de la laïcité, arguant à juste titre que la "République ne saurait se contenter d'imposer la neutralité par la seule loi". Probablement d'origine musulmane, le Pr BIDAR constate qu'une "minorité active [de musulmans]" considère que "cette laïcité n'est qu'une idéologie concurrente de la leur, et contre laquelle, à ce titre, il leur paraît légitime de faire valoir leur droit à la différence". C'est fort bien poser le problème.
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Il ajoute quelques paragraphes plus avant : "Se souvenir de ce qu'on appelle aussi 'être laïque' est l'occasion de rappeler qu'avant d'être un principe politique, la laïcité est une 'position de conscience' : est laïque la conscience critique capable de prendre la distance du doute et de la remise en question vis-à-vis de toutes les convictions, vérités, visions du monde, qui la sollicitent".
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Fidèle à la nouvelle règle de conduite que je me suis fixée, et dans la mesure où la question des revendications islamistes (je n'ai pas dit musulmanes) de visibilité dans l'espace public met la laïcité au premier plan des questions politiques, je vais NOUS poser quelques questions à propos de ce texte :
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(a) Une conscience critique peut-elle arriver à conclure, par le seul fait de son libre jeu, que telle vision lui paraît juste et telle autre fausse ? Et si oui selon quels critères ?
(b) Une conscience, telle que la définit ce texte, doit elle être nécessairement sceptique (révoquer en doute a priori toute vision affirmée du monde, toute conviction, toutes vérités qui la sollicitent) pour mériter le qualificatif de critique et laïque ?
(c) Si la réponse est : oui elle doit l'être, une conscience critique peut-elle accepter l'idée même que des hommes et des femmes tiennent pour vérité telle ou telle croyance qu'elle-même révoque en doute avant même d'en avoir examiné les fondements au motif que ce sont des affirmations, des convictions, des visions du monde personnelle, ou propres à des communautés humaines plus ou moins grandes ?
(d) Une conscience critique peut-elle admettre que l'espace public, laïc par définition, est imprégné dans sa structure même, par l'histoire, la culture, la géographie, et qu'une pure indifférence vis-à-vis de ces déterminations est purement abstraite et impossible ?
(e) Une conscience critique peut-elle admettre que l'on doit obéir en tout à sa propre conscience ?
(f) Peut-elle surplomber toutes les consciences individuelles ?
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Le Pr BIDAR fort justement fait une différence entre le principe politique de laïcité, et le principe éthique de laïcité. En somme, et là je me vois dans l'obligation de commenter, la neutralité reconnue de l'espace public reviendrait à renoncer personnellement, au nom du bien commun, à y imposer des comportements, des paroles, des gestes manifestant explicitement une appartenance religieuse ; mais dans ce cas pourquoi tolérer des comportements non religieux mais de nature idéologique, et relevant eux aussi de croyances ?
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Ces questions sont fort complexes, et je n'ai pas de réponses à ce dilemme vieux comme ANTIGONE et CREON. J'ai tout de même un élément à apporter : une conscience est toujours la conscience d'une personne. Car la société non plus que les groupes humains ne pensent pas. Cela a été très bien dit par Simone WEIL. En somme une conscience critique est une abstraction dépourvue de tout caractère concret.
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J'attends vos réponses.
1 commentaire:
La laïcité pourrait être une valeur essentielle, mais voilà !… Ils étaient là pour s’instruire ils sont sortis analphabètes. Ils devaient devenir des hommes libres, et être amené à une autonomie de jugement, ils sont devenus des bagnards d’une pensée unique. La laïcité la plus sectaire du monde occidental ouvre ses bras de Bouddha au monde musulman, pour une implosion programmée. Le 13 février 2007 Abdennour Bidar déclare sur une radio « Je déplore que Mahomet soit si méconnue en France. Et ça c'est quelque chose sur lequel j'aimerais travailler à l'avenir, j'aimerais qu'on me donne la parole et qu'on donne la parole à d'autres pour dire à quel point Mahomet a été non seulement pour les musulmans mais je dirais pour… ( hésitation)…..l’humanisme universel une figure de sainteté une figure de sagesse dans son humanité même. On sait que c'était un personnage extrêmement complexe, on sait que c'était un chef de guerre, on sait qu'il était polygame etc... C’était un homme complexe, mais qui dans cette complexité avait une très très grande force et je déplore que sa figure soit méconnue."
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