mardi 25 juin 2019

Lundi 24 juin 2019. La "liberté" qui tue ou la perte des repères verticaux.


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LA LIBERTÉ QUI TUE !
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"Et au bout du compte, notre époque est si complètement libérée que tien ne semble plus tenu par rien — ni la nation, ni la vie publique, ni les familles, ni les personnes. D’où, d’un côté le désir ressurgissant de murs et de frontières, de protection, d’identité, de retour à, de repli sur soi, d’égotisme affranchi, d’exclusion et de pureté. Et de l’autre, l’importance accordée aux « valeurs », celles de la démocratie, de la république, de l’égalité, de l’entreprise, de l’école. Un nouveau puritanisme, vide de consistance mais d’autant plus virulent, se voue à policer la langue et à traquer de nouvelles déviances — homophobie, islamophobie, christianophobie — réduisant tout et chacun à des identités assignées. Quand le corps social part en lambeaux, les valeurs ressemblent à des sparadraps usagés posés sur une large cicatrice ; elles ne peuvent que recouvrir et infecter davantage une plaie purulente que l’on ferait mieux de laisser respirer.
"Les causes profondes de cette situation n’ont pas grand-chose à voir avec les débats politiques qui nous obsèdent, avec les vieilles querelles liturgiques, avec les cases et les oukases du prêt-à-classer. Ce n’est pas une question de « réacs » et de « progressistes ». C’est la sécularisation qui agit comme un rouleau compresseur, qui écrase tout, et pas seulement la religion, car plus rien de vertical ne tient. Et ce qui n’est pas aplati par la sécularisation est broyé par la marchandisation. L’horizon consumériste s’est substitué à l’horizon eschatologique. Effet dissolvant de la marchandisation, autonomie de l’individu, relativisme de la vérité, ventres locatifs, pères facultatifs, liquidité de la société… les facteurs de désaffiliation sont à la fois multiples, convergents et extérieurs à la sphère religieuse." [Texte intégral.]
In
Jean-Pierre DENIS.
Un catholique s’est échappé.
Les Éditions du Cerf, Paris, 2019.(Page 68.)
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CONTREPOINT DE LEO STRAUSS.
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"Pour certaines personnes, la vérité n’est rien de plus que le résultat d’un consensus. Or, de toute évidence, un consensus de ce genre doit se produire entre des gens qui sont vivants en même temps. De la sorte, la vérité qu’ils décideront devra être imposée aux générations futures. Bien sûr, lesdites générations seront à même de changer en constituant un nouveau consensus qui prendra de nouvelles décisions quant à la nature de la vérité. Mais il faudra bien le faire en se fondant sur la « vérité » d’une génération précédente qui sera présente en elle et les marquera, que les hommes vivant à une époque donnée en soient conscients ou non. Ainsi, cette démocratie absolue devra nécessairement dégénérer en une dictature totale du présent sur l’avenir, c’est-à-dire en une absence absolue de démocratie. Il faut qu’il y ait quelque chose comme une vérité objective, indépendante de notre volonté, que l’on puisse transmettre de génération en génération, si les générations futures ne doivent pas être abandonnées sans défense aux caprices de leurs ancêtres."
In
Léo STRAUSS.
Nihilisme et politique. Traduit de l’anglais et présenté par Olivier SEDEYN. ("Rivage poche/Petite bibliothèque". N°460. Collection dirigée par Lidia BREDA.)
Payot et Rivages, Paris, 2004. (Page220.)
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COMMENTAIRES PERSONNELS ET ULTIME CONTREPOINT DE PHILIPPE MURAY..
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Jean-Pierre DENIS comme Léo STRAUSS soulignent la pauvreté dictatoriale d’une société sans repères verticaux, totalement marchandisée, financiarisée, sécularisée ; elle se rabat sur de pauvres « valeurs », définies en un moment donné par des comités Théodule qui s’adjugent le pouvoir de dire le bien et le mal, au gré de leurs préoccupations électorales. Et vogue la galère. Après nous, le déluge.
Il est tout de même frappant de voir comment des penseurs d’origine diverses pensent exactement de la même manière. Tenez, regardez, pour conclure, ce que dit Philippe MURAY :

"[…]. C’est l’apparition de nouvelles lois, de nouvelles régulations, de nouvelles normes plus étonnantes les unes que les autres et qui poussent à toute allure comme des plantes monstrueuses, comme une végétation des premiers âges. La liberté n’a pas duré longtemps, mais le nouveau régime de persécutions qui se met en place emploie encore le langage de la libération. Il ne l’emploiera pas longtemps d’ailleurs, juste le temps qu’il faudra pour être devenu irréversible. On reconstruit en toute hâte, avec des matériaux un peu frustes il faut le reconnaître, mais c’est parce qu’ils ont été redessinés et retravaillés sur logiciel, les échafauds, les gibets, les pals, les estrapades, les bûchers que l’on avait détruits pendant l’orgie, et personne n’a l’air de s’en étonner ou de s’en inquiéter. Les torturés, d’ailleurs, ne seront pas les mêmes qu’avant, alors tout va bien. Après l’orgie, ce qu’il y a de plus libéré ce sont les lois, c’est la loi du désir de loi, mais basé sur des valeurs que notre temps impose comme des évidences de toujours ou des lois d’essence alors qu’il ne s’agit, comme à chaque époque, que de préjugés. Les anciens régimes autoritaires mettaient au-dessus de tout la nation, la race ou le peuple ; les nouveaux propagandistes des nouveaux totalitarismes diffus, non dirigés, non conscients d’eux-mêmes, mais tout aussi totalitaires que les précédents, mettent en avant la parité, l’égalité égalitaire, la nécessité de conquérir tous les jours de nouveaux droits particuliers, et c’est tout cela dont l’ère de la liberté a accouché. Elle accouche tout simplement d’un nouveau désir de servitude."
Philippe MURAY.
Moderne contre moderne. Exorcismes spirituels IV. Essais. Quatrième tirage.
Les Belles Lettres, Paris, 2010 (pour la présente édition). (Page 84.)

Nous y sommes. Le régime de PONCEFRELU-PILATOQUET a atteint l'acmé de ce processus de décomposition. Certes, il peut garder le pouvoir, mais c'est un pouvoir en pleine décomposition.


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