Être dans le monde, sans lui appartenir, tel est l'âpre état qui échoit en partage au disciple de Jésus. C'est une parole très mystérieuse que cette Parole du Maître. Le monde ne peut être assimilé à la création : car toutes les Écritures célèbrent sa beauté et sa grandeur ("Les cieux chantent la gloire de Dieu" dit un Psaume). Et du reste, elle "gémit et pleure dans l'attente de Dieu". Le monde, c'est du moins ce que je crois, est cette assemblée des hommes, ce long cortège des vivants et des morts, qui a fait l'histoire, et donné à ce qui est l'aujourd'hui son visage. Le monde, c'est aussi l'humanité coupée de Dieu, qui vit selon la chair au sens où l'entend Paul de Tarse, c'est-à-dire selon l'inclination de la nature humaine, coupée de/ ou plus exactement non reliée à/ la transcendance. Mais alors comment le disciple doit-il être dans le monde ? Pas question de l'ignorer ; mêmes les moines et moniales prient pour le monde, et ils ont au fait - je l'ai souvent vérifié - de ce qui s'y passe ; ils déchiffrent les événements du moment à une lumière qui n'est pas celle des physiciens, et avec une acuité d'analyse confondante. Pas question de le combattre non plus, ce monde ; il nous a été donné en dépôt, comme les talents que confie à ses serviteurs le maître qui part pour un pays lointain. Pas même question de le transformer par la force. On a vu ce que ça a donné. On peut donc imaginer que les disciples y sont présents-vivants pour l'ensemencer de la Parole, la rendre crédible aux hommes par leur vie. Situation qui exige confiance et fidélité ; situation qui n'est inconfortable qu'en apparence. Car le disciple "possède déjà ce qu'il espère". En somme, je ne vois pour lui qu'une seule possibilité : la foi, la foi pure, la foi nue.
Je ne saisis pas les raisons profondes qui me font vous délivrer cette très courte réflexion. Ou plutôt ce sont des événements minuscules : discourtoisies des passants, pornographie rampante des journaux, offres publicitaires mirobolantes de gains par des moyens qui n'ont rien à voir ni avec le travail, ni avec le talent, incivilités de toutes sortes, etc. Chaque fois, on peut trouver des raisons qui expliquent ces faits. Mais aucune d'elle ne témoigne de la noblesse de coeur, du statut tout particulier de l'homme dans la création, et des aspirations profondes qui dorment au plus profond des coeurs. J'espère ne pas vous avoir ennuyés. Bon dimanche.
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