Un très cher ami alsacien m'envoie un message où il m'indique ceci que je tiens à vous faire connaître.
Madame Marie-Agnès LABARRE, sénateur proche de monsieur MELANCHON a déposé une proposition de loi tendant à abroger l'application du concordat de 1801 en Alsace-Moselle et les mesures prises en faveur des religions protestante et israélite. Ces régions, annexées par l'Allemagne impériale au terme de la désastreuse guerre de 1870, ne pouvaient se voir appliquer des lois qui avaient été votées alors qu'elles n'étaient plus françaises (dont la loi de séparation). Le maintien de nombre de mesures juridiques antérieures à l'annexion prend le nom de "droit local". C'est ainsi que le régime foncier, le régime de sécurité sociale, le régime des cultes et de leurs ministres, celui des vacances, entre autres, sont différents dans les Départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.
Si madame LABARRE avait quelques connaissances historiques, elle saurait que les tentatives faites par CLEMENCEAU et les laïcards de son escorte pour "harmoniser" à la sauce anticléricale l'Alsace et la Moselle y ont suscité un fort courant autonomiste. Nombre de messins n'ont jamais pardonné au petit Père la Victoire l'expulsion immédiate en novembre 1918 de l'évêque allemand de METZ. Il était adoré de son clergé et n'avait rempli que les devoirs de sa mission.
Si madame LABARRE avait un peu de cohérence concrète, elle demanderait l'abrogation totale du droit local. Son fanatisme laïc lui fait borner son initiative au seul domaine religieux. On voit bien par là que sa proposition est purement idéologique et qu'elle ne s'intéresse nullement aux sentiments et aux désirs de ses compatriotes alsaciens et lorrains. L'homme concret lui importe peu. Ce qui l'intéresse, c'est la pureté de son idéologie, la virginité abstraite de son activité cérébrale.
Si madame LABARRE avait quelques connaissances du terrain, elle saurait que l'Alsace est la région de France où il y a proportionnellement le moins d'élèves dans les écoles privées "confessionnelles" sous contrat. Elle voudrait ruiner l'enseignement public en Alsace qu'elle ne s'y prendrait pas autrement. Et je vois un très bel avenir se dessiner pour le Lycée Jean Sturm (protestant), le collège épiscopal Saint-Etienne (catholique) ou le Lycée Ort (israélite) pour ne citer que quelques établissements très prestigieux de STRASBOURG, au cas où sa proposition serait adoptée. Je connais bien le collège Saint-Etienne que mes enfants ont fréquenté. Il n'y avait pas que les fils de riches dans cet établissement, je puis l'affirmer, et chaque famille payait l'écolage en fonction de ses revenus sans qu'il y ait le moindre contrôle de la part de l'administration. Certaines ne payaient pratiquement rien du tout.
Si madame LABARRE avait quelque bienveillance sommeillant en son coeur, elle ne jugerait pas en fonction de son idéologie, mais en fonction de la paix civile que le maintien de ce régime très tolérant a introduit dans le vie publique alsacienne. Mais périsse l'homme concret pour que triomphent ses idées.
Si madame LABARRE avait un brin d'intelligence politique, elle comprendrait que les nombreux votes en faveur du Front National dans cette région de l'est n'ont d'autres raisons qu'un sentiment profondément ancré dans le coeur des Alsaciens : ils ont souffert pour avoir voulu être Français et sont blessés de ne pas voir leurs souffrances prises en considération par la Mère Patrie.
Madame LABARRE, un bon conseil : ne touchez pas au Concordat. Ce serait ouvrir une boîte de PANDORE, et déclencher une guerre de religion. Car vous êtes la grande prêtresse d'une religion qui ne dit pas son nom, et je ne vois guère de différence entre vos croyances et la foi de ceux que vous voulez contenir dans les étroites limites de leur particulier. Sauf que ces derniers n'imposent rien à leurs concitoyens.
N'y touchez pas, vous dis-je, car vous risqueriez de vous en mordre les doigts.
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