vendredi 29 avril 2011

A propos du Ciel et des hommes

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Je poursuis la lecture de l'ouvrage remarquable de FENG YOULAN, son "Nouveau traité sur l'homme". Et dans une note de bas de page, je trouve cette citation remarquable de MENCIUS (Meng zi, 6A, 16) : "L'humanité, la justice, la sincérité, la bonne foi, une ardeur infatigable pour faire le bien sont des dignités conférées par le Ciel. Celles de Prince, de Ministre d'Etat, de Grand Préfet sont des dignités conférées par les hommes."


Jamais paroles de sage ne m'ont paru plus adaptées à la situation actuelle que ces paroles-là. D'abord, il est tout à fait remarquable que MENCIUS utilise le mot dignités pour qualifier des vertus qui ne confèrent à l'homme aucun autre pouvoir que celui de faire ce que le Ciel demande. Ensuite, MENCIUS fait apparaître dans une lumière éclatante que les combats politiques - ceux qui, dans notre pays, opposent entre eux des candidats à l'élection présidentielle, dont aucun n'est encore déclaré, par exemple -, ou les attentats suicides dont l'horreur nous secoue - comme celui de MARRAKECH ou ceux dont on ne parle plus tant ils sont réguliers et qui imbibent la terre d'IRAK ou celle du PAKISTAN ou encore celle d'AFGHANISTAN, du sang des innocents - sont l'oeuvre d'hommes qui n'écoutent pas les murmures du Ciel. Pour MENCIUS, seule la vertu est digne pour l'homme, et elle ne vient pas de lui.


Mais nous avons perdu notre boussole ; jamais on ne dira assez que l'Occident doit sa décadence actuelle à son refus de ne voir du réel que ce qui tombe au pouvoir des sens et de la technique. Je n'entends pas confondre le temporel et le spirituel ; c'est une erreur dans laquelle l'Église catholique de notre pays a donné du XVIIe S. au XIXe S. - Révolution exclue. Elle l'a payé cher. Mais elle doit son salut et sa survie à la séparation des deux domaines. Rejeter la Foi théologale des chrétiens, et les croyances des autres confessions religieuses dans les ténèbres de l'obscurantisme est d'une insupportable prétention, et fait violence aux coeurs droits. Déclarer que tout se vaut, qu'il n'y a pas de vérité, qu'il n'existe pas de normes conformes à la nature, la nature humaine notamment, revient à tout justifier.


Qu'on ne s'étonne donc pas du fleurissement de la perversité, de la violence, de l'obscénité, du dévoiement des arts dans notre monde. Nous l'avons démocratiquement voulu. Et s'il est normal pour tout citoyen de rendre à César ce qui appartient à César, il lui est indispensable de rendre à Dieu ce qui appartient à Dieu. C'est exactement ce que MENCIUS suggérait et que JÉSUS quelques siècles plus tard a proclamé en réduisant au silence embarrassé quelques pharisiens qui voulaient le prendre au piège. L'accomplissement en JÉSUS du pressentiment des sages fut révélé au monde par sa mort sur la Croix. Ne serait-il que mort, son message resterait impérissable. Pour notre bonheur et l'honneur de Dieu, les disciples que nous sommes savent qu'il est ressuscité.


Bonne journée

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Cher Professeur,

Je vois que vous êtes un " étudiant " assidu de la philosophe chinoise. D'ailleurs en Chine, il est dit : 活到老学到老。Vivre vieux et étudier jusqu'à la fin.

Je voudrais vous faire partager cette autre phrase de Meng Zi ( 孟子)qui parle de ce que doit être l'homme de bien

“ 达则兼济天下,穷则独善其身

Anonyme a dit…

que je traduirai humblement pour vous par :

Riche et puissant mais doublement aidant ce qui se passe sous le ciel. Pauvre et démuni mais cultivant sa propre vertu.

Meng Zi essaie de dire que ce n'est pas parce qu'on est pauvre qu'on doit laisser tomber les valeurs morales, et ce n'est pas parce qu'on est riche que l'on doit négliger d'aider les autres.

Bref il veut rappeler aux riches leur part responsabilité face à la misère du monde, mais il rappelle aussi aux pauvres leur part de responsabilité dans cette misère.

Je vous souhaite une bonne fin de semaine, et à vous lire.

Rougemer, 20110429