dimanche 28 avril 2013

A madame Françoise Martres

Comme je dois m'absenter toute la semaine, ceci est le premier billet de ce dimanche ! J'en ferai deux autres. Reprise lundi prochain en huit.
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Madame le Président,

Vous vous êtes émue de la saisine (tardive) du Conseil Supérieur de la Magistrature par mamade TAUBIRA, l'actuel garde des sceaux. Dans une lettre mise en ligne sur Rue 89, vous lui dites :

"En plus de 40 années de combats pour les droits des magistrats (...), le Syndicat de la magistrature a dû faire face à de multiples tentatives visant à l'empêcher de s'exprimer. Vous venez de vous inscrire dans cette longue tradition, nous le regrettons vivement ", [...].
"Faut-il vous rappeler que dans nos prises de position publiques nous nous en sommes toujours tenus au débat d'idées ? C'est bien l'expression publique syndicale (...) que vous remettez en question par votre saisine consternante du Conseil supérieur de la magistrature."
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D'abord, je note que vous ne contestez plus un point essentiel : ce mur est bien le fruit d'une expression publique syndicale (quoique vous avez prétendu d'abord qu'il figurait dans un espace privé). Ensuite, je ne vois pas bien la relation qu'il y a entre l'expression d'opinions syndicales et l'injure faite aux personnes. Enfin, réclamer un traitement de faveur parce qu'on a les mêmes idées que son ministre de tutelle est une curieuse façon de défendre l'indépendance de la justice.

Vous avez une curieuse conception du débat d’idées et votre défense est assez pitoyable. Le débat d’idées, parfaitement légitime en démocratie, implique-t-il que des magistrats aient le droit de mépriser les parents des victimes, comme l’un de vos pairs l’a fait pour Philippe SCHMITT dont la fille a été assassinée dans le RER par un récidiviste ? Ce sont là des faits que vous ne pouvez contester, et qui appelle de votre part et de celle de votre collègue une réflexion collective sur le discernement. Comment voulez-vous que l’on ait confiance dans une justice dont les acteurs, chargés de rendre le droit, expriment leurs préférences politiques, idéologiques ou partisanes ? C’est impossible. Le désastre est complet.

Il n’y a à cette polémique qu’une issue honorable, celle de présenter des excuses aux personnes inutilement offensées. Vous avez d'abord argué que ces débordements avaient eu lieu dans un espace privé. L’argument vous accablait : il indiquait simplement que c’est entre vous, dans un petit club, que vous élaborez votre opinion, séparez les boucs des brebis, et attribuez les bons et mauvais points. Le mal fait à l’honneur de la justice est irréparable. Oui, le désastre est complet. Vous apparaissez à nos yeux, quoi que puisse en dire madame TAUBIRA ou vous-même, comme incapables de rendre un jugement impartial et pondéré. Vous avez beau maintenant prétendre qu'il s'agit d'une expression syndicale publique, la contradiction d'avec vos premiers propos confirme l'embarras dans lequel vous vous trouvez plongée...

Oh certes, vous le connaissez le droit. Mais vous le connaissez si bien que vous vous arrangerez pour infliger les peines minimales aux justiciables supposés être de votre bord (remise de peine, libération anticipée), et les peines maximales aux justiciables qui à vos yeux sont des adversaires politiques (amendes prohibitives, gardes à vue infondées, mise en examen douteuse) et que vous traitez en réalité en ennemis. Votre syndicat disqualifie la justice. Nous n’avons pas, nous n'avons plus confiance en elle. Le désastre, oui, le désastre est complet.

Dans ces conditions, vous comprendrez madame, que votre nom et celui des membres de votre bureau syndical soient inscrits – provisoirement je l’espère – au mur de l’ignominie. Présentez des excuses, madame, à ceux que vous et les vôtres ont offensés impunément, ou quittez la magistrature dont vous ne semblez plus être digne.
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Rappels : manif le 26 mai, participation aux rassemblements des Veilleurs : résistance passive, non violence, prière. Dans ce message à madame MARTRES, je me suis efforcé d'être le plus serein possible. C'est bien difficile... Je reviendrai aujourd'hui dans un deuxième billet sur cette affaire qui confirme l'état de décomposition totale de nos institutions.
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