dimanche 20 juin 2010

Comment on écrit l'histoire

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J'achève la lecture d'un petit livre dérangeant et qui me semble devoir être critiqué sur plusieurs points, mais qui donne des éclairages très intéressants sur la fonction éthique du roman, présenté comme une fiction volontaire, et qui ne prend jamais le parti de définir le bien ou le mal, mais simplement révèle la vérité de l'homme.
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Nancy HUSTON, puisqu'il s'agit d'elle, dans son ouvrage de réflexion L'espèce fabulatrice dit ceci qui me paraît devoir être gravé en lettres d'or sur le fronton de toutes les cheminées, privées ou publiques, spécialement celles des palais nationaux :
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"Chaque pays raconte, de son Histoire comme de toutes les histoires, la version qui l'arrange, et qui le montre sous la lumière la plus flatteuse. Certains faits marquants seront à jamais engloutis dans le silence ; d'autres, au contraire, deviendront fictions officielles et seront inlassablement soulignés, commémorés, enseignés."
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Voilà qui est vrai et qui a déjà été analysé avec une acuité remarquable par Simone WEIL, au fil de ses Ecrits historiques et politiques. Dans un texte qu'elle a intitulé Quelques réflexions sur les origines de l'Hitlérisme, elle montre que des formules comme La France éternelle ou L'éternelle Allemagne n'ont strictement aucun sens. Il faut voir comment elle explique, avec une érudition extraordinaire, la manière dont HITLER s'est inspiré de la politique extérieur de Rome. Il n'y a pas de France éternelle, au moins en ce qui concerne la paix et la liberté. Napoléon a inspiré au monde autant de terreur et d'horreur qu'HITLER. Quant aux Germains, ils étaient bien plus fidèles à leurs engagements et à leurs serments que les Romains qui n'ont cessé de les violer et d'exercer sur ces peuples une tyrannie et une cruauté dont nous n'avons pas la moindre idée. Pourtant (et TACITE le confirme : il dit de l'un de ces peuples germains qu'il choisit de défendre sa grandeur par la justice. Il est dépourvu d'avidité, de cruauté, tranquille, se tenant à part) les Germains ont été longtemps des modèles de vie politique bonne. C'est du cynisme romain qu'HITLER s'est inspiré, pas de l'Eternelle Allemagne ! Et nous avons commis l'irréparable erreur, en 1938, de confondre les nazis et les allemands. Voilà qui arrangeait bien les hommes politiques.
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Si nous n'étions pas prisonniers du mythe de la Révolution française, obsédé par une égalité qui est supposée nous conduire au bonheur, nous comprendrions, entre autre, que si l'égalité est mariée à la fraternité (au moins dans notre devise), nous devrions accepter de faire un effort pour régler au mieux de tous les intérêts de nos concitoyens l'épineux problème des retraites. Le mythe historique a la vie dure, les syndicats aussi. Et, continuant de nous raconter des fables sur la France éternelle, nous allons tout droit dans le mur.

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