mercredi 16 février 2011

A propos du courage

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Il y a bien longtemps que je ne vous ai parlé d'une très prometteuse et jeune philosophe, je veux parler de Cynthia FLEURY. Elle vient de publier un livre dont je ne connais qu'un extrait. Mais il me semble tellement fort, tellement significatif, que sans attendre je désire vous en faire part.
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"[...] Comment apprendre le courage ? Comment nourrir le courage pour qu'il ne vous quitte plus ? J'ai perdu le courage alors même que je voyais la société dans laquelle je vivais être sans courage. J'ai glissé avec elle. Me mêlant chaque jour à cette négociation du non-courage. Là il n'y a pas d'eau. Seulement la corrosion. C'est Naples et ses ordures. Nous vivons dans des sociétés irréductibles et sans force. Des sociétés mafieuses et démocratique où le courage n'est plus enseigné. Mais qu'est-ce que l'humanité sans le courage ? Si ma chute peut sembler poétique, celle qui est collective est gluante. Et je vois bien que le salut ne viendra que de quelques individus prêts à s'extraire de la glu, sachant qu'il n'y a pas de succès au bout du courage. Il est sans victoire. La vraie civilisation, celle de l'éthique, est sans consécration."
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Je dois dire que ce texte est prodigieusement dense. Il résume ce que j'ai eu bien souvent l'occasion de dire ici : que la liberté, qui est un rapport conscient de la pensée et de l'acte, n'exige pas d'atteindre le but envisagé pour être libératrice (Simone WEIL), qu'on ne peut se sauver tout seul (les grands héros comme SAKHAROV, SOLJENYTSINE, LIU XIABAO), que la politique conduite sans morale conduit à la mort de la nation (nombreux billets).
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La raison pour laquelle je combats les ritournelles de l'opposition, et approuve certaines initiatives du Président SARKOZY, est précisément que je trouve les remarques des opposants, lâches, sans grandeur d'esprit, sans vision, SANS COURAGE (flatter les passions humaines est tellement facile), et que Nicolas SARKOZY a eu LE COURAGE de s'attaquer à des fléaux qui nous détruisent à petit feu : corporatisme (les syndicats, les magistrats, pour ne nommer que ceux qui me viennent en tête), individualisme (essentiellement des possédants, quel que soit le niveau de la possession : "ceci est mon chien, ceci est ma place au soleil" disait PASCAL dans l'une de ses Pensées), idéologie et esprit de système (les idées passent avant le réel)
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Il me semble qu'aujourd'hui je commence à comprendre pourquoi la culture française qui éclaira longtemps le monde est en déclin, que brille encore au zénith la culture anglo-américaine, tandis qu'un autre soleil, celui de la Chine, n'attend que le crépuscule de son rival pour émerger à l'horizon. Nous ne pensons qu'en termes d'idées, jamais de réel. Nous aurions beaucoup à apprendre de philosophes comme AUSTIN sur qui je reviendrai.
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Je vais illustrer ce propos par un exemple récent, celui du procès qui est fait à François FILLON (le cas de madame ALLIOT-MARIE me semble différent). On condamne (enfin, certains condamnent) le Premier Ministre au motif qu'il a emprunté un avion mis à sa disposition par le gouvernement égyptien pour passer en Égypte des vacances. On condamne a posteriori, et au seul motif que les Égyptiens se rebellent contre un homme dont on feint de découvrir qu'il fut un dictateur pendant trente ans. On ne se pose pas les questions relatives au réel ; en voici quelques unes (je reste ainsi fidèle à ma méthode, celle des questions).
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(a) Qui a proposé de mettre cet avion à disposition de monsieur FILLON ?
(b) Y-a-t-il eu des contreparties politiques à cet arrangement, et si oui lesquelles ?
(c) Monsieur FILLON a-t-il réglé son séjour sur ses deniers personnels (il semblerait - conditionnel - que ce fut bien le cas, car la presse n'aurait pas manqué, dans le cas contraire, d'enfoncer le clou).
(d) Monsieur FILLON avait-il, politiquement, intérêt à refuser cette offre ? En avait-il même la possibilité ?
(e) Pourquoi des personnalités, des journalistes, qui font fi des problèmes moraux les plus criants, insinuent-ils que ce voyage soulève un problème moral ?
(f) Y-a-t-il eu dans la presse des journalistes qui ont condamné le régime du Président MOUBARAK ?
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Voilà ce qu'un esprit amoureux de la justice et de vérité aimerait savoir, avant de condamner (au nom de qui ou de quoi, si ce voyage n'a pas coûté un centime au contribuable) un homme qui jusqu'à ce jour s'est montré COURAGEUX et intègre.
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Mais Cynthia FLEURY le dit : le courage est sans victoire. Il tire sa force et sa joie de la vérité qu'il entend défendre. La vraie civilisation est celle de l'éthique (je préférerais qu'on utilisât le mot morale), et non celle du scoop, de la turbulence, de la polémique, du superficiel, et j'ajouterai, pour être symétrique, du bling bling !
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2 commentaires:

tippel a dit…

Bien dit Monsieur le Président.

Geneviève CRIDLIG a dit…

D’accord pour cette analyse mais uniquement à ce niveau de notre contexte social et politique actuel.
Redardons d’abord la définition de courage : Dans Wikipédia « Le courage est un trait de caractère qui désigne la capacité à surmonter la peur pour faire face à un danger. Le terme peut aussi être employé pour exprimer l'endurance notamment à l'égard de la douleur.
Le courage authentique requiert l'existence de la peur, ainsi que le surpassement de celle-ci dans l'action. Lorsque le danger est confronté sans peur, on parle plutôt d'assurance ou, de façon plus péjorative, d'inconscience, notamment lorsque le danger est manifestement sous-estimé.
Son contraire est la lâcheté. »

Car dans courage il y a le mot cœur ; j’y vois aussi le mot vérité et la capacité à oser l’exprimer, j’y vois la lucidité, et surtout la force face au risque et à l’incertitude des résultats.


De ce fait, dans la vie courante, je ne dirais pas du Français moyen mais de chaque habitant quels que soient son origine, son métier, ses études, sa catégorie socio-professionnelle, sa religion ou son athéisme, son adhésion ou non à tel syndicat ou parti politique, il me semble que chacun a la capacité de poser un acte de courage, là où il est planté – et il y en a sinon autant qu’autrefois ( mais de quel passé parle-t-on ?) sinon davantage.

Si nous regardons autour de nous, les exemples abondent souvent dans une grande discrétion - dans les familles, dans les situations de désunité, de souffrances morales ou physiques, dans notre milieu de travail et cela va de l’école à la retraite : un enfant peut se montrer très courageux dans l’exercice de son travail ou dans ses relations avec ses copains, une mère de famille saurait vous prouver combien le courage fait partie intégrante de sa responsabilité, idem pour tel employé, exploitant agricole, enseignant , cadre , chômeur, prêtre, religieux, retraité ou député. Je ne vais pas énumérer toutes les professions et tous les types de situations au sein desquels le courage est indispensable pour vivre ou survivre, dans un climat de recherche de paix ou de sauvetage- et ce n’est pas uniquement un effet de résilience.

C’est pour tout cela que le courage ne me paraît pas aussi absent de notre société que cela. Au contraire.