mardi 30 juillet 2019

Jeudi 25 juillet 2019. Qu'est-ce que la conscience ? Deuxième billet


2. Qu’est-ce que la conscience ? Deuxième partie.

Dans la première partie du billet consacré à la conscience, nous avons vu que le mot était très polysémique en français, et que, très curieusement, le dictionnaire Larousse ne faisait aucune référence aux aspects neurophysiologiques de la conscience.
Les journaux ont amplement souligné que Vincent LAMBERT était dans un "état végétatif". Je vais ici reprendre ce que disent Olivia Gosseries, Aurore Thibaut, Mélanie Boly, Mario Rosanova, Marcello Massimini  et Steven Laureys  dans un article intitulé : Assessing consciousness in coma and related states using transcranial magnetic stimulation combined with electroencephalography publié en 2014, dans les Annales françaises d’anesthésie et de ranimation.
Rassurez-vous, je ne vais pas vous assommer avec des mots et des notions incompréhensibles.

Les auteurs distinguent, de manière classique, divers désordres de la conscience (consciousness) : le coma, le syndrome d’éveil non répondeur (ou non répondant) (unresponsive wakefulness syndrom), l’état de conscience minimale (minimally conscious state) et le locked in syndrom.

Les médias qui croient tout savoir ont déclaré que Vincent LAMBERT était dans un état végétatif (en réalité un unresponsive wakefulness syndrom). Voici ce que disent à ce propos les auteurs précités (je traduis) :

"Cet état a d’abord été appelé syndrome apallique ou coma vigile, et en 1972, il a été appelé état végétatif. Une nouvelle terminologie a été proposée en 2010 — le syndrome d’éveil non répondeur [UWS] — pour éviter la forte connotation négative avec des risques de comparaison par inadvertance des patients avec des légumes. Le terme d’UWS permet une description plus précise de l’état clinique et fait référence à des patients qui sont incapables de réagir à des stimulus d’une manière non réflexe (d’où le nom de non répondeur), Cliniquement, cet état est donc défini par un éveil (wakefulness) sans prise de conscience (awareness) dans lequel les patients sont capables d’ouvrir les yeux sans prise de conscience de l’environnement et d’eux-mêmes. Ils ne montrent que des comportements réflexes (grincement des dents, mouvement des yeux, déglutition, mâchage, ouverture de la bouche, gémissements). Cet état peut être transitoire, chronique ou permanent.
Bien que la récuperation d’un cycle d’éveil et de sommeil soit un critère diagnostic de l’UWS, des études récentes ont mis en évidence une absence des caractéristiques électrophysiologiques du sommeil dans l’UWS. Le métabolisme cérébral est ordinairement diminué de 40 à 50 % et présente des perturbations des circuits cortico-thalamo-corticaux avec une préservation relative des fonctions du tronc cérébral. Les dysfonctionnements cérébraux sont plus spécifiquement localisés dans le réseau frontopariétal (incluant les réseaux médiaux et latéraux reliés au soi et à l’environnement respectivement) et dans le thalamus. Lors des stimulations sensorielles, les patients UWS présentent une activation cérébrale, qui reste confinée aux cortex primaires. Enfin les processus reliant le cortex frontal aux cortex pariétaux sont perturbés quand on mesure l’activité électrique lors des stimulations auditives."

Il convient ici de faire plusieurs remarques. (a) C’est à dessein, et pour aller dans le sens des amateurs d’euthanasie active ou passive, que les journaux ont utilisé le terme d’état végétatif pour qualifier la situation de Vincent LAMBERT, alors que les neurologues ont vu la forte connotation négative associée à ce terme, puisqu’ils ont forgé le terme de UWS. En français, certains neurologues utilisent le terme de « pauci-relationnel ». Mais je ne pense pas qu’il rende entièrement compte de la situation réelle de ces patients. (b) Même au sein de cette entité clinique qu’est l’UWS, il peut y avoir des degrés divers de gravité. Nous ne savons strictement rien du dossier clinique, et notamment des études des potentiels évoqués visuels, auditifs, moteurs et somesthésiques. (Tout ce que les imbéciles ont dit est relatif à l’état végétatif…) J’ose espérer que ces examens ont été pratiqués. (c) Il y a, selon moi, une assimilation abusive entre la non réactivité et l’absence de conscience de soi. En d’autres termes, nous ne savons pas, et personnes ne peut le savoir, si, par exemple, la mémoire de Vincent était peu ou prou préservée. Nous ne savons absolument pas ce que signifiaient pour Vincent les signaux électriques que l’on pouvait détecter dans son cerveau.

Je dis et je conclus que monsieur SANCHEZ a commis un assassinat légal, avec la bénédiction de tout un courant de pensée qui, en fin de compte, accorde peu de prix à la vie humaine. Je reviendrai dans un troisième billet sur les travaux d’OWEN.

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