Un
silence sépulcral s’est abattu sur la presse qui, pourtant, il y a peu, ne cessait de
gloser sur la situation de Vincent LAMBERT et de supputer les possibles issues
de ce drame. Vincent est mort. Tournons la page. Et n’y pensons plus. Eh bien
si, pensons-y ! J’ai passé ma vie à faire de la recherche et de l’enseignement.
Pourquoi se donner tant de mal pour étudier des maladies réputées incurables
comme la maladie de Charcot ou la maladie d’Alzheimer ? Me serais-je fourré le doigt dans l’œil ? Ce monde qui a des
tripes mais n’a pas de cœur (BERNANOS) s’apitoie sur les animaux abandonnés par
leurs maîtres pendant les vacances (ce qui est bien entendu un scandale) mais
ne s’intéresse guère, hormis quelques fous (dont je m’efforce de faire partie),
à cette partie de l’humanité gravement blessée par la maladie quelle qu’en soit
la cause.
Il
me semble qu’aucun journaliste, pas même ceux de la presse dite catholique, ne
s’est posé quelques questions essentielles : j’en vois au moins trois, qui
ne me semblent pas avoir reçues de réponses satisfaisantes ou approfondies :
1. Qu’est-ce
que la vie ?
2. Que
sait-on de la conscience ?
3. Qu’est-ce
que le bien ?
Pour
aujourd’hui, je tâcherai de répondre à la première.
1. Qu’est-ce
que la vie ?
En
première approximation, on peut dire que c’est l’actualisation permanente d’une
information que portent les gènes. Ceux-ci, en s’exprimant, de manière très
régulée, et selon des règles très complexes qu’il est inutile de décrire ici,
aboutissent à la production de protéines douées de diverses fonctions :
protéines structurales, protéines enzymatiques, protéines régulatrices, etc., qui
permettent ensuite la production et l’utilisation de lipides, de sucres et d’autres
protéines. Le tout est articulé d’une manière coordonnée dans le temps et dans l'espace, qu’aucun esprit
humain n’est capable d’embraser d’un seul regard, tant est complexe et intriqué
le réseau interagissant que forment ces divers événements. La vie se manifeste
par la croissance, laquelle se
caractérise par une augmentation de la masse de matière vivante ou par son
maintien (aspect trophique de la vie), et par la possibilité qu’ont les cellules
de se multiplier (aspect plasique de la vie). Tout le monde voit bien la différence entre une hypertrophie (les muscles d'un culturiste par exemple) et une hyperplasie (une tumeur par exemple).
La
vie, par ailleurs, conséquence de ce qui vient d’être dit, et ceci est propre à
tous les êtres vivants, possède un double dynamisme : celui de sa propre
conservation, et celui de la reproduction ; que celle-ci soit sexuée ou non n’enlève
rien à ce caractère absolument universel de la vie.
Claude
TRESMONTANT et d’autres, diraient que la vie est une forme ou une information
donnée à la matière.
Il
se trouve que la vie a des ratés qui se manifestent par des mutations létales lesquelles
aboutissent à la mort dans tous les cas de figures et modes de reproduction,
par des mutations délétères qui se manifestent, chez l'homme, par des maladies dites
génétiques, dont certaines raccourcissent le temps de vie, et d’autres ne le
modifient pas, mais s’expriment par des malformations diverses, des retards
mentaux, des métabolismes anormaux, des croissances retardées. Et puis il y a
aussi des mutations bénéfiques qui confèrent des avantages dits sélectifs au
sujet qui en est le siège, qu’il soit une plante ou un animal et des mutations neutres.
Mais
la vie peut être abîmée par des accidents fortuits ou (pour les animaux
supérieurs) par des addictions diverses qui laissent le sujet atteint dans un
état de diminution existentielle, dans la mesure où sa liberté est entravée. Addiction mise à part, la chose est vraie
aussi bien pour les plantes que pour tous les autres êtres vivants.
C’est
là que les bons apôtres des loges, et de la compassion auto-ombiloscopique interviennent, pour ce qui concerne la vie humaine, en décidant de ce qu’est
une vie digne d’être vécue ou indigne de l’être.
Selon
le mode de pensée dominant, une vie digne d’être vécue est une vie qui se
rapproche d’un modèle idéal et mannequinesque, belles proportions pour tous, belles
fesses, beaux seins pour les unes, beaux muscles et torse en tablette de
chocolat pour les autres. Ces modèles d’une vie humaine digne d’être vécue nous
sont renvoyés dans la figure par la presse féminine, les journaux people, sans
compter les magazines consacrés à la santé ou au sport.
On
offusquerait gravement un bouddhiste si on lui disait qu’il faut détruire les
animaux nuisibles, lui qui se garde bien de détruire une araignée ou un ver de
terre. Les raisons de ce respect de la vie reposent sans aucun doute sur la croyance
bouddhique en la métempsycose. Mais ce respect est absolu. Dans le cas de
Vincent, un bouddhiste dirait que son état reflétait son karma ; j’ignore
s’il aurait dit qu’il fallait ne pas le soigner et laisser le karma faire son œuvre.
C’est possible, mais ce n’est pas certain. Ce qui est certain, c’est qu’il l’aurait
considéré comme vivant.
Il
est évident cependant que le respect que l’on porte à la vie dépend de la
définition qu’on en donne. Dans le cas de Vincent Lambert qui n’était pas
malade, n’était pas branché sur des appareils respiratoires, n’avait pas un
électroencéphalogramme plat, il ne fait aucun doute pour ce qui me concerne qu’il
était bien vivant, et qu’il était aimé de ses parents et de quelques-uns de ses
proches. Je dis donc calmement que sa mort est le fruit d’un assassinat légal.
Et je suis tout disposé à m’en expliquer à qui voudra bien me demander des
comptes.
Demain,
nous parlerons de la conscience.
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