samedi 3 mai 2008

Le stigmate du socialisme

J'ai promis, hier soir, de vous citer quelques aphorismes de Gustave THIBON, le paysan philosophe à qui nous devons de connaître les oeuvres de Simone WEIL, elle aussi penseur d'une incroyable densité. J'y reviendrai souvent à Gustave THIBON, très souvent. Tout est lumineux dans ses propos. Et, aujourd'hui, nous aurions bien besoin de lui pour nous remettre la tête à l'endroit.
Alors commençons.
Le stigmate essentiel du socialisme (et quelle nation n'est pas aujourd'hui plus ou moins infestée du virus socialiste ?) réside là : il méconnaît, il détruit les réserves, les lentes réserves dormantes, la patience conservatrice des organes profonds. Là où sont les puits de la vie - les puits de la tradition, de l'autorité, de l'expérience où s'abreuve obscurément la caravane sociale - il voit des parasites et des obstacles. Il confond réserve et inutilité. Tout ce qui conserve, dans le monde des corps comme dans celui des âmes, provoque son aversion : est-ce par hasard qu'il enveloppe dans la même haine la propriété et la religion ?
Le socialisme a la phobie de l'épaisseur. L'instinct dégradateur et anti-vital qui habite en lui se révolte contre les forces substantielles qui accumulent, dominent, tempèrent, contre la densité des puissances intérieures qui retiennent le devenir humain dans un sillon d'harmonie. Dans ces éléments de stabilité et de vie, l'idéologie marxiste ne voit que poids mort et qu'absurde oisiveté. Des forces qui attendent, se cachent, se taisent, lui sont insupportables. Le rêve du grand soir n'a qu'un sens : ramener à la surface, consumer dans un vaste feu d'artifice matériel toutes les antiques réserves de l'humanité, et atteindre par cette combustion universelle, à un degré inédit d'ampleur et de rapidité dans la production et les échanges sociaux. [...] Plus de lest, plus de poids mort, plus de réserve paralysante : une voile sans épaisseur ni densité que le vents des grands principes puisse mouvoir à son gré - la rationalisation de l'humanité ! Hélas ! la vieille masse épaisse et lente peut réagir sous les cataclysmes : elle a des réserves pour traverser les déserts et résister aux tempêtes, tandis qu'il suffit d'un souffle contraire pour crever à jamais la baudruche infiniment rapide, infiniment plate !
In
Diagnostics. Essai de physiologie sociale.
Préface de Gabriel Marcel.
Fayard, Paris, 1985. (Le livre a été publié la première fois en février 1940.)
Voilà pourquoi, je prétends que le socialisme a partie profondément liée avec le système absurde de consommation où nous entraînent dans un tourbillon furieux les chevaliers d'industrie du CAC 40. Il ne nous dit pas qu'il faudrait un autre modèle de civilisation. Non ! Il dit qu'il serait bon que tout un chacun, et plus précisément sa clientèle électorale, puisse profiter de ces biens matériels, dont l'utilité pratique ou l'intérêt culturel sont d'un douteux intérêt, par une augmentation du pouvoir d'achat. (Incidemment, je ne vois pas comment une alliance authentique de projets, autres qu'une alliance de circonstances, peut unir les Verts aux Socialistes ; s'ils sont verts c'est de rage et d'ambition). Je plaide pour une augmentation du pouvoir de réfléchir et de penser.
A demain pour une autre extrait.

Aucun commentaire: