mardi 8 mai 2007

Reflexions

"On ne saura jamais ce que la peur de ne pas paraître suffisamment à gauche aura fait commettre de lâchetés à nos français" disait Charles PEGUY.
Voilà pourquoi nombre de nos hommes politiques ont soutenu MAO, Fidel CASTRO, STALINE et autres tyrans qui ont des millions de morts à leur palmarès. En dépit des cris que poussaient vers eux les victimes de ces monstres avant qu'elles ne soient exécutées, ils se sont bouché les oreilles ; en dépit des images d'horreur qui leur parvenaient par le canal des dissidents pourchassés, ils se sont bouché les yeux ; ils pouvaient protester, prendre des mesures de rétorsion, en un mot avoir une parole, ils ont préférer se taire ou n'avoir que des jugements creux, vous savez ce que l'on appelle plaisamment des "paroles verbales".
Des exemples ?
Monsieur Jacques DELORS, sur le plateau d'Apostrophe, le 16 janvier 1976 : "j'ai été profondément choqué par trois affirmations de ce livre (La tentation totalitaire de Jean-François REVEL, note du rédacteur) : premièrement une assimilation du communisme et du nazisme ; deuxièmement le monopole de la violence par le communisme, alors que la violence est un phénomène très partagé puisqu'il suffit de parler des guerres coloniales, des interventions américaines ou en Amérique du Sud ; enfin par une critique sans nuance des pays communistes." Soljenitsyne aura sans doute apprécié.
Monsieur Jean-Pierre COT, dans le Nouvel Observateur du 31 décembre 1978 "Je refuse de traiter pareillement les internements arbitraires en Union Soviétique (40 milions de paysans morts de faim en Russie d'Europe sous STALINE, note du rédacteur) et les tortures, assassinats et disparitions massives en Argentine (6500 morts selon les aveux du Capitaine ASTIZ, note du rédacteur)". Monsieur COT aurait-il eu un accident vasculaire cérébral ? Une aphasie ? Vous entendez bien : il parle "d'internements arbitraires" et non des excutions, disparitions, déportations de millions de citoyens "soviétiques" sous le régime stalinien. On croit rêver.
Et cet aveu tardif de Jean DANIEL (L'ère des ruptures, Grasset, Paris, 1979) : "Je fus souvent tenté de préférer l'erreur qui rapproche à la vérité qui sépare", (à mon humble avis, ce fut plus qu'une tentation ; il arrive que le Malin nous y fasse succomber ; la litote ici est des plus succulentes) ou de Pierre DAIX, un marxiste repenti et sincère et probe : "Moi, l'ancien de Mauthausen, j'ai bien aidé les bourreaux du goulag".
(Merci à Jean SEVILLIA. Le terrorisme intellectuel, Perrin, Paris, 2000 et 2004, qui dans cet ouvrage, duquel j'ai extrait ces citations, met les points sur les i de cette question avec une précision et une probité remarquable.)
Je n'hésite pas à dire que la défaite de la gauche aux élections présidentielles est le résultat de ce mensonge permanent, de ce viol collectif de la vérité la plus élémentaire. Comme le dit un auteur anglo-saxon : "Le premier devoir des intellectuels est d'être intelligent ; encore faudrait-il ajouter que celui de leurs lecteurs est d'avoir de la mémoire". Pour ce qui me concerne, j'en ai et j'entends bien raffraîchir celle des amnésiques.
Je n'aime pas l'idéologie néo-libérale. Je ne crois pas à la main invisible d'Adam SMITH. Il me semble nécessaire d'assurer un juste partage des biens terrestres car la Terre appartient à tous les hommes. Mais je ne crois pas au bonheur imposé au prix de la terreur et de l'immoralité. Je me demande s'il est possible de se dire "de gauche" sans se compromettre avec ses membres les plus sanguinaires : pour les refondateurs du socialisme, c'est une vraie question ; il faudra bien qu'ils y répondent.

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