L'esclavage fut et demeure une pratique abominable. Notre pays l'a pratiqué avant et après la Révolution. C'est un crime contre l'humanité. Tout cela est exact. MAIS je refuse de me reconnaître une quelconque responsabilité personnelle dans ce crime. Je veux bien me repentir de ce dont je suis l'auteur volontaire, mais pas des fautes de mes ancêtres. Et c'est une grande conquête morale que de nier l'existence de la responsabilité collective : Souvenez-vous de certaines horreurs ! Du temps de l'Occupation, les nazis sélectionnaient arbitrairement des otages et les exécutaient quand il y avait eu une attaque de leurs convois ou de leurs troupes par les résistants. Souvenez-vous du sentiment de révolte et d'injustice qui vous saisissait quand un professeur punissait collectivement votre classe faute d'avoir pu identifier le responsable d'un chahut ou du jet d'une malencontreuse boulette.
En revanche, je me sens parfaitement solidaire de mes contemporains. Et je me sens dans l'obligation de rappeler quelques évidences.
Quand pour gagner quelques centimes d'euros, je vais acheter mon essence au supermarché, je condamne à la faillite et à fermeture le pompiste de mon quartier ou de mon village.
Quand je paye 1 euros un tee-shirt ou un slip fabriqué en Chine au prix de l'exploitation éhontée des paysans de la Chine centrale et occidentale, exilés dans des usines tenues par les tyranneaux du Parti reconvertis dans les affaires, je contribue à l'appauvrissement de mon pays, je perpétue l'esclavage - bien réel celui-là - des ouvriers chinois et j'induis la délocalisation des quelques fabricants de textile qui végètent péniblement dans mon pays et ne trouvent d'issue que dans la fuite dans les pays pauvres.
Quand je vais me baffrer aux buffets en plein air du Club Med, sous les yeux écarquillés d'enfants au ventre ballonnés par la malnutrition, des enfants qui attendent mon départ pour vider les poubelles, je contribue à l'exploitation des populations locales lesquelles ne tirent aucun bénéfice de ma présence.
Quand je refuse de donner quelques centimes d'euros de plus pour acheter des produits issus du commerce équitable, j'enrichis les spéculateurs de matière première, les multinationales de l'agro-alimentaire et je me moque du travail pénible des petits producteurs africains ou sud-américains.
Quand mesdames et messieurs Louis Althusser, Roland Barthes, Simone de Beauvoir, Jean-Louis Bory, Patrice Chéreau, Jacques Derrida, Françoise Dolto, Gabriel Matzneff, Jean-Paul Sartre, Philippe Sollers, ont signé un manifeste (publié par le Monde dans son numéro du 22-23 mai 1977), pour réclamer la dépénalisation des relations sexuelles avec des mineurs, ils n'imaginaient pas les ravages que feraient vingt ans plus tard la pédophilie. Tous ces "intellectuels" ou presque étaient "de gauche". Que dit "La Gauche" aujourd'hui à ces encombrants soutiens dont, heureusement pour elle, beaucoup ont quitté ce monde ? Madame ROYAL a tranché, elle, et selon moi, dans le bon sens. Serait-ce parce qu'elle a essayé de réintroduire la morale dans la vie politique que ses "amis" lui ont savonné la planche et continuent de le faire ?
Il n'y a pas de responsabilité collective. Il n'y a que des responsabilités individuelles, mais la somme de nos choix personnels donnent à la société la couleur qui est la sienne ici et maintenant. Si l'on veut changer les choses, commençons par être cohérents et mettons nos actes en accord avec nos idées.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire