Dans un article au vitriol, Maurice SZAFRAN (Trois leçons parmi tant d'autres, Marianne, N° 398, semaine du 4 au 10 octobre) fustige les responsables de la crise financière. Il le fait avec talent, quoiqu'en forçant un peu le ton. Il stigmatise ces banquiers véreux, ces traders pourris, ces financiers corrompus qui savaient pertinemment que, tôt ou tard, un jour ou l'autre, le système néolibéral, cette construction dépourvue de toute base solide s'effondrerait.
Il y a là un amalgame entre vice et système économique qui mérite d'être examiné de plus près.
Ce que le journaliste dénonce, ce sont des dérives morales : les adjectifs "véreux, pourris, corrompus", indiquent bien, selon l'auteur, que les responsables de la catastrophe sont des hommes dépourvus de toute moralité. Il s'agit donc d'examiner si le système d'économie de marché est le porteur intrinsèque de cette immoralité ou bien si la dérive est due à une crise de l'anthropologie, et si d'autres systèmes auraient évité ces abus.
Quand on considère ce qui se passe en Chine où la corruption règne comme une maîtresse, ou dans les dictatures africaines, ou dans certains pays sud-américains, on est tenté de pensé que les hommes s'y comportent comme dans cet Occident qualifié de néolibéral par Maurice SZAFRAN. Il faut donc remonter plus haut et se demander ce que ces pays si divers ont en commun dans leur système économique.
Dans le même numéro de Marianne, Jacques GENEREUX (La gauche sans boîte à outil intellectuelle) donne un semblant de réponse à cette lancinante question : En refondant le discours politique sur une anthropologie rigoureuse, on peut désormais concilier les deux grandes traditions du socialisme etc. (Le reste de la phrase importe peu). L'auteur met le doigt sur la plaie : c'est l'anthropologie sous-jacente à tous les systèmes économiques actuels qui est fausse et qui peut se résumer en un mot, idolâtrie du productivisme. Il affirme, et je l'approuve, que toutes les sciences de l'homme [...] attestent la nature sociale de l'être humain et le fait que sa liberté se construit par les liens, et non dans la rivalité pour les biens.
Depuis que j'ai ouvert ce Blog, je ne cesse de clamer (a) que l'homme est un sujet social ; (b) qu'il ne vit pas que de pain ; (c) que la rivalité - qui est nécessairement mimétique - conduit à la violence ; (d) que le but du politique est de conduire l'homme à la fin qui lui est due.
Pour avoir oublié ces vérités premières, le capitalisme industriel, qui consiste on le rappelle à faire appel à des capitaux privés pour faire tourner l'économie, en rendant propriétaire d'une fraction de la société l'actionnaire, a dérivé vers le capitalisme financier, réserve inépuisables d'opportunités pour les cupides, les mafieux, les menteurs. C'est pour avoir dissocié le politique de la morale et la morale, de l'économie que nous en sommes là.
Il faut faire rendre gorge à tous ces banquiers qui se sont enrichis sur le dos des pauvres. Il y a aux USA vingt-cinq grosses légumes qui ont accumulé, ces cinq dernières années, 3,1 milliards de dollars dans leurs poches, par le biais de la spéculation (Marianne, toujours). Il faut tout simplement confisquer leur fortune si mal acquise au lieu de demander à leurs victimes de réparer les dégâts dont ces avides se sont rendus responsables.
Mais je reste perplexe. Car je me suis laissé dire (mais je n'ai pas vérifié la nouvelle) que le numéro 2 de la Caisse d'Epargne, ce responsable qui a si spectaculairement démissionné du Directoire, vient d'être nommé le numéro 1 du Crédit Foncier. Si cela est vrai, c'est tout simplement scandaleux. Ce monsieur a été très bien payé pour faire tourner au mieux son établissement, pour en surveiller le fonctionnement. On ne peut pas vraiment dire qu'il y a réussi. Les hommes politiques qui couvrent ces pratiques ont-ils le droit de demander des sacrifices à leurs concitoyens ? Poser la question, c'est je crois donner la réponse.
3 commentaires:
En ce funeste anniversaire du Jeudi Noir de 1929. Le jour où la panique gagna les bourses de New York. Je préfère me rappeler de l'homme de la situation, Franklin Delano Roosevelt avec son New Deal puis son Bretton Woods.
Aujourd'hui, une fois encore, nous avons pu s'apercevoir que la crise n'est pas derrière nous. Nous sommes en plein dedans. La destruction de l'économie réelle s'accélère. Et avec les plans fous de renflouement du système, le risque d'une crise d'HYPERINFLATION augmente chaque jour! L’existence même des nations est mise en cause !
Hier, devant un parterre de dirigeants de Hedge Fund, Nouriel Roubini déclare que le pire est à venir.
La solution aujourd'hui! Dire stop à la folie de la tyrannie financière avec un VRAI Nouveau Bretton Woods!
Une bataille s'est engagée entre les dirigeants politiques autour du contenu du sommet sur la crise financière qui se tiendra le 15 novembre 2008 à Washington.
La population doit s'accaparer le débat! A toi la Parole!
David C.
david.cabas.over-blog.fr
Je publie aujourd'hui même un billet, intitulé : messieurs remboursez !
Merci de vos remarques.
La question que je posais dans mon commentaire, c'est justement comment faire la dette a ceux qui ont détruit le système.
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