Je viens juste de voir quelques vidéos montrant les dévastations qui se sont abattues sur le quartier du Port du Rhin, à STRASBOURG. Je connais bien ce quartier. Il ne transpire pas la richesse ; il n'héberge que des gens au revenu modeste, voire très modestes. Comme le dit un de ses habitants : "c'est encore nous les pauvres, qui avons payé". Des imbéciles, des fous furieux ont brûlé une pharmacie, l'une des rares du quartier, un hôtel, des commerces, le bureau de tourisme. Les abris-bus sont détruits, les chaussées couvertes de débris de toutes sortes. On ne voit pas très bien où ces actions peuvent conduire ; on ne peut en comprendre la signification, si ce n'est celle de la rage impuissante d'une poignée de nantis - eh oui ! - qui à l'aide de téléphones portables, de motos rapides, d'internet et d'ordinateurs, peuvent se permettre de coordonner des actions violentes que n'ont pu endiguer 20.000 policiers. Il s'agissait d'une véritable guérilla urbaine, et il se trouve encore des gens pour dire que la police n'a rien fait. Certes, il semble bien que les forces de l'ordre se soient éclipsées après le passage des cortèges officiels car elles ont sans doute gagné le coeur de la ville, la Place Kléber, la Place Broglie, la Place de la République que les manifestants avaient l'intention d'investir. Il est regrettable, plus que regrettable même, que rien ni personne n'ait pu s'opposer à cette violence, ni même la prévoir en ce quartier. Mais quand on connaît la ville - ce qui est mon cas - on ne voit pas "l'intérêt" qu'il y a à vandaliser le quartier du port du Rhin. Si, on en voit un, celui de la lâcheté. Situé à la frontière allemande, il permet aux valeureux assaillants de se replier rapidement sur KEHL sans risquer d'être poursuivis par la police française. Une fois encore des pauvres ont été frappés dans leur lieu de vie et dans leur environnement. Ces grands coeurs de gauche sont tout prêts à démolir le monde pour sauver les opprimés disent-ils. Que ne commencent-ils par expliquer, argumenter, protester même, en manifestant dans le calme. Ils en sont incapables. (Écoutez bien ce que dit monsieur BESANCENOT [j'en ai déjà parlé], vous verrez que le sort des hommes concrets ne l'intéresse pas ; il comprend que des innocents perdent la vie à cause de la révolution ; ce qui mérite son combat, c'est le triomphe de ses idées, c'est à dire de son ego, de sa volonté de puissance, de son amour du pouvoir, et non le très hypothétique bonheur de lendemains qui chantent.)
Je suis pris de colère, et j'ai bien envie de flanquer une râclée à ces voyous ; je suis rempli de tristesse aussi, car je connais la difficulté qu'il y a à vivre au Port du Rhin, et je ne comprends pas qu'il puisse se trouver des gens pour critiquer l'absence de la police, comme s'il leur paraissait normal que de tels débordements puissent surgir pour manifester un désaccord politique. Et je fais le pari que c'est cette absence (relative) de la police qui va faire la une des journaux, et le fond des gloses, des éditoriaux, des analyses et des commentaires, et non le malheur des habitants. Rappelez-vous l'histoire de l'excommunication. Mis à part Mgr FISICHELLA, qui a parlé de la petite victime ? Personne ! On a tiré à boulets rouges sur l'archevêque de RECIFE, sur le Vatican qui n'en pouvait mais, sur le pape ; mais l'enfant ? Personne n'a exprimé pour elle la moindre compassion. Je le répète, le propre de l'idéologie c'est de n'accorder aucun crédit au sort des hommes concrets.
3 commentaires:
Et voilà à nouveau une bien triste illustration des conséquences de l’incapacité à exprimer un désaccord autrement que par la violence : cela devient une banalité que de dire l’absence de mots qui mène à divers désastres est l’un des maux les plus patents aujourd’hui.
Entre autre un cortège, d’autres circonstances historiques mais le même profil.
C’était en mai 68, dans la même ville de Strasbourg, sur le pont de l’Europe précédent, une même rencontre symbolique franco-allemande entre étudiants des deux pays – sans doute la première – s’est achevée de la même façon, certes sans les dégâts matériels aussi importants mais le sens était le même : plusieurs personnes qui ne devaient qu’avoir de lointains rapports avec le monde étudiants réel, n’ont eu d’autre projet, en passant devant ce qu’il faut malheureusement appeler désormais le « feu poste de douane », que de monter aux mâts portant les drapeaux pour les arracher
>> Résultat : charge de la police qui veillait à l’abri , demi-tour des deux foules de milliers de jeunes qui n’avaient que l’intention de manifester publiquement une rencontre -dans le tourbillon de 68 bien sûr – mais pacifique.
J’en connais qui n’ont dû leur salut qu’en sautant dans le Rhin pour échapper à l’étouffement ou au piétinement. Adieu l’amitié franco-allemande… Adieu l’Europe… pour un temps.
Je souhaite que cette vision sombre de la bonne ville de Strasbourg qui est à la une de toutes les émissions en ce moment ne s’inscrive pas définitivement de la mémoire. La vocation de Strasbourg est plus haute que cela.
tout cela semble malheureusement bien vrai, mais je n'y étais pas!
Pourriez-vous me dire toutefois qui étaient ceux ou celles qui, devant la présence des forces de l'ordre qui s'installaient, se plaignaient, poussaient des cris divers et variés, écrivaient dans les journaux, ne supportaient pas les vérifications d'identité, hurlaient devant les impossibilités de se déplacer dans certaines zones où devaient se rendre les chefs d'état?
Encore une fois, Strasbourg aurait mieux faire de se conduire en adulte responsable et pas en gamin qui tape du pied. S'en souviendront un jour ceux qui décideront du transfert du parlement européen à Bruxelles. Bruxelles, siège de l'Otan, qui reçoit de multiples chefs d'état avec les mêmes précautions et les mêmes ennuis (j'y suis déjà allé à ces moments) sans aucun problème avec ses habitants!
Errare humanum est, mais persevere Strasbourg diabolicum.
Bonjour Olibrius !
* En ce qui concerne la manifestation de 68 - en ce que je sais – sa conception, son organisation n’avaient rien à voir avec celle de l’OTAN. Je ne peux donc que dire ceci en réponse aux différents aspects de votre question :
- Elle émanait, à ma connaissance, de la base, c’est -à - dire des étudiants des 2 pays qui participaient à ce que l’on a appelé plus tard le mouvement (NB Ce n’était pas une adhésion totale, ainsi que cela se passe aussi depuis dans les défilés et grèves touchant l’Ecole et l’Université, nombre de jeunes n’en voulait pas mais était obligé de suivre).
C’était une décision prise par le comité de coordination et un vote d’une AG. Cet acte était issu de la spontanéité collective, à l’instar d’autres expressions publiques. Avec le recul j’ajoute : sans doute avec pas mal de manipulation mais elle n’était alors ni visible ni perceptible aux yeux d’une jeunesse de 17 à 22 - 24 ans.
Les responsables politiques étaient absents.
Est-ce que l’actuel député européen Cohn-Bendit y était ? Mystère - sans doute, car sa parole déferlait sur les groupes un peu partout dans les rues ou dans les amphis.
- A ma connaissance toujours il n’y a pas eu de contrôles, de quelque origine que ce soit.
- Quant à l’expression physique des manifestants, elle était au départ calme, sereine, joyeuse, bien sûr bavarde, sans hurlements ou vociférations à l’égard du pouvoir. Ensuite quand le choc du demi-tour a eu lieu - au début dans l’incompréhension de ce qui arrivait vu la masse et l’éloignement des faits suscitant cette panique grandissante – ce qui primait, c’était je crois, uniquement le sauve qui peut général et le chacun pour soi à ne songer qu’à sauver sa peau !
Plutôt la peur, un certain silence.
* En ce qui concerne le siège du Parlement européen : je ne désespère pas, je souhaite fortement que Strasbourg le garde. – essentiellement parce que cette ville située au cœur de l’Europe a une très longue histoire de paix et de réconciliations : elle en a l’expérience.
Plus le fait, qui va vous paraître étonnant – parce que c’est une ville française : il ne faudrait pas oublié que certains des mêmes étudiants qui défilaient sur le pont de Kehl, venant de Paris, avaient découvert lors de leur inscription que Strasbourg était en France - et non en Allemagne.
Et le temps n’est pas si éloigné où des gens de Paris ou d’autres provinces faisaient la même découverte. Et cela ne tient pas au fait que les Français aient cette fâcheuse réputation d’être quasi nuls en Histoire… Mais ça, c’est une autre histoire.
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