Je m'absente jusqu'au 4 septembre inclus. Nous reprendrons le cours de nos échanges, dont je me réjouis de voir qu'ils s'étoffent, le 5 septembre.
dimanche 30 août 2009
Petits arrangements avec l'histoire, ou les malheurs de Condorcet
Je me promenais il y a peu sur les quais de Seine, rive gauche. Temps splendide, soleil qui faisait resplendir les façades du Louvre, et briller Notre-Dame. J'avais souvent fait cette promenade, et pourtant, un petit monument avait échappé à mon attention. Entre l'Institut et l'Hôtel de la Monnaie, quai Conti, se niche une placette au milieu de laquelle se dresse une statue de bronze. Un bel homme, légèrement cambré en arrière en une allure aristocratique. C'est la statue de CONDORCET, du marquis de CONDORCET. Sur le socle, ne figurent que le nom et les dates de naissance et de mort de grand mathématicien, athée virulent, rationaliste convaincu et républicain : 1753-1794. Rien d'autre. Curieux éloge funèbre pour un philosophe qui s'est empoisonné afin d'échapper à la guillotine. Curieux éloge pour un savant qui a donné son nom à un lycée parisien réputé, et qui à ce titre est un modèle pour les jeunes qui fréquentent l'établissement. Il n'est pas innocent que les responsables du Ministère de l'Instruction Publique aient choisi cet homme comme éponyme. On connaît leur grand amour des Lumières, de la raison, de la république, et de la laïcité. Je ne leur reproche pas. Je me borne à constater.
Or, ce matin, relisant par hasard les notes que j'ai prises à partir du livre de Frédéric LENOIR, "Le Christ philosophe", je vois au passage une citation de CONDORCET. Elle est tiré d'un ouvrage qu'il publia en 1793, à peine un an avant qu'il ne se donne la mort : Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain. On verra dans quelle illusion cet homme, au demeurant génial, vivait, et vers quels progrès sa pensée a conduit :
"Il arrivera donc, ce moment où le soleil n'éclairera plus sur la terre que des hommes libres, ne reconnaissant d'autre maître que leur raison ; où les tyrans ou les esclaves, les prêtres et leur stupides ou hypocrites instruments n'existeront plus que dans l'histoire et sur les théâtres ; où l'on ne s'en occupera plus que pour plaindre leurs victimes et leurs dupes, pour savoir reconnaître et étouffer, sous le poids de la raison, les premiers germes de la superstition et de la tyrannie, si jamais ils osaient reparaître."
Ils ont osé, et c'est lui qui a favorisé, avec d'autres leurs survenues. Il en est mort, sans doute désespéré de s'être fourvoyé. Le soleil s'est levé sur un homme, sur des hommes, sur des centaines d'hommes emprisonnés en raison de leur naissance, de leurs opinions ou de leur religion. Je ne sache pas que CONDORCET se soit élevé contre les exécutions, les exactions des armées révolutionnaires, les procès sommaires. C'est beau la raison au service de l'idéologie. Y aura-t-il au lycée CONDORCET des historiens et des philosophes qui oseront dire à leurs élèves la vérité sur le drame qu'a vécu cet homme ?
Vous l'avais-je point dit ?
Il y a fracture idéologique à La Rochelle. Madame Cécile DUFLOT vient de critiquer vertement madame Ségolène ROYAL qui a déclaré "démagogique, historiquement décalée, etc." la taxe carbone, qu'elle, Cécile, trouve parfaitement justifiée. Ne vous avais-je point dit, il y a quelques billets, qu'il serait très difficile d'organiser des primaires ouvertes "à gauche", comme "à droite", le problème de "la gauche" étant encore plus délicat que celui de la droite ? D'un côté l'écologie (madame DUFLOT), résolument anti-productiviste, de l'autre, un socialisme résolument pour le progrès, et opposé à toute forme de limitation de ce progrès, soit par souci d'en voir partager les fruits par tous, soit par idéologie de "la libération des forces de production". Pour être tout à juste, il faut ajouter ceci : madame ROYAL aurait préféré que l'on promeuve les recherches sur la voiture propre (grande consommatrice prévisible de métaux rares, comme le lithium, et donc de ressources naturelles limitées, il faut le souligner), ce qui atténue quelque peu l'aspect de sa critique, puisqu'elle déporte la solution au problème du gaz carbonique vers l'utilisation d'un autre type de véhicule, non polluant.
En vérité, le débat n'est pas vulgaire. Et il faut reconnaître au gouvernement une rare habileté politique. En s'emparant d'un sujet qui divise l'opposition, il oblige celle-ci à choisir d'accepter ou de refuser une mesure, proposée du reste par un de ses membres, monsieur ROCARD. Mais au-delà de l'aspect un peu politicien de cette initiative, il y a une vraie question. A-t-on le droit de dire : "après nous, le déluge", ou faut-il penser à l'avenir de nos enfants, en modérant nos appétits ?
Il me semble que l'idéologie de la croissance a poussé depuis longtemps les pouvoirs publics à aider les industries consommatrices d'emploi, les industries à s'engager dans une course effrénée à la publicité, les citoyens à vouloir satisfaire tout de suite tous leurs désirs. Il en résulte une intolérance croissante à la frustration. Or, d'autres ont dit, ailleurs et bien mieux, que la frustration est à l'origine de la culture. On risque donc de voir la culture s'étioler dans nos pays européens, et c'est du reste ce risque qui a conduit à créer un Ministère du même nom, chose qui eût été impensable il y a 60 ans.
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samedi 29 août 2009
Islam
L'Islam est devenu la deuxième religion de France. C'est un fait. Les uns le déplorent et le redoutent, d'autres y sont indifférents, des troisièmes enfin s'en félicitent voire l'encouragent.
Je ne reviendrai pas sur le débat du financement des mosquées par les collectivités territoriales. Je partage l'avis de Fourmi sur leur légalité, pas forcément sur leur opportunité.
Que disent ceux qui redoutent l'importance de l'Islam en France ? Certains arguments sont certainement tissés d'intolérance, de xénophobie ou de racisme. D'autres sont plus sérieux. Nous avons, en tant que Français, le droit imprescriptible à garder la culture, les traditions et les valeurs qui ont construit notre patrie. Les revendications identitaires musulmanes (piscines réservées aux femmes, par exemple) ne sont pas acceptables, et il faut donc s'y opposer absolument. Par ailleurs, c'est un trait culturel important, les peuples islamisés ont un rapport au temps qui n'est pas le nôtre, et leur imaginaire est habité de nombreux souvenirs historiques, que ce soit l'occupation de l'Espagne, la défaite des Arabes à POITIERS, les croisades, etc. Certains de leurs imams n'ont pas renoncé à ce qu'ils considèrent être comme un droit, celui de récupérer les pays dont ils ont été chassés. Ce sentiment très fort peu pousser des musulmans, même tolérants, à certains excès verbaux ou comportementaux. Ceci étant, et j'en ai été le témoin à d'assez nombreuses reprises, la présence de musulmans en France est une chance pour l'évangélisation. Et plutôt que d'offrir systématiquement (je dis bien systématiquement, et non pas épisodiquement) l'hospitalité d'une église ou d'un temple au culte musulman, nos églises chrétiennes feraient mieux d'envoyer des missionnaires dans ces milieux. Je connais personnellement trois convertis d'origine musulmane. Ils n'ont rien renoncé de leur origine maghrébine ou proche-orientale, mais ils sont admirables de foi et de charité. Il n'y a pas d'obstacles à cette évangélisation, autre que notre timidité, notre peu de courage (assimilé à la tolérance) et notre peu de foi, à quoi s'ajoute une sainteté de vie toute relative.
Que disent ceux qui ne s'intéressent pas à la question ? La religion est une affaire privée. Tant qu'ils restent dans leurs mosquées, ils ne sont pas gênants. L'argument est un peu court ; quant on sait par ailleurs que 13 % des naissances se font dans des couples mixtes, dont l'un des conjoints est souvent musulman, on peut raisonnablement penser qu'un jour - et peut-être pas si lointain que cela, la religion musulmane pourrait devenir aussi importante que la religion chrétienne. Il en était ainsi au premiers temps de l'Islam dans les pays proche-orientaux christianisés... On a vu aussi à quoi l'intolérance religieuse musulmane peut conduire : expulsion des grecs orthodoxes de la TURQUIE du Sud-Ouest, massacres de arméniens, et plus récement, les assassinats de prêtres catholiques par des fanatiques turcs. Il faut donc, me semble-t-il, être ouvert et fraternel, mais circonspect devant certains prêches et certaines initiatives (création d'associations notamment).
Quant à ceux qui se réjouissent du fait, ils appartiennent à différentes familles de pensée. Les uns se réclament citoyens du monde ; ils oublient un peu vite que leurs concitoyens ne partagent pas forcément leur point de vue, ces citoyens qui désirent légitimement garder à leur patrie les valeurs qu'ils ont reçues de leurs pères. D'autres se réjouissent, et ils se recrutent essentiellement dans les milieux musulmans intégristes. C'est dans leur esprit la revanche divine sur les infidèles que de voir les pays occidentaux peu à peu "envahis" par les adeptes de la vraie foi.
En aucun cas, selon moi, nous ne pouvons considérer avec indifférence la présence massive de l'Islam dans notre pays. Il doit être traité comme le sont toutes les autres confessions, ni plus, ni moins. Et tout croyant qui pratique un islam sincère et juste mérite le respect, mais un respect sans complaisance ni concessions.
vendredi 28 août 2009
Des primaires à gauche comme à droite, pourquoi pas ?
L'idée d'organiser des primaires "à gauche" (j'ai écouté Fourmi) est-elle idiote ? Rien n'est moins sûr. Mais alors il faudrait aussi en organiser "à droite", et ne proposer aux suffrages des Français que deux candidats lors des élections présidentielles.
J'ai déjà eu l'occasion, au moins à deux reprises depuis que j'ai ouvert ce Blog, de faire référence à CONDORCET qui a démontré mathématiquement l'impossibilité d'organiser un vote reflétant l'opinion majoritaire du peuple si on lui offre plus de deux choix. La difficulté des primaires ouvertes vient de l'éparpillement des opinions et théories politiques à droite comme à gauche. Il rend très difficile l'élaboration d'un programme sur lequel tous s'accordent (ce fut du reste le génie de François MITTERRAND que ce Programme Commun). Il y a à gauche, en gros, deux courants idéologiques ; celui qui se réclame du marxisme (O. BESANCENOT, M.G. BUFFET, J.-L. MELANCHON hors PS, B. HAMON, M.-N. LIENNEMAN, etc.) et celui qui se réclame de la social-démocratie (en gros, tous les autres). La localisation des écologistes "à gauche" (merci Fourmi) est une imposture intellectuelle, si l'on veut se donner la peine de réfléchir à leurs propositions. Ils sont résolument contre une économie productiviste, et ceci implique la promotion d'une agriculture extensive, des produits biologiques, des petites unités de production, d'une modération de l'intrusion de la technique dans la vie quotidienne, le choix de la bicyclette et des transports en commun plutôt que celui de la voiture particulière (par quoi ils se rapprochent effectivement des socialistes). Le socialistes se réclamant du marxisme, s'ils sont fidèles à MARX, sont au contraire pour la libération des forces de production, c'est-à-dire le développement des techniques, la production agricole intensive, etc. tout le contraire de ce que veulent les écologistes. Quant aux tenants de la sociale-démocratie, ils se retrouvent un peu dans les propositions du MODEM, et une partie de leurs idées a été reprise par l'actuel gouvernement. Tel est, pour moi, le dilemme idéologique de "la gauche" (ça me démange d'écrire..., non, je ne le ferai pas)
La droite est-elle plus unie ? Certes pas davantage. Entre la droite "libérale" qui pense que la liberté des hommes exige la liberté du marché, et qui par conséquent exacerbe la concurrence, promeut la mondialisation, n'est pas très chaude pour tempérer les folies des marchés financiers, une droite plus traditionnelle - qu'on appelle bêtement conservatrice, comme si la règle absolue qui gouverne les organismes vivants n'était pas justement la conservation des espèces, comme si nous ne devions rien à nos ancêtres, comme si nous ne cessions de nous auto-construire à partir de rien, et enfin une droite de sensibilité plus sociale-démocrate, il est sans doute difficile de trouver des accords de programme, préalables à toute élection.
Il en résulte que ce paraît souhaitable et désirable, est sans doute impossible à réaliser, à moins de l'obliger par la constitution. Mais alors, difficulté supplémentaire, il serait très difficile à un nouveau courant de pensée de prendre sa place, toute sa place, dans l'espace public.
J'avoue ne pas bien voir clair dans tout ça. Mais j'ai entendu madame AUBRY, à qui l'on fait dire n'importe quoi, affirmer qu'avant de choisir un candidat, il serait bon de se mettre d'accord sur des objectifs politiques. C'est le bon sens même.
Affaire à suivre.
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jeudi 27 août 2009
Satellites bis ou les aveux de Moscou
Il vous souvient sans doute que, dans le billet intitulé "Satellites", où je mettais en doute que l'on eût vraiment perdu la trace de l'Artic Sea, j'avais évoqué l'hypothèse d'une affaire d'Etat, qui pourrait bien dissimuler un trafic d'arme, ou un transport de matière fissile, et aussi une rivalité mafieuse.
Je n'avais ni boule cristal ni marc de café, en évoquant ces éventualités. Eh bien, figurez-vous que MOSCOU vient de reconnaître que ce navire, censé avoir disparu entre Baltique et Atlantique, ne transportait peut-être pas que du bois, mais possiblement des armes et/ou du matériel nucléaire. La déduction n'était pas difficile à faire pour qui se refuse à gober tout ce que les médias veulent lui faire avaler. Et puis il y avait ce curieux transport de bois, de la FINLANDE, pays qui a une longue frontière commune avec la RUSSIE, à l'ALGERIE, qui ne semble pas être en pénurie de ce matériau.
On reparlera de cette affaire, et l'on sera étonné et épouvanté de ce que la volonté de puissance pousse des hommes politiques à faire.
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Hypothèse :
Les valeurs d'une société se reflètent dans les modèles qu'elle offre à sa jeunesse, à travers la famille, les enseignants et les médias.
Aurions-nous eu un d'ESTIENNE d'ORVE, une Geneviève ANTHONIOZ-de-GAULLE, un Edmond MICHELET, un Guy MOQUET, un Gabriel PERI, un Paul VAILANT-COUTURIER qui ont risqué leur vie et pour certains l'on perdue, s'ils n'avaient pas été, les uns et les autres, élevés dans l'amour de leur patrie, le désintéressement, le sens de l'honneur, la noblesse de coeur, et dans le chérissement de la liberté ? Aurais-je connu un homme comme mon grand-oncle, déporté à DACHAU après avoir été dénoncé pour faits de résistance, et qui a donné son morceau de pain quotidien à un prêtre du diocèse de SOISSONS, quand il a su qu'un convoi de prêtres venait de cette région ? (Ça, nous ne l'avons appris que le jour de ses obsèques, de la bouche même du prêtre, bénéficiaire de ce geste, qui présidait la messe de funérailles.) Aurais-je eu une grand-mère telle que la mienne, qui à 24 ans, en 1917, a pris le train des troupes pour rendre visite à son mari blessé pendant une attaque allemande à VERDUN, après avoir obtenu une autorisation exceptionnelle des autorités militaires ? Mon grand-oncle et ma grand-mère ont été pour moi des modèles.
Raison de l'hypothèse :
Ce qui m'inspire cette hypothèse, c'est le tapage fait autour de la mort de Michaël JACKSON, les cancans sur Brad PITT et Angelina, la promotion médiatique et publicitaire de Brüno et de son acteur vedette Sacha BARON-COHEN, l'anniversaire de WOODSTOCK, etc. Et c'est la montée de la violence dans la classe d'âge pudiquement appelée "les jeunes", "des jeunes", etc., la dernière illustration étant le braquage d'une banque rue Monge, à Paris, par trois mineurs, dont une jeune fille ravissante (paraît-il).
Plan de travail :
Je proposerais volontiers que l'on fît une étude de contenu comparative des livres et revues destinés à la jeunesse, dans les années 1925-1930 d'une part, et 1985-1990 ou 1990-1995, de l'autre. Comme il est impossible de tout analyser, on peut admettre qu'un échantillonnage de 10 % des productions donne un bon reflet des contenus, à conditions de choisir au hasard les ouvrages et revues. La chose est simple à faire et bien connue des biologistes. On prend une table de permutation circulaire des chiffres de 1 à n, n étant le nombre d'objets total à échantillonner. On déclare que l'on prendra les objets correspondant au 10 premiers pourcent. Puis à l'aide d'une bibliographie (les bibliothèques en disposent), on donne à chaque ouvrage dans l'ordre où il figure, le nombre fourni par la table de permutation. Un exemple simple de cette technique ? Supposez que vous deviez échantillonner 5 objets dans un lot de dix. Vous les numérotez de 1 à 10. Puis vous choisissez une table de permutation, au hasard : par exemple celle-ci : 10, 3, 5, 9, 6, 2, 8, 4, 7, 1. Vous décidez de prendre les objets portant les numéros allant de 1 à 5. La table vous indique que vous étudierez le 2e, le 3e, le 7e, le 8e et le dernier des objets préalablement numérotés. Ainsi, vous n'introduisez aucun biais dans la sélection.
Conclusions :
Je pense que l'hypothèse se trouverait vérifiée. Je crois aussi que, conformément aux travaux remarquables de René GIRARD, l'indifférenciation des personnes véhiculée par le concept flou d'égalité est générateur de violences. Car plus on se ressemble, et plus l'on désire ce que l'autre désire ou possède. Plus l'on est dans la rivalité mimétique. (Il a un I-phone ? Pourquoi pas moi ?). Je pense enfin que les modèles doivent être relativement (je dis relativement) inaccessibles, de façon à tirer vers le haut les intelligences, les coeurs et les esprits, maintenant une juste distance entre celui qui aspire au mieux et celui qui le représente. Gustave THIBON, encore lui, a raison quand il dit :
"Etroitesse à droite, mixture à gauche. Dans tous les domaines, l'homme livré à lui-même ne peut osciller qu'entre ces deux écueils. Et seul, dans tous les domaines, un climat moral et social vitalement chrétien peut lui épargner ce choix amer. Ces abîmes de la révolte et de la détresse humaine, la dureté ascétique de droite les séquestre, la courte folie de gauche les travestit, mais le christianisme les transfigure - A gauche, l'ampleur impure et fiévreuse du marécage où se mêlent l'eau et la terre, les miasmes et la rosée, - à droite la pureté étroite et glacée des monts rigides, - en haut, l'ampleur suprême du ciel pur, tendre et sans fond - du ciel plus large que la plaine, plus haut et plus vierge que les monts !"
Si j'exprime ainsi le choses, c'est pour montrer à mes lecteurs qu'avant d'exposer mes opinions, un peu séchement, certes, j'ai réfléchi, et qu'elles ne sont pas le fruit de mes cogitations éthérées. C'est enfin et surtout pour nuancer ce qui pourrait paraître excessif, assourdissant, inaudible (Ah, Olibrius !). Et d'abord, et avant tout, je milite pour la miséricorde et la bienveillance. Allez, que XYLOGLOSSE me pardonne si je le bouscule un peu, et même un peu beaucoup.
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mercredi 26 août 2009
Le monde hait ce qui est pur
Voici un poème de LI PO, un très grand littérateur chinois qui écrivait sous les TANG. Il a été traduit par François CHENG, et figure dans le livre dont j'ai déjà parlé, consacré à la poésie chinoise classique.
LAVÉ ET PARFUMÉ.
Si tu te parfumes,
ne frotte pas ta coiffe ;
Si tu te baignes,
n'essuie pas ta robe.
Sache-le bien, le monde
hait ce qui est pur.
L'homme à l'esprit noble
cache son éclat.
Au bord d'une rivière
est le vieux pêcheur :
"Toi, moi, à la source
nous retournerons !"
Si tu te parfumes,
ne frotte pas ta coiffe ;
Si tu te baignes,
n'essuie pas ta robe.
Sache-le bien, le monde
hait ce qui est pur.
L'homme à l'esprit noble
cache son éclat.
Au bord d'une rivière
est le vieux pêcheur :
"Toi, moi, à la source
nous retournerons !"
La pointe du poème, c'est bien entendu le "Sache-le bien, le mode hait ce qui est pur".
Et le monde se mire aujourd'hui dans les médias et le show-biz ; deux univers qui nous renvoient de nous-mêmes une image bien peu reluisante. Je relis le livre remarquable, truffé de faits, tous référencés, qui a pour titre "Le terrorisme intellectuel". En son chapitre intitulé : Liberté, Egalité, Sexualité, il démontre comment les médias, allant à l'encontre de ce que disent les démographes, les sociologues, les médecins, les moralistes, laïcs comme religieux, sur le mésusage de la sexualité, déforment la réalité. Voici un petit extrait de cette étude :
"Le 8 mars 1993, le gratin du cinéma français attribue quatre Césars au film de Cyril COLLARD, Les nuits fauves. C'est l'histoire d'un séropositif contaminant sciemment une jeune femme. "Un hymne à la vie, à l'amour étourdissant et flamboyant", estime Jack LANG. L'oeuvre est autobiographique. Tristement autobiographique : le 5 mars, trois jours avant le nuit des Césars, Cyril COLLARD est mort du SIDA. Il avait trente-six ans. [...]
"La prévention du SIDA, poursuit Jacques SEVILLIA, dès lors repose tout entière sur l'apologie du préservatif. Tous les médecins savent que ce n'est pas un moyen fiable à 100 % Mais il ne faut pas le dire : faire l'amour à n'importe quel âge, quand on veut et avec qui on veut est un droit de l'homme. Le professeur Henri LESTRADET, membre de l'Académie de Médecine, fait campagne pour expliquer que le préservatif aggravera la catastrophe : il est accusé de tenir un discours mortifère."
Quand l'abbé Pierre, le 7 avril 1994, évoque la faculté de se préserver de la contamination par la fidélité, il est hué comme le sont les pharmaciens qui refusent de vendre des préservatifs à des adolescents, ou les proviseurs qui ne veulent point installer de distributeurs de préservatifs dans leur établissement, lesquels appareils seront inaugurés en grande pompe, quelques semaines plus tard, par monsieur LANG en personne, alors ministre de l'Education Nationale, dans un Lycée parisien. C'est au cours de l'émission "Tous contre le SIDA" (toutes les chaînes, six heures ininterrompues...) que la foule présente sur le plateau conspue ces hommes et ces femmes courageux qui ne font que dire la vérité.
Le monde hait ce qui est pur. LI PO a raison. C'est pourquoi le monde du show-biz déclare chef-d'oeuvre le film de COLLARD, ce film qui nous montre comment, au nom du droit à jouir, il est possible de tuer une personne que "l'on aime". C'est ce que monsieur LANG appelle un hymne à la vie.
Le monde hait ce qui est pur. LI PO a mille fois raison. C'est pourquoi les hommes et les femmes au coeur droit ont été ridiculisés, au nom du droit à jouir, quand ils ont préféré suivre la voix étroite de leur conscience que le large chemin de la facilité.
LI PO a raison quand il dit que le monde hait ce qui est pur. Mais le monde, c'est nous qui le faisons ce qu'il est. Nous avons le droit, que dis-je le devoir, d'agir selon la vérité, et en consultant notre conscience plutôt que les éditorialistes de Libération, de Marianne ou du Monde.
mardi 25 août 2009
Esprit de corps, passion amoureuse de la force
Je reviens à LANZA del VASTO que j'avais délaissé depuis trop longtemps. Je le fais après avoir entendu XYLOGLOSSE, alias Arnaud MONTEBOURG, pérorer à cors et à cris dans les étranges lucarnes, à propos des primaires au parti socialiste. Et il me revenait ce que dit mon cher barbu à propos de l'esprit de corps ; souffrez qu'en quelques mots je vous résume la chose :
"L'Esprit de Corps, c'est la passion amoureuse pour la force du groupe. Ce n'est pas l'amour de tous, ni d'aucun des membres du groupe ; ce n'est pas l'amour du groupe, c'est l'amour de la puissance du groupe. La passion amoureuse est la recherche d'une puissance aveugle, ou, à son défaut, d'une souffrance obscure, d'une secousse enfin et d'un excès qui procurent la perte de conscience et l'oubli des limites de la personne, extase charnelle et sacrifice instinctif. [...] L'acte de tuer ou de mourir dans la bataille est l'oeuvre de chaire de l'Esprit de Corps et l'homme y atteint en effet à l'oubli des limites de sa personne, à la perte de la conscience à l'extrême pointe de l'exaltation vitale."
In
Les quatre fléaux. Chapitre 4. Puissance et justice. Section 54.
Il me semble qu'une partie de nos maux viennent de cet esprit de corps qui corrompt toute tentative de dialogue, de discussion, de compromis, et qui veut la victoire d'un camp par l'écrasement de l'adversaire de l'autre camp. XYLOGLOSSE est un fou furieux, et un fou dangereux. Il est de la même race que les Conventionnels qui au mépris de la Constitution par eux votée et imposée, en violation permanente des Droits de l'homme, de la morale, et de la saine politique, ont précipité la France dans une tourmente dont elle n'est jamais sortie tout à fait. XYLOGLOSSE est un fauteur de guerre civile en puissance, tant est grande sa haine de tout ce qui ne pense pas comme lui. Il est loin d'avoir l'envergure d'un ROCARD, d'un DELORS, d'une Martine AUBRY, ou même d'un Lionel JOSPIN. Et c'est pourtant à lui, je le crains, que les agités du PS, risquent d'accorder leur confiance. Ah, que Dieu nous préserve d'un tel désastre ! Un bellâtre qui dicte sa loi à notre patrie ? Quelle horreur !
Quand aurons-nous enfin la culture de la discussion, le respect de l'opinion d'autrui, la bienveillance qui fait examiner avec un oeil critique certes, mais ouvert, les propositions de ceux qui ne pensent pas comme nous ? Comment se fait-il qu'un homme qui n'est certainement pas idiot puisse raisonner de manière aussi primaire, si ce n'est par passion du pouvoir ?
Dans un récent billet, j'honorais la mémoire d'Adrien ZELLER, le défunt Président de la Région Alsace. Ce que j'aimais chez lui, c'est son aptitude à "rentrer dans le point de vue de l'autre", à "sauver sa proposition", comme le dit Ignace de LOYOLA, et à trouver des solutions qui puissent trouver l'assentiment de tous ou presque. Comme le disait LANZA, toujours lui, "la beauté du compromis est que quelque chose soit fait".
lundi 24 août 2009
Qumram et Zaccharie
Dans un article intitulé "Les Manuscrits de la Mer Morte", livre dont je n'ai pu hélas trouver l'exacte référence, Aimé FUCHS fait dans une annexe une curieuse remarque, de nature, une fois de plus, à clouer le bec à tous ceux qui, sans le moindre esprit critique, la moindre approche scientifique, renvoient les Évangiles aux oubliettes des légendes et des mythes. Cette annexe, dont je vais vous donner copie, indique que grâce à un manuscrit retrouvé à QUMRAN, on sait quand les prêtres devaient faire leur service au Temple. [J'ai évoqué avec vous cette obligation dans le commentaire intitulé "Vulnérabilité (bis)"]. On sait, par exemple, quand ZACCHARIE, le père de Jean le Baptiste devait être au Temple, lui qui était de la classe d'ABIA. Et l'on va voir que ni la date de la fête de Jean-Baptiste ni la date de la naissance de Jésus ne résultent des cogitations d'une imagination populaire surchauffée, mais découlent tout simplement des faits.
Voilà donc cette annexe :
"Une opinion répandue veut que la date du 25 décembre pour Noël ait résulté de la supplantation, sous Constantin, de la fête romaine du Sol Invictus au solstice d’hiver fin décembre, par le Christianisme. Une autre théorie y voit la christianisation des Saturnales romaines. Ces théories ont été récemment remises en question par la découverte du calendrier de Qumran.
Voici de quoi il s’agit.
Les prêtres auxquels incombait le service du Temple de Jérusalem étaient répartis en vingt-quatre classes sacerdotales (1 Chr. 24.1-28) et chaque classe assurait son service deux fois par an, pour la durée d’une semaine chaque fois.
Zacharie, le père de Jean-Baptiste, était de la classe d’Abia (Lc 1.5) et, dans le récit de Saint Luc, il est précisé que l’ange lui apparut pendant qu’il était de service. Or, un fragment de Qumran fournit des précisions très intéressantes : dans 4Q 320-330, on trouve le calendrier des services du Temple, qui spécifie, pour chaque semaine de l’année, la classe sacerdotale qui doit assurer le service. C’est ainsi que l’on apprend que la classe d’Abia prenait son service, dans la première année du cycle de six ans : le troisième mois de l’année (Siwan), dans la semaine du 8 au 14 ; le huitième à la fin de septembre et il n’y a donc pas lieu d’être surpris d’apprendre que le calendrier byzantin fête la conception de Jean-Baptiste le 23 septembre ; il serait donc né neuf mois plus tard, ce qui nous amène vers le 24 juin, qui est précisément la Saint Jean. Enfin, il est précisé dans Lc 1.26 que l’Annonciation a eu lieu six mois après la conception de Saint Jean ; en d’autres termes, la conception de Jésus a eu lieu six mois après celle de Saint Jean ; il est donc né six mois
après celui-ci ; or, six mois après le 24 juin nous amène vers le 25 décembre. Cqfd."
Les prêtres auxquels incombait le service du Temple de Jérusalem étaient répartis en vingt-quatre classes sacerdotales (1 Chr. 24.1-28) et chaque classe assurait son service deux fois par an, pour la durée d’une semaine chaque fois.
Zacharie, le père de Jean-Baptiste, était de la classe d’Abia (Lc 1.5) et, dans le récit de Saint Luc, il est précisé que l’ange lui apparut pendant qu’il était de service. Or, un fragment de Qumran fournit des précisions très intéressantes : dans 4Q 320-330, on trouve le calendrier des services du Temple, qui spécifie, pour chaque semaine de l’année, la classe sacerdotale qui doit assurer le service. C’est ainsi que l’on apprend que la classe d’Abia prenait son service, dans la première année du cycle de six ans : le troisième mois de l’année (Siwan), dans la semaine du 8 au 14 ; le huitième à la fin de septembre et il n’y a donc pas lieu d’être surpris d’apprendre que le calendrier byzantin fête la conception de Jean-Baptiste le 23 septembre ; il serait donc né neuf mois plus tard, ce qui nous amène vers le 24 juin, qui est précisément la Saint Jean. Enfin, il est précisé dans Lc 1.26 que l’Annonciation a eu lieu six mois après la conception de Saint Jean ; en d’autres termes, la conception de Jésus a eu lieu six mois après celle de Saint Jean ; il est donc né six mois
après celui-ci ; or, six mois après le 24 juin nous amène vers le 25 décembre. Cqfd."
J'avoue que la démonstration me remplit de ravissement. En effet, la théorie du Sol Invictus ou des Saturnales, ne s'appuie sur aucun texte mais sur une interprétation assez peu solide du calendrier liturgique. Si la fête de Noël avait des vertus purement substitutives à la fête païenne du solstice d'hiver, elle aurait lieu de 21 décembre. Les découvertes de QUMRAN viennent donc à l'appui des dires de Luc. Il se peut que Luc ait purement inventé les faits, mais alors il a bien calculé son affaire. Il est plus économique intellectuellement d'admettre qu'il rend compte de faits dont il a eu connaissance, directe ou indirecte. Il est notable qu'il commence son Evangile en précisant qu'il a pris de s'informer de tout avec exactitude avant de l'écrire. Je crois bien qu'il n'a pas menti.
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dimanche 23 août 2009
L'honneur de la politique
Plusieurs lecteurs me demandent de faire un billet sur le Président Adrien ZELLER qui vient de nous quitter. Ils m'ont précédé, car j'avais bien l'intention de dire qui il était, puisque j'avais eu le privilège et l'honneur d'assez bien, et même de bien le connaître dans le cadre de mes activités universitaires. Adrien ZELLER était avant tout un homme intègre, qui voyait large, était dépourvu de tout sectarisme, et avait le sens du bien commun. Je voudrais rapporter ici deux anecdotes dont j'ai été le témoin ou l'acteur.
J'avais été convié par le Président ZELLER à participer à un congrès des élus régionaux et locaux qui se tenait à CAEN. Il avait eu la gentillesse de me faire inviter à un diner réservé aux responsables des associations d'élus de ces collectivités territoriales. J'étais, ma foi, à sa droite, et il avait devant lui Charles JOSSELIN, Président socialiste du Conseil Général des Côtes d'Armor. Et monsieur JOSSELIN de dire en riant : Adrien, tu es le plus à gauche des hommes de droite que je connaisse, tu n'es pas conservateur (les deux hommes se connaissaient, manifestement s'estimaient, et étaient des amis, comme l'était du reste monsieur ROUSSET le Président socialiste de la Région Aquitaine). Monsieur ZELLER partit d'un grand éclat de rire. La réflexion lui semblait dépourvue de sens réel. Il était tout sauf idéologue, et s'il préférait le programme centriste au programme socialiste, c'est pour des raisons sociétales et après une sérieuse analyse économique, comme j'ai eu l'occasion à plusieurs reprises de le constater. Il n'y avait rien à répondre à monsieur JOSSELIN, au demeurant très sympathique.
Je me souviens aussi des réflexions qu'il m'a faites après le vote du paquet fiscal. Il désapprouvait formellement le bouclier fiscal, et il me dit : "Voyez-vous, Philippe, en tant que Président de région, j'ai tant (il me dit la somme) d'indemnité mensuelle. (Elle était tout à fait modique, croyez-moi, pour la responsabilité endossée par son bénéficiaire.) Elle me suffit largement pour vivre. Cette loi est une erreur." Je ne pense pas le trahir en révélant ici ces propos qui montrent bien quel était Adrien ZELLER. Il se contentait de ce qu'il avait et ne désirait rien de plus ; pas de convoitise chez cet homme qui n'avait qu'un mandat, aurait pu être de nouveau ministre ou député, et n'a voulu qu'être utile à l'Alsace.
Il avait compris l'intérêt qu'il y avait à soutenir le développement des biotechnologies appliquées à la santé. Son concours sans faille à l'Association Alsace BioValley que j'ai eu l'honneur de présider pendant huit ans a permis à la Région Alsace d'obtenir un Pôle d'excellence en Innovations thérapeutiques, un pôle à vocation internationale.
Adrien ZELLER a été un grand serviteur de sa région, un homme d'une modestie rare et d'une honnêteté scrupuleuse. Il a été l'honneur de la politique. Et je forme le voeux qu'il puisse être un modèle pour tous ceux qui ambitionnent de servir la chose publique.
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Précision
L'un de mes lecteurs, se méprenant sur le sens de mes remarques, prétend que je pourrais être un très bon porte-parole de la démagogie socialiste quand je dis "Monsieur ou madame Untels, etc...monsieur ou madame DUPONT, moins bien lotis" dans le billet intitulé "Vulnérablité (bis)". En vérité j'ai dû mal m'exprimer. En utilisant deux mots qui ne sont pas de moi, mais de Paul RICOEUR, "mêmeté" et "ipséité", j'aurais noyé le poisson de l'indigne convoitise dans l'eau touble des marais de la gôôôôche, et passé sous silence l'impératif du dixième commandement "Tu ne convoiteras pas le bien d'autrui". L'accusation, même courtoise, est grave.
Je voulais dire, et je le maintiens, que toute décision politique s'inspire des exigences de mêmeté (traité tous les citoyens sur un pied identique, en raison même de leur commune participation à la vie du pays), et d'ipséité (tenir compte des particularités de son métier, de sa situation de famille, de son statut social, de sa santé, etc.). La mêmeté justifie le terme moyen de notre devise nationale : égalité ; et l'ipséité, le premier : liberté.
Je dirai même que tout le débat politique se résume à prendre des décisions qui concilie les deux qualités de tout être humain. Veut-on interdire le foulard à l'école ? Ce n'est pas la laïcité - quoiqu'on prétende - qui promeut cette interdiction, c'est le principe de la mêmeté qui doit être vécue dans l'espace public (l'espace hors de la maison). On prend des mesures spécifiques pour les handicapés ? C'est le principe d'ipséité qui est à l'oeuvre dans ce même espace. La Révolution ne voyait que le premier principe ; le monde contemporain, que le second.
Je dis et redis que le disciple a transcendé cette division. Jésus a montré par ses actes et ses paroles que tout être humain est un fils de son Père, et en même temps, il a regardé d'un infini regard d'amour et de compassion aussi bien le centurion romain, que la cananéenne, que les lépreux, considérés dans leur situation particulière.
Comment aurais-je pu vouloir dire autre chose ? Moi qui, depuis l'ouverture de ce Blog, et à intervalles réguliers et rapprochés, ne cesse de me réclamer de René GIRARD, lequel justement a montré comment le désir mimétique est cause de toute violence. Mais René GIRARD n'a pas dit qu'il fallait mépriser les pauvres et les laisser crever de maladie, de faim, ou de guerres injustes.
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samedi 22 août 2009
De neige, d'or et d'azur
Je suis allé hier au Musée GUIMET. Je le fréquente très régulièrement. C'est sans doute l'un des plus beaux musées d'Art Asiatique du monde. Le Musée exposait temporairement dans la rotonde du quatrième étage des vases de Sèvres peints par CHU TEH-CHUN, artiste chinois qui vit à Paris depuis 1955 et est devenu le premier Chinois à être reçu à l'Académie des Beaux Arts. Et comme on comprend le choix de ses pairs.
Il y avait là une cinquantaine de vases, tous du même type (SR22, pour le préciser), en porcelaine de Sèvres, diversement peints de grands traits bleus et tachés d'or, et pour certains d'entre eux, colorés en plus de vert et d'ocre, savemment disposé. Quelle beauté ! Fait surprenant, il s'agit de motifs abstraits, mais avec des traits vivants, non point épais, mais déliés, et des taches disposés avec un art consommé, dans un ordre, un équilibre tel que l'on croit voir des paysages monochromes, typiquement chinois, s'animer sur les panses élégantes de ces vases. Il règne dans cette rotonde une lumière et une paix prenantes ; aucun visiteur ne parle, tant le sacré, la prière, la méditation semblent baigner la salle.
Il vous souvient sans doute que j'avais produit, il y a peu, un petit billet intitulé "Hymne à la peinture", et je faisais bien la distinction entre les artistes modernes et contemporains qui habitent leurs toiles abstraites de prière ou d'esprit et les faiseurs qui filoutent le bourgeois en flattant son ignorance et son peu de goût. J'avais cité MANNESSIER et Nicolas de STAËL comme deux de ces peintres de génie dont les compositions élèvent l'âme. Eh bien figurez-vous que CHU TEH-CHUN, qui avait été formé à l'Académie des Beaux-Arts de HANGZHOU dans les années 1935 et y avait étudié l'art chinois figuratif, figurez-vous, disais-je que c'est la découverte de l'oeuvre de Nicolas de STAËL en 1956, qui a poussé cet artiste à "[libérer] en lui des énergies qu'il portait au plus profond de son être" (In Notice de présentation de l'exposition). Ainsi tout se comprend. Les génies parlent aux génies. Eux seuls peuvent se comprendre. Nous, les amateurs, ne pouvons que goûter ces oeuvres sans jamais pouvoir les créer.
Il est vraisemblable que la découverte de Nicolas de STAËL par CHU TEH-CHUN a été favorisée par l'histoire dramatique et singulière du premier, qui a mis fin à ses jours, en 1955. Il avait 41 ans.
Cette exposition s'appelle "De neige, d'or et d'azur". Elle est bien nommée. Si vous en avez le temps, ne manquez pas d'y faire un tour.
Vulnérabilité (bis)
Le texte de ma filleule Marie, a rebuté deux lecteurs qui l'ont dit dans leurs commentaires. Je vais m'efforcer de l'expliquer. Il m'est plus facile qu'à eux de le comprendre car je dispose de la totalité du texte de la conférence. Mais les remarques que je vais faire me sont strictement personnelles et exprime la compréhension que j'ai de cette conférence effectivement d'abords difficiles.
Alors je commence.
La vulnérabilité est une caractéristique spécifique de l'espèce humaine. A ce titre elle est une donnée anthropologique universelle si l'on admet que tous les hommes appartiennent à une seule et même grande famille. La vulnérabilité est objectivement observable et subjectivement ressentie.
Observable ? De tous les petits d'animaux, le petit d'homme est le seul qui soit totalement dépendant de ses parents pour sa survie. Abandonné à lui-même, un nouveau-né ne tarderait pas à mourir. Il n'a aucun programme, aucune stratégie de survie dans un monde qui ne lui est ni hostile, ni amical, mais tout simplement neutre et indifférent.
Ressentie ? Oui et à plusieurs niveau. Combien de comportements névrotiques, de phobies sont-ils dus à ce qu'on appelle justement des "blessures d'enfance" (tiens ! tiens! voilà le mot blessure). Névroses et phobies sont ressenties sans que le sujet en connaisse consciemment l'origine. Mais il y a aussi un sentiment conscient de fragilité, chez les vieillards qui sentent la mort approcher, ou chez tout être humain aux prises avec les forces de nature déchaînées : tremblements de terre, tornades, raz-de-marée, inondations, incendies de forêts, etc. Bien d'autres circonstances encore suscite cette prise de conscience. Un même sentiment de fragilité peut naître devant un amour déçu, une incapacité à faire, à comprendre. On voit par là que la vulnérabilité n'est pas si simple à définir, et que le concept, s'il est universellement admis, est loin de l'être avec la même signification pour ceux qui s'en emparent.
C'est ce double aspect de la vulnérabilité, objectif et subjectif, qui domine la scène où se déroule la vie humaine. Pourquoi ce concept devrait-il être critique et normatif, notamment dans le domaine politique ? Il faut éclairer cette affirmation. Critique, il l'est en effet. C'est à l'aune de la vulnérabilité humaine fondamentale qu'il faut juger les décisions politiques. Et c'est pourquoi l'on se scandalise des massacres de femmes, d'enfants, de vieillards "sans défenses" (c'est le mot souvent utilisé pour stigmatiser ces abominations), c'est pourquoi, avec une hâte suspecte d'ailleurs, on a glosé sur les effets de la canicule : quoi, on laisse des vieillards isolés, sans aide, mourir déshydraté, dans la solitude. On pourrait multiplier les exemples. La vulnérabilité fonde la société et le vivre ensemble. Et c'est pourquoi le concept est normatif, qu'il s'impose comme une norme. Est humainement inacceptable toute loi, toute mesure politique, qui ne prend pas en compte cette propriété fondamentale de l'être humain. Or la philosophie des Lumières, qui a tellement influencé la mentalité moderne et contemporaine, nous a conduit à une impasse, celle de l'autonomie des individus, de leur autoconstruction. Nous nous construisons, sous le regard de l'autre, et dans une interdépendance absolue avec lui.
L'impasse est facile à comprendre. Ces penseurs n'avaient pas fait la différence entre la "mêmeté", qui fait des êtres humains des membres à part entière de la même famille, et celle de "l'ipséité", qui fait de chaque être humain un être unique, un mystère pour les autres comme pour lui, une telle unicité, que même la nature l'a sanctionnée par l'individualité "immunologique", cette fameuse individualité qui rend les greffons si rarement compatibles, et en tout cas, jamais totalement compatibles.
Toute la question du politique est donc de tenir compte à la fois de la mêmeté et de l'ipséité dans les décisions que les pouvoirs publics sont amenés à prendre. Vous remarquerez, du reste, que toutes les critiques de l'opposition, actuelle comme passée, reprennent toujours à leur compte et alternativement l'un de ses deux aspects de la personne humaine. Le soutien aux sans-papiers est fondé sur le principe de mêmeté, la progressivité de l'impôt, sur celui de l'ipséité : monsieur, madame untels ont une meilleure situation que monsieur ou madame DUPONT, en raison d'études plus brillantes, de capacités supérieures. Cette particularité doit être mise au service des moins bien lotis. Et la redistribution qui en découle repose sur le principe de mêmeté.
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vendredi 21 août 2009
Sur la vulnérabilité
Les diverses remarques et commentaires - et je me félicite qu'ils se multiplient - m'amènent à constater que mes interlocuteurs s'acceptent comme vulnérables, tout comme moi, du reste, qui n'aie jamais songé à dissimuler mon nom sous un pseudonyme, (pas plus que les tâtonnements de ma réflexion, quand bien même je pourrais apparaître comme un peu raide ou tranché dans mes opinions), et qui par conséquent accepte de m'exposer aux critiques.
J'ai le bonheur de compter parmi mes filleules, Marie, la fille de mon meilleur ami. Marie est normalienne, agrégée de philosophie (à 23 ans !), et prépare une thèse sur la vulnérabilité. Je vous livre ici le début d'une conférence qu'elle a récemment donnée, avant de commenter quelque peu ce que semble être la vulnérabilité.
"La catégorie de vulnérabilité est au centre de la critique des théories traditionnelles de la justice et de la morale élaborée par Martha Nussbaum et Joan Tronto. Celles-ci déploient une anthropologie de la vulnérabilité qui fait de cette catégorie un trait de toute existence humaine, et se fondent sur cette anthropologie pour réviser nos conceptions de la vie bonne et de la société juste. Je voudrais me pencher sur ces tentatives – et surtout sur celle de Nussbaum – pour expliciter l’intérêt politique d’une réflexion sur la vulnérabilité mais également en indiquer les difficultés épistémologiques.
Pour résumer les choses rapidement, il me semble que cet intérêt politique provient du fait que la catégorie de vulnérabilité peut jouer un rôle à la fois critique et normatif : un rôle critique au sens où elle permet de mettre en question une certaine « idéologie de l’autonomie » et, conjointement, le contexte social et politique qui la produit et lui permet de se maintenir ; un rôle normatif au sens où elle permet d’élaborer une conception différente de la justice et de la coopération sociale, intégrant pleinement les valeurs engagées dans les pratiques de care.
Cela dit, pour remplir effectivement ce double rôle, la notion de vulnérabilité semble demander à être précisée, et c’est là où les problèmes épistémologiques surgissent : à première vue, à la centralité de la catégorie semble en effet correspondre sa sous-détermination, le flou qui entoure ses usages et qui en compromet le caractère opératoire. Je voudrais montrer ici qu’on aurait tort de faire de cette sous-détermination un « manque », ou un « défaut » qui justifierait la disqualification de la notion. Plus précisément, il me semble que la catégorie de vulnérabilité, tout en renvoyant à un trait de l’existence humaine, à une propriété essentielle et donc universelle, ne peut pourtant être saisie qu’indirectement, à travers des manifestations et des pratiques particulières, qui varient d’un contexte socio-historique à un autre, voire même d’un individu à un autre. Autrement dit, la vulnérabilité pure n’apparaîtrait jamais comme telle, mais il serait nécessaire de la postuler pour rendre compte d’un certain nombre de phénomènes moralement et politiquement problématiques dont elle serait la condition de possibilité."
Pour résumer les choses rapidement, il me semble que cet intérêt politique provient du fait que la catégorie de vulnérabilité peut jouer un rôle à la fois critique et normatif : un rôle critique au sens où elle permet de mettre en question une certaine « idéologie de l’autonomie » et, conjointement, le contexte social et politique qui la produit et lui permet de se maintenir ; un rôle normatif au sens où elle permet d’élaborer une conception différente de la justice et de la coopération sociale, intégrant pleinement les valeurs engagées dans les pratiques de care.
Cela dit, pour remplir effectivement ce double rôle, la notion de vulnérabilité semble demander à être précisée, et c’est là où les problèmes épistémologiques surgissent : à première vue, à la centralité de la catégorie semble en effet correspondre sa sous-détermination, le flou qui entoure ses usages et qui en compromet le caractère opératoire. Je voudrais montrer ici qu’on aurait tort de faire de cette sous-détermination un « manque », ou un « défaut » qui justifierait la disqualification de la notion. Plus précisément, il me semble que la catégorie de vulnérabilité, tout en renvoyant à un trait de l’existence humaine, à une propriété essentielle et donc universelle, ne peut pourtant être saisie qu’indirectement, à travers des manifestations et des pratiques particulières, qui varient d’un contexte socio-historique à un autre, voire même d’un individu à un autre. Autrement dit, la vulnérabilité pure n’apparaîtrait jamais comme telle, mais il serait nécessaire de la postuler pour rendre compte d’un certain nombre de phénomènes moralement et politiquement problématiques dont elle serait la condition de possibilité."
Tout le reste de la conférence est de la même rigueur. Exceptionnel.
Il me semble que l'homme, dès son apparition sur la terre, a eu le sentiment de sa vulnérabilité. J'entends par là, de sa faiblesse, de ses limites, de sa fragilité, de la facilité extrême, qui est celle de tout homme, qu'il a d'être blessé, au propre comme au figuré, par la nature comme par autrui. A mon avis, c'est ce sentiment, initialement confus, de vulnérabilité qui a poussé l'homme à faire société, selon le principe bien cristallisé : "L'union fait la force". Selon moi toujours, la société est nécessaire pour qu'apparaisse la violence mimétique si bien analysée par René GIRARD. Elle est donc postérieure à la prise de conscience de la vulnérabilité. Mais qui dit société, dit possibilité de se comparer à autrui, de désirer ce qu'il désire, d'où les violences, et la mise en route du processus victimaire, dès qu'apparaissent des inégalités, pas n'importe lesquelles, des inégalités qui créent des rapports de force, suscite la soumission contrainte, et parfois conduit à l'esclavage, toutes situations qui peuvent paraître désirables comme elle est bonne pour celui qui en est le bénéficiaire.
C'est sans doute la raison qui a poussé tant de sages, dans toutes les cultures, a énoncer la Règle d'or, la règle cardinale de la vie en commun, dans une société bonne et juste : "Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'il te fasse", reprise de manière positive par Jésus : "Fais à autrui ce que tu voudrais qu'il te fasse". Jésus se place ici dans le registre de la relation, et non de la prestation économique ou sociale. Et il prend comme modèle de relation, celle qu'il entretient avec son Père. On voit par là que Jésus n'est pas un sage comme les autres, car il sanctionne la vérité de ses paroles par des signes (guérisons, exorcismes, résurrection de morts), et sa parole est performative ; elle fait ce qu'elle dit. Bien entendu, je comprends que l'on puisse borner son adhésion à Jésus, à l'adhésion aux seuls textes, sans conclure à leur vérité historique. Mais ce que disent les Évangiles, c'est bien cela, et rien d'autre. Libre à chacun d'en tirer pour lui les conséquences.
Si nous étions convaincus de notre vulnérabilité, au lieu de la dissimuler derrière des masques, nous l'accepterions, et nous pourrions alors faire de la compassion pour autrui et pour la nature, le moteur de nos actions et de nos décisions.
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jeudi 20 août 2009
Propos minuscules
Voilà deux jours, je traversais le pont qui, de la Porte de Saint-Cloud, va vers le Pont du même nom. Soleil de plomb, chaleur étouffante. Je m'efforçais de rejoindre au plus vite le jardin ombreux qui borde l'Avenue Ferdinand Buisson. J'aperçois à quelques deux cents mètres, un homme âgé, mais encore alerte ; bientôt nous allons nous croiser. Et de fait nous nous croisons. L'homme a de beaux cheveux blancs, une allure et une marche d'une grande noblesse. Sur sa chemise entrouverte, il a passé une veste légère, de tissu sombre cependant. Il a le visage buriné par le soleil. Manifestement il est originaire d'Afrique du Nord. Au revers de la veste, quatre rubans : médaille militaire, valeur militaire et deux autres que je ne peux pas identifier. Nos regards se croisent. Je lui fais un clin d'oeil, un sourire, manifeste sans doute mon étonnement ; il fait quelques pas, puis se retournant m'appelle et semble demander les raisons de ma surprise :
-Je regardais vos décorations. Vous en avez beaucoup !
-Oui. J'ai fait l'Indochine. J'ai pu en rentrer vivant, mais tant de camarades sont morts là-bas !
-Monsieur, je vous félicite pour votre courage. Bonne soirée.
Brève mais inoubliable rencontre. J'ai aimé le sourire un peu las de cet homme, son maintien, sa dignité, sa gentillesse. Il a donné à sa patrie une partie de sa vie. Il est juste, qu'en retour, il soit honoré et reçoivent d'elle le juste dédommagement de son engagement. Je ne le reverrai sans doute jamais plus ce modèle de soldat des troupes dites "coloniales", à qui la France doit tant pour sa Liberté et son Honneur. Qu'on ne les oublie jamais ces hommes-là, qu'ils restent dans nos mémoires et dans nos coeurs, et qu'ils ne meurent point dans l'amertume née de notre ingratitude.
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mercredi 19 août 2009
Que faut-il faire ?
Dans un échange que nous avons eu à propos de mon billet intitulé "Les regrets de Richelieu", Olibrius met en cause, sinon la bonne foi, du moins l'utilité de l'action caritative conduite par diverses organisations non gouvernementales ou diverses communautés religieuses. Ses remarques, marquées d'une ironie pointue, soulèvent des questions tellement importantes que je reviens "publiquement" sur le sujet.
Je vais le faire par un détour, celui du bon Samaritain (Luc 10, 29-36). Donc, un prêtre, puis un lévite passent devant l'homme que des brigands ont roué de coups, et laissé pour mort sur le bord du chemin, baignant dans son sang. Non seulement ils ne s'arrêtent pas, mais ils se détournent du malheureux qui gémit. Oh, ce n'est ni par indifférence, ni par égoïsme qu'ils ont ce comportement ! Non. Ils ne veulent tout simplement pas contracter d'impureté rituelle au contact du sang. Comme ils descendent de Jérusalem vers Jéricho, ces ministres du culte ne peuvent invoquer le service qu'ils doivent accomplir dans le Temple, en des époques rigoureusement déterminées. Ils sont obsédés par le respect de la Loi dans ses aspects les plus casuistiques (voir le billet "Il y a loi et loi"). Passe un Samaritain. Il fait partie de ces schismatiques, et mêmes hérétiques, que les juifs méprisent et détestent, de ces hommes qui adorent sur le mont GARIZIM et ont blasphémé le Béni en introduisant dans le Lieu déclaré saint, quelques idoles locales. Lui ne s'embarrasse pas de questions rituelles. Il soigne le malheureux, le panse, le transporte dans une auberge, paye des arrhes au tenancier et lui promet de régler le solde des dépenses au retour de son voyage. Mais la pointe de la parabole est dans la question que pose Jésus à son interlocuteur, un légiste, qui voulait lui clouer le bec : "Lequel de ces trois à ton avis, s'est montré le prochain de l'homme tombé aux mains des brigands ? ".
En général, on se méprend sur le sens de la question. On y comprend que le blessé est le prochain, négligé ou reconnu par les passants. Il n'en est rien. Le prochain, pour Jésus, est celui qui s'est rendu proche du pauvre homme.
Alors je vais droit à la conclusion ! Ce sont les hommes et les femmes qui se rendent proches des malheureux, des pauvres, des affamés qui sont leurs prochains, et non le contraire. En allant au Togo pour y créer un Centre Médical (à SOKODE), des membres de la Communauté du Puits de Jacob (voir le site web) sont devenus les prochains de la maman dont l'enfant est en train de dépérir de malnutrition, de cet aveugle que l'onchocercose a jeté dans la nuit, de cet homme qui s'est fracturé le bras en tombant d'un échafaudage, (ou de ce qui en tient lieu), de ces grelottants de fièvre que ronge le paludisme. Tout le reste, les questions politiques, idéologiques, géostratégiques, n'est que littérature. C'est très exactement ainsi qu'il faut faire. Et c'est ainsi que Jésus à répondu à la question du légiste : "Maître, que faut-il faire pour avoir la vie éternelle ?"
mardi 18 août 2009
Rectificatif
Un de mes lecteurs me signale que la Fédération des Parents d'élèves de l'École Publique ne se réclame pas d'une sensibilité de gauche. Une partie de mon argumentation tombe donc, et je prie le président de cette association de bien vouloir accepter mes excuses pour cette méprise. Il n'empêche que les réactions des parents soulignent combien l'organisation de l'accueil des enfants, les jours de grève des enseignants est une nécessité, abstraction faite des nécessités médicales.
Aidez-moi !
Monsieur Luc CHATEL, ministre de l'Education Nationale a pris la décision de faire fermer les classes des écoles dont plus de trois élèves auraient présenté les signes de la grippe au cours d'une semaine. Sur le plan strictement scientifique, c'est une mesure tout-à-fait propre à contenir l'extension de l'épidémie. Il est prouvé, par les enquêtes épidémiologiques notamment, que les communautés scolaires ou enfantines sont des lieux propices à la contamination. On ne peut certes en déduire que l'épidémie sera jugulée, mais on peut espérer qu'elle progressera plus lentement et atteindra un moins grand nombre de sujets.
C'est pourquoi j'ai été absolument stupéfié d'entendre que le Président de la Fédération des Parents d'Elèves de l'École Publique, dont je crois savoir qu'elle a une sensibilité de gôôôôche, se demandait comment les parents allaient faire pour garder les enfants, en cas de fermeture de l'école. Nous aurions aimé que cette fédération eût la même réaction quand les pouvoirs publics ont instauré le service d'accueil obligatoire des enfants, en cas de grève des enseignants. Mais il paraît qu'il s'agit là d'un cas différent aux yeux des responsables de cette fédération. Il faut être aveugle pour ne pas comprendre (a) que la mesure de fermeture des classes en cas de risque d'épidémie scolaire est une mesure de bon sens ; (b) qu'elle suscite bien des difficultés aux parents des enfants qui ne peuvent aller à l'école ; (c) que le service d'accueil en cas de grève des enseignants, lui aussi est une mesure de bon sens ; (d) que l'école n'est pas une garderie, mais un lieu où se transmettent des savoirs et des comportements de sociabilité.
Je proposerais volontiers que les responsables de la Fédération des Parents d'Elèves de l'École Publique, qui par bonheur n'auraient pas été atteints par ce méchant virus, organisent eux-mêmes l'accueil des enfants exempts de signes de grippe, en prenant sur leurs RTT ou leurs vacances. COLUCHE eût été encore de ce monde, qu'il aurait dit : "En voilà une idée qu'elle est bonne !"
Il me paraît, en effet, qu'il y a grande incohérence dans les propos de ces responsables. Comme je ne comprends pas bien, je crie : "Aidez-moi".
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lundi 17 août 2009
Satellites
Au temps des satellites espions qui peuvent détecter du haut du ciel des objets de quelques dizaines de centimètres de long, à qui fera-t-on croire que l'Artic Sea avait disparu ? Les médias en effet parlent de "disparition", comme si les radars côtiers ou les vedettes rapides ou les écoutes radio étaient devenus aveugles, paralysées ou sourdes.
Il faut donc se demander pourquoi ce bateau battant pavillon maltais, armé par une société finlandaise (la Sol Chart Management), mais disposant d'un équipage russe, s'est tout d'un coup évaporé devant les yeux ébahis de l'opinion publique. Passons sur le goût des médias, en veine de nouvelles captivantes, et qui essayent de nous faire croire que le triangle des Bermudes s'est déplacé dans la Baltique. Ce navire, officiellement, avait chargé du bois en Finlande et il se dirigeait, théoriquement, vers un port algérien où il devait livrer cette cargaison.
Il aurait été attaqué, à une ou deux reprises, par des hommes cagoulés. Il aurait été dérouté, et serait localisé du côté des îles du Cap Vert, encore que d'autres sources le prétendent revenu dans le golf de Gascogne. Pourquoi ces mystères, pourquoi ce flou, pourquoi ces mensonges venus des plus hautes instances de l'information ?
On se demande comment il est possible que des pêcheurs égyptiens puissent capturer huit pirates somaliens alors qu'aucune marine de guerre, pas même la russe (dont on avait un instant évoqué l'intervention) n'ait été en mesure d'arraisonner le navire détourné.
Il me semble que l'affaire est plus grave qu'il n'y paraît. Une rançon d'un million et demi de dollars a été réclamée dit Jan NYHOLM, un responsable du Bureau National d'Enquête finlandais. Il n'en dira pas plus pour ne pas mettre l'enquête en péril, rien sur la date, rien sur le lieu ou "sur des choses comme ça" (sic). Selon moi, les responsables finlandais, russes, anglais, français, américains, algériens et d'autres, sont parfaitement au courant des tenants et aboutissants de cette affaire.
Alors ? Trafic d'armes déjoué par les victimes potentielles de ce honteux commerce ? Transport suspect de matières nucléaires ou fissiles ? Règlement de compte entre mafieux russes ? Tentative de faire pièce à des mouvements islamistes d'Afrique du Nord ? On peut tout supposer. Et je trouve que le montant de la rançon est assez mince pour un bateau comme l'Artic Sea.
Il m'apparaît que l'on reparlera plutôt qu'on ne le croit de cette histoire invraisemblable. Deux choses me semblent avérées : il ne s'agit pas d'un acte de piratage comme il en sévit au large de la Somalie ; c'est une affaire d'Etat.
On pourrait toutefois envoyer un astronautes dans l'espace afin qu'il vérifie le bon fonctionnement des satellites espions.
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dimanche 16 août 2009
Les regrets de Richelieu
Tout à fait à court d'idée ce matin, je me suis plongé avec délice dans la lecture rapide d'un livre, selon moi capital, qu'écrivit BERNANOS vers la fin de son exil volontaire au Brésil et dont j'ai souvent parlé peu après l'ouverture de ce Blog : je veux parler de La France contre les robots. BERNANOS avait quitté son pays natal, amer et dégoûté des honteux accords de MÜNICH qui préfiguraient la défaite et la honte momentanée de notre patrie. Ah ! Il faudrait tout citer, tant la pensée de ce livre est roborative, juste, émouvante.
BERNANOS nous y apprend qu'en 1772, l'Anglais DALLINGTON définit la France comme une vaste démocratie, et que RICHELIEU, tout aussi centralisateur que le tyran ROBESPIERRE (à qui l'on a eu le front de dédier une station de métro !) disait avec regret : "Toute ville chez nous est une capitale. Chaque communauté française, en effet, ressemble à une famille qui se gouverne elle-même, le moindre village élit ses syndics, ses collecteurs, son maître d'école, décide la construction des ponts, l'ouverture des chemins, plaide contre le Seigneur, contre le curé, contre un village voisin." Ce point de vue est intéressant à plus d'un titre. D'abord parce qu'il montre combien est profond le mensonge d'Etat qui prétend que l'Ancien Régime était tyrannique ; c'est une imposture dont nous ne sommes pas encore remis, si jamais nous le pouvons un jour. Ensuite par ce qu'il soulève une question que BERNANOS n'a pas explicitement posée.
Paradoxalement, en effet, BERNANOS indique que la Révolution de 1789 à été la "Révolution de l'Homme, inspirée par une foi religieuse dans l'homme". Mais il explique que cette flamme a été vite étouffée par la tyrannie de la Convention. Et il ajoute : "En 1789, les élites sont à leur place, c'est-à-dire à l'avant-garde. Cent cinquante ans plus tard, les élites seront à l'arrière, à la traîne, et elles trouveront la chose parfaitement naturelle ; c'est au peuple qu'elles prétendront laisser le risque, la recherche. Des classes dirigeantes qui refusent de bouger d'un pouce, que pourrait-on imaginer de plus absurde ? Comment diriger sans guides ? Les classes dirigeantes refusent de bouger, mais le monde bouge sans elles."
Que s'est-il donc passé ? Le reniement absolu de ce qui fit la France pendant des siècles - un monument de goût, de culture et de civilisation ; elle faisait la mode de l'Europe entière ; on y venait pour apprendre sa langue ; s'imprégner de sa culture - est advenu par l'irruption du soi-disant (je ne dis pas prétendu) règne de la raison, par celui non moins imbécile de la loi, de l'Etat, de la Nation, par le développement prodigieux du machinisme, du salariat, du prolétariat, de l'esclavage de la conscription, de l'arrogance de la bourgeoisie enrichie par la spéculation sur les biens nationaux. Et nous avons aujourd'hui ce que nous avons mérité par notre apostasie du passé : des banquiers qui se tapissent le nombril de bonus, des industriels qui délocalisent à tour de bras, des marchands du temple qui ruinent les industries et artisanats de leur patrie par des importations massives de produits étrangers, souvent chinois, toujours ou presque de mauvaise qualité.
Les millions de touristes qui visitent PARIS ne le font pas par amour de la Révolution, mais par admiration pour ce que notre pays a produit de mieux depuis des siècles : de l'hôtel de Cluny, à celui des Invalides, de Notre-Dame à la Place de la Concorde. L'Opéra-Bastille et le grand bazar du Centre Pompidou font bien pâle figure à côté de ces chefs d'oeuvre...
N'oublions jamais ceci : les spécialistes des révolutions et des guerres ont montré que ces phénomènes violents aboutissaient toujours à instaurer des régimes politiques plus tyranniques que celui qu'ils prétendaient détruire : c'est vrai de notre Révolution, de la Révolution russe, de la Chine maoïste, de l'Allemagne nazie. Et je mets au défi qui que ce soit de me prouver le contraire.
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samedi 15 août 2009
Hymne à la peinture
Il est difficile de faire plus beau que les peintures monochromes produites par les peintres chinois, sous la dynastie des SONG notamment. Les peintres, les penseurs, les calligraphes chinois ont abondamment écrit sur la peinture. François CHENG a traduit de nombreux passages de ces textes qui souvent traduisent merveilleusement la force de ces oeuvres. Voici un extrait traduit par François CHENG d'un ouvrage de CHU CHING-HSÜAN qui date de la dynastie des T'ANG : il a une portée universelle, et on peut l'appliquer à toute oeuvre inspirée :
La peinture est sacrée. Elle scrute ce que le Ciel et la Terre ne montrent pas et révèle ce que le soleil et la lune n'éclairent pas. Au moyen d'un menu pinceau, le peintre apprivoise les dix mille êtres ; et se servant de son coeur, il appréhende l'espace sans limites. Grâce à cet art [...], le visible se trouve représenté, l'invisible même prend forme
In
François CHENG.
Souffle-Esprit. Textes théoriques chinois sur l'art pictural. Collection Points/Série Essais, N°545. Éditions du Seuil, Paris, 1989.
Quelle immense civilisation que la civilisation chinoise ! Quels trésors de sagesse, de beauté, d'ingéniosité ! Comme j'aime ce pays et ses habitants. Je n'ai pas le bonheur d'avoir visité l'un, rencontré les autres. Mais il me semble comprendre que l'âme de ce peuple, qui n'est sans doute pas très religieux, est infiniment ouverte aux choses de l'esprit. Si vous aimez la peinture chinoise, il n'est plus temps de visiter l'exposition que lui a consacrée le Musée CERNUSCHI. Mais le deuxième étage du Musée GUIMET présente des trésors inégalés ; ils sont périodiquement changés, pour ne pas les soumettre aux injures de l'air ; au premier étage, vous pouvez voir aussi d'admirables peintures bouddhiques, ramenées de DUNHUANG (TOUEN HOUANG) par Paul PELLIOT. On est là bien loin des barbouillis contemporains que nos TRISSOTINS portent aux nues, sans bien voir qu'ils ne disent rien, ni de l'âme de l'artiste ni de celle du monde. Ce n'est pas condamner l'art contemporain que de dire ainsi les choses : un MANESSIER, un Nicolas de STAEL, par exemple, ont produit des oeuvres abstraites de toute beauté. Mais c'est qu'ils les habitaient soit de prières soit d'esprit et qu'il n'y transparaissait pas l'esprit de lucre suintant des cimaises de tant de galeries parisiennes.
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Il y a loi et loi
Il est intéressant de lire, sous la plume de l'esprit supérieur que fut CICERON, l'avis que voici : "Il existe une loi vraie, celle de la droite raison, conforme à la nature répandue à tous les êtres, toujours d'accord avec elle-même, non sujette à périr, qui nous rappelle impérieusement à remplir notre fonction, nous dit la fraude et nous en détourne [...]. Cette loi n'est pas différente à Athènes et à Rome, autre aujourd'hui, autre demain, c'est une seule et même loi immuable, qui régit toutes les nations et en tout temps." (De Republica, 3, 22).
Non moins intéressant, l'avis de ce génie que fut PASCAL : "Pourquoi me tuez-vous ? Eh, quoi ! ne demeurez-vous pas de l'autre côté de l'eau ? Mon ami, si vous demeuriez de ce côté, je serais un assassin, cela serait injuste de vous tuer de la sorte, mais puisque vous demeurez de l'autre côté, je suis un brave et cela est juste." (Pensée III, article IX, dans l'édition publiée en 1803 chez Antoine Augustin Renouard, à Paris). Il dit encore : "Les états périraient, si on ne faisait souvent plier les lois à la nécessité. Mais jamais la religion n'a souffert cela, et n'en a usé. Aussi il faut ces accommodements ou ces miracles. Il n'est pas étrange qu'on se conserve en pliant, et ce n'est pas proprement se maintenir et encore périssent-ils enfin entièrement : il n'y en a point qui ait duré quinze cents ans. Mais que cette religion [PASCAL veut parler du christianisme] se soit toujours maintenue et inflexible, cela est divin."
Ces deux textes mettent bien en évidence le caractère apodictique ("qui a une évidence de droit et non de fait" dit le Larousse) de certaines lois, et l'aspect casuistique de certaines autres ("subtilité complaisante", nous dit le même Larousse, de la deuxième acception du terme ; on peut entendre ici et de préférence, "adapté à des situations particulières").
Il me semble que cette distinction est capitale et doit être saisie par tous les législateurs. Oui, on peut dire qu'il y a des lois de circonstance ; hélas elles sont trop nombreuses, spécialement en France. Mais on peut dire aussi qu'il y a des lois nécessaires et inviolables, par exemple : toutes celles qui touchent au respect de la vie, à la dignité d'autrui, au partage des biens. On peut en discuter les modalités parfois, mais alors on est souvent dans l'argutie et le vain combat politique. On a le devoir de dire qu'il est injuste de laisser à la rue des dizaines de sans-logis, on a le devoir de dire qu'il est injuste de laisser de nombreuses familles dans la misère ; on a en retour le droit d'exiger des sans-logis, une fois réglée leur situation, une participation à la vie sociale par le travail au service de tous ; on peut exiger des familles justement aidées par la contribution de tous, qu'elles participent par l'impôt, fût-il modique, à la vie de la patrie. Toutes ces conclusions sont triviales, j'en conviens, mais elles correspondent bien à "la nature répandues dans tous les êtres" dont parle CICERON, et elles soulignent le caractère contraignant pour la personne de certains comportements qui seuls sont en mesure d'y correspondre, ainsi que le côté paradoxal des exigences formulées par les États, dont parle PASCAL.
A méditer. Respecter le bien d'autrui justifie certains aspects de la loi dite HADOPI ; respecter la vie de famille, le repos et le partage exige le repos dominical.
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vendredi 14 août 2009
Les mots sont des pièges
Le slogan "travailler plus pour gagner plus", cher au Président de la République, a suscité railleries et critiques. Jamais elles n'ont été justifiées ; on s'est borné à le moquer.
Or, je n'aime pas ce slogan, moi non plus, et je vais expliquer pourquoi : il fait de l'argent un but pour la vie. Il s'appuie sur l'avidité ou la cupidité humaines. Pour montrer combien sont les mots sont des pièges - car je me plais douter que ce n'était pas l'intention du concepteur du mot d'ordre - on peut trouver une autre formule plus appropriée, et qui fait tout simplement appel à la justice : "Gagner plus en travaillant plus". Il est normal que le travail soit rétribué, et qui travaille plus voit son travail honoré par un salaire plus important. Le but n'est plus l'argent ; l'expression met en corrélation deux notions intimement mêlées : le travail et la rétribution du travail. Aucun des critiques, à ma connaissance, n'a insisté sur la signification implicite du slogan présidentiel. De sorte qu'ils sont passés à côté de l'essentiel, qui est une vision matérialiste des aspirations humaines. Or l'homme ne vit pas que de pain. Nous ne le savons que trop et les chanteurs qui célèbrent l'amour humain ou déplorent sa dégradation, ne font qu'illustrer cette aspiration à un autre chose.
De même est piégé le slogan "protégeons la planète". Notre civilisation se plaît à considérer que l'homme est le maître de toute chose, que la nature n'a rien à nous apprendre ou à nous dire, que tout est le produit de la culture, au point même qu'il y a des chercheurs en sciences humaines qui prétendent nier la réalité de la sexuation, pour parler de celle du genre ! Il est impossible de comprendre en profondeur ce que signifie protéger la planète, si l'on considère que l'homme peut tout, s'auto-construit, et ne reçoit rien que l'homme n'ait lui-même fabriqué ou élaboré. Car on peut toujours rester dans l'illusion que la science remédiera aux effets destructeurs de l'activité humaine. C'est dans l'intime relation avec la nature, considérée comme le bon fruit à nous donné par le Créateur, que l'on peut s'engager dans une démarche personnelle de respect de l'environnement.
On n'en finirait pas de donner des exemples où les mots trahissent ou travestissent ce qu'ils prétendent vouloir dire, et révèlent la pensée profonde de qui les a proférés.
Plaidoyer pour la pensée
Dans un commentaire de mon dernier billet, Fourmi a la bonté de dire des choses agréables et gentilles à propos de ce Blog. Je remercie ce lecteur bienveillant, et voudrais lui dire, ainsi qu'à tous les autres, les principes que je m'efforce d'appliquer en rédigeant ces petits textes ; il y en a trois : (a) Le premier est le principe d'objectivité, qui consiste à partir des faits et non point des idées. Certes, il y a des faits objectifs, mais il y a aussi des faits de conscience, plus difficiles à cerner, qu'il faut cependant prendre en compte, avec tout le recul nécessaire. (b) Le deuxième est le principe d'argumentation, qui consiste à utiliser tous les moyens de la raison, et toutes les données reçues des penseurs, des philosophes, des artistes, des hommes politiques, des chercheurs, etc., considérées comme acquises ou presque indiscutables. Il s'agit là de faire fond sur la culture. (c) Le troisième est le principe de témoignage ou plus exactement de fidélité, qui consiste à confronter tous ces faits, toutes ces réflexions, à l'enseignement de Jésus.
Je n'ai aucune honte, bien au contraire, à dire publiquement que, pour moi, le Fils de l'Homme est un Maître en humanité, qu'il nous révèle à nous-même en nous montrant son Père, et qu'il n'est pas de salut possible pour l'humanité en dehors de lui. Ce dernier principe est très exigeant ; car il oblige à la vérité du jugement, à l'usage de la liberté mise au coeur de chaque homme, à la probité intellectuelle, au perfectionnement incessant de sa humanité.
En commentant sur ce Blog, il y a bien longtemps, les réflexions de Jürgen HABERMAS sur l'éthique de la discussion, je pointais l'absolue nécessité de dire à son interlocuteur d'où l'on parle, pour ne pas le manipuler. Il me paraissait nécessaire de redire ici ma position de façon à ne pas induire mes lecteurs en erreur. Oui, il est possible d'être un scientifique et d'être un disciple.
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jeudi 13 août 2009
Il faut que je commente
L'un de mes fidèles lecteurs fait des remarques trop importantes sur mon dernier billet pour que je ne commente pas ce que j'ai dit de manière elliptique.
1-Ce lecteur est perplexe et il a raison, à la lecture de "Les banquiers... ne semblent pas avoir compris que les temps ont changé". On pourrait entendre ce jugement comme une justification de leurs pratiques anciennes. Il n'en est rien, bien entendu. Tout le monde semblait s'en accommoder, tant que le sang des pauvres n'éclaboussait que discrètement les autels de MAMMON (deux M ; j'ai corrigé) ; mais maintenant, il les inonde en flot ininterrompu et l'on ne peut plus faire l'aveugle. Je suggérais donc (sans l'avoir explicité) que, faute d'un changement des pratiques, il risquait d'y avoir une révolte violente des laissés pour compte, plongés dans le désespoir et la misère, ou un retour à des pratiques autoritaires et à un régime excessivement encadré par la loi.
2-En revanche, je l'invite à relire soigneusement la conclusion de ce billet. Je ne dis pas "Y'a qu'à faut que", mais très exactement le contraire, en appelant à mon secours des penseurs qui démontrent que le seul principe de changement social est le changement des comportements individuels. Ce changement ne peut être obtenu par la loi, en tout cas pas par la loi seule, mais par un retour sur soi-même, et une prise de conscience de la solidarité de destin de tous les êtres humains (qui n'a rien à voir avec la générosité, la fraternité, et encore moins la charité). Ainsi à défaut de mettre Dieu au coeur de la vie sociale, on peut y mettre la raison et montrer que l'harmonie sociale, à un niveau strictement cantonné à l'ordre humain et naturel, exige un équitable partage des biens de la terre.
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Non au dieu Mammon
C'est proprement effarant ! Nos banquiers et nos financiers ne semblent pas avoir compris que les temps ont changé. Comme si de rien n'était, ils continuent de provisionner des sommes considérables pour les redistribuer sous forme de bonus à leurs traders, alors même que des milliers de nos concitoyens sont plongés dans le désespoir et la pauvreté par les licenciements ne sont souvent (pas toujours, certes) justifiables que par le goût du lucre des actionnaires.
J'ai toujours dit, et je redis encore, que l'économie administrée a fait les preuves de son incapacité à créer autant de richesses qu'une économie de libre entreprise. Encore faut-il qu'il y ait entreprise. Que font donc ces gens qui, l'oreillette à l'oreille et les yeux fixés sur un chronomètre, lancent, hagards, des ordres de ventes et d'achat dans le but unique de faire de l'argent pour le compte de leur employeur (prétexte) mais surtout pour le leur (bonus !) ? Quels services rendent-ils à la société ? Que produisent-ils ? Quelle richesse, autre que de l'argent qui est nécessairement volé ?
Ces banquiers-là doivent prendre conscience que leurs pratiques est moralement inacceptable. Il est tout de même curieux qu'un économiste (monsieur de SCITIVAUX), un philosophe (Simone WEIL) et deux penseurs (Gustave THIBON, Marcel LEGAUT) disent tous, à des années d'intervalle, que le seul principe de changement social est le changement des comportements individuels. Puisque messieurs les banquiers disposent de la puissance énorme que représente l'argent, qu'ils l'utilisent au mieux de l'intérêt général, et non de leurs intérêts particuliers. Je crains fort, sinon, que l'on en vienne à la solution préconisée par monsieur Michel SAPIN (homme qui manifestement est honnête et pense, et pense surtout à autre chose que sa propre carrière), et que la loi vienne mettre fin à des abus qu'un peu de sagesse, d'intelligence et de largeurs de vue suffiraient à éviter. Pour la rentrée, un seul mot d'ordre : non au dieu Mammon. Non cette puante idole, que l'on repaît du sang des pauvres.
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Alsace
L'Alsace est probablement l'une des régions les plus singulières, les plus attachantes, les plus secrètes de notre patrie. J'aime ces moments de l'été où commence à se voir la chute du soleil à l'horizon de midi. Point encore de feuilles rousses dans la ramure des arbres qui bordent les bras du Rhin tortu, ou peuplent les forêts du ried humide. Mais déjà les marronniers, dans la ville, ont des teintes d'automne. Le ciel se pare de la déchirante couleur de septembre ; les Vosges, vers l'ouest, prennent cette allure triste qui laisse présager les pluies d'octobre. Oui, j'aime profondément cette terre où j'ai passé la majeure partie de ma vie d'homme actif, cette terre qui vit au rythme lent des saisons.
Les alsaciens sont taiseux, opiniâtres, fraternels. Ils ont un solide humour, mais n'acceptent de se livrer qu'aux passants, aux proches, au touristes qui le respectent. Rien n'est plus émouvant que la foi solide et simple qui se respire dans les bourgs et les très gros villages du piémont. Aux rameaux, à la Toussaint, sans compter l'Assomption et les autres jours saints, les églises sont pleines, et les dimanches aussi du reste. Alors, après la messe, dès le midi, les winstub se remplissent de familles élargies (grands-parents, enfants, petits-enfants, oncles et neveux) qui célèbrent la fête dans les rires, et dégustent les waedele (jambonneau), les schiffaele (palette fumée), les grumbere kiechle (galettes de pomme de terre), ou les énormes forêts-noires et les meringues glacées.
Quand vient l'automne et que commencent les vendanges, il faut aller dans les villages du vignoble, rentrer dans les winstub et boire le vin nouveau accompagné de noix et de pain paysan (nüssen un büre brot). Le sentiment d'intimité, de sécurité, de sérénité qui se dégage de ses moments là est unique. Les boiseries qui toujours lambrissent les murs de ces petits restaurants très particuliers rajoutent à cette paix que je n'ai vue nulle part ailleurs.
Alors Paris et son agitation prennent une allure dérisoire ; tous ces gens pressés, à l'air important ou las, ne savent pas le goût d'une vie simple, laborieuse, saine ; ils ne connaissent pas l'Alsace. Mais il est encore temps de la visiter.
mercredi 12 août 2009
Silence
Le silence a des vertus que l'on ne peut connaître, tant que l'on ne les a pas expérimentées. Dix jours à ne dire que le strict nécessaire à ses voisins, voilà qui est décapant ; j'ai été faire le service d'une retraite spirituelle dans ma chère Alsace. [Et surtout qu'Olibrius ne vienne pas dire que c'était inutile. (Du reste il en parle dans un commentaire de mon dernier billet).] J'ai vu là de véritables résurrections, chez des pauvres : telle personne, amputée de sa jambe gauche il y a vingt ans en raison d'un cancer des os trop tard diagnostiqué ; telle autre, malmenée pendant son enfance, ou violée, qui repartent guéries psychiquement et spirituellement, quand ce n'est pas physiquement (au moins pour l'une d'entre elle). Personnellement, je sais maintenant où est mon bonheur. Toute ma vie, j'ai été sur le devant de la scène, sur le ridicule théâtre d'ombre qu'offre notre monde sans Dieu, ce monde autosuffisant, satisfait de lui-même et de son péché. J'en suis revenu. Mon bonheur est dans le service, et dans le service des plus pauvres. Je vais donc essayer de m'y appliquer, comme je le peux.
Il me semble que notre monde a besoin de connaître le salut, pas n'importe lequel, pas celui que nous promettent les faiseurs, les politiciens, les "philosophes", les gourous, les "coaches", les tenanciers d'institut de thalassothérapie. Non ! Le monde a besoin d'un bonheur que le malin ne puisse lui ravir.
Bien entendu, cela ne m'empêchera pas de continuer à diffuser mes petits billets. Je mesure leur vanité. Mais enfin il faut bien que la vérité soit quelquefois dite, même par des pécheurs !
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Pauvres,
Retraite spirituelle,
Silence
samedi 1 août 2009
Relâche
Je m'absente jusqu'au 11 août et reprendrai mes billets le 12. Passez de bonnes vacances : rencontres, découverte, réflexion, méditation, détente, bref tout ce qui peut donner à la vie une autre dimension que le strict utilitaire ou la satisfaction de nécessités purement physiologiques. Et merci pour votre fidélité
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