vendredi 22 octobre 2010

Lettre ouverte aux lycéens et étudiants

-
Chers lycéens,
Chers étudiants,

Vous manifestez bruyamment contre une réforme des retraites dont vous ne percevez, me semble-t-il, ni les raisons ni les enjeux. Permettez à un homme rentré dans la dernière partie de sa vie, qui a élevé six enfants, enseigné pendant quarante ans à l'Université, été chef scout pendant cinq ans au temps de sa jeunesse, de m'adresser à vous au nom d'une expérience dont vous ne pouvez vous prévaloir.
-
Il me semble que votre colère n'est pas tournée contre cette réforme, mais contre vous-même, et qu'elle traduit un mal-être très profond. Acceptez-vous que nous discutions en faisant appel à la conscience de chacun de nous et à la raison ? Acceptez-vous que l'on vous pose quelques questions ?
-
Connaissez-vous dans le détail les dispositions de cette réforme ?
Pouvez-vous dire avec précision en quoi elle vous lèse ?
Savez-vous qu'il y a d'autant plus d'emplois pour les jeunes qu'il y a de seniors actifs ?
Acceptez-vous le principe de la retraite par répartition qui fait payer les pensions des inactifs par les actifs ?
Connaissez-vous avec précision l'évolution de la démographie du monde du travail ?
Avez-vous des solutions pour trouver l'argent nécessaire au financement de pensions à une hauteur convenable ?
Pensez-vous qu'il n'y ait d'avenir professionnel que dans une situation de salarié ?
Croyez-vous que vous avez les aptitudes personnelles nécessaires pour créer votre propre entreprise ?
Trouvez-vous juste que les grèves n'aient qu'un seul but, celui de nuire au fonctionnement économique du pays ?
Accepteriez-vous de payer plus d'impôts pour abonder le fond de retraite ?
Accepteriez-vous de devenir chef d'entreprise ?
-
Vous êtes dans la protestation si chère aux adolescents. On vous manipule en vous assimilant à un groupe, et un groupe de pression, au service de l'ambition politique de tel ou tel responsable. Les médias, la presse en particulier, depuis trois ans, ne cesse d'accabler la personne du Président de la République, faute de pouvoir critiquer sur le fond les mesures qu'il prend. Mais la détestation d'un homme n'a jamais tenu lieu de politique. Et pour être crédible, il ne suffit pas de bloquer les portes des lycées ou des facultés avec des poubelles, voire d'y mettre le feu. Il faut avoir un projet, une vision de la politique, une vision de l'homme. Et je n'entends rien de tout cela, je n'entends que le cri d'une partie de la jeunesse, déboussolée par le manque de sens d'une civilisation marchande, consommatrice, hédoniste. Cela n'a jamais fait le bonheur, simplement le plaisir, ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Et quand je vois, comme hier, un cortège de jeunes manifestants dont l'une des meneurs porte un blouson de cuir du meilleur faiseur, et qu'un autre se balade avec un djambé de luxe en tapant dessus comme un sourd, je me dis qu'il y a des contradictions entre le discours et les comportements qui sont insupportables à tout esprit droit.
-
Votre seul devoir civique, je dis bien le seul, est de vous adonner de toutes vos forces à vos études, de trouver de sains loisirs en compagnie d'amis sûr, et de ne pas oublier que vous avez une conscience dont il convient de faire un constant usage.
-
S'il advenait qu'un leader étudiant lise ce message, je serais heureux qu'il réponde à mes questions. Je l'assure d'emblée de ma bienveillance, croit à sa bonne foi, mais pas forcément à la justesse de ses vues.
-
J'ai consacré ma vie professionnelle à des jeunes de votre âge. Je les ai passionnément aimés, et j'ose le dire, servis. Je leur dois des joies qui n'ont d'équivalent que dans les joies familiales. Et je suis désolé de voir que nombre d'entre eux réagissent aux sollicitations de la vie avec des réflexes de vieux. J'essaye de comprendre. Cela m'est difficile. Ce n'est pas une raison pour démissionner.
-
A tous ceux qui me liront, amitié, rude amitié, mais amitié vraie.

7 commentaires:

potomac a dit…

mais c'est bien de nous tenir au ciourant de votre lettre ouverte; mais envoyez la aux syndicats dont se réfère les manifestants( y compris les syndicats lycéens,etc...)sinon c'est enfoncer une porte ouverte.

Roparzh Hemon a dit…

ce que dit potomac est l'évidence même.

Philippe POINDRON a dit…

Chers lecteurs,

Si quelqu'un peut me donner l'adresse du syndicat lycéen et celle du syndicat étudiant qui conduisent la contestation, je me ferai un devoir de leur envoyer cette lettre. Mais, avec naïveté, je crois que mes lecteurs peuvent eux aussi diffuser un tel appel, et le suivi des statistiques montre que les billets sont lus par une cinquantaine de personnes tous les jours. C'est peu. Mais cela peut modifier les points de vue.
Bien amicalement à tous les deux.

potomac a dit…

mais vous allez sur le net et vous avez leur site:fidl et unl

Philippe POINDRON a dit…

Je vais le faire

tipell a dit…

Cher Monsieur Poindron,
j'avais remarqué, il y a quelques jours, les noms du bureau de la FIDL, syndicat des lycéens: PRESIDENT Massira BARADJI,
SECRETAIRE GENERAL Leila BOUBEKEUR
SECRETAIRE GENERAl ADJOINT Djamila AMZIL, bonne chance pour votre magnifique courrier qui, je l'espère, ne sera pas classé à la verticale.

potomac a dit…

ce sera, peut-être, un classement de droite à gauche ( ah,ah,ah, l'astuce n'est pas mal et est double).