mardi 15 mars 2011

Avant que vous n'alliez dormir

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François CHENG, de l'Académie Française, vient de publier un livre remarquable. Il y commente des calligraphies superbes dont il est l'auteur et il y ajoute quelques citations de poètes chinois anciens, qui me paraissent confondantes de profondeur et de beauté. Je vais vous en livrer quelques unes. Elles berceront votre nuit, rempliront vos yeux d'étoiles, et - en ces moments où l'on aurait toutes sortes de raison de désespérer le l'homme - elles vous rendront un peu d'espoir.
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Du grand poète (et peintre) WANG WEI :
"Sur le tard, je n'aime que la quiétude.
Loin de mon esprit la vanité des choses.
Dénué de ressources, il me reste la joie
De hanter encore ma forêt ancienne."
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De AI TS'ING :
"Pour avoir trop aimé cette terre,
J'ai souvent les yeux emplis de larmes."
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De CHUANGTSEU :
"Tout le monde connaît
l'utilité
de ce qui est utile ;
Personne ne connaît celle
de ce qui est inutile."
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De CHUANGTSEU toujours :
"Il n'y a pas de plus grande tristesse,
que la mort du coeur."
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Ah, comme je voudrais que vous comprissiez la force de caractère, la justesse du ton, la beauté des sentiments de cet homme qui "sans diplômes valables, sans métier" était en perdition quand il arriva en France. "Métaphysiquement, je traversais une période d'interrogation intense. Arraché à un milieu familier, affrontant l'inconnu, j'ai dû réapprendre à vivre. Petit à petit, immergé dans cette terre d'accueil et initié à cette nouvelle langue [François CHENG parle ici du français], j'ai réussi à me réenraciner dans l'être. J'ai éprouvé maintes fois l'ivresse de renommer les choses à neuf, comme au matin du monde. Habité aujourd'hui PAR UN SENTIMENT DE RECONNAISSANCE [majuscules de votre serviteur], je fais mienne cette phrase de KEATS qui assurait que "la terre est une vallée où pousse les âmes."
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Cher monsieur, vous pratiquez une langue superbe. Vous n'avez jamais renié vos origines et pourtant vous êtes le plus français des français qui se puissent imaginer. Nous sommes honorés de vous compter au nombre de nos compatriotes, vous qui venez de cet Orient lointain et fascinant. Votre culture, vos talents, vos écrits rehaussent l'éclat de nos lettres. Merci, du fond du coeur, merci.
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1 commentaire:

Anonyme a dit…

Cher Professeur,

Merci pour ces lignes sur François Cheng.

En passant, je me suis toujours demandé, pourquoi à ce jour n'y a t-il pas eu encore d'occidental capable d'utiliser la langue chinoise pour s'exprimer par l'écrit comme le pratique Monsieur Cheng. ( et comme d'autres Chinois le font en anglais, aussi )

Bah... ça viendra peut-être me direz-vous...

Mouais...À part Mattéo Ricci... quel est l'occidental qui aura le plus de " foi " en la culture chinoise ?

D'après vous, professeur ?