vendredi 17 juin 2011

De l'exemplarité

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Le Livre des Odes, un des grands livres canoniques chinois, dit ceci :

"Le Prince, dont la conduite est toujours pleine d'équité et de sagesse, verra les hommes des quatre parties du monde imiter sa droiture. Il remplit ses devoirs de père, de fils, de frère aîné et de frère cadet [il s'agit là des relations entre les êtres, telles que les a définies CONFUCIUS, il y manque seulement la relation entre amis, la seule qui selon le sage est absolument symétrique] et ensuite le peuple l'imite." Le mot "devoir" est intéressant car il rejoint là la question "Que dois-je faire pour avoir la vie bonne ?". C'est-à-dire la morale.
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Il y a là une très profonde vérité. Il est intéressant de la confronter avec ce que Gustave THIBON disait plus de deux millénaires plus tard :
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"Rares sont les êtres qui coïncident avec eux-mêmes. La plupart des hommes vivent en dehors de leur propre nature, esclaves d'un personnage et d'un rôle dans la comédie sociale. Ils sont comme absents de leur propre existence. ET LE MÊME MENSONGE IMPRÈGNE LEURS RELATIONS, même les plus intimes, avec le prochain. Ce ne sont pas des visages, mais des masques de théâtre qui échangent des baisers et des serments." (In Notre regard qui manque à la Lumière.)
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Et c'est ainsi que madame ROYAL a prétendu qu'elle porterait le SMIC à 1500 euros par mois et qu'après son échec électoral elle a déclaré qu'elle n'avait jamais cru à cette promesse que son parti lui avait imposée de mettre dans son programme.
Et c'est ainsi que le PS s'apprêtait à désigner comme candidat aux présidentielles un homme capable de payer une caution de 6 millions de dollars, de s'offrir un luxueux appartement de 600 m² dans le quartier chic de New York, sans compter le paiement de la société de surveillance, tout en déclarant (et en redéclarant, du reste) la guerre aux riches !. C'est ainsi que monsieur Pierre BERGE, richissime homme d'affaire, peut se payer le luxe d'avoir soutenu  de son argent madame ROYAL tout en vendant des dizaines de millions d'euros une merveilleuse collection d'objets d'art, accumulés pendant sa vie commune avec Yves SAINT-LAURENT.
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Faites ce que je dis, non pas ce que je fais. Tous ces gens qui vous agitent des plumes sous le nez sont des menteurs, qui n'habitent pas leur vie et sont assez loin de pratiquer la vertu.
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Mêmes remarques pour des hommes politiques de la majorité. Comment peut-on se dire démocrate et proposer l'aide de la France à un dictateur comme l'a fait madame ALLIOT-MARIE ? Comment parler d'économie et de restrictions quand on se fait payer ses cigares par les contribuables ? Comment lutter les agressions sexuelles quand soi-même on pourrait avoir quelques reproches à se faire en cette matière ?
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Nous exigeons de nos hommes politiques qu'ils mettent en pratique dans leur vie les vertus qu'ils prétendre défendre. C'est bien le moins qu'on puisse leur demander, à défaut de succès dans la lutte contre la précarité, le chômage, la perte de sens, les violences urbaines. Qu'ils les pratiquent, nom d'une pipe, ces vertus-là. Et alors, le peuple les imitera.
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C'est tout pour aujourd'hui.
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3 commentaires:

CORATINE a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
CORATINE a dit…

Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous, cher M. Poindron. Je pense que 70% des gens s'intéressent très peu à la vie politique!
Et qu'avant les scandales de ces six derniers mois, avant que n'éclatent au grand jour les déviances de nos dirigeants, il y a toujours eu pléthore de vols, de viols, de meurtres, d'actes de pédophilies, de malversations, etc.
La nature humaine est ainsi faite. Nombre d'enfants sont élevés par des parents parfaits, cela les empêche-t-il de sombrer souvent dans la violence, la révolte et la drogue? Vous le savez comme moi que montrer l'exemple n'est pas toujours, loin de là, un garde-fou à la nature humaine.
Mon père m'a enseigné la religion (messe tous les dimanches, catéchisme, prière tous les soirs, etc.), comment expliquez-vous à présent que je ne crois en rien et que j'ai cessé toute pratique de cette religion?
J'ai élevé mes enfants dans une certaine optique et en leur montrant une certaine manière d'être. Comment ne pas être désolée à présent qu'ils aient pris des chemins tout à fait divergents, sur lesquels je ne les suis pas du tout. Le Français moyen ne s'intéresse pas à la politique, à moins que les choses ne deviennent vraiment croustillantes et à la portée de son indignation!!!
Vous savez bien que les trois quarts du temps, il ne comprend rien à ce qui se passe précisément, donc a fortiori s'il ne va pas lui-même chercher l'information dans ses détails les plus précis qui lui sont souvent dissimulés.
Nicolas Sarkosy devenant un brave père de famille, tout le monde devrait suivre cette saine et heureuse philosophie de la vie... Que nenni! Les Français de SOUCHE ont peur de mettre des enfants au monde, vous n'ignorez pas pourquoi.... Donc, peut-on parler d'un peuple qui suivrait avec enthousiasme l'exemplarité de ses dirigeants?
L'être humain n'est pas ainsi fait.
J'accepterai volontiers vos remarques, cher M. Poindron, et je suis très admirative de votre blog.

Philippe POINDRON a dit…

Chère Coratine, vous dites là des choses essentielles. Je vous renvoie d'abord au billet sur les milieux existentiels tels que FENG YOULAN les a définis. Il est évident que, par goût du pouvoir, les hommes politiques ont intérêt à maintenir leurs concitoyens dans le milieu existentiel "utilitaire". Il est non moins évident que passer dans le milieu existentiel "moral" suppose un effort sur soi-même. Mais (cf. billet "Réponse à un ami"), il n'y a pas d'acte moral sans exercice de la liberté. Il est probable que votre rejet de la religion, malgré une éducation chrétienne, vient de ce que votre liberté n'a pas été sollicité. On vous a accablée de devoirs et d'interdits, au lieu de vous nourrir d'amour. Mais vous avez la vie devant vous, et surtout, vous avez compris qu'il est nécessaire d'avoir des repères pour vivre (l'éducation donnée à vos enfants le prouve). La vie est un chemin. Et le chemin prend fin avec notre dernier souffle. Je vous suis très reconnaissant de lire mes billets avec attention. Je les écris avec le plus de probité intellectuelle possible, même si mon tempérament assez polémique me pousse parfois à des excès.
Bien amicalement.