mardi 16 septembre 2008

Je suis pour les médailles

L'idée de donner des médailles aux jeunes bacheliers ou diplômés titulaires de mention est une excellente idée. Les protestataires qui prétendent que cette mesure est bling-bling, inutile, et qu'elle ne traite pas des inégalités (sic) devraient un peu s'informer. J'ai sur eux un certain avantage qui est celui de l'expérience de terrain : j'en ai deux exemples qui méritent d'être ici résumés.
Le premier a trait à l'enquête que l'Institut pour la Promotion du Lien Social (IPLS) a conduite dans 20 collèges du Bas-Rhin. J'ai été le Président de cet Institut pendant trois ans, et j'ai interviewé près d'une trentaine d'intervenants surtout dans les Collèges de ZEP (sur la centaine d'interrogatoires conduits dans le cadre de cette étude). Tous mes interlocuteurs, en des termes divers mais convergents, ont souligné le déficit de transmission intergénérationnelle, l'absence de prise au sérieux des jeunes, indéfiniment cantonnés dans l'irresponsabilité de leurs vie par des adultes eux-mêmes irresponsables, la difficulté qu'ils avaient à intéresser les parents aux problèmes rencontrés par leurs enfants. Que des générations d'adultes marquent leur intérêt pour les performances scolaires des jeunes gens et jeunes filles me paraît aller dans le bon sens, permet de les préparer à la vie active, manifeste qu'ils existent comme futur responsables ou acteurs dans la société. Donc, malgré les dénégations des syndicats et d'une fédération de parents d'élèves, émanation des organisations dites de gôôôche, les enseignants, principaux, conseilles principaux d'éducation, psychologues, infirmières, conseillers d'orientation, insistent sur la nécessité de prendre au sérieux les jeunes et de les reconnaître comme des acteurs de leur vie, et des responsables de leurs actes et de leurs choix. Du reste, dans le cadre des activités de l'IPLS, nous avons organisé depuis plusieurs années au début du mois de mai, un Forum de la Tolérance et de la Fraternité, auquel étaient invités plus d'une centaine de jeunes des collèges et lycées. Il leur était proposé de découvrir ces notions à travers des ateliers de mime, d'écriture, de musique, de théâtre, de jeux de rôle, etc. Ils venaient accompagnés d'un enseignant de leur établissement. Nous leur remettions, à la fin de la journée, un diplôme d'Ambassadeur de la Tolérance et de la Fraternité. Il fallait voir la fierté de ces jeunes se faisant photographier, groupe par groupe, en exhibant leur diplôme (pour certains, le premier jamais reçu, et sans doute l'unique). Il fallait voir aussi la déception des très rares participants, inscrits trop tard, et pour qui nous n'avions pas eu le temps de faire imprimer ces diplômes et qui réclamaient qu'on le leur envoyât (ce que nous avons fait). Et enfin, il était intéressant de noter au minimum l'intérêt, au mieux l'enthousiasme des accompagnateurs pour cette initiative.
Deuxième exemple. J'ai enseigné pendant 33 ans à l'Université Louis Pasteur. Les trois derniers doyens qui ont conduit les affaire de la Faculté, ont réintroduit une séance de remise solennelle des diplômes, suivi d'un cocktail festif. L'atmosphère de cette fête était et est toujours extraordinaire. Étudiants bien habillés (pour une fois), étudiantes en robe pimpante (idem), parents fiers de leurs enfants, enseignants entourés et sollicités (pour des photos, par exemple).
On me rétorquera qu'il s'agit là de l'élite. Je veux bien. Mais faut-il, parce qu'ils sont l'élite, les mépriser ? En quoi honorer les meilleurs ôte-t-il à ceux qui ont moins et pour lesquels la nation fait beaucoup (je peux en témoigner ; voir enquête évoquée ci-dessus) ? Toujours cette haine qu'éprouve le médiocre pour ce qui le dépasse, ce ressentiment des incapables, cette prétention qu'il suffit de dénoncer un mal pour croire qu'il est guéri. Pas une tête ne doit dépasser dans l'esprit de ces fanatiques de l'égalité. Et c'est sans doute pourquoi leurs ancêtres se sont employés à en couper autant lors de la Révolution. Rien n'est pire qu'un médiocre qui accède au pouvoir. Ou bien il est violent, ou bien il est impotent. Ou bien, et c'est le cas le plus fréquent, il est les deux à la fois.
Merci à un ami très cher, le Pr D. G... qui a lancé cette idée de remise solennelle des diplômes quand il était Doyen (un très bon...)

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