vendredi 12 septembre 2008

Les modes de pensée contemporains

Parmi les nombreuses tares qui me semblent affecter les modes de pensée contemporains, il en est deux qui me paraissent corruptrices de toutes réflexions. La première consiste à juger les événements d'hier comme s'ils dataient d'aujourd'hui. C'est là le résultat de l'idéologie. On juge avant de collecter les faits, et quand on en a, on leur applique un système d'analyse préfabriqué. C'est se fermer à toute compréhension profonde de l'histoire, et de plus, c'est d'une rare malhonnêteté intellectuelle. Pour comprendre, il faut d'abord savoir ce que les contemporains des faits en disent et ce qu'ils disent d'eux-même. Il est très facile, et juste, du reste, d'appeler DIDEROT et VOLTAIRE à son secours, quand on veut condamner l'Église catholique de l'Ancien Régime. Il serait intéressant de savoir ce qu'en disent non seulement d'autres écrivains éminents, mais aussi le peuple des croyants. Nous avons peu de documents sur cette question, et c'est bien dommage. Il nous faut donc collecter des faits : que faisaient les évêques, les prêtres, les moines ? Comment les fidèles vivaient-ils les prescriptions (qui nous paraissent aujourd'hui bien pesantes) de l'Église en matière de sexualité ? Et ne serait-il pas juste de les comprendre dans le contexte d'une mortalité infantile effrayante ? (La durée moyenne de la vie humaine était de 29 ans en 1789 ! ). On peut remonter plus haut et s'effrayer du droit de vie ou de mort que les pères de familles romains avait sur leurs enfants. Mais pour comprendre l'existence d'une telle pratique, il faut s'interroger sur les devoirs qui incombaient au pater familias.Etc., etc.
La deuxième tare, tout aussi corruptrice, consiste à isoler des faits de leur causes, et à les juger sans les replacer dans un contexte diachronique. C'est là l'enfant adultérin de la culture médiatique et de la marchandisation des savoirs. Un fruit de l'instantanéité de nos émotions. L'exemple typique et actuel est celui de Bernard TAPIE qui, manifestement, a été victime de goujats financiers. On n'en veut rien savoir. Le pouvoir d'achat des citoyens est en berne ! TAPIE n'a donc droit à rien, même s'il a été floué. En remontant plus haut, et pour prendre un autre exemple, celui de Gaspard de COLIGNY, fameux protestant qui fut assassiné lors des massacres de la Saint Barthélémy, on oublie de signaler que ce martyr de la cause avait fait brûler vif quelques centaines de paysans catholiques, en PERIGORD (à LA CHAPELLE FAUCHER, très exactement), qu'il dévasta la GUYENNE et le LANGUEDOC, et que le meurtre de ce grand seigneur aurait pu avoir pour mobile le désir de vengeance. Inversement, on justifiera les exactions des Dragons du Roi dans les Cévennes pour des raisons politiques, alors que le fond de la question est tout différent : il s'agit des droits imprescriptibles de la conscience, revendiqués à juste titre par les huguenots. On se souviendra alors de Marie DURAND, qui écrivit sur les murs de sa prison, à AIGUES-MORTES : Résister. Et il est bon ici de rappeler que, bien des siècles avant, Jean CHRYSOSTOME, Père de l'Église d'Orient, avait dit : Même si je dois être excommunié, je dois suivre la voix de ma conscience. Cette sentence n'a jamais été contestée ni abolie par aucune autorité dans les Églises d'Orient ou d'Occident. Tout cela mérite donc d'être pesé, examiné, et interprété avec toutes les nuances qui s'imposent, et la plus grande rigueur intellectuelle.
Bref, les deux plus grandes tares des modes de pensée contemporains est qu'elles empêchent l'éclosion d'une vraie pensée et qu'elles favorisent le foisonnement des idéologies. C'est proprement insupportable, et tout le monde a l'air de s'en f...

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