jeudi 14 mars 2019

Jeudi 14 mars 2019. Nouvelles du pari bénédictin : guetteurs sur les fortifications.


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Au lieu d’un château fort dressé au milieu des terres, pensons plutôt à l’armée des étoiles jetée à travers le ciel.
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UN ETAT DES LIEUX PAR MARCEL LEGAUT.
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"À mesure que, suivant une évolution quasi ontologique, la société des hommes progresse en connaissances et en puissance, Dieu paraît moins présent, moins agissant, toujours plus absent et plus étranger au monde. La science et la technique effacent peu à peu les traces que l'ignorance et la candeur des siècles passés vénéraient comme des passages de Dieu. Le merveilleux recule sans cesse. Jusqu'où s'arrêtera-t-il ? Toutes les facilités religieuses qui s'appuyaient jadis sur lui disparaissent et sont remplacées par autant d'obstacles. La société humaine n'est peut-être pas encore athée en droit. En fait, elle pèse sur ses membres comme si elle l'était. Chacun en porte lourdement le poids sur son cœur. Les enfants sont rapidement atteints par la contagion de ce scepticisme collectif. Les adultes, même les plus évolués intellectuellement, sont la proie de l'agnosticisme, ils refusent de se passionner pour ce qu'ils ne peuvent pas atteindre par les techniques et les disciplines scientifiques. Il n'est pas jusqu'aux croyants qui parfois s'arrêtent, pris de vertige, devant l'étrangeté de leur recherche et de leur foi au milieu de l'indifférence ou de l'incompréhension générale."
Marcel LÉGAUT.
Travail de la Foi. Quelques approximations spirituelles.
Éditions du Seuil; Paris, 1962. (Page 151.)
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ET UNE RÉPONSE DE THOMAS MERTON.
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"[…]. Je crois que la vie spirituelle est celle de l’être vrai de l’homme, la vie de cet être intérieur dont la flamme est si souvent étouffée sous les cendres de l’anxiété et des soucis vains. Bien qu’elle soit orientée vers Dieu plutôt que vers la satisfaction des besoins matériels de l’existence, la vie spirituelle n’est pas faite d’illusions ou de rêves : sans elle notre existence tout entière devient irréelle et illusoire. En nous intégrant dans l’ordre établi par Dieu, la vie spirituelle nous place en plein centre du réel, non tel que nous l’imaginons, mais tel qu’il est. Elle arrive à ce résultat en nous faisant prendre conscience de ce que nous sommes vraiment, et en nous plaçant en la présence de Dieu."
Thomas MERTON.
Nul n’est une île. Traduit de l’américain par Marie TADIÉ. (Collection «Points», série Sagesses, N°Sa64.)
Éditions du Seuil, Paris, 1993 (date du dépôt légal). (Page5.)
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COMMENTAIRES PERSONNELS.
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LEGAUT et MERTON nous font part de leurs réflexions sur la place de Dieu et de la vie spirituelle dans nos sociétés qui se disent évoluées. Le premier se place d’un point de vue extérieur et jette sur l’état de la foi un constat alarmant. La technique, la science n’ont que faire de Dieu. C’est bien ce que nous renvoient les médias et le monde politique, sans parler du monde artistique moderne, qui n’a d’artistique que le qualificatif et achève le Beau à coup de transgressions, d’obscénités et de laideur (pensons au Plug anal de madame HIDALGO, heureusement vandalisé, comme jadis par Elie les autels dressés aux Baal sur le mont Carmel). Et puis, dans une lumière tout droit jaillie de l’intérieur, le second nous dit que le Royaume est au-dedans de nous, et qu’en acceptant de l’habiter, nous rencontrons ce que nous sommes, et nous entrevoyons notre visage de gloire, celui-là seul que Dieu connaît.
Je voudrais vous donner un exemple de ce que je considère comme une imposture intellectuelle, parée des atours de la plus parfaite objectivité mais très clairement destinée à accabler encore davantage l’Église. Je ne sais plus quelle chaîne de télévision a invité François OZON, l’auteur du film Grâce à Dieu ainsi qu’une victime du père PREYNAT. Deux figurants complètent le plateau animé par je ne sais quel journaliste, un de ces interchangeables intervenants qui confondent le bavardage et la réflexion. François OZON confesse qu’il a été élevé dans le catholicisme mais qu’il est athée. La victime, elle, affirme qu’elle s’est construite, depuis toujours, dans l’athéisme. Les deux autres pantins du plateau ne disent rien. Et le journaliste tartine, tartine, en remet une couche. Il m’apparaît qu’une information objective et honnête aurait exigé que l’on fasse venir un croyant. Il aurait pu en tout premier lieu affirmer sa condamnation sans appel des crimes de pédophilie et d’éphébophilie commis jusque dans les années 1991 par le prédateur dénoncé par OZON. Il aurait pu ensuite dire que ces scandales qui touchent l’Église le remue, le déstabilise, lui font poser des questions, des questions terribles, enfin il aurait pu ajouter que la justice des hommes doit certes passer, mais qu’au-dessus de la justice, il y a aussi la miséricorde, et que les légitimes et sévères sanctions ne doivent pas faire oublier une vérité anthropologique essentielle : il ne faut jamais enfermer un homme dans une phrase ou une action, car c’est affirmer alors qu’il n’y a pas de rédemption possible pour un criminel. Notre Dieu n’est pas de ceux qui condamnent sans appel : il nous invite à la conversion perpétuelle, c’est-à-dire à la sainteté.
Nous devons faire le pari bénédictin : assurer la garde nocturne sur les murailles de l’humanité plongée dans une trompeuse sérénité, attendre l’aurore avec constance, et être rempli de compassion pour ceux qui dorment à l’abri de ces fortifications. Si elles n’étaient pas surveillées par les guetteurs, nul ne peut dire ce qu’il adviendrait des dormeurs.


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