dimanche 25 octobre 2009

Stupéfaction

Je suis engagé depuis plus d'un an dans la catéchèse. L'aumonier et la responsable de l'aumônerie des Collèges La Fontaine et Claude Bernard m'ont confié les jeunes de quatrième, qui se préparent à recevoir le sacrement de Confirmation. Une ancienne condisciple et amie, que j'ai retrouvée à PARIS après quarante ans, fait partie de notre groupe de catéchètes.


Nous échangeons avec les jeunes sur les dons de l'Esprit Saint. Trois volets à cette réflexion : A quoi correspond, humainement, chacun des sept dons ? Comment se manifeste-t-il dans l'ancien et le nouveau Testament ? Comment se manifeste-t-il dans chacune de nos vies ? Nous avions commencé par les dons d'intelligence et de science. Faire échanger des jeunes sur leur expérience personnelle n'est pas chose facile. Nous avions donc préparé un petit questionnaire pour les aider dans leurs réflexions. Une question, notamment, était celle-ci : t'est-il arrivé d'entendre des critiques sur l'Église ? Où ? Par qui ? Quand ? Quelle a été ta réaction ? Qu'as-tu répondu ?


L'un des jeunes me dit : "Ce n'est pas toujours évident de répondre. L'Église s'est rendu coupable de tant de massacres ! " J'essaye de faire préciser. Il apparaît clairement que cette critique vient du professeur d'histoire et qu'elle vise l'Inquisition. Dans l'esprit du jeune Guillaume, des milliers, des dizaines de milliers de personnes ont été brûlés, torturés, obligés de renier leur conviction, etc. Sa réaction me plonge dans la stupéfaction.


J'ai donc cherché. Il me souvenait avoir vu dans le très beau film inspiré du livre d'Humberto ECCO, le Nom de la Rose, le personnage répugnant mais totalement imaginé de Bernardo GUI, qui dans le récit comme dans le film trouve une mort ignominieuse. Il était inquisiteur, il a effectivement existé. Il se trouve que nous avons conservé les minutes de tous les procès qu'il a instruits dans le Sud-Ouest de la France. Voici les résultats de mes recherches : entre 1308 et 1323, Bernardo GUI a prononcé 139 acquittements, 286 peines religieuses (service militaire en terre sainte, port d'une croix), 307 peines de prison, 156 peines diverses (emprisonnements théoriques, exhumations, exposition au pilori, exil, destruction de maisons), 42 condamnations à mort, soit trois par an sur une période de 15 ans. (Je dois ces chiffres à l'excellent Jean SEVILLIA). L'Inquisition ne vise que les chrétiens. Les fidèles des autres religions ne tombent pas sous ses coups. Bien plus, le pape Clément III, en 1190 déclare prendre les juifs sous sa protection personnelle, défend à tout chrétien de baptiser un juif contre son gré, de gêner les célébrations des fêtes juives, d'attenter aux cimetières juifs. En 1244, soit treize ans après la création de l'Inquisition, Grégoire IX insère cet acte dans le livre V de ses Décrétales, ce qui lui donne force de loi et expose à l'excommunication celui qui irait à son encontre (toujours l'excellent Jean SEVLLIA).



Le grand crétin prétentieux d'AULARD, en compagnie d'un certain DEBIDOUR (dans les années 1880-1890), pourtant, n'hésitait pas à écrire dans un livre destiné à enseigner l'histoire de France aux enfants du Cour Moyen, que l'Inquisition "empêchait les hommes de penser" ; et messieurs NANE et GUIOT écrivaient pour des enfants plus âgés que les peines infligées par l'Inquisition étaient la torture, l'emprisonnement perpétuel et le bûcher de sorte "que la liberté était étouffée sous des monceaux de cadavres". Ne parlons pas de ce manuel anonyme de la fin du XIXe siècle qui disait que peu avant 1830 (sic) la justice inquisitoriale était "aussi cruelle qu'expéditive, vu le nombre de victimes qu'elle avait à brûler quotidiennement" (authentique ; cité par Jacques HEERS).


Mais on évoque très pudiquement les massacres épouvantables commis en Vendée par les armées de la République pour extirper "la superstition et le fanatisme des ennemis de la liberté", lesquels n'avaient qu'un tort, celui de ne pas partager les opinions des monstres de PARIS. Ou que je me tourne, quand je lis des ouvrages sur l'histoire de la Révolution dans notre pays, je ne trouve que mascarades de procès, jugements expéditifs sans instruction préalable, crimes et tueries en tous genres et selon tous moyens : on fusille volontiers à BREST, et la mort sublime du Baron d'AMPHERNET (père de six enfants, dont un nouveau-né) en est un exemple ; on pend à ORANGE, qui a vu 332 personnes tuées en quelques mois, et en AVIGNON, et le marquis de ROCHEGUDE y a laissé ainsi la vie (mais on y guillotine aussi) ; on noie à NANTES, et c'est ainsi que les quatre soeurs de LA METTRIE périront (la plus jeune avaient 17 ans) parmi trente mille autres victimes, on guillotine PARIS, à LYON, à ARRAS, à STRASBOURG et ailleurs, à tour de bras, ou bien l'on assomme et tue à coups de crosses de fusils. Voici un dernier et bel exemple de la purification conduite par les armées de la Convention en Vendée :


"Le 25 janvier 1794, le commandant de la première colonne infernale, Grignon, arrivait dans la paroisse du Pin . Une vingtaine d'habitants s'étaient portés à sa rencontre, le suppliant de ne pas brûler leurs maisons et d'accepter le repas qu'ils ont préparé pour lui et pour ses troupes. Grignon se met à table. Après avoir copieusement dîné, il ordonne d'attacher ses hôtes avec des cordes. On les traîne dans un champ voisin, et sur un signe de l 'atroce général, les Bleus les tuent à coups de sabre et de baïonnette. Pendant cette boucherie, une mère, la femme Tricot, était là, tenant dans ses bras son tout jeune enfant encore à la mamelle. L'enfant est égorgé sur le coeur de sa mère, qui voit en même temps massacrer sous ses yeux son père, son beau-père, sa soeur et sa belle-soeur, son mari et un fils de 18 ans, récemment arrivé de la campagne d'Outre - Loire. Durant le massacre, cette femme n'avait cessé d'exhorter les victimes à subir la mort pour l'amour de Jésus- Christ.
— Songez, leur crie-t-elle, songez que votre Dieu est mort sur la croix, et votre roi sur l'échafaud.
Elle semblait implorer le même sort , pour elle-même; mais Grignon préféra la condamner à survivre. Après cet horrible carnage, quand les bourreaux se sont éloignés, l'admirable chrétienne, couverte du sang des siens, ensevelit de ses propres mains les cadavres mutilés de son mari, de ses enfants et de toute cette glorieuse famille de martyrs." (GAUTHEROT)
Ah, certes, ça a une tout autre allure que l'Inquisition ! Du souffle ! De l'épopée ! Non ?
J'en conclus personnellement que les dons de l'Esprit ne sont féconds que quand ils tombent dans des âmes humainement préparées, instruites avec probité dans les sciences de tous ordres, capables de juger sainement à la lumière de la Parole. Pas question d'approuver, avec mes yeux actuels, les procès de l'Inquisition, qui cependant paraissaient tout à fait normaux et naturels aux hommes de l'époque, et qu'ils étaient même exigés d'eux. Mais je puis honnêtement conclure qu'ils n'ont aucune mesure avec les atrocités fondatrices de notre République. Rien de plus, mais rien de moins.

2 commentaires:

Roparzh Hemon a dit…

Cher auteur,

une fois de plus j'ai du mal à croire à ce que vous affirmez dans
votre (avant-)dernier billet. Vous dites être stupéfait de la
réponse de ce jeune en 4ème que vous citez. A votre place, je n'aurais pas
été stupéfait du tout. Cet adolescent ne pensait-il pas précisement
et ne disait-il pas précisément ce que notre bonne vieille Éducation Nationale
a pour but de le faire dire et penser ? Il a été "formaté", comme
on dirait aujourd'hui, et il n'y est pour rien. Qui s'en étonnerait ?

Il y a plus. C'est certes un devoir que de rétablir l'"histoire assassinée ";
que Jean SEVILLIA, Jacques HEERS et les autres soient bénis ! Mais cela
n'est pas tout. Le consensus actuel sur l'Histoire n'étant
qu'un tissu de mensonges, un certain nombre de personnes, sans
prétendre comparer ou juger les affirmations contraires à l'histoire
"officielle", s'en détourneront, non pas par bêtise ou par lâcheté, mais
simplement par manque de temps et par ce que ce ne sont pas
des historiens de profession : comme le disait Marcel Aymé, "l'étude pointue
des documents historiques n'est pas compatible avec la nécéssité d'aller
au café avec les amis. " En ce qui me concerne, les ouvrages de Jean DUMONT
auront certainement joué un rôle indispensable si je deviens un vrai chrétien un
jour, mais je n'ai jamais rencontré d'autre personne qui fut vraiment sensible
aux arguments historiques qui m'ont frappé.

A wir galon,

E. D.

P.S. Vous n'avez pas dit dans votre billet si vous réussîtes finalement
à délivrer ce jeune élève de ses doutes ?

Philippe POINDRON a dit…

Cher lecteur,

Je n'ai pas encore eu l'occasion de donner à Guillaume les précisions que j'ai livrées dans mon billet. Mais je le ferai. Oui, ce jeune est formaté, et nous n'avons pas beaucoup de moyens pour combattre ce formatage. C'est pourquoi il me semble utile de donner par l'intermédiaire d'un Blog quelques éléments qui montrent à quel point le mensonge officiel est immense, connu des services de l'Education Nationale et voulu par elle. Je m'efforce toujours de citer des faits, de les mettre en éclairage les uns par les autres. Que nous en soyons encore à célébrer la Révolution me paraît incroyable et c'est pourtant ainsi, et cette célébration est faite en toute bonne foi, mais en tout aveuglement. Il faut donc utiliser tous les moyens modernes, et la toile en est un, pour diffuser et faire connaître ce mensonge, un poison qui continue de tuer lentement le pays qui il y a un siècle était encore le plus riche d'Europe.
Bien entendu, j'ai lu un livre remarquable de DUMONT, "La Révolution ou les prodiges du sacrilèges". Il y en a un autre très intéressant pour lequel il convient de faire de la publicité : "Le Livre noir de la Révolution". Et puis il nous faut remettre à la mode des Joseph de Maistre, des Simone Weil (c'est paradoxal, mais ça ne l'est qu'en apparence), des Marcel GAUCHET (même remarque) et faire connaître ces analyses à un maximum de personnes. On ne peut pas tromper tout le monde toute le temps. Nous devons réhabiliter LA PENSEE.
A wir galon.