samedi 22 juin 2013

De la République des Veilleurs, (première partie), second et très long billet du 22 juin 2013

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Ainsi que je vous l'annonçais dans le premier billet de ce jour, voici une très importante contribution d'Henri HUDE sur la République des Veilleurs. J'ai bien conscience que cet essai est très long et qu'il risque de décourager bien des lecteurs. néanmoins, en raison de son acuité et de sa profondeur, je vous demande instamment, si vous en avez le temps, de le lire entièrement. Puisqu'il comporte trois parties, je le publierai en trois fois.
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" La République des Veilleurs
Écrit par Henri HUDE
Dimanche, 09 Juin 2013 21:27
Beaucoup se demandent en ce moment (juin 2013) ce que va devenir le mouvement social né en France depuis quelques mois. Mon opinion est qu’il va durer, s’amplifier et qu’il a des chances sérieuse de triompher, c’est-à-dire d’aboutir à un renouvellement profond de la vie culturelle, économique et politique en France. Peut-être au-delà même des frontières de la France. J’en donne les raisons dans un bref essai, que voici. Celui-ci est un peu plus long que les articles que je publie d’ordinaire, mais il ne m’a pas semblé opportun de le couper en plusieurs livraisons. Il a pour titre La République des Veilleurs. L’avenir de la liberté en France. Il compte trois parties :
1. La dictature du nihilisme transgressif et le nouveau départ de la dialectique historique
2. Une nouvelle république en formation
3. L’intuition d’une future civilisation humaniste

 
1ère Partie
La dictature du nihilisme transgressif et le nouveau départ de la dialectique historique 
La compréhension des événements de France relève à mon avis de la philosophie de l’Histoire. Nous sommes en face de ce que Hegel formule dans son langage comme « la Raison dans l’Histoire ». La situation peut en effet être résumée ainsi : la dialectique de l’Histoire occidentale s’est remise en marche en France.
 Nous constatons d’abord l’épuisement progressif d’un potentiel mobilisateur et dynamisant qui faisait l’Histoire – celui de la Gauche. Nous observons même un renversement de la direction de cette force historique. Le principe de liberté se retourne peu à peu en principe de dictature. Mais surtout, nous discernons la présence, toute nouvelle, dans la conscience commune, d’une intuition créatrice nouvelle, d’une émotion créatrice nouvelle. La raison a fait un pas de plus. Et son expression politique, c’est ce que nous pouvons appeler la « République des Veilleurs ».

Un germe d’esprit qui s’épanouit en civilisation, à travers une restructuration d’ensemble, et ouvrant la perspective d’une nouvelle époque, c’est bien une révolution. Et cela n’enveloppe pas nécessairement la violence – cela dépend de l’esprit nouveau et de la réaction de l’ancien monde. L’origine d’un esprit nouveau est toujours invisible et remonte haut, mais son émergence se produit visiblement. Nous avons sous les yeux quelque chose de tel.
La Gauche, c’est-à-dire les Lumières dans l’Histoire, à la pointe de l’Histoire et la faisant, n’existe plus. Un autre principe dynamique, un autre germe spirituel est apparu. C’est ça, la Révolution. La Gauche avait représenté, pendant plus de deux siècles, le grand principe dynamique de l’histoire occidentale. La poésie épique de Hugo, la musique de Verdi, ou la philosophie de Fichte, donnent une idée de sa grandeur, qui était d’abord morale : la liberté par le devoir, la liberté comme autodétermination rationnelle au moyen du respect de la loi morale, identique à la Raison.
L’Histoire se fait ainsi aujourd’hui contre ce qui, par inertie, porte encore le nom de « Gauche », et qui agonise en faisant exactement le contraire de tout ce qu’elle avait vocation à faire, ou même en défaisant tout ce qu’avait réussi à faire, du temps où elle était vivante. Regardez, par exemple, le « politiquement correct » : « Il est interdit de penser », tel pourrait être son leitmotiv. On ne saurait trahir plus complètement la grande philosophie des Lumières.
Réciproquement, la Droite n’est plus la Droite, d’abord parce que la Gauche n’existe plus, à laquelle s’opposait la Droite, qui se définissait par cette opposition. Ensuite parce que la Gauche avait tellement triomphé, que la Droite ne subsistait que comme une Gauche tiède. Elle avait renoncé à défendre ce au nom de quoi elle avait longtemps résisté à la Gauche. Et l’opposition effective à la Gauche, pour autant qu’elle subsistait, se sentait elle-même comme vidée de Raison, rejetée hors de l’Histoire et condamnée à n’exister qu’en désespoir ou sur le mode de l’extrême.

Mais voilà que, par un renversement dialectique complet, la Gauche, ayant tué son opposition, a été privée de tout dynamisme, s’est mise à tourner en rond et, pour essayer de trouver un sens, a cédé à l’instinct de mort – se livrant au nihilisme transgressif (pour une explication détaillée de cette expression, voir plus bas). 
Et nous en étions là quand le nouvel esprit, dont nous allons parler, a surgi. Et depuis, toutes les catégories politiques usuelles sautent, tout paraît usé, creux et nul. Quelque chose de neuf émerge et aspire à se matérialiser. Mais quoi donc ? Le peuple le vit et le sent, mais il manque de mots pour dire ce qu’il vit, ce qu’il attend, ce qu’il espère. Et c’est le rôle de la philosophie que de le penser. Mais il y faudra bien du temps et tout ne sera clair que quand tout aura été accompli. En tout cas, un immense mouvement anime le peuple, doté d’une universalité supérieure, rendant un avenir à l’humanisme, traversant tous les partis. Et le pouvoir n’y voit rien, n’y comprend rien. C’est pourquoi il est condamné. Il rentre à reculons dans le néant.
 
 
C’est par rapport à ce mouvement que tous seront forcés de prendre position, et de se redéfinir. C’est pour cela que n’ont plus de sens des questions comme celles de savoir : « Comment le mouvement social doit-il se situer par rapport à tel ou tel parti de la Droite ? » ou : « Comment doit-il se rapporter à la fraction de la Gauche qui se rapproche de lui ? » Car dès lors qu’existe un vrai dynamisme historique, doté d’un vrai principe spirituel, enraciné dans la Raison, la seule question est de savoir si on est dedans, ou dehors. Ainsi donc, à terme, le PS éclatera en deux. L’UMP éclatera en deux. Le FN éclatera en deux. Etc. Et l’Histoire ira de l’avant.
En outre, il ne faut pas oublier que le mouvement pour le mariage et la famille ne représente qu’un des trois pôles de ce mouvement social nouveau où un nouvel esprit est en train de se faire jour (voir plus bas).  Le parti socialiste français, dont nous parlerons sans aucun esprit partisan, tout comme de la Gauche dans son ensemble, se trouve au pouvoir en 2013, et il y offre un exemple accompli de ce qu’est une structure morte et mortifère, dont l’esprit et la vie se sont retirés. Leurs dirigeants ne sont objectivement qu’une des factions d’une bourgeoisie libertaire et antisociale, qui alterne avec une autre, grâce au détournement des mécanismes de la représentation, permettant de faire valider indéfiniment par un peuple découragé la politique de l’oligarchie libertaire au moyen de procédures formellement démocratiques. On ne saurait mieux dire que la démocratie est à recréer, parce que la ruse a remplacé la vérité, et que tous les êtres vivants et de bonne foi ont leur place et leur vie dans le mouvement qui nous conduit vers la nouvelle République.
Une République nouvelle en France ne se définit pas d’abord par un numéro 6, ou 7, ou par une réanimation d’idéologies tombées dans le coma. La République nouvelle est celle qui prend de nouveau au sérieux l’idée de la liberté absolue, sans aller la chercher dans la rapacité infinie, la transgression et la mort. La République nouvelle est une nouvelle veille des esprits dans la cité. Elle est la République des Veilleurs. 
 
 
Ces dirigeants du PS ne sont pas socialistes, mais individualistes. Non pas ouvriers mais bourgeois. Faisant une politique ultra-libérale au niveau global, et pratiquant en même temps un socialisme régional ou municipal difficile à différencier d’un simple clientélisme. Non pas libérateurs mais dogmatiquement libertaires et très intolérants. Non plus moraux mais sans éthique, et plus moralisateurs que jamais. Non pas rationalistes, mais ayant renoncé à toute philosophie sérieuse au profit du nihilisme transgressif (où se cristallise en concepts le simple arbitraire individualiste). Là est le point important, celui auquel va s’appliquer le travail de remise en cause, celui dont la négation fait surgir la nouveauté imprévue.

Le nihilisme transgressif est devenu la doctrine officielle de ce Gouvernement, et d’une grande partie de la classe politique. Il est le contraire même de toute pensée éclairée de la liberté. Il est contraire à toute conviction républicaine substantielle. Or, non seulement le Gouvernement de la France, aujourd’hui, a adopté cette philosophie nihiliste et transgressive, mais il a entrepris de l’imposer de force à toute la jeunesse de la nation. Pour bien comprendre à quel point la Gauche, ardente ou tiède, s'est muée en son contraire, il convient de vérifier avec soin s'il est vrai, ou pas, que le nihilisme transgressif peut exister sous deux versions : la première serait celle du "Surhomme", la seconde celle du "Dernier Homme".

Le nihilisme transgressif du Surhomme est celui du national-socialisme. Le nihilisme transgressif du "Dernier Homme" est celui de l'idéologie libéral-libertaire. L'un préfère la violence, l'autre la ruse. Mais, c'est la même philosophie, et c'est toujours le même homme, qui veut détruire l'Homme, et montre la même fureur de mise au pas et d'uniformisation (Gleichschaltung) de la société libre.

La différence, c'est que le premier nihilisme appartient, selon l'expression de Nietzsche, à une "superbe bête blonde", en pleine santé, qui adhère à son destin de mort, pourvu qu'elle soit héroïque et grandiose ; le "Dernier Homme" est plutôt comme un vieillard égoïste qui, selon l'expression de La Bruyère, "achèterait un instant de survie au prix de l'extinction du genre humain". L'un comme l'autre ne veulent pas que rien puisse leur survivre. Celui qui se croit Surhomme est un guerrier criminel, qui rêve de belle mort. Le Dernier Homme est un administrateur suicidaire et gris, qui rêve d'euthanasie, de décroissance et parfois même d'extinction du genre humain.
La Gauche en France s’était identifiée à la liberté pratique – à la politique de Rousseau, et à la morale de Kant, qui en était l’intériorisation [1]. La liberté « pathologique », ayant rejeté la Raison transcendantale et la morale de l’obligation des grandes Lumières, mais restant travaillée par le besoin humain d’inconditionné et d’absolu, ne trouve d’horizon que dans la transgression et dans le toujours plus de transgression, à la limite, un jour, dans la violence et la cruauté.

Or la Gauche du nihilisme transgressif, tout en gardant parfois une phraséologie kantienne, renonce totalement à la rigueur morale effective et à l’exigence civique. Elle s’identifie à une liberté que Kant aurait appelée pathologique et donc au droit du plus fort. 
La Gauche nihiliste et transgressive n’a pourtant pas oublié les lois de la politique pure. Elle sait que la conservation de l’initiative est la condition de la conservation du pouvoir. Ayant perdu tout critère et tout dynamisme ascensionnel, renonçant à toute sublimation culturelle, elle se livre à la fois à l’instinct de plaisir et à l’instinct de mort, et choisit d’appeler « nouvelle civilisation » la descente en vrille dans cette barbarie. Elle fuit en avant pour tenter de garder le pouvoir dans un monde qui lui échappe. Elle choisit une voie de démesure, mêlant prosélytisme et dictature. Mais, cette fuite en avant est ce qui à la fois la condamne à n'être plus que du passé, et ce qui fait surgir sa négation sublime.
 
 
Comme il reste toujours quelque part dans l’esprit humain un bout d’idée d’Absolu, cette liberté de transgression, rejetant la Nature, Dieu et la Raison, ne peut se fonder que sur l’absolu du Néant. Morale d’immoralisme transgressif libertaire et métaphysique nihiliste : telle est bien désormais la doctrine officielle. Ce nihilisme transgressif devient le noyau d’une culture officielle qui prétend installer une République nihiliste et une République de la transgression, et uniformiser le pays entier sous son contrôle, avec une agressivité et une intolérance qu’on n’avait plus connue à ce degré depuis bien longtemps. Par ce regain d’autoritarisme, le nihilisme du Dernier homme risque de fusionner un jour avec celui du Surhomme, dans un goût transgressif et non moins libertaire de la volonté de puissance.
Par habitude, la Gauche morte entretient une fausse conscience et un discours creux, comme si on était encore aux temps héroïques du jacobinisme, ou aux temps généreux du Front populaire. Mais sa rhétorique, vidée de tout son sens moral et traditionnel, couvre désormais exactement le contraire de ce qu’elle exaltait autrefois – tout comme les discours d’Hitler reprenant la philosophie de la SDN et invoquant le droit des nations à disposer d’elles-mêmes couvraient en réalité son contraire, un impérialisme bestial. Ainsi la honte fait rougir tous ceux qui aimaient sincèrement la Gauche et l’inquiétude grandit chez tous les Français. C’est dans ce contexte qu’on se met à parler de Résistance en France, avec un grand « R ». L’acception héroïque et historique de ce vocable est en train de revenir en usage. 
 
 
Le nihilisme transgressif haut de gamme, c’est la philosophie de Nietzsche. Certains lobbys aux Etats-Unis ont popularisé un « leftist nietzscheism », récupérant la philosophie de Nietzsche. En mal de reconnaissance et d’autojustification, ils ont estimé [2] qu’un certain mode de vie ne pouvait être justifié et légitimé que sur la base d’une métaphysique nihiliste récusant à la fois Dieu, la Nature et la Raison comme possibles instances normatives. Bien plus, la moralité devait s’identifier au rejet transgressif de ces mêmes instances. A cause de ce besoin d’autojustification, la philosophie qui fut celle de l’ultra-extrême-Droite politique européenne est devenue la philosophie de référence de l’ultragauche sociétale américaine, puis mondiale. Cette ultragauche sociétale étant par ailleurs, dans le même temps, devenue bourgeoise, oligarchique et impériale – et cet amalgame étant arbitrairement qualifié de Démocratie avec un grand « D »."
 
[1] Ou, inversement, à la morale de Kant et à la politique de Rousseau, qui en était l’extériorisation.
[2] Ce qui est très subjectif. Platon spécule sur le sujet, dans le Banquet, sans avoir recours au nihilisme.
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La seconde partie de cette contribution sera publiée dans le prochain billet.
 
 

2 commentaires:

tippel a dit…

UN SOCIALIO VICTIME D'UNE BANDE DE JEUNES AMIS ?
Après l’incendie de la voiture du maire, une 508 neuve, sa femme agressée.

Après l’incendie de la voiture du maire de Fresnes dans la nuit de jeudi à vendredi, c’est l’épouse de Jean-Jacques Bridey (PS) qui a subi une agression vendredi vers 19 heures. Alors qu’elle rentrait chez elle à bord de sa petite voiture, la femme du député-maire a été approchée sur le parking par quatre jeunes armés d’un bâton.

Les agresseurs ont tenté de frapper la femme du maire à coups de bâton, par la fenêtre avant du véhicule qui était ouverte. La victime a réussi à esquiver les coups. Les adolescents ont frappé sur le capot de la Twingo et fini par faire exploser le pare-brise arrière. Ils ont pris la fuite.

L’épouse de Jean-Jacques Bridey a déposé plainte ce matin. Du côté de la mairie, on refuse de faire lien avec l’incendie de la voiture du maire, qui s’est produit dans la nuit de jeudi à vendredi. « Rien ne permet pour l’instant de dire que ces deux faits sont liés », insiste le cabinet du maire...
Traduisez on est mort de peur.

tippel a dit…

Dans une vidéo datant de 2008.

Vincent Peillon : « On ne pourra jamais construire un pays de liberté avec la religion catholique »

On pourra pas dire qu'il cachait son jeux.