mardi 10 mars 2009

A propos des cellules souches

Le Président OBAMA vient de ré-autoriser le financement des recherches consacrées aux cellules souches embryonnaires. Ce n'est pas une bonne nouvelle. Une telle autorisation ouvre la porte à la marchandisation du corps humain.
De quoi s'agit-il exactement ?
Aux tout premiers stades de la vie embryonnaire, les cellules sont dites totipotentes. Elles sont capables de se différencier en n'importe quel type de cellules : nerveuses, musculaires, sanguines, etc. Les marchands du Temple ont donc imaginé un scénario qui leur assurerait la fortune, et dont voici le schéma. (a) On fait financer la recherche sur les cellules souches en partie par l'Etat et en partie par des investisseurs de capitaux à risque. A cette fin, on pratique sur une grande échelle la fécondation in vitro, pour fabriquer des stocks d'embryon que l'on congèle. Ou l'on utilise les embryons dits surnuméraires, ou qui ne sont plus "investis d'un projet parental" (sic). Les techniques de congélation ont atteint une telle perfection qu'il est possible de garder intact un tissu congelé pendant des siècles. Il faut attendre 4.000 ans pour que les rayons cosmiques, les seuls qui, à la température de conservation de -196°C, (celle de l'azote liquide), puissent léser de manière éventuellement significative le matériel génétique de la cellule congelée. (b) Avec ces embryons, on détermine les conditions de différenciation des cellules souches. Telle hormone orientera la différenciation vers la cellule nerveuse, telle autre vers la cellule musculaire. (c) On procède ensuite à la fabrication d'embryons destinés à un individu donné, en utilisant, le cas échéant, un ovocyte maternel pour s'assurer de l'identité immunologique parfaite de l'embryon avec le sujet demandeur. (d) On congèle l'embryon. Et en cas de besoin exprimé par le sujet, on procède d'abord à la multiplication de la cellule souche dans des conditions n'autorisant pas la différenciation, puis on différencie, quand le stock de cellules souches est suffisant. Et l'on procède alors à ce qu'il faut bien appeler une autogreffe.
Alternativement, on peut établir des banques d'embryons immunologiquement typés et les vendre aux fins de greffe à un sujet compatible qui nécessiterait, par exemple, une restauration musculaire ou nerveuse.
C'est très exactement dangereux et inutile. Pour toutes sortes de raisons. (a) Il existe une tumeur embryonnaire, le tératocarcinome, qui permet d'étudier les conditions dans lesquelles une cellule souche peut se différencier en tel ou tel type de cellules. Un tel travail a été ébauché, il y a déjà longtemps, par François JACOB, notre Prix Nobel, sur un tératocarcinome de la Souris. Le tératocarcinome existe aussi chez les êtres humains. Bien entendu, il faut être prudent dans l'extrapolation des résultats à la cellule souche normale. Mais enfin on peut en obtenir de très informatifs par cette méthode. (b) L'organisme adulte héberge une foule de cellules souches non pas totipotentes, mais multipotentes. Elles ne peuvent plus se différencier en tous types de cellules, mais en certains seulement. Il en existe dans le cerveau, dans les muscles, dans la moelle osseuse. J'ai moi-même montré, il y a bien longtemps, avec le Dr Yves LOMBARD, que la rate, le péritoine, les poumons, et d'autres tissus riches en macrophages hébergeaient des cellules souches capables de donner des macrophages adultes. Et le Dr Jean-Thomas VILQUIN, jadis dans notre laboratoire, puis au Canada chez le Pr TREMBLAY et enfin aujourd'hui à Paris dans un laboratoire du CNRS, travaille avec brio sur des cellules souches musculaires. (c) Il est tout à fait possible - et cela a été montré presque simultanément par des auteurs japonais et américains -, de transformer une cellule adulte en cellule souche. La technique consiste à transfecter la cellule avec certains gènes ; elle demande à être améliorer, car certains de ces gènes sont tumoraux. Mais on progresse très rapidement et il sera bientôt possible d'obtenir ainsi des cellules souches parfaitement utilisables, et dans des conditions morales incontestables.
Il est dangereux de faire ces recherches qui ouvrent la voie à l'eugénisme, au trafic de cellules (qui pourra empêcher une femme en situation d'extrême pauvreté de vendre ses ovocytes pour vivre ou nourrir ses enfants ?), à la marchandisation et à l'instrumentalisation du corps humain, qui, juridiquement, est pourtant dit "indisponible". Tout cela montre à l'envi l'orgueil humain, la folie mégalomaniaque de certains chercheurs, la cupidité de certains autres. Tout cela, aussi, est inutile et ne relève pas de la connaissance ou du savoir, mais de la technique. Et la technique est en train de nous faire crever.
Science sans conscience n'est que ruine de l'âme...

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